Les sources du droit

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La recherche des sources du droit dans une perspective sociologique et philosophique va au-delà de la simple identification des textes législatifs et des décisions judiciaires. Cette approche considère que le droit émane des profondeurs de la vie sociale, reflétant les coutumes, les valeurs, les croyances et les pratiques d'une communauté. Dans cette vision, les normes juridiques sont vues comme une formalisation des règles sociales existantes, illustrant comment le droit émerge naturellement de la société plutôt que d'être simplement imposé de l'extérieur.

Le droit est donc perçu comme un phénomène dynamique, évoluant constamment avec les changements dans les attitudes sociales, les structures économiques et les relations de pouvoir. Par exemple, les évolutions dans la perception des droits des minorités ou les attitudes envers l'environnement ont conduit à de nouvelles législations et politiques publiques. Ces changements montrent comment le droit peut s'adapter et se reformuler en réponse aux nouvelles réalités et exigences de la société.

En outre, cette approche souligne l'interaction complexe entre le droit et la société. Le droit est à la fois un miroir des normes sociales et un outil de changement social. Par exemple, les lois sur l'égalité des sexes ne se contentent pas de refléter un changement d'attitude envers les femmes, mais jouent également un rôle actif dans la promotion de l'égalité des sexes. Enfin, le rôle des différents acteurs dans le système juridique est crucial. Les législateurs, les juges, les avocats et les citoyens eux-mêmes contribuent à l'interprétation et à la mise en œuvre du droit, souvent influencés par leurs propres perspectives et intérêts. Ces acteurs façonnent le droit à travers leurs actions et décisions, rendant le processus juridique non seulement une application des règles, mais aussi une interaction continue entre différents points de vue et intérêts au sein de la société.

La distinction entre les sources formelles et les sources matérielles du droit

La distinction entre les sources formelles et les sources matérielles du droit est essentielle pour comprendre comment les règles de droit sont créées et les influences qui les façonnent.

Les sources formelles, ou directes, du droit sont les moyens officiels par lesquels les règles de droit sont formulées et exprimées. Elles comprennent des éléments comme la législation, où les parlements et autres organes législatifs adoptent des lois qui définissent des droits et des obligations spécifiques. La jurisprudence est une autre source formelle importante, impliquant les décisions des tribunaux qui interprètent et appliquent les lois dans des cas concrets. Ces sources formelles sont obligatoires et ont une autorité juridique directe, ce qui signifie qu'elles doivent être suivies et appliquées par les tribunaux, les gouvernements et les citoyens.

D'autre part, les sources matérielles, ou indirectes, du droit représentent les influences et les facteurs qui contribuent à la création et à l'évolution du contenu du droit. Ces sources englobent une vaste gamme de phénomènes sociaux, culturels, économiques et politiques. Par exemple, les mouvements sociaux, les changements dans les attitudes publiques, les développements économiques, et les idéologies politiques peuvent tous influencer la création de nouvelles lois ou la modification de la législation existante. Les sources matérielles ne sont pas des règles de droit en elles-mêmes, mais elles jouent un rôle crucial dans la formation de la substance et de la matière du droit.

Les sources formelles représentent la manière officielle et autorisée par laquelle le droit est établi et exprimé, tandis que les sources matérielles sont les divers facteurs et influences qui façonnent le contenu et l'évolution du droit. Cette distinction souligne l'interaction entre la structure juridique formelle et les dynamiques sociales et culturelles plus larges qui influencent le développement du droit.

Les sources formelles du droit

Dans l'histoire du développement juridique, on constate que la nature et la prédominance des sources formelles du droit changent en fonction de l'organisation sociale et politique des sociétés.

Dans les sociétés moins organisées ou plus anciennes, la coutume jouait souvent un rôle central comme source formelle du droit. Les coutumes, qui sont des pratiques et des traditions acceptées au fil du temps par une communauté, servaient de fondement principal aux règles juridiques. Ces règles n'étaient pas écrites, mais étaient transmises et appliquées par tradition et consensus social. Cependant, à mesure que les sociétés se sont développées et organisées, notamment avec l'émergence des États-nations et des systèmes politiques plus complexes, le rôle de la loi écrite a pris de plus en plus d'importance. Les systèmes de loi modernes sont caractérisés par des règles de droit écrites, formulées et adoptées par des organes législatifs officiels. Ces lois écrites offrent plusieurs avantages, notamment une plus grande clarté, une uniformité dans l'application et la possibilité de s'adapter plus facilement aux changements sociaux et technologiques.

Dans les sociétés contemporaines, la loi écrite est devenue la source formelle de droit la plus dominante. Cela ne signifie pas que les autres sources, comme la coutume, ont complètement disparu, mais leur rôle est devenu moins central dans la plupart des systèmes juridiques modernes. En effet, la loi écrite permet une régulation plus précise et systématique des relations sociales, économiques et politiques dans des sociétés complexes et en rapide évolution.

La coutume

La coutume est une source de droit non écrite qui se forme à partir des pratiques répétées et bien établies au sein d'une collectivité. Elle devient une règle juridique lorsque ces pratiques sont tenues par la communauté comme étant juridiquement obligatoires. Ce caractère obligatoire est issu de l'acceptation collective et non d'une formalisation écrite. Historiquement, dans de nombreuses sociétés, la coutume a joué un rôle central dans la régulation des comportements. Par exemple, dans de nombreuses communautés rurales, des coutumes régissaient l'utilisation des terres agricoles, le partage de l'eau, ou la résolution de conflits au sein de la communauté. Ces règles n'étaient pas écrites, mais étaient respectées et suivies aussi rigoureusement que les lois écrites dans les sociétés modernes.

Dans les sociétés contemporaines, bien que la loi écrite domine le système juridique, la coutume continue de jouer un rôle, notamment dans des domaines où la législation est silencieuse ou ambiguë. Dans certains cas, les tribunaux se réfèrent à des pratiques coutumières pour interpréter les lois ou pour combler des lacunes législatives. Par exemple, dans le droit commercial international, certaines normes et pratiques commerciales qui se sont développées au fil du temps sont souvent reconnues et appliquées par les tribunaux, même si elles ne sont pas codifiées dans des traités ou des statuts. En outre, dans le contexte du droit international, les coutumes jouent un rôle significatif. Des principes comme la souveraineté des États ou la diplomatie ont été largement régis par des coutumes internationales avant d'être codifiés dans des traités. La coutume, en tant que source de droit, illustre comment les normes juridiques peuvent émerger de manière organique à partir des pratiques et des croyances d'une communauté. Elle montre que le droit n'est pas seulement un ensemble de règles imposées d'en haut, mais peut aussi naître de l'interaction sociale et des conventions établies au sein d'une société.

La coutume, reconnue comme la forme la plus ancienne de droit, a longtemps été la source principale du droit dans de nombreuses sociétés. Historiquement, en particulier entre le Xème et le XIIème siècle, comme souligné par Gilissen, la coutume représentait la majorité des sources de droit dans les sociétés occidentales. Cette prédominance s'explique par l'absence de systèmes juridiques formels et la rareté des lois écrites, rendant les traditions et pratiques locales cruciales pour la réglementation des comportements sociaux et la résolution des litiges. Cependant, avec l'avènement des États-nations modernes et le développement de systèmes juridiques formalisés, l'importance de la coutume a considérablement diminué. Depuis environ deux cents ans, la loi écrite est devenue la principale source du droit, reflétant les besoins d'une société en évolution rapide et la nécessité d'une régulation juridique plus précise et détaillée. Par exemple, l'adoption de codes civils et pénaux dans de nombreux pays européens au XIXe siècle marque un tournant décisif, avec un passage d'un système juridique basé sur la coutume à un système dominé par la loi écrite.

Néanmoins, la coutume n'a pas été complètement évincée. Elle conserve un rôle significatif dans certains domaines et systèmes juridiques. Dans les systèmes juridiques mixtes, par exemple, elle est reconnue et utilisée parallèlement à la loi écrite. De même, dans le droit international, des normes coutumières continuent de régir certains aspects des relations entre États. En outre, dans certaines communautés locales ou chez les peuples autochtones, les coutumes demeurent un fondement essentiel de la régulation sociale et juridique. La réduction du rôle de la coutume dans les systèmes juridiques modernes illustre l'évolution du droit au fil du temps, marquée par une transition d'un système basé sur des pratiques traditionnelles vers un système axé sur des lois formellement établies et écrites. Cette évolution témoigne de l'adaptation du droit aux complexités et aux exigences changeantes des sociétés contemporaines, tout en soulignant l'importance historique et continue de la coutume dans la compréhension globale du droit.

Les coutumes naissent des pratiques répétées d'un groupe spécifique et sont considérées comme juridiquement obligatoires par les membres de ce groupe. Elles jouent souvent un rôle crucial dans les situations où la loi écrite est absente, ambigüe, ou insuffisante. La nature dynamique des coutumes est un aspect clé. Elles évoluent en fonction des changements dans les pratiques et les croyances du groupe concerné. Si les pratiques d'une communauté changent au fil du temps, les coutumes associées à ces pratiques peuvent également se modifier. Ce processus permet aux coutumes de rester pertinentes et adaptées aux réalités sociales actuelles de la communauté.

En outre, les coutumes peuvent effectivement disparaître, soit par abrogation explicite, soit par désuétude. L'abrogation se produit lorsqu'une nouvelle loi écrite entre en conflit avec une coutume et l'annule officiellement. La désuétude, quant à elle, se produit lorsque la pratique sous-jacente à une coutume n'est plus observée ou reconnue par la communauté, rendant ainsi la coutume obsolète. Par exemple, dans de nombreuses sociétés rurales, des coutumes régissaient la gestion commune des terres et des ressources naturelles. Avec l'urbanisation et l'introduction de lois formelles sur la propriété et l'utilisation des terres, ces coutumes ont souvent été remplacées ou modifiées pour s'adapter aux nouvelles réalités juridiques et sociales. Cette capacité des coutumes à s'adapter, à évoluer ou à disparaître souligne leur nature organique et leur lien étroit avec les pratiques et les besoins d'une communauté. Bien que dans les systèmes juridiques modernes la loi écrite prédomine, les coutumes continuent de jouer un rôle important, en particulier dans les domaines où la législation est moins détaillée ou dans les communautés où les traditions ont une forte influence.

Les éléments constitutifs de la coutume en droit sont essentiels pour comprendre son développement et sa reconnaissance en tant que source juridique. Un aspect clé est le long usage, qui nécessite qu'une pratique soit suivie de manière prolongée et répétée, généralement pendant une période considérable comme quarante ans. Cette durabilité assure que la pratique n'est pas simplement une tendance passagère, mais une partie intégrante et reconnue des normes comportementales de la communauté. Par exemple, dans certaines communautés rurales, des méthodes traditionnelles de partage des eaux ou de gestion des terres, pratiquées sur plusieurs générations, ont acquis le statut de coutumes juridiques. En parallèle, l'opinio necessitatis, ou la conviction que l'usage de la coutume est obligatoire, est également cruciale. Cette croyance renforce l'idée que la pratique n'est pas simplement une habitude, mais revêt un caractère juridique obligatoire. Les membres de la communauté adhèrent à la coutume non par choix, mais parce qu'ils croient qu'ils sont juridiquement contraints de le faire. Cette perception transforme une simple pratique sociale en une règle coutumière avec force juridique. Un exemple concret pourrait être trouvé dans les pratiques de mariage ou d'héritage dans certaines cultures, où les traditions ne sont pas seulement suivies par respect des usages, mais aussi parce qu'elles sont considérées comme des obligations légales.

Ces éléments, le long usage et l'opinio necessitatis, interagissent pour élever des comportements habituels à un statut juridique. Ils mettent en lumière comment des pratiques régulièrement observées et profondément enracinées dans une communauté peuvent évoluer pour devenir des composantes reconnues du système juridique. Cette transformation de pratiques sociales en règles de droit souligne le caractère organique et basé sur la communauté de la coutume en tant que source juridique.

La coutume, en tant que source de droit, se distingue par son origine et son adaptation aux mœurs de la communauté d'où elle émane. Elle reflète la volonté populaire et change avec l'évolution des pratiques sociales et culturelles. Cela lui confère un caractère dynamique et flexible, lui permettant de s'aligner étroitement sur les valeurs et les besoins actuels de la société. Cependant, le caractère oral de la coutume et l'absence de documentation formelle peuvent poser des défis en termes de sûreté juridique. Contrairement aux lois écrites, dont la formulation et l'application sont clairement établies dans des textes officiels, les coutumes dépendent souvent de la transmission orale et de l'interprétation collective. Ceci rend leur existence et leurs paramètres précis parfois difficiles à déterminer. Dans les procédures judiciaires, c'est généralement à la partie qui invoque une coutume de prouver son existence et son application. Ce besoin de preuve peut compliquer l'utilisation de la coutume, surtout dans des situations où les pratiques coutumières ne sont pas largement reconnues ou où il existe un désaccord sur leur interprétation. Malgré ces défis, les juges sont censés connaître le droit, suivant le principe du "iura novit curia" (le tribunal connaît la loi). Ce principe signifie que les juges sont supposés être au courant non seulement des lois écrites, mais aussi des coutumes applicables dans leur juridiction. Ils sont donc en mesure d'interpréter et d'appliquer les coutumes en l'absence de législation écrite spécifique ou pour clarifier des points de droit non résolus par la loi.

La loi, en effet, peut être vue comme une cristallisation ou une formalisation écrite de l'expérience et des pratiques acquises à travers la coutume. Dans de nombreux cas, les lois écrites ont émergé pour codifier et standardiser les pratiques coutumières qui étaient déjà en place, apportant ainsi une clarté et une uniformité accrues. À l'ère moderne, le rôle de la coutume dans les systèmes juridiques a effectivement été relégué à une position secondaire, principalement à cause de la prédominance et de la précision des lois écrites. La coutume intervient souvent là où la loi écrite est silencieuse, vague ou incomplète. Dans ces cas, les pratiques coutumières peuvent servir de guide pour interpréter ou combler les lacunes de la loi. Par exemple, dans certains domaines du droit international, en l'absence de traités ou d'accords formels, les pratiques coutumières internationales peuvent jouer un rôle significatif. Cependant, la coutume ne se limite pas uniquement à un rôle subsidiaire. Dans certaines juridictions, notamment celles qui suivent un système de droit mixte ou qui reconnaissent les droits des peuples autochtones, la coutume peut avoir une place plus prépondérante. De plus, dans des domaines comme le droit commercial international, certaines pratiques commerciales coutumières sont largement acceptées et appliquées, même en l'absence de législation formelle.

L'article 1 du Code civil suisse, promulgué le 10 décembre 1907, offre un aperçu fascinant de la manière dont le système juridique suisse aborde l'application et l'interprétation du droit. Ce texte législatif établit d'abord la primauté de la loi en stipulant que toutes les matières doivent être régies par les dispositions légales, qu'elles soient explicitement énoncées ou comprises dans l'esprit de la loi. Cela souligne l'importance fondamentale de la loi écrite dans l'ordre juridique suisse, reflétant une préférence claire pour des directives claires et formulées. Cependant, l'article 1 reconnaît également les situations où la loi écrite ne fournit pas de réponse directe à un problème juridique. Dans de tels cas, il confère aux juges la responsabilité de se tourner vers le droit coutumier. Si aucune coutume applicable n'existe, le juge est alors invité à prendre une décision en se basant sur les principes qu'il aurait utilisés s'il avait le rôle de législateur. Cette disposition confère aux juges suisses une grande latitude et responsabilité pour interpréter la loi et combler ses lacunes, en s'appuyant sur leur compréhension des principes fondamentaux de justice et d'équité.

En outre, cet article souligne l'importance de la doctrine et de la jurisprudence. Les juges sont encouragés à s'inspirer des travaux académiques et des décisions judiciaires antérieures pour guider leurs décisions. Cela assure que les décisions ne sont pas prises dans un vide, mais s'appuient sur un corpus établi de savoir juridique et sur des précédents. L'approche du droit suisse, telle qu'elle est reflétée dans cet article, illustre un équilibre entre la rigueur de la loi écrite et la flexibilité nécessaire pour traiter des situations où la loi est silencieuse, ambiguë ou incomplète. Elle montre comment un système juridique peut combiner efficacement diverses sources de droit pour assurer que la justice soit rendue de manière cohérente et équitable.

Le concept de droit coutumier dans le Code civil suisse de 1912 reflète une approche spécifique à la nature fédérale de la Suisse. Le droit coutumier, dans ce contexte, est compris comme un ensemble de pratiques et de normes juridiques qui ont une portée à l'échelle de la Confédération suisse. Cela signifie que, lorsqu'un juge fait appel au droit coutumier pour trancher une affaire, il applique des coutumes qui sont reconnues et observées à travers toute la Suisse. Cette approche est particulièrement pertinente étant donné la structure fédérale de la Suisse, où différents cantons ont des traditions et des systèmes juridiques qui peuvent varier. Le droit coutumier au niveau fédéral sert donc de cadre de référence commun qui peut être utilisé par les juges dans l'ensemble du pays. Toutefois, il est essentiel que ces coutumes soient non contradictoires avec les spécificités régionales. En d'autres termes, le droit coutumier appliqué ne doit pas entrer en conflit avec les pratiques ou les lois propres à une région spécifique de la Suisse. Ce système permet une certaine uniformité dans l'application du droit tout en respectant les particularités locales. Il reflète l'équilibre entre l'unité nationale et la diversité régionale, un principe fondamental dans la gouvernance suisse. En reconnaissant le droit coutumier à l'échelle de la Confédération, le Code civil suisse de 1912 facilite une application du droit qui est à la fois cohérente à l'échelle nationale et sensible aux spécificités cantonales.

Historiquement, dans de nombreux systèmes juridiques, les coutumes ont souvent servi de base aux lois formelles. Ce processus se manifeste lorsque les pratiques et les normes qui ont émergé et se sont établies au sein d'une communauté sont finalement codifiées sous forme de lois écrites. Ce phénomène peut être observé dans divers contextes juridiques et historiques. Par exemple, dans les sociétés anciennes ou traditionnelles, les règles régissant le commerce, la propriété, les mariages, ou les héritages étaient initialement basées sur des coutumes locales. Avec le temps, ces pratiques coutumières ont été formalisées et incorporées dans des systèmes de loi écrite pour assurer une plus grande cohérence, clarté et accessibilité.

La transformation de la coutume en loi écrite présente plusieurs avantages. Elle permet une meilleure standardisation des règles juridiques, facilitant ainsi leur compréhension et leur application. De plus, en formalisant ces pratiques, la loi écrite peut offrir une protection juridique plus claire et plus équitable, en s'assurant que les règles sont appliquées de manière uniforme. Cependant, ce processus de codification ne signifie pas que la coutume perd toute pertinence. Dans certains cas, la loi écrite peut laisser des espaces pour l'interprétation et l'application de coutumes, notamment dans des domaines où la législation est silencieuse ou insuffisamment détaillée. De plus, même après la codification, les coutumes peuvent continuer à influencer l'interprétation et l'application des lois, en particulier dans les systèmes juridiques qui reconnaissent la valeur des traditions et des pratiques locales. La relation entre la coutume et la loi est dynamique et interdépendante. La coutume peut souvent ouvrir la voie à la création de lois écrites, mais elle continue également de jouer un rôle dans l'élaboration et l'application du droit, même dans les sociétés modernes où la loi écrite prédomine..

La loi

La loi est un élément central des systèmes juridiques modernes, et elle remplit plusieurs fonctions clés. La loi se caractérise par sa généralité et son abstraction, ce qui signifie qu'elle est conçue pour s'appliquer à un large éventail de situations et de personnes, sans se limiter à des cas individuels ou spécifiques. Cette généralité permet une application uniforme des règles dans des circonstances similaires, assurant ainsi l'équité et la prévisibilité dans le système juridique. En tant que source de droit, la loi fixe des règles, des obligations et des interdictions. Elle établit des normes de comportement que les individus et les organisations sont tenus de suivre, et définit les conséquences juridiques en cas de non-respect de ces normes. Par exemple, les lois peuvent réglementer des domaines aussi divers que le commerce, la circulation routière, les droits de propriété, ou les relations contractuelles, et elles peuvent imposer des obligations telles que le paiement d'impôts ou le respect des normes environnementales.

La loi est habituellement créée et adoptée par des organes législatifs, comme les parlements ou les assemblées législatives, et elle représente l'autorité de l'État. Une fois adoptée, la loi doit être respectée par tous les membres de la société, et son application est généralement assurée par le système judiciaire et les organes d'exécution de l'État. Ainsi, la loi joue un rôle fondamental dans la structuration de la société, en établissant un cadre clair pour les droits et les obligations, et en fournissant un mécanisme pour résoudre les conflits et maintenir l'ordre social. Son caractère général et abstrait lui permet d'être un instrument de gouvernance efficace et adaptable aux évolutions et aux besoins de la société.

La distinction entre la loi au sens matériel et la loi au sens formel est fondamentale pour comprendre la nature et l'application du droit dans les systèmes juridiques modernes.

La loi au sens matériel fait référence à tout acte qui énonce une règle de droit ou un ensemble de règles de droit. Ce concept se concentre sur le contenu de l'acte législatif, c'est-à-dire sur la nature des règles qu'il prescrit. Un exemple notable est la Charte des Nations Unies, qui établit des règles et des principes régissant les relations internationales. Ce type de loi peut être édicté par différents organes, pourvu qu'ils soient compétents et agissent selon une procédure régulière.

D'autre part, la loi au sens formel se concentre sur la procédure d'élaboration de l'acte législatif. L'accent est mis non pas sur le contenu de la loi, mais sur la manière dont elle a été créée, en respectant les formes et les conditions requises. Cette conception, issue de la période révolutionnaire du XVIIIème siècle, repose sur l'idée que la loi doit être l'œuvre du peuple souverain ou de ses représentants. Elle reflète la notion qu'un homme libre obéit à des lois qu'il se donne lui-même, par opposition à l'esclave qui subit la loi imposée par un despote. Dans ce contexte, la loi au sens formel est celle qui émane d'un organe législatif, tel que le parlement à l'échelle nationale ou fédérale, un grand conseil au niveau cantonal, ou un conseil communal au niveau local. Ce sont des lois créées par un organe élu et représentatif, exprimant la volonté du peuple.

Cette distinction entre la loi au sens matériel et la loi au sens formel est cruciale pour l'interprétation et l'application du droit, car elle souligne à la fois l'importance du contenu de la loi et la légitimité de son processus d'élaboration. Elle assure que les lois ne sont pas seulement des règles arbitraires, mais des normes qui reflètent la volonté collective et qui sont adoptées selon des procédures démocratiques et transparentes.

Une particularité intéressante du système juridique suisse est que la création de règles de droit ne relève pas exclusivement du Parlement. En Suisse, l'exécutif, bien qu'il ne soit pas un organe législatif au sens formel, joue un rôle important dans l'élaboration des normes juridiques. Dans de nombreux cas, l'exécutif suisse a la capacité d'édicter des règles qui ont le caractère de loi au sens matériel. Cela signifie que, même si ces règles ne sont pas adoptées par le processus législatif formel, elles prescrivent des obligations, des droits, ou des normes de conduite similaires à celles que l'on retrouverait dans une loi formelle. Ce pouvoir de l'exécutif est souvent exercé sous forme de règlements, d'ordonnances ou de directives. Cette pratique reflète une approche pragmatique de la gouvernance, où l'exécutif peut répondre de manière plus flexible et rapide aux besoins et aux situations qui ne nécessitent pas nécessairement l'élaboration d'une loi formelle par le Parlement. Cela peut être particulièrement pertinent dans des domaines techniques ou spécifiques où une expertise détaillée est nécessaire, ou en situation d'urgence où des réponses rapides sont requises.

Il est également à noter que la majorité des règles de droit en Suisse sont effectivement édictées par l'exécutif. Cette réalité met en évidence le rôle substantiel de l'exécutif dans la réglementation quotidienne et dans la mise en œuvre des politiques publiques. Toutefois, bien que l'exécutif joue un rôle crucial dans la création de normes juridiques, le système suisse maintient un équilibre entre les différents pouvoirs de l'État. Les lois formelles adoptées par le Parlement fournissent le cadre général dans lequel l'exécutif opère, et la possibilité de recours juridiques assure que l'exercice de ce pouvoir reste conforme aux principes de l'État de droit.

L'article 182 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse offre un cadre clair quant au rôle du Conseil fédéral dans le processus législatif et la mise en œuvre du droit. Cette disposition constitutionnelle autorise le Conseil fédéral à créer des normes juridiques sous forme d'ordonnances, mais cette capacité est strictement encadrée : elle doit être expressément permise par la Constitution ou une loi. Cette approche assure que l'exécutif suisse, bien qu'il participe activement à l'élaboration des règles de droit, le fait dans les limites prévues par les instruments juridiques supérieurs. Par exemple, si une loi fédérale délègue spécifiquement au Conseil fédéral le pouvoir de préciser certains aspects techniques ou administratifs par ordonnance, le Conseil fédéral peut alors légitimement exercer cette fonction.

En plus de son rôle législatif délégué, le Conseil fédéral est également chargé de veiller à l'application effective de la législation, des décisions de l'Assemblée fédérale et des jugements des autorités judiciaires fédérales. Cela implique un engagement actif dans l'exécution des lois et dans la garantie de leur application concrète et uniforme à travers le pays. Cette responsabilité est cruciale pour assurer que les lois et les décisions judiciaires ne restent pas lettre morte, mais sont effectivement mises en œuvre, ce qui est essentiel pour le fonctionnement efficace de l'État de droit.

La disposition de l'article 182 illustre donc la manière dont le système juridique suisse équilibre les fonctions législatives et exécutives. Elle reflète la structure fédérale et démocratique de la Suisse, où le pouvoir est partagé et réglementé pour éviter les abus et garantir que toutes les branches du gouvernement agissent dans le cadre de leurs compétences légitimes. Ce système assure non seulement la création de règles de droit adaptées et spécifiques, mais aussi leur mise en œuvre effective, deux aspects fondamentaux pour la stabilité et la justice dans la société suisse.

L'article 163 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse définit la forme que doivent prendre les actes édictés par l'Assemblée fédérale, en établissant une distinction entre les lois fédérales, les ordonnances et les arrêtés fédéraux.

Selon cet article, lorsque l'Assemblée fédérale, qui est l'organe législatif suprême de la Suisse, établit des dispositions qui fixent des règles de droit, ces dernières doivent être formulées soit sous la forme d'une loi fédérale, soit sous la forme d'une ordonnance. Ce choix de forme dépend de la nature et de l'importance de la réglementation en question. Les lois fédérales sont généralement utilisées pour des questions de grande portée ou de principe, tandis que les ordonnances peuvent être employées pour des règlements plus spécifiques ou techniques. Le deuxième alinéa de cet article aborde les arrêtés fédéraux, qui sont une autre forme d'acte législatif. Ces arrêtés peuvent être classés en deux catégories : les arrêtés fédéraux soumis au référendum et les arrêtés fédéraux simples qui ne le sont pas. Les arrêtés fédéraux soumis au référendum sont typiquement des actes d'une importance particulière, qui peuvent être soumis à un vote populaire. Les arrêtés fédéraux simples, en revanche, sont généralement utilisés pour des décisions ou des mesures qui ne requièrent pas la consultation directe de la population. Cette structuration de la forme des actes législatifs reflète le système démocratique et fédéral de la Suisse, où différentes formes d'actes législatifs sont utilisées en fonction de leur importance et de leur portée. Cela permet une grande flexibilité et adaptabilité dans le processus législatif, tout en assurant la participation du peuple suisse dans les décisions politiques majeures, conformément aux principes de la démocratie directe.

La nature des arrêtés édictés par le Parlement suisse souligne une distinction importante dans la hiérarchie et la fonction des différents types d'actes législatifs. En effet, un arrêté, contrairement à une loi ou une ordonnance, n'a généralement pas de caractère général et abstrait, ce qui le différencie d'une règle de droit traditionnelle. Les arrêtés pris par l'Assemblée fédérale en Suisse sont souvent utilisés pour des décisions ou des actions spécifiques. Ils peuvent concerner des sujets variés, comme l'approbation d'un traité international, la décision sur un budget ou une dépense spécifique, ou des mesures concernant une situation particulière. Contrairement aux lois fédérales ou aux ordonnances, qui sont conçues pour s'appliquer de manière uniforme à un large éventail de situations et d'individus, les arrêtés ont tendance à être circonstanciés et ciblés.

Cela dit, le fait qu'un arrêté n'ait pas un caractère général et abstrait ne diminue pas son importance. Les arrêtés pris par le Parlement sont des actes légaux significatifs et peuvent avoir un impact considérable sur des aspects spécifiques de la gouvernance ou de la politique. Par exemple, un arrêté fédéral approuvant un traité international engage la Suisse sur la scène internationale, bien qu'il ne crée pas de règles générales applicables à l'ensemble de la population suisse. Cette distinction entre les lois (générales et abstraites) et les arrêtés (plus spécifiques et circonstanciés) est une caractéristique essentielle du système législatif suisse, reflétant sa complexité et sa capacité à répondre à une large gamme de besoins législatifs et politiques.

La distinction entre la loi au sens matériel et la loi au sens formel, en ce qui concerne les arrêtés édictés par le Parlement suisse, est cruciale pour comprendre la nature de ces actes législatifs. Un arrêté, bien qu'il ne constitue pas une loi au sens matériel (car il ne fixe pas de règles de droit générales et abstraites), peut être considéré comme une loi au sens formel en raison de son origine. Comme il est édicté par le Parlement, un organe législatif officiel, l'arrêté acquiert une légitimité formelle. Ce caractère formel se réfère à la procédure et à l'organe à travers lesquels l'acte est adopté, plutôt qu'à son contenu ou à son application.

Cette distinction est importante dans le système juridique suisse. Elle montre que même si un arrêté ne crée pas de règles juridiques générales applicables à tous, il est néanmoins un acte légal important en raison de sa source : le Parlement. Cela souligne la diversité des outils législatifs à la disposition du Parlement suisse pour répondre aux différentes exigences de la gouvernance, que ce soit pour adopter des règles générales (lois au sens matériel) ou pour prendre des décisions sur des questions spécifiques (arrêtés). Cette approche permet une flexibilité dans le processus législatif, où différents types d'actes peuvent être utilisés en fonction des besoins et des circonstances, tout en garantissant que tous les actes sont soumis à un processus démocratique et légitime.

La majorité des lois au sens formel, c'est-à-dire des actes adoptés par le Parlement ou un organe législatif officiel, sont aussi des lois au sens matériel, en ce sens qu'elles établissent des règles de droit générales et abstraites applicables à un large éventail de situations. À l'exception de certains arrêtés fédéraux, qui peuvent être formellement adoptés par le Parlement sans nécessairement établir de règles de droit générales, la plupart des lois formelles sont également matérielles. Cependant, la réciproque n'est pas toujours vraie. Toutes les lois au sens matériel, c'est-à-dire les normes qui fixent des règles de droit, ne sont pas forcément des lois au sens formel. En d'autres termes, des règles de droit peuvent être établies par des moyens autres que la législation formelle du Parlement. Ces règles peuvent provenir, par exemple, d'ordonnances ou de directives émises par l'exécutif, comme le Conseil fédéral, dans le cadre de leurs pouvoirs délégués. Bien qu'elles établissent des règles de droit (donc matérielles), elles ne sont pas adoptées par le processus législatif formel (donc pas formelles). Cette distinction entre les lois au sens formel et matériel est importante car elle reflète la diversité et la complexité du processus de création de règles de droit. Elle montre comment différentes branches du gouvernement peuvent contribuer à l'élaboration du cadre juridique, en permettant une répartition des tâches entre les organes législatifs et exécutifs, et en assurant une flexibilité dans l'adaptation et la réponse aux exigences et aux défis juridiques variés.

Les sources matérielles du droit

La jurisprudence

La jurisprudence, qui englobe l'ensemble des décisions rendues par les tribunaux et autres autorités d'application du droit, est un élément fondamental du système juridique. Elle inclut non seulement les verdicts et arrêts émis par ces instances, mais aussi les principes, les raisonnements et les solutions adoptés dans ces décisions.

Un aspect crucial de la jurisprudence est son rôle dans l'interprétation de la loi. Par leurs décisions, les tribunaux clarifient et donnent sens aux textes législatifs, parfois en les interprétant de manière à répondre à des cas complexes ou inédits. Par exemple, une cour suprême peut interpréter une disposition constitutionnelle de manière à résoudre un conflit de droits, influençant ainsi la manière dont cette disposition sera appliquée à l'avenir. En outre, la jurisprudence sert à créer des précédents, particulièrement dans les systèmes de common law, où les décisions des cours supérieures forment une base sur laquelle les tribunaux inférieurs s'appuient pour leurs propres jugements. Ce système de précédents assure la cohérence et la stabilité du droit, en garantissant que des cas similaires sont traités de manière similaire.

La jurisprudence joue également un rôle essentiel pour combler les lacunes législatives. Dans des situations où la loi est silencieuse ou ambiguë, les tribunaux peuvent élaborer des solutions juridiques adaptées. Par exemple, face à des questions émergentes liées à la technologie ou à la vie privée, les tribunaux peuvent interpréter la loi de manière à protéger les droits des individus dans un contexte en évolution. Enfin, les décisions judiciaires peuvent refléter et influencer les valeurs et les normes sociales. Les tribunaux, en interprétant et en appliquant la loi, adaptent souvent le droit aux évolutions des attitudes sociales. Des décisions historiques en matière de droits civils ou de libertés individuelles illustrent comment la jurisprudence peut à la fois refléter et guider les changements sociaux. Ainsi, la jurisprudence, en tant que corpus de décisions judiciaires, est une source dynamique et vivante de droit. Elle représente une accumulation de savoir juridique et joue un rôle vital dans le développement continu et l'adaptation du système juridique face à des défis nouveaux et complexes.

La jurisprudence, constituée des sentences et des arrêts rendus par les tribunaux, est une source de droit vivante et évolutive. Elle est particulièrement cruciale dans les situations où il n'existe pas de règles de droit écrites spécifiquement applicables à un cas donné. Lorsqu'un juge est confronté à un cas où la loi écrite est absente ou insuffisante, il se tourne souvent vers la jurisprudence pour trouver des orientations. Cela implique de chercher des décisions antérieures prises par d'autres juges dans des affaires similaires. Ces précédents fournissent un cadre de référence et aident à assurer une certaine cohérence dans l'application du droit. Par exemple, un juge traitant une affaire de responsabilité civile pourrait s'appuyer sur des décisions antérieures pour déterminer la manière d'évaluer la négligence ou le dommage.

Cependant, la jurisprudence n'est pas rigide. Un aspect clé de son utilisation est la capacité du juge à s'écarter des décisions précédentes si les circonstances de l'affaire courante le justifient. Si un juge estime que les conditions ou les circonstances d'une affaire actuelle diffèrent significativement de celles d'affaires antérieures, ou si de nouveaux développements juridiques, sociaux ou technologiques le rendent nécessaire, il peut choisir de trancher différemment. Cette flexibilité est essentielle pour permettre au droit de s'adapter et d'évoluer avec le temps et les changements de société. La jurisprudence, en tant que tel, est un équilibre entre la continuité et l'adaptation, fournissant un cadre juridique stable tout en permettant des ajustements nécessaires pour répondre aux défis émergents et aux circonstances changeantes. Cela démontre la nature dynamique du droit et le rôle crucial des juges dans son interprétation et son développement.

L'expression "faire jurisprudence" est utilisée lorsqu'une décision de justice est considérée comme établissant un précédent important qui peut influencer les décisions futures dans des cas similaires. Cette notion est fondamentale dans le fonctionnement du système juridique, notamment dans les pays où la jurisprudence occupe une place prépondérante. En Suisse, bien que le système juridique ne soit pas fondé sur la common law (où la jurisprudence a un rôle central), les décisions des tribunaux, notamment celles des hautes juridictions, ont une importance significative. Ces décisions, souvent désignées sous le terme de "solutions jurisprudentielles", servent de guide pour l'interprétation et l'application des lois. Elles peuvent éclairer des zones d'ombre de la législation ou fournir des orientations sur la manière de traiter des cas juridiques complexes.

Les solutions prétoriennes, un terme qui trouve son origine dans le système judiciaire romain, font référence à des décisions prises par des juges (préteurs dans la Rome antique) qui, en l'absence de lois spécifiques, créaient des règles pour résoudre les litiges. Dans le contexte moderne, le terme est parfois utilisé pour décrire des décisions judiciaires qui établissent des principes nouveaux ou qui interprètent la loi de manière innovante. En Suisse, comme dans d'autres systèmes juridiques, la jurisprudence et les solutions prétoriennes jouent un rôle crucial dans le développement et l'adaptation du droit. Elles permettent non seulement de combler les lacunes législatives, mais aussi d'adapter le système juridique aux évolutions sociales et technologiques, garantissant ainsi que le droit reste pertinent et efficace.

La doctrine

La doctrine se réfère à l'ensemble des opinions, analyses, interprétations et commentaires sur le droit émis par des juristes, des universitaires, des chercheurs et des praticiens du droit. Ces personnes se consacrent principalement à l'étude, à l'enseignement ou à la pratique du droit, et leurs travaux contribuent de manière significative à la compréhension et au développement du droit. Les contributions doctrinales prennent de nombreuses formes, y compris des articles dans des revues juridiques, des livres, des commentaires sur la législation ou la jurisprudence, et des critiques de décisions judiciaires. Ces écrits sont souvent utilisés pour explorer des questions juridiques complexes, proposer des interprétations de la loi, critiquer ou soutenir des décisions judiciaires, et suggérer des améliorations ou des réformes du système juridique. Bien que la doctrine ne soit pas une source de droit contraignante comme la loi ou la jurisprudence, elle joue un rôle important dans l'évolution du droit. Les travaux doctrinaux influencent souvent la législation, la jurisprudence et la formation des politiques publiques. Ils servent également de ressource précieuse pour les juristes, les juges et les étudiants en droit, en fournissant des analyses approfondies et des perspectives éclairées sur divers aspects du droit.

La production accrue de textes législatifs s'accompagne d'une augmentation du volume de travaux doctrinaux. Les auteurs de doctrine cherchent de plus en plus à rester en phase avec les évolutions juridiques rapides et à répondre aux questions immédiates posées par ces changements. Cette orientation vers l'immédiateté a des implications notables. D'une part, elle assure que la doctrine reste pertinente et directement applicable aux problématiques contemporaines. Les juristes, les praticiens et les décideurs ont accès à des analyses et des commentaires qui reflètent l'état actuel du droit et les défis juridiques émergents. D'autre part, cette focalisation sur l'actualité peut effectivement réduire la capacité de la doctrine à offrir une perspective à long terme. Lorsque les travaux se concentrent principalement sur des questions immédiates ou des réponses rapides à des législations nouvelles, il peut y avoir un manque de vision globale et de réflexion profonde sur les tendances et les principes sous-jacents. Ce manque de recul peut limiter la capacité de la doctrine à fournir une compréhension holistique et pondérée du droit, qui est cruciale pour son développement réfléchi et sa cohérence sur le long terme. Il est donc important pour la doctrine juridique de trouver un équilibre entre réactivité et vision à long terme. Bien qu'il soit essentiel de répondre aux défis actuels, il est également important de maintenir une perspective globale qui permet d'appréhender le droit dans son contexte plus large et de contribuer de manière significative à son évolution et à sa compréhension.

La doctrine juridique, un pilier essentiel de l'étude et de l'application du droit, se compose de divers types d'ouvrages, chacun jouant un rôle unique dans la diffusion du savoir juridique. Au cœur de la doctrine se trouvent les traités, des ouvrages exhaustifs qui offrent un examen systématique d'une branche du droit ou d'un domaine spécifique. Un traité sur le droit constitutionnel, par exemple, couvrirait de manière détaillée les principes fondamentaux, la jurisprudence et les théories pertinentes. Ces ouvrages sont souvent considérés comme des références incontournables dans leur domaine. Les manuels ou précis, quant à eux, sont des sous-catégories de traités, mais avec une orientation plus synthétique et pédagogique. Destinés principalement à l'enseignement, ils fournissent une introduction claire et structurée à un domaine du droit, rendant les sujets accessibles, notamment pour les étudiants. Un manuel de droit civil, par exemple, présenterait les concepts de base et les règles de cette branche du droit de manière concise. Le commentaire, un autre type d'ouvrage doctrinal, se concentre sur l'analyse d'une décision de justice spécifique, d'une loi ou d'un texte doctrinal. Par exemple, un commentaire sur un arrêt de la Cour suprême pourrait explorer les implications de la décision, discuter son contexte et analyser son impact sur la jurisprudence future. Les monographies traitent de questions juridiques déterminées de manière approfondie. Ces études, souvent des thèses de doctorat ou des recherches post-doctorales, peuvent explorer des sujets juridiques spécialisés ou émergents. Par exemple, une monographie pourrait se pencher sur les implications juridiques de l'intelligence artificielle. Les articles, généralement plus courts, se trouvent dans des revues spécialisées ou des ouvrages collectifs. Ils traitent souvent de questions juridiques contemporaines ou spécifiques, offrant des analyses ciblées sur des aspects du droit. Un article dans une revue de droit commercial pourrait, par exemple, discuter des récentes évolutions en matière de droit des contrats. Enfin, les éditions officielles des textes légaux, comme les recueils de lois, sont souvent accompagnées de commentaires et d'analyses. Ces publications sont cruciales pour comprendre le texte de la loi dans son contexte, en fournissant des clarifications et des explications.

La diversité des publications doctrinales joue un rôle crucial dans l'enrichissement du paysage juridique. Chaque type de publication apporte sa propre perspective et profondeur d'analyse, contribuant de manière significative à la compréhension et à l'évolution du droit. Les traités, avec leur couverture exhaustive d'un domaine juridique, fournissent un socle solide de connaissances, offrant une compréhension approfondie des principes et des théories. Les manuels et précis, de leur côté, rendent le droit accessible à un public plus large, en particulier les étudiants, en présentant les concepts de manière structurée et pédagogique. Les commentaires, en se concentrant sur des décisions judiciaires ou des textes législatifs spécifiques, aident les praticiens et les universitaires à comprendre et à interpréter les implications de ces décisions dans des contextes pratiques. Les monographies abordent des questions juridiques ciblées, souvent en explorant de nouvelles frontières ou en offrant des perspectives innovantes sur des sujets complexes. Les articles dans les revues juridiques permettent un dialogue continu sur des questions juridiques actuelles, stimulant le débat et la réflexion. Les éditions officielles des textes légaux, complétées par des commentaires d'experts, sont des ressources inestimables pour comprendre le droit en vigueur et ses applications. Ensemble, ces différentes formes de publications doctrinales forment un écosystème riche et dynamique qui alimente le développement du droit. Elles fournissent une base essentielle pour la prise de décision juridique, la formation juridique, la recherche et la réforme législative, jouant ainsi un rôle indispensable dans la perpétuation et l'évolution du système juridique..

Aujourd'hui, la doctrine est largement reconnue comme une autorité en matière de droit, fournissant des analyses, des interprétations et des commentaires qui influencent la compréhension et l'application du droit. Bien qu'elle ne soit pas une source de droit contraignante au même titre que la législation ou la jurisprudence, son influence est indéniable dans la formation des décisions judiciaires, des politiques législatives et de la pratique juridique. Historiquement, la doctrine a joué un rôle encore plus direct dans la création du droit. Dans certaines époques et juridictions, les écrits des juristes et des théoriciens du droit étaient considérés comme des sources formelles de droit. Par exemple, pendant la Renaissance en Europe, les commentaires et les interprétations des juristes sur le droit romain étaient souvent traités comme des sources légitimes du droit, influençant directement les décisions judiciaires et la pratique juridique. Ces travaux doctrinaux étaient parfois si respectés qu'ils étaient cités par les juges comme des autorités faisant presque autorité de loi. De nos jours, bien que la doctrine ne soit pas formellement reconnue comme une source de droit, son rôle reste essentiel. Elle aide à éclairer et à guider l'interprétation de la loi, offre des perspectives critiques sur la jurisprudence et contribue à la discussion et à l'évolution des concepts juridiques. Les travaux doctrinaux continuent de jouer un rôle clé dans l'éducation et la formation des juristes, et dans la manière dont le droit est compris, enseigné et pratiqué.

À Rome, pendant l'Antiquité, la doctrine juridique jouait un rôle prépondérant dans la formation et l'application du droit. Les juristes romains, hautement respectés pour leur expertise et leur savoir, rédigeaient des opinions, des traités et des commentaires sur le droit romain. Ces écrits étaient considérés comme des sources autoritatives et directes du droit. Le Digeste, compilé sur ordre de l'empereur Justinien au VIe siècle, est un exemple éminent de cette pratique. Il faisait partie du Corpus Juris Civilis, une collection massive visant à consolider et à systématiser le droit romain. Le Digeste en particulier était une compilation d'extraits des écrits des juristes romains les plus éminents. Ces extraits étaient soigneusement sélectionnés et organisés pour former un corpus cohérent de principes juridiques. Les opinions et analyses des juristes romains incluses dans le Digeste étaient traitées avec une grande autorité et étaient souvent considérées comme équivalentes à des lois. En effet, dans le système juridique romain, la distinction entre la « loi » (les statuts officiels) et la « doctrine » (les écrits des juristes) était beaucoup moins rigide qu'elle ne l'est dans la plupart des systèmes juridiques modernes. Ainsi, dans l'Antiquité romaine, la doctrine ne se limitait pas à influencer le droit de manière indirecte ; elle en était une composante intégrale et formelle, jouant un rôle crucial dans la définition et l'interprétation des normes juridiques. Cela témoigne de la manière dont, historiquement, la frontière entre la « loi » et la « doctrine » pouvait être fluide et met en évidence le rôle essentiel des juristes dans la formation du droit.

Au fil des siècles, de nombreux jurisconsultes et personnalités éminentes du droit ont laissé une empreinte indélébile sur le monde juridique à travers leurs écrits et analyses. Ces figures influentes ont produit une littérature marquante qui a contribué à façonner, développer et éclairer le droit à travers différentes époques et sociétés. Dans l'Antiquité romaine, des juristes comme Gaius, Ulpian, et Papinien ont rédigé des traités et des commentaires qui ont formé la base du droit romain. Leurs travaux ont été si influents qu'ils ont été largement cités dans le Corpus Juris Civilis, notamment dans le Digeste, et ont continué à influencer le droit civil européen pendant des siècles. Au Moyen Âge, la redécouverte des textes juridiques romains a conduit à un renouveau de l'étude juridique. Des érudits comme Gratien, avec son "Decretum", ont joué un rôle crucial dans le développement du droit canonique, tandis que d'autres ont contribué à la renaissance du droit civil en Europe. À l'époque de la Renaissance et au-delà, des juristes tels que Hugo Grotius aux Pays-Bas ont été pionniers dans le développement du droit international, tandis que des figures comme Sir William Blackstone en Angleterre ont influencé la common law avec des ouvrages comme les "Commentaries on the Laws of England". Plus récemment, au XIXe et XXe siècles, des juristes comme John Austin, Hans Kelsen, et H.L.A. Hart ont apporté d'importantes contributions à la théorie juridique, influençant la manière dont le droit est compris et enseigné dans les universités du monde entier. Chacune de ces personnalités a contribué à modeler le paysage juridique de leur temps, en apportant des perspectives nouvelles, en élaborant des théories influentes, ou en interprétant le droit d'une manière qui a eu un impact durable. Leurs travaux ont non seulement enrichi la compréhension juridique de leur époque, mais continuent d'influencer la pensée et la pratique juridiques contemporaines.

Domat et Pothier, auteurs de l’ancien régime avant que la France ne se dote d’un système de codification de droit civil, par leurs œuvres doctrinales, ont favorisé l’unification du droit.

Jusqu’au XVIIIème siècle, la France était soumise à des codifications différentes. Avec la Révolution, le droit en France a été unifié, afin que tout le monde puisse le reconnaitre. Domat et Pothier ont œuvré afin d’unifier le droit privé.

Eugen Huber.

En Suisse, Eugen Huber a rédigé une œuvre importante de doctrine par son ouvrage intitulé "Histoire et système du droit privé suisse" : il a fait une étude systématique de tous les méthodes et textes de droit suisse afin d’en tirer des trames générales acceptées par tous. Il s’agit d’établir une loi uniforme et acceptée par tous. Il va unifier la législation privée de tous les cantons afin d’aboutir à la codification du droit privé à travers le Code civil suisse en 1912. Pour défendre son travail, il sera conseiller fédéral à Berne entre 1911 et 1912.

Ainsi, la doctrine a joué pleinement son rôle de source directe de droit, aujourd’hui elle joue un rôle d’autorité. On ne saurait nier l’influence de la doctrine sur l’élaboration du droit.

Les principes généraux du droit

Les principes généraux du droit constituent un ensemble de principes directeurs qui, sans avoir le caractère précis et concret des règles de droit positif, servent d'orientation dans l'application et les développements de l'ordre juridique.

Les adages ou les brocards sont des proverbes du droit, des maximes juridiques énoncées en une phrase concise.

  • Adages : brève formule souvent latine qui exprime un principe de droit.
    • Audiatur et altera pars : que les deux partis soient entendus ;
    • Iura novit curia : la cour connaît le droit ;
    • In dubio pro reo : le doute profite à l'accusé ;
    • Iustitia est constans et perpetua voluntas jus suum cuique tribuendi : la justice est une volonté constante et perpétuelle de rendre à chacun ce qui lui est dû ;
    • Nonbis in idem : le juge ne peut être saisi deux fois pour la même affaire ;
    • Nullum crimen sine lege : pas de crime sans loi ;
    • Lex posterior derogat priori : la loi la plus récente déroge à la loi antérieure ;
    • Lex specialis derogat generali : la règle spéciale déroge à la règle générale ;
    • Pacta sunt servanda : les engagements doivent être respectés c'est-à-dire la bonne foi oblige celui qui s'est engagé à tenir son engagement.
  • Brocards : c’est un adage vulgarisé sous une forme populaire.
    • À l’impossible nul n’est tenu : le contrat est nul si sa mise en œuvre est impossible ;
    • Le mort saisit le vif : au moment de la mort, les héritiers sont investis immédiatement de la succession ;
    • Le Roy et mort vive le Roy : cela implique qu’il n’y a pas de rupture de règne, au moment où le défunt est mort son héritier débute son règne.

Permet d’assurer au système juridique une certaine cohérence et une unité systématique au milieu du désordre des règles positives.

Ces principes expriment des valeurs philosophiques sur lesquelles repose le système juridique de nos États occidentaux. Ils jouent un rôle dans l’interprétation du droit et servent, entre autres, à combler les lacunes. Cependant, ces principes ne sont pas des formes directes de droit sauf si ils ont été consacrés par la Constitution .

En droit international, il y a quelques principes qui régissent les sujets de droit international, ce sont les Principes de Richier qui sont trois principes de base en droit international :

  1. principe d’égalité entre États : il pèse d’un même poids dans les conférences internationales ;
  2. indépendance des États : chaque État est en principe autonome, il a sur son territoire la plénitude de la compétence. Il ne subit que la restriction de pouvoir qu’il veut bien accepter (ex- France/Suisse, les polices de chaque pays ont le droit d’intervenir sur leurs territoires mutuels dans le canton de Genève, l’Ain et la Haute-Savoie) ;
  3. principe de non-intervention dit aussi de non-ingérence : résultante des deux précédents principes, un État ne peut intervenir dans les affaires internes d’un autre État (intervention politique, économique, militaire).

Entre l’application et la mise en œuvre du droit international, il y a une différence parce que dans l’État-national occidental, il y a un exécutif, un législatif et un judiciaire. S’il y a un conflit, le pouvoir judiciaire va trancher. Il y a une structure qui permet de défendre la sécurité et la paix publique aux contraires de l’organisation de l’ordre international.

Annexes

Références