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|[[Introduction à la science politique]]
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L'étude de la violence en science politique est un domaine de recherche qui examine les différentes formes de violence, leur origine, leurs causes et leurs conséquences dans le contexte politique. La violence peut prendre de nombreuses formes, telles que la violence physique, la violence symbolique, la violence structurelle, la violence politique, etc. Comprendre ces différentes formes de violence et leur rôle dans la politique est essentiel pour analyser les conflits, les mouvements sociaux, la gouvernance et les relations internationales.
Les théories classiques sur la violence sont importantes à étudier pour plusieurs raisons. Tout d'abord, elles constituent les fondements théoriques de notre compréhension de la violence dans les sciences sociales. Elles ont établi les concepts et les cadres d'analyse utilisés dans l'étude contemporaine de la violence. En comprenant ces théories classiques, nous avons une base solide pour aborder les questions de violence dans un contexte plus large. De plus, ces théories classiques offrent une perspective historique sur les problèmes de violence. Elles ont émergé à différentes époques de l'histoire de la pensée sociale et politique, et nous permettent ainsi de comprendre comment les idées sur la violence ont évolué au fil du temps et ont façonné les approches actuelles. Les concepts et la terminologie introduits par les théories classiques sur la violence sont également essentiels à étudier. Par exemple, la distinction entre la violence directe et la violence structurelle proposée par Johan Galtung est fondamentale pour comprendre les différentes formes de violence et leurs impacts. En étudiant ces théories, nous acquérons une connaissance approfondie de ces concepts et de leur application dans l'analyse de la violence contemporaine. Il est également important d'examiner de manière critique les théories classiques sur la violence. En les étudiant, nous sommes en mesure de remettre en question leurs hypothèses et leurs limites. Cette démarche critique favorise le développement de nouvelles théories et de nouvelles perspectives sur la violence, contribuant ainsi à l'évolution des connaissances dans ce domaine. Enfin, les théories classiques sur la violence restent pertinentes aujourd'hui. Bien que certaines d'entre elles puissent sembler datées, de nombreux concepts et idées qu'elles ont développés sont toujours utiles pour comprendre les dynamiques de la violence contemporaine. En étudiant ces théories, nous pouvons établir des liens entre les idées du passé et les réalités actuelles, ce qui nous permet de mieux appréhender les enjeux contemporains liés à la violence.
L'étude des théories classiques sur la violence est essentielle pour acquérir une compréhension approfondie de ce phénomène complexe. Elles fournissent les fondements théoriques, la perspective historique, les concepts clés et les cadres d'analyse nécessaires pour comprendre la nature et les implications de la violence dans différents contextes. De plus, elles jouent un rôle important dans le développement de nouvelles connaissances et de nouvelles approches pour prévenir et résoudre les problèmes de violence.
= Étymologie du mot « violence » =  
= Étymologie du mot « violence » =  
L’étymologie permet de comprendre l’ensemble des réflexions en matière de science politique sur le concept de violence.
L'étymologie, qui consiste à étudier l'origine et l'évolution des mots, peut apporter des éclaircissements sur les réflexions en matière de science politique sur le concept de violence. En examinant les racines et les significations étymologiques des termes liés à la violence, nous pouvons mieux comprendre les différentes conceptions et interprétations de ce phénomène complexe.
 
Par exemple, le mot "violence" lui-même dérive du latin "violentia", qui signifie "force excessive" ou "violence". Cette racine met en évidence l'idée d'une action violente qui dépasse les limites acceptables. L'étymologie de ce terme suggère donc une notion de contrainte ou de coercition exercée de manière excessive. De même, l'étymologie de certains autres mots associés à la violence peut également offrir des éclairages intéressants. Par exemple, le mot "agression" provient du latin "aggressio", qui signifie "attaque". Cela souligne l'idée d'une action offensive ou d'une attaque contre autrui. En étudiant l'étymologie de ce terme, nous pouvons mieux appréhender le caractère intentionnel et offensif de certains comportements violents. L'étymologie peut également révéler des nuances dans les différentes formes de violence. Par exemple, le terme "violence symbolique", popularisé par le sociologue Pierre Bourdieu, met en lumière la dimension symbolique ou non physique de certaines formes de violence. L'étymologie du mot "symbole" renvoie à l'idée de "mettre ensemble", soulignant ainsi l'importance des symboles, des représentations et des pratiques culturelles dans la perpétuation de la violence sociale et politique. En étudiant l'étymologie des mots liés à la violence, les chercheurs en science politique peuvent donc approfondir leur compréhension des conceptions et des implications de ce phénomène. Cela peut les aider à analyser les discours politiques, à décoder les significations implicites et à examiner les différentes dimensions de la violence, qu'elles soient physiques, symboliques, structurelles ou politiques. En fin de compte, l'étymologie peut contribuer à une meilleure appréhension de la violence dans le domaine de la science politique en éclairant les origines et les significations profondes des termes utilisés pour la décrire.
   
   
La racine du mot violence<ref>violence. https://fr.wiktionary.org/wiki/violence.</ref> est le mot violé qui est créé dans les années 1980 qui est l’atteinte à l’intégrité d’une personne ; c’est l’atteinte à la personne dans son intégrité physique, morale et c’est-à-dire dans son être même.
L'étymologie du mot "violence" remonte au mot latin "violentia" qui signifie "force excessive" ou "violence". Cependant, il est également pertinent de noter que le mot français "violence" est étroitement lié au mot "violer" qui est apparu au 11ème siècle et qui est dérivé du latin "violare". Le terme "violer" implique l'idée d'une atteinte à l'intégrité d'une personne, que ce soit physiquement, moralement ou dans son être même. Cette connotation d'atteinte à l'intégrité renforce la notion de violence en tant qu'acte qui transgresse les limites acceptables et qui porte préjudice à autrui. Elle met en évidence la dimension profonde de la violence, allant au-delà de la simple notion de force physique excessive, pour englober des aspects moraux, psychologiques et existentiels. Cela souligne l'importance de considérer la violence comme une atteinte à la personne dans son ensemble, affectant sa dignité, sa sécurité et son bien-être. En examinant l'étymologie du mot "violence" et sa relation avec le terme "violer", nous comprenons mieux la gravité et l'impact profond de la violence sur les individus et les sociétés. Cela renforce également l'importance d'analyser les différentes formes de violence et leurs conséquences multidimensionnelles dans le domaine de la science politique.
 
Au fil du temps, le sens du terme s'est étendu pour englober non seulement les atteintes à l'intégrité personnelle, mais aussi les abus de force et les actions contraires aux normes et aux bonnes conventions. Au XIIIe siècle, le terme "violence" a commencé à être associé à l'abus de la force. Cela signifie que la violence ne se limite plus seulement à l'usage de la force excessive, mais englobe également l'utilisation de la force dans des desseins contraires aux normes et aux bonnes conventions. Cela met en évidence l'aspect normatif de la violence, soulignant que certaines actions violentes sont perçues comme étant en contradiction avec les principes éthiques, moraux ou juridiques de la société. Cette extension du sens du mot "violence" pour inclure les actions contraires aux bonnes conventions souligne l'importance du contexte social et culturel dans la compréhension de la violence. Les normes et les conventions varient d'une société à l'autre, et ce qui peut être considéré comme violent dans une culture peut ne pas l'être dans une autre. Cette évolution du sens de la violence est pertinente. Elle souligne l'importance de prendre en compte les normes, les valeurs et les conventions sociales dans l'analyse de la violence politique. Les actions qui sont perçues comme violentes peuvent varier en fonction des attentes de la société et des normes politiques établies.


Ce mot va être ensuite étendu aux institutions et à l’ordre moral. Le mot va évoluer vers le XIIIème siècle signifiant dès lors l’abus de la force. Celui qui ferait usage de la violence et celui qui abuse de sa force, c’est-à-dire que c’est celui qui utilise sa force dans des desseins qui sont contraires aux bonnes conventions. À partir de 1342 apparait le verbe de « violenter » qui désigne le fait qu'il y a une action dans la violence. Ce qui caractérise au sens premier la violence est une action, elle a une dimension d’intentionnalité. Agir avec violence est agir avec intention de façon abrupte et immédiate. Au XVIème siècle apparait l’adjectif « violemment » et l’expression de « faire violence » qui montre que l’on parle d’une action.
L'introduction du verbe "violenter" à partir de 1342 renforce l'idée que la violence implique une action intentionnelle. Le verbe "violenter" indique qu'il y a une action en cours, soulignant ainsi la dimension active de la violence. Il met l'accent sur le fait que la violence est le résultat d'une intention délibérée d'agir de manière abrupte et immédiate envers autrui. Cette notion d'intentionnalité souligne que la violence n'est pas simplement le produit du hasard ou de circonstances accidentelles, mais qu'elle est le résultat d'une volonté délibérée de causer du tort, de dominer ou de contraindre autrui. Elle implique une certaine agressivité dans l'action, avec une volonté d'obtenir des résultats immédiats et souvent coercitifs. L'apparition de l'adjectif "violemment" et de l'expression "faire violence" confirme davantage que la violence est associée à une action spécifique. L'adjectif "violemment" qualifie une action accomplie avec force et intensité. Il souligne l'idée d'une action brutale, rapide et intense, caractéristique de la violence. L'utilisation de cet adjectif renforce l'aspect dynamique et puissant de la violence. L'expression "faire violence" met en évidence le fait que la violence implique une action délibérée et intentionnelle. L'emploi du verbe "faire" souligne l'aspect actif de la violence, indiquant qu'elle est le résultat d'une action entreprise de manière déterminée. Cette expression souligne également que la violence est une action qui s'impose à autrui, une action qui va à l'encontre de la volonté ou des intérêts de la personne concernée. Ainsi, l'émergence de l'adjectif "violemment" et de l'expression "faire violence" dans le langage renforce l'idée que la violence est une action intentionnelle et dynamique. Cela souligne la dimension active de la violence, caractérisée par une utilisation délibérée de la force ou de la coercition.


Ainsi, la violence est du domaine de l’action et de l’ordre de l’action humaine qui est de l’ordre de l’intentionnalité, une intention de l’action. La composante essentielle est la force. Cependant, il existe de nombreuses autres dimensions, on peut être dans la violence morale ou psychologique. Ce n'est pas nécessairement quelque chose qui est de l’ordre de l’agression par la force, c’est une agression d’esprit morale.
Dans le domaine de la science politique, cette dimension intentionnelle de la violence est cruciale pour comprendre les motivations et les objectifs des acteurs politiques qui recourent à la violence. . Elle nous permet de distinguer la violence des accidents ou des événements non intentionnels, et de l'analyser comme une stratégie délibérée utilisée pour atteindre des fins politiques spécifiques. Cela met en évidence la nécessité de considérer les motivations, les intentions et les dynamiques d'action derrière les comportements violents dans le contexte politique.


La violence relève du domaine de l’action, il y a une intentionnalité de l’action qui est de faire violence. Un des modes possibles de l’expression de la violence est l’utilisation de la force et de fait de la contrainte. C’est une contrainte à changer de position en raison même de l’atteinte faite.  
La violence est indissociable de l'action humaine et de l'intentionnalité. Elle implique une intention d'agir et de causer des dommages ou de contraindre autrui. La composante de force est centrale dans la violence, qu'elle soit physique, morale, psychologique ou autre. Il est important de reconnaître que la violence ne se limite pas uniquement à des actes d'agression physique. Elle peut également prendre des formes non physiques, telles que la violence morale ou psychologique. La violence morale peut se manifester par des actes d'intimidation, de dévalorisation, de manipulation ou d'abus émotionnel qui visent à nuire à la dignité et au bien-être psychologique d'une personne. La violence psychologique englobe des formes d'abus ou de coercition qui agissent sur le psychisme de l'individu, pouvant inclure des actes de manipulation, de chantage émotionnel, de menace, de privation affective, etc. Ces formes de violence peuvent avoir des conséquences profondes sur la santé mentale, le bien-être émotionnel et les relations sociales des individus. Il est essentiel de comprendre que la violence ne se réduit pas uniquement à la manifestation physique de la force, mais qu'elle peut également prendre des formes subtiles et insidieuses qui portent atteinte à l'intégrité, à la dignité et au bien-être des individus. Dans le domaine de la science politique, cette compréhension de la violence dans ses différentes dimensions est cruciale pour analyser les relations de pouvoir, les conflits politiques, les dynamiques sociales et les conséquences politiques de la violence. Cela permet de prendre en compte les diverses formes de violence et d'élaborer des stratégies de prévention et de résolution des conflits plus holistiques et efficaces.


Hannah Arendt va opposer la violence qui exige des instruments à ce qu’elle appelle le ''pouvoir de la puissance''. Au fond, il faut distinguer la violence du pouvoir et de la puissance parce que la puissance est directement instrumentale. Ainsi, elle va s’interroger sur l’expression des différentes formes de violences.
La violence est intrinsèquement liée à l'action et implique une intentionnalité. Elle se manifeste souvent par l'utilisation de la force et de la contrainte, ce qui peut entraîner une modification de la position, de la situation ou du comportement d'une personne en raison de l'atteinte qui lui est infligée. Lorsqu'une personne fait violence à autrui, elle cherche à imposer sa volonté par la force ou la contrainte, poussant ainsi la personne visée à changer de position ou de comportement. Cela peut se produire dans divers contextes, tels que les relations interpersonnelles, les relations de pouvoir, les conflits politiques ou sociaux. La contrainte imposée par la violence peut être physique, par exemple lorsqu'une personne est physiquement agressée ou soumise à des actes de force. Elle peut également être psychologique, sociale ou politique, où la personne est forcée ou contrainte de se conformer à certaines normes, exigences ou demandes sous la menace de conséquences négatives. Il est important de noter que l'utilisation de la force et de la contrainte ne sont pas les seuls modes d'expression de la violence. Comme nous l'avons mentionné précédemment, la violence peut prendre d'autres formes telles que la violence morale, psychologique, symbolique ou structurelle, qui peuvent également avoir des effets néfastes sur les individus et les sociétés.  
 
Hannah Arendt, philosophe politique du XXe siècle, a apporté une contribution importante à la réflexion sur la violence et le pouvoir. Selon elle, il convient de distinguer la violence du pouvoir et de la puissance, car la violence requiert des instruments spécifiques, tandis que le pouvoir est plus directement lié à la capacité d'agir et d'influencer. Arendt soutient que la violence est associée à l'utilisation de la force physique ou de moyens coercitifs pour imposer sa volonté. Elle est souvent caractérisée par la destruction, la soumission ou la domination de l'autre. Pour exercer la violence, on a besoin d'instruments, d'armes ou de moyens tangibles pour imposer cette volonté par la force. En revanche, Arendt fait une distinction entre la violence et le pouvoir, qu'elle décrit comme étant plus directement instrumentale. Le pouvoir, selon elle, est la capacité d'agir collectivement, de se rassembler et de prendre des décisions politiques. Il est fondé sur la coopération, le consentement et la participation active des individus. Contrairement à la violence, le pouvoir n'exige pas nécessairement l'utilisation de la force physique ou de moyens coercitifs. Arendt souligne que le pouvoir est une force plus durable et légitime que la violence. Le pouvoir repose sur la capacité des individus à se rassembler et à agir de manière concertée, tandis que la violence est souvent utilisée pour surmonter les obstacles ou les résistances au pouvoir. Elle met également en évidence les dangers inhérents à l'utilisation de la violence pour atteindre des objectifs politiques, car elle peut conduire à une spirale de violence et à la destruction des relations politiques et sociales. Dans son œuvre, Arendt s'interroge sur les différentes formes d'expression de la violence, notamment dans le contexte du totalitarisme, où la violence est utilisée de manière systématique pour contrôler et opprimer les individus. Elle explore les implications politiques et éthiques de la violence et du pouvoir, cherchant à comprendre comment les individus peuvent préserver leur dignité et leur liberté face aux forces violentes et oppressives.


= Champs scientifiques de réflexion =
= Champs scientifiques de réflexion =
Depuis une trentaine d’année les cognitivistes travaillent sur la violence de manière scientifique. Le concept central est le concept d’agressivité exprimé par Konrad Lorenz dans les années 1970. Il va d’abord s’interroger sur ce qu’est une conduite agressive et si elle ne relèverait pas de l’instinct naturel de l’homme. Suivant les contextes et la nature de la situation contextuelle l’agressivité serait naturelle à l’homme.  
Le terme "cognitiviste" fait généralement référence à un type de psychologue qui se concentre sur la manière dont les gens perçoivent, pensent, se souviennent, apprennent et résolvent les problèmes. Les cognitivistes s'intéressent principalement à l'information entrante et à la manière dont elle est traitée par le cerveau. Ils étudient la violence du point de vue de la façon dont elle est perçue et traitée par le cerveau. Depuis environ trente ans, les cognitivistes ont abordé la question de la violence d'un point de vue scientifique. Leur travail a permis de mettre en évidence certains processus cognitifs qui peuvent conduire à la violence. Par exemple, ils ont étudié comment les biais cognitifs (comme la pensée dichotomique, où tout est perçu comme bon ou mauvais, sans nuance) peuvent conduire à la violence. Ils ont également étudié comment les schémas de pensée dysfonctionnels (comme la rumination, où une personne reste bloquée sur des pensées négatives) peuvent augmenter le risque de comportements violents. Les recherches ont également montré que les personnes ayant une tendance à la violence ont souvent une capacité réduite à reconnaître et à comprendre les émotions des autres, un phénomène connu sous le nom d'alexithymie. Ils peuvent aussi avoir du mal à réguler leurs propres émotions, en particulier la colère. Ces recherches ont des implications importantes pour la prévention et le traitement de la violence. Par exemple, elles suggèrent que les interventions qui visent à améliorer la régulation des émotions et à modifier les schémas de pensée dysfonctionnels peuvent être efficaces pour réduire la violence. De plus, en comprenant les processus cognitifs qui sous-tendent la violence, nous pouvons être mieux en mesure d'identifier les personnes à risque et de les aider avant qu'elles ne deviennent violentes. Cependant, il est important de noter que la violence est un phénomène complexe qui est influencé par de nombreux facteurs, y compris mais sans s'y limiter, les facteurs sociaux, économiques et environnementaux. 
 
Konrad Lorenz était un éthologue autrichien qui a largement contribué à notre compréhension des comportements animaux, y compris de l'agressivité. Dans son livre de 1963, "On Aggression" (ou "L'Agression, une histoire naturelle du mal" en français), Lorenz présente la théorie selon laquelle l'agressivité est un instinct inné chez les animaux et les humains. Lorenz définit l'agression comme une force motrice qui pousse l'individu à se battre. Pour lui, l'agression n'est pas nécessairement destructrice ou antisociale, elle peut être essentielle à la survie et à l'évolution des espèces. Par exemple, l'agression peut favoriser la compétition, ce qui peut, à son tour, favoriser l'adaptation et la survie. Lorenz croit également que l'agression est liée à des processus neurobiologiques spécifiques et qu'elle est déclenchée par des stimuli spécifiques, qu'il appelle des "signaux de déclenchement fixe". Ces signaux peuvent varier d'une espèce à l'autre, et chez les humains, ils peuvent être très complexes. En ce qui concerne l'humanité, Lorenz suggère que notre agressivité innée pourrait être exacerbée par certains aspects de la société moderne. Il soutient que les sociétés traditionnelles avaient des moyens de canaliser l'agressivité de manière productive et de minimiser les conflits violents, mais que ces mécanismes pourraient être absents ou dysfonctionnels dans la société moderne.
 
Certains chercheurs, y compris Lorenz, ont suggéré que l'agression est une caractéristique commune à toutes les espèces, et peut-être même un instinct biologique fondamental. Cela ne signifie pas que tous les êtres sont constamment agressifs, mais plutôt que tous ont la capacité d'exprimer des comportements agressifs dans certaines circonstances. Dans le monde animal, l'agression peut jouer un rôle important dans différentes situations, comme la défense du territoire, l'accès aux ressources alimentaires, ou l'établissement de la dominance au sein d'un groupe. Certains de ces comportements peuvent être observés dans l'espèce humaine également. Toutefois, il convient de noter que l'agressivité humaine a des caractéristiques uniques qui la distinguent de l'agressivité chez les autres animaux. Par exemple, les humains sont capables d'agression symbolique et indirecte (comme l'humiliation ou le rejet social), et ils sont également capables de violence à grande échelle, comme la guerre. De plus, bien que la biologie et l'instinct puissent jouer un rôle dans l'agression, de nombreux chercheurs soulignent également l'importance des facteurs environnementaux et sociaux. Par exemple, des facteurs tels que la pauvreté, le stress, l'abus de substances, l'exposition à la violence dans les médias, et le manque de compétences en résolution de conflits peuvent tous augmenter le risque de comportement agressif. Il est également important de souligner que, bien que l'agressivité puisse être une caractéristique commune à toutes les espèces, cela ne signifie pas qu'elle est inévitable ou irréversible. De nombreuses recherches montrent que l'agressivité peut être modifiée par des interventions appropriées, comme l'éducation, la thérapie, et les changements dans l'environnement social et physique.  
   
   
Les sciences et la biologie renvoi sur la question des pulsions sur l’instinct d’agression qui est dans tous les êtres vivants et que l’on retrouve dans la nature. Ainsi il pourrait exister un point commun qui serait l’agressivité.  
L'agressivité peut aussi être comprise comme un mode d'expression et d'action. Elle peut être une réponse à un environnement perçu comme menaçant ou stressant, et peut représenter une tentative de défendre des ressources perçues comme étant en danger, que ce soient des ressources physiques ou psychologiques. L'agressivité peut également être une manière d'exprimer des sentiments de frustration, de colère, d'anxiété ou de peur. Cela ne justifie pas nécessairement l'agression, mais aide à comprendre pourquoi elle peut se produire. Comprendre l'agressivité comme un mode d'expression peut également aider à développer des moyens plus efficaces de gérer et de prévenir l'agression. Par exemple, il peut être utile d'apprendre à exprimer ses sentiments de manière plus constructive, ou à résoudre les conflits de manière non violente. Il est également important de noter que l'agressivité n'est pas la seule façon d'exprimer ces sentiments ou de réagir à ces situations. De nombreuses personnes et cultures ont développé des façons non agressives de gérer les conflits, l'adversité et les émotions négatives. Ainsi, bien que l'agressivité puisse être une réponse instinctive à certaines situations, elle n'est pas la seule réponse possible, et elle peut souvent être modifiée ou contrôlée par l'apprentissage et la pratique. Cependant, il est également crucial de distinguer entre l'agressivité et l'assertivité. Alors que l'agressivité implique souvent l'intimidation, la domination ou la violation des droits d'autrui, l'assertivité est une manière de s'exprimer qui respecte les droits et les sentiments des autres tout en défendant efficacement ses propres droits et besoins.
   
   
Il faut aussi considérer  que l’agressivité serait aussi un mode d’expression et d’action. On peut voir le passage d’une science cognitiviste médicale a une question. À une question culturelle et politique. Ainsi l’expression ne serait-elle pas un moyen d’expression,l’agressivité permet d’exprimer l’individualité. l’expression de l’individualité est malgré tout une expression de communication.
Les questions de violence et d'agressivité transcendent les disciplines et impliquent un large éventail de facteurs, des aspects biologiques et cognitifs individuels aux influences socioculturelles et politiques. Au niveau individuel, la psychologie cognitive et les neurosciences ont beaucoup apporté à notre compréhension des mécanismes cérébraux et cognitifs qui peuvent conduire à la violence ou à l'agressivité. Par exemple, des recherches ont montré que certains types de biais cognitifs, de dysfonctionnements dans le traitement de l'information ou de difficultés dans la régulation des émotions peuvent augmenter le risque de comportements agressifs. Cependant, il est également essentiel de comprendre que la violence et l'agressivité sont profondément influencées par des facteurs socioculturels et politiques. La culture peut influencer la manière dont la violence est perçue, acceptée ou sanctionnée, et elle peut offrir des modèles de comportement violent ou non violent. Par exemple, une culture qui valorise la domination ou l'agression peut encourager des comportements violents, tandis qu'une culture qui valorise la coopération ou la résolution pacifique des conflits peut encourager des comportements non violents. De même, la politique peut influencer la violence à tous les niveaux, des politiques gouvernementales qui peuvent favoriser ou dissuader la violence (par exemple, par le biais de lois sur le contrôle des armes ou de politiques d'éducation) à la manière dont les conflits politiques ou les inégalités peuvent conduire à la violence à grande échelle, comme les guerres ou les révolutions.
 
La violence et l'agressivité sont des phénomènes multidimensionnels qui sont influencés par une multitude de facteurs. Il est donc nécessaire d'adopter une approche interdisciplinaire pour les comprendre pleinement. Parmi ces disciplines, on peut citer la biologie, la psychologie, la sociologie, l'anthropologie, la criminologie, la science politique et d'autres encore.
 
* La biologie et la psychologie se concentrent souvent sur les facteurs individuels qui peuvent conduire à la violence, tels que les processus neurologiques, les biais cognitifs, les troubles de la personnalité, la régulation des émotions, etc.
* La sociologie et l'anthropologie examinent souvent comment les facteurs sociaux et culturels peuvent influencer la violence, par exemple, comment la structure sociale, les normes culturelles, les rôles de genre, les inégalités, etc., peuvent favoriser ou dissuader la violence.
* La criminologie se concentre sur les facteurs qui peuvent conduire à la violence criminelle, y compris les facteurs individuels, sociaux, économiques et environnementaux.
* La science politique examine souvent la violence à un niveau plus macroscopique, par exemple, comment les conflits politiques, les politiques gouvernementales, le terrorisme, la guerre, etc., peuvent conduire à la violence à grande échelle.
 
Ces disciplines, et d'autres, apportent des perspectives uniques et importantes sur la violence et l'agressivité. Par conséquent, une compréhension complète de ces phénomènes nécessite une approche interdisciplinaire qui intègre les perspectives de toutes ces disciplines.
 
L'agressivité peut certainement être une forme d'expression, et dans certains cas, elle peut être utilisée pour exprimer l'individualité. Par exemple, une personne peut recourir à l'agressivité pour affirmer son autonomie, pour résister à une autorité perçue comme oppressante, ou pour se distinguer des autres. L'expression de l'individualité est intrinsèquement liée à la communication. Qu'elle soit exprimée à travers l'art, la parole, le comportement, le style vestimentaire ou d'autres moyens, cette expression sert à transmettre des informations sur soi aux autres. C'est une façon d'exprimer ses sentiments, ses pensées, ses valeurs, ses intérêts et sa personnalité unique. De plus, l'expression de l'individualité n'est pas seulement une communication à sens unique - c'est aussi une façon d'interagir avec les autres et de participer à la vie sociale. Par exemple, lorsqu'on exprime son individualité, on peut inspirer les autres, les défier, les inviter à nous connaître mieux, ou simplement partager une partie de nous-même avec eux. C'est un aspect fondamental de la communication humaine.
 
Pour comprendre pleinement la violence et l'agressivité, il est crucial de prendre en compte plusieurs dimensions. Ces dimensions incluent les facteurs biologiques, les traits de personnalité individuels et l'interaction sociale.
 
# Facteurs biologiques : Il est bien établi que les facteurs biologiques peuvent influencer la propension à la violence et à l'agressivité. Par exemple, les déséquilibres chimiques dans le cerveau, les anomalies génétiques ou lésions cérébrales peuvent augmenter le risque de comportements violents ou agressifs.
# Traits de personnalité : Les traits de personnalité individuels peuvent également jouer un rôle important. Par exemple, des traits de personnalité tels que l'impulsivité, la faible maîtrise de soi, ou la tendance à l'irritabilité peuvent augmenter le risque d'agressivité. De même, certaines conditions psychologiques, comme les troubles de la personnalité antisociale, sont également associées à une plus grande propension à la violence.
# Interaction sociale : la socialisation joue un rôle clé dans le développement de comportements agressifs ou violents. Les enfants qui sont insuffisamment socialisés, ou qui grandissent dans des environnements où la violence est courante ou acceptée, peuvent être plus enclins à recourir à l'agression. De plus, les personnes qui ont des difficultés à gérer les relations sociales ou à comprendre et à répondre aux signaux sociaux peuvent également être plus susceptibles d'agir de manière agressive.
 
Ces trois dimensions sont interconnectées et se renforcent mutuellement. Par exemple, les facteurs biologiques peuvent influencer les traits de personnalité, qui à leur tour peuvent influencer la façon dont une personne interagit avec les autres. De même, les expériences sociales peuvent affecter à la fois les traits de personnalité et la biologie d'une personne. Il est donc nécessaire de prendre en compte ces trois dimensions pour comprendre pleinement la violence et l'agressivité et pour développer des interventions efficaces pour prévenir ou gérer ces comportements. Ces interventions peuvent impliquer des stratégies biologiques (comme la médication), psychologiques (comme la thérapie comportementale) et sociales (comme l'éducation à la résolution pacifique des conflits ou la création d'environnements sociaux plus sûrs et plus inclusifs).
 
La maîtrise de l'environnement est un facteur clé pour limiter l'agressivité et la violence. Cela peut se comprendre de plusieurs façons. Premièrement, la capacité à contrôler les aspects physiques de son environnement peut aider à réduire l'agressivité. Par exemple, une personne qui est capable de créer un environnement de vie sûr et confortable peut être moins susceptible de ressentir le stress et la frustration qui peuvent conduire à l'agressivité. Deuxièmement, la maîtrise de l'environnement social peut également être importante. Une personne qui a de bonnes compétences sociales et qui est capable de naviguer efficacement dans ses relations avec les autres peut être moins susceptible de recourir à l'agressivité comme moyen de résoudre les conflits. Troisièmement, la maîtrise de l'environnement émotionnel intérieur est également cruciale. Une personne qui a développé des compétences efficaces de régulation des émotions et de résilience face au stress peut être mieux équipée pour gérer les situations qui pourraient autrement conduire à l'agressivité. Enfin, la maîtrise de l'environnement peut aussi signifier la capacité de changer son environnement lorsque cela est nécessaire. Par exemple, une personne qui est capable de quitter un environnement violent ou d'en éviter la création peut être moins susceptible de recourir à la violence elle-même. Pour développer cette maîtrise de l'environnement, il peut être utile d'adopter une approche holistique qui inclut la promotion de la santé mentale, l'éducation à la résolution non violente des conflits, le développement de compétences sociales, l'amélioration des conditions de vie, et d'autres stratégies similaires.  
   
   
Au fond, on prend la tridimensionnalité de la violence comme des facteurs biologiques.
L'émotion joue un rôle central dans l'agressivité et la violence. Les émotions intenses, comme la colère, la frustration ou la peur, peuvent souvent déclencher des comportements agressifs. De plus, la manière dont nous percevons et interprétons nos émotions peut aussi influencer notre propension à l'agressivité. Par exemple, si nous interprétons nos émotions de colère comme une indication que nous avons été traités injustement, cela peut nous inciter à agir de manière agressive pour rétablir ce que nous percevons comme un équilibre juste. De même, si nous avons du mal à gérer ou à exprimer nos émotions de manière saine, cela peut nous rendre plus susceptibles de recourir à l'agression comme moyen d'expression. C'est pourquoi la régulation émotionnelle - c'est-à-dire la capacité à comprendre, à gérer et à répondre de manière appropriée à nos émotions - est souvent un élément clé pour prévenir l'agressivité et la violence. Les stratégies de régulation émotionnelle peuvent inclure des choses comme la prise de conscience de ses propres émotions, l'apprentissage de techniques de relaxation ou de réduction du stress, la pratique de la communication assertive, le développement de compétences de résolution de problèmes, et d'autres techniques similaires. Il est également important de noter que notre perception de ce qui constitue une "agression" peut varier grandement d'une personne à l'autre et d'une culture à l'autre. Ce qui est perçu comme une agression par une personne peut être perçu comme une action neutre ou même positive par une autre. Cela signifie que la compréhension et la prise en compte de ces différences de perception peuvent être cruciales pour prévenir l'agressivité et la violence.  
   
   
Il y a des facteurs biologiques, des facteurs liés à la personnalité du sujet sachant que l’agressivité est liée en partie à la difficulté d’être sociale, ainsi  un enfant, moins il est socialisé jeune plus la violence et l’agressivité ressort. Ces trois cercles permettent de comprendre ces facteurs d’échange socioaffectifs et dans quelle mesure cela peut être géré.  
L'agressogénicité est un terme qui désigne la capacité d'une situation à provoquer ou à encourager des comportements agressifs, et cette capacité est souvent déterminée par les trois dimensions mentionnées précédement : les facteurs biologiques, les traits de personnalité, et les interactions sociales. La perception joue un rôle clé dans l'agressogénicité. Par exemple, si une personne perçoit une situation comme étant menaçante, injuste, ou frustrante, elle peut être plus susceptible de répondre de manière agressive. De même, si une personne a une propension biologique ou personnelle à percevoir les situations de manière négative, ou si elle a été socialisée dans un environnement où l'agression est considérée comme une réponse appropriée, elle peut être plus susceptible de trouver des situations agressogènes. Il est également important de noter que les situations agressogènes ne sont pas forcément intrinsèquement agressives. Par exemple, une discussion animée ou un débat intense peut être perçu comme agressogène par une personne, mais pas par une autre. Cela signifie que la manière dont nous interprétons et réagissons aux situations peut avoir un impact majeur sur leur agressogénicité. C'est pourquoi il est crucial de développer des compétences de régulation émotionnelle, de résolution de conflits, et de communication assertive. Ces compétences peuvent nous aider à naviguer de manière plus saine et efficace dans les situations agressogènes, et à les transformer en opportunités de croissance et de compréhension mutuelle.  
   
   
L’enjeu fondamental pour limiter l’agressivité et la violence peut être la capacité que les individus ont à maitriser leur environnement.
La science politique, en tant que discipline, s'intéresse beaucoup à la violence. La violence, en particulier la violence politique, est un aspect fondamental de l'organisation des sociétés humaines, et sa compréhension peut aider à éclairer de nombreux aspects de la politique, tels que la formation de l'État, les conflits ethniques et religieux, la révolution, le terrorisme, la guerre et la paix, entre autres. Dans la science politique, la violence est généralement considérée comme une forme d'action politique. C'est-à-dire que la violence est souvent utilisée comme un moyen d'atteindre des objectifs politiques, qu'il s'agisse de prendre le pouvoir, de défendre des droits, de résister à l'oppression, de promouvoir un changement social, ou d'autres objectifs similaires. Cependant, il est important de noter que, bien que la violence soit une forme d'action, elle n'est pas la seule, ni nécessairement la meilleure, manière d'atteindre ces objectifs. Il existe de nombreuses autres formes d'action politique, telles que le militantisme, la négociation, le dialogue, l'éducation, et d'autres stratégies non violentes, qui peuvent souvent être plus efficaces et moins destructrices. En ce qui concerne l'hypothèse que "la violence est de l'action", elle pourrait servir de point de départ pour forger une théorie sur les conditions sous lesquelles la violence devient une forme d'action politique acceptable ou préférée. Par exemple, cette théorie pourrait explorer des questions telles que : Quels sont les facteurs qui incitent les individus ou les groupes à choisir la violence comme moyen d'action politique ? Comment les structures politiques, économiques et sociales influencent-elles cette décision ? Quels sont les impacts de la violence sur la politique et la société, et comment peuvent-ils être gérés ou minimisés ?
 
L’émotion est au cœur du sujet, c’est la perception et la lecture de sa situation. Le concept d’émotion est important, car il permet de comprendre ces situations où il y a perte de rationalisation ; effectivement c‘est parce que l’on ressent une agression que l’on peut exprimer une agressivité.  
La théorie contextuelle joue un rôle essentiel dans la compréhension de la violence, surtout dans le champ de la science politique. En se concentrant sur le rapport entre l'individu et le collectif, on peut examiner comment le contexte social, économique et politique influence le comportement violent. La dimension collective de la violence se manifeste de plusieurs façons. Par exemple, des groupes d'individus peuvent s'engager dans la violence ensemble, comme lors des émeutes ou des guerres. Dans ces cas, la dynamique de groupe peut renforcer la violence, car les individus se sentent souvent moins responsables de leurs actions lorsqu'ils agissent en groupe. De plus, la violence peut être utilisée comme un moyen d'affirmer l'identité de groupe ou de défendre les intérêts du groupe. Par exemple, des groupes ethniques, religieux ou politiques peuvent recourir à la violence pour lutter contre la discrimination ou l'oppression, ou pour revendiquer le pouvoir. Cependant, il est important de noter que la dimension collective de la violence n'est pas seulement une question de dynamique de groupe. Les structures sociales, économiques et politiques plus larges jouent également un rôle majeur dans la facilitation ou la limitation de la violence. Par exemple, des institutions politiques fortes et équitables peuvent aider à prévenir la violence en résolvant pacifiquement les conflits, tandis que l'inégalité économique ou la discrimination sociale peuvent encourager la violence en créant des frustrations et des tensions. Par conséquent, la compréhension de la dimension collective de la violence nécessite une analyse du contexte dans lequel la violence se produit, y compris les normes sociales, les institutions politiques, les conditions économiques, et d'autres facteurs similaires. C'est là que la théorie contextuelle peut être particulièrement utile.
 
Ces trois dimensions sont importantes et expliquent des situations agressogenes c’est-à-dire une situation de l’ordre de la perception.
Passer d'un fait individuel à un fait collectif implique une analyse approfondie des mécanismes de socialisation et de formation de groupe. Les comportements individuels ne deviennent des phénomènes collectifs que lorsqu'ils sont adoptés et répétés par un groupe de personnes. Ce processus peut être influencé par une variété de facteurs, tels que les normes sociales, les institutions politiques, l'éducation, les médias, et d'autres influences culturelles. Dans le cas de la violence, un acte violent peut devenir un phénomène collectif lorsque la violence est perçue comme un moyen acceptable ou nécessaire de résoudre les conflits, d'affirmer l'identité de groupe, de défendre les droits, ou d'atteindre d'autres objectifs sociaux ou politiques. Par exemple, si une société est marquée par des conflits armés, la violence peut devenir un comportement social accepté, voire attendu. La violence peut être qualifiée de fait sociétal lorsqu'elle devient un phénomène répandu et accepté au sein d'une société. Cela peut se produire lorsque la violence est institutionnalisée, comme dans le cas de la violence d'État, ou lorsque la violence est culturellement acceptée, comme dans le cas de certaines formes de violence domestique ou de violence de genre. La gestion politique de la violence est un enjeu fondamental dans la mesure où elle influe sur la manière dont la violence est perçue, gérée et prévenue dans une société. Les politiques publiques peuvent aider à prévenir la violence en promouvant l'éducation, en améliorant les conditions de vie, en mettant en place des mesures de prévention et de répression de la violence, et en promouvant la résolution pacifique des conflits.
Si la science politique s’intéresse à la violence c’est parce que le cœur même de la science politique est la question de l’action de l’action, si on parle de l’hypothèse que la violence est de l’action dès lors il y a une théorie à forger. D’autre part, c’est une théorie contextuelle c’est-à-dire le rapport entre l’individu et le collectif f mais c’est la dimension collective.
La question est de savoir comment passe-t-on d’un fait individuel à un fait collectif est comment peut-on qualifier la violence de fait sociétal. On intègre dans une analyse d’un fonctionnement et de régulation sociale qui pose la question de la gestion politique comme un fait fondamental.


= Les théories classiques de la violence =
= Les théories classiques de la violence =


== Hobbes et la théorie de la violence comme utilité sociale ==
== Hobbes (1588 - 1979) et la théorie de la violence comme utilité sociale ==
[[Image:Thomas_Hobbes_(portrait).jpg|right|150px|thumb|Thomas Hobbes.]]
[[Image:Thomas_Hobbes_(portrait).jpg|right|150px|thumb|Thomas Hobbes.]]


Selon [[La naissance du concept moderne de l’État|Hobbes]], il existe trois niveaux de violence possible :
Thomas Hobbes, philosophe politique anglais du XVIIe siècle, est bien connu pour sa théorie sur l'état de nature et le contrat social, qui a des implications importantes pour notre compréhension de la violence. Dans son œuvre la plus célèbre, "Le Léviathan", Hobbes décrit l'état de nature comme un état de "guerre de tous contre tous" où la violence est omniprésente. Selon Hobbes, en l'absence d'une autorité centrale (un "Léviathan") pour imposer l'ordre, les individus sont en perpétuelle compétition pour les ressources, ce qui conduit à un état constant de peur et de violence. Cependant, Hobbes considère que les individus sont rationnels et cherchent à éviter cette condition de vie brutale. Par conséquent, ils décident de conclure un contrat social, abandonnant une partie de leur liberté en échange de la protection offerte par un État ou une autorité centrale. L'État, en retour, a le devoir de maintenir l'ordre et de protéger les citoyens de la violence. Selon la perspective de Hobbes, la violence a donc une certaine "utilité sociale" en ce sens qu'elle sert de motivation pour la création de l'État et l'établissement du contrat social. La peur de la violence dans l'état de nature incite les individus à s'unir et à créer une société organisée pour assurer leur sécurité collective. Il est important de noter, cependant, que bien que Hobbes reconnaisse cette "utilité" de la violence dans la création de l'État, il ne promeut pas la violence en soi. Au contraire, l'objectif de la constitution de l'État est précisément d'éliminer la violence de la vie quotidienne des individus. Pour Hobbes, la violence n'est donc pas une caractéristique souhaitable de la société, mais plutôt un mal à éviter.
*Niveau des relations interindividuelles dans l’état de nature ;
 
*Niveau de la guerre internationale ;
Thomas Hobbes a détaillé trois niveaux de violence possibl dans ses écrits :
*Niveau de la guerre entre souverain et rebelle.
 
* Les relations interindividuelles dans l'état de nature : Hobbes a dépeint l'état de nature comme un lieu de violence brutale, où il n'existe aucune autorité pour protéger les individus les uns des autres. Dans cet état, dit Hobbes, la vie de l'homme est "solitaire, pauvre, brutale, et courte". Les individus sont en conflit constant pour des ressources limitées, ce qui conduit à un état de "guerre de tous contre tous".
* La guerre internationale : Hobbes considérait que les relations internationales existaient dans un état de nature similaire, où chaque État est souverain et où il n'existe pas d'autorité mondiale pour réguler leurs interactions. Cela peut conduire à des guerres internationales, où chaque État agit selon ses propres intérêts et utilise la force pour atteindre ses objectifs.
* La guerre entre le souverain et les rebelles : Hobbes a également discuté de la violence qui peut survenir au sein d'un État, notamment entre le souverain et les rebelles. Pour Hobbes, toute rébellion contre le souverain est illégitime car elle viole le contrat social et peut faire retomber la société dans l'état de nature. Cependant, il admet que si le souverain ne remplit pas ses obligations (en particulier celle de protéger les citoyens), alors les citoyens ont le droit de se défendre.
 
Chacun de ces niveaux de violence illustre un aspect différent de la théorie politique de Hobbes. Ils mettent en évidence son point de vue selon lequel la violence est une conséquence inévitable de l'état de nature et que l'État et le contrat social sont nécessaires pour maintenir la paix et l'ordre.
 
Dans son ouvrage "Le Léviathan", Hobbes a identifié trois principales causes de conflit dans l'état de nature, qui mènent à la violence :
 
* Rivalité : Selon Hobbes, la rivalité est causée par la compétition pour les ressources limitées. Dans l'état de nature, les individus sont en concurrence constante pour les ressources nécessaires à leur survie, comme la nourriture, l'eau et l'abri. Cette compétition peut entraîner des conflits et de la violence.
* Méfiance : La méfiance peut aussi conduire à la violence, car dans l'état de nature, les individus ne peuvent pas faire confiance aux autres pour respecter leurs droits ou leurs biens. Dans un tel état, les individus peuvent recourir à la violence pour se protéger ou protéger leurs biens par précaution, même s'il n'y a pas de menace immédiate.
* Fièreté (ou Gloire) : Hobbes a aussi considéré que le désir de gloire ou de réputation peut mener à la violence. Les individus peuvent se battre pour préserver leur honneur, pour gagner le respect des autres ou pour assurer leur place dans la hiérarchie sociale.
 
Ces causes de conflit et de violence dépeignent l'état de nature comme un lieu de peur et d'insécurité, où les individus sont constamment sur leurs gardes et prêts à se battre pour leur survie. C'est pourquoi, selon Hobbes, les individus ont un intérêt rationnel à quitter cet état de nature et à établir un contrat social, pour créer un état qui peut assurer la paix et la sécurité.


Hobbes dénombre trois causes de la violence :
Selon la théorie de Hobbes, ces trois causes principales de conflit (rivalité, méfiance et fierté) peuvent entraîner des guerres et des conflits. Sans une autorité centrale pour maintenir l'ordre, imposer des règles et réguler le comportement, les individus sont susceptibles de se battre pour des ressources limitées, de se protéger par précaution en raison de la méfiance, et de chercher à affirmer leur réputation ou leur place dans la hiérarchie sociale. Dans l'état de nature décrit par Hobbes, ces conflits ne sont pas régulés et peuvent facilement dégénérer en violence généralisée ou en guerre. C'est pourquoi Hobbes a soutenu l'idée de la création d'un "Léviathan", ou d'un État puissant, qui pourrait contrôler la violence et maintenir l'ordre. De plus, ces concepts peuvent être extrapolés à l'échelle internationale. Les États, tout comme les individus dans l'état de nature, peuvent se retrouver en conflit pour des ressources, par méfiance mutuelle, ou pour des raisons de fierté nationale. Ces tensions peuvent déboucher sur des guerres ou des conflits internationaux. Bien que Hobbes ait décrit un état de nature potentiellement violent, son but n'était pas de promouvoir la violence, mais plutôt de souligner l'importance de l'autorité centrale (l'État) pour maintenir la paix et l'ordre.  
*la rivalité ;
*la méfiance ;
*la fierté.  
Il en découle des guerres et des conflits.  
   
   
=== Niveau des relations interindividuelles dans l’état de nature ===
=== Niveau des relations interindividuelles dans l’état de nature ===
Ainsi, la violence est déraisonnable, c’est de l’espace de la passion. Le paradoxe est que la violence est passionnelle et déraisonnable mais elle donne lieu à une action rationnelle.  
Dans la philosophie de Hobbes, la violence est associée à un manque de raison et est souvent liée à des passions débridées. Pour Hobbes, les individus rationnels chercheraient à éviter la violence car elle mène à l'insécurité et à l'instabilité. C'est l'un des principaux arguments de Hobbes pour expliquer pourquoi les individus décident de former un État via un contrat social : pour échapper à la violence et à l'incertitude de l'état de nature. Cependant, Hobbes ne considère pas la violence comme totalement irrationnelle. Il la voit plutôt comme le produit inévitable de la poursuite rationnelle des intérêts dans une situation où il n'existe pas d'autorité pour réguler le comportement des individus. En d'autres termes, dans l'état de nature, il peut être rationnel pour un individu de recourir à la violence pour assurer sa survie ou pour protéger ses biens.  
   
 
Opposition = déraison = passion = anarchie
C'est l'un des paradoxes centraux dans la philosophie politique de Thomas Hobbes : la violence, bien que souvent déclenchée par des passions déraisonnables, pousse à une action rationnelle pour éviter de tels conflits à l'avenir. Dans l'état de nature, où règnent la méfiance, la rivalité et la quête de gloire, les individus peuvent être amenés à agir violemment pour garantir leur propre sécurité et leurs intérêts. Cependant, la vie dans cet état de guerre perpétuelle est dangereuse et instable, et selon Hobbes, les individus sont rationnels et cherchent naturellement à éviter ces conditions de vie brutales. C'est donc la perspective de cette violence qui incite les individus à conclure un contrat social et à créer un État. Ce passage de la violence déraisonnable à une action rationnelle pour la prévenir illustre le paradoxe au cœur de la philosophie de Hobbes. Le désir d'éviter la violence, en dépit de sa nature passionnelle et déraisonnable, motive la création d'une structure politique et sociale rationnelle et ordonnée. Bien que Hobbes propose cette théorie comme une explication du développement de la société et de l'État, il ne suggère pas que la violence soit un prérequis nécessaire ou souhaitable pour ce processus. L'objectif ultime, selon Hobbes, est d'établir un État qui puisse maintenir la paix et la sécurité, minimisant ainsi la possibilité de violence.
 
La question sous-jacent de de savoir si l’action peut être rationnelle peut-on dès lors parler d’irrationalité ?
Il est possible d'établir une chaîne conceptuelle reliant "opposition" à "déraison", puis "passion" et enfin "anarchie". Cela peut être interprété de la façon suivante dans le contexte de la philosophie politique :
 
# Opposition : Ceci pourrait se référer à la concurrence ou à la lutte pour les ressources dans l'état de nature, tel que décrit par Hobbes. Sans une autorité pour imposer l'ordre, les individus se trouvent en opposition les uns avec les autres pour garantir leur survie.
# Déraison : L'opposition constante et la lutte pour la survie peuvent conduire à des comportements déraisonnables, comme la violence. Sans réglementation ou protection, les individus peuvent agir de manière impulsive ou irrationnelle pour assurer leur propre sécurité.
# Passion : Hobbes considérait les passions humaines comme une cause majeure de conflit et de violence. Dans l'état de nature, sans règles pour modérer ces passions, elles peuvent conduire à la déraison et à la violence.
# Anarchie : Si les passions humaines ne sont pas régulées par une autorité, l'état de nature peut se transformer en anarchie. Hobbes a décrit cet état comme une "guerre de tous contre tous", où il n'y a aucune loi ou ordre, et où la violence est omniprésente.
 
Hobbes voyait cette chaîne d'événements comme un potentiel, et non comme une fatalité. Il soutenait qu'en reconnaissant la possibilité de cette suite d'événements, les individus pouvaient choisir de former un contrat social et de créer un État, pour prévenir la déraison, modérer les passions et éviter l'anarchie.
 
La question de la rationalité de l'action est un sujet central en philosophie et en sciences sociales. La plupart des théories de l'action partent du principe que les individus agissent de manière rationnelle, c'est-à-dire qu'ils choisissent les moyens les plus efficaces pour atteindre leurs objectifs, compte tenu de leurs croyances et de leurs valeurs. L'idée que toute action est rationnelle peut être néanmoins remise en question. Par exemple, nous savons que les individus peuvent agir sous l'effet de l'émotion, de l'impulsion, ou à cause de contraintes cognitives qui les empêchent de faire des choix parfaitement rationnels. En outre, ce que nous considérons comme "rationnel" peut varier en fonction du contexte culturel ou personnel. En ce qui concerne la violence, il peut être difficile de considérer des actes violents comme étant "rationnels". Cependant, du point de vue de l'acteur, la violence peut sembler être une réponse rationnelle à une situation perçue comme une menace. De plus, dans certaines circonstances, la violence peut être utilisée comme un moyen stratégique pour atteindre des objectifs spécifiques. Dans le cadre de la théorie de Hobbes, par exemple, la violence dans l'état de nature peut être considérée comme une réponse rationnelle à une situation d'insécurité et de compétition pour les ressources. Cependant, Hobbes lui-même reconnaît que cette violence est néfaste et déstabilisante, et soutient que la solution la plus rationnelle est de créer un État qui peut assurer la paix et la sécurité.
   
   
=== Niveau de la guerre internationale ===
=== Niveau de la guerre internationale ===
Le passage à l’état de guerre est une théorie de l’État westphalien, ce sont des États qui se font la guerre.
Le concept d'État westphalien fait référence à un certain type d'ordre international qui a émergé à la suite des traités de Westphalie en 1648, qui ont mis fin à la guerre de Trente Ans en Europe. Ces traités ont établi l'idée de la souveraineté de l'État, selon laquelle chaque État a une autorité exclusive et incontestable sur son territoire et sa population. L'ordre westphalien est donc caractérisé par un système international d'États souverains qui ne reconnaissent aucune autorité supérieure à la leur.
 
La première hypothèse est le désir d’accumulation qui veut que chaque État veuille à un moment donné acquérir plus de puissance pour régner par rapport aux autres. L’état de guerre est un état d’accumulation qui va triompher grâce au souverain et aux institutions publiques, c’est un état d’appropriation des ressources. Pour que cela fonctionne cela ne signifie pas que la violence va être rapportée du côté de la guerre mais que l’État va devoir gérer sa propre violence.
Dans un tel système, les États peuvent entrer en conflit ou en guerre pour diverses raisons, comme la rivalité pour le pouvoir ou les ressources, les différends territoriaux, ou les différences idéologiques. Dans ce contexte, la guerre peut être vue comme une extension de la politique par d'autres moyens, pour reprendre la célèbre formule de Carl von Clausewitz.
 
Dans la théorie de [[La naissance du concept moderne de l’État|Hobbes]], la violence peut toujours ressurgir dans le cadre de l’État car il doit par essence être instrumentalisé vers des fins et des objectifs, il va devoir se défendre de l’extérieur mais aussi de la violence à l’intérieur de son propre système.  
La théorie de Hobbes sur l'état de nature et l'état de guerre peut être appliquée à l'échelle internationale dans le système westphalien. En l'absence d'une autorité mondiale supérieure pour réguler les relations entre les États, ces derniers peuvent se retrouver dans une situation semblable à l'état de nature décrit par Hobbes, où le conflit est constant et où la sécurité est toujours menacée. De même, tout comme les individus dans l'état de nature, les États peuvent choisir de former des alliances ou des organisations internationales pour garantir leur sécurité et promouvoir leurs intérêts.
 
L'État, guidé par un désir intrinsèque d'accumulation de pouvoir, se trouve souvent en situation de compétition ou de conflit avec d'autres États pour l'acquisition de ressources supplémentaires. Cela peut conduire à un état de guerre latent, où chaque État cherche à maximiser sa puissance relative. Cependant, pour que l'État puisse fonctionner efficacement et assurer le bien-être de ses citoyens, il doit également être capable de gérer et de réguler sa propre violence, tant interne qu'externe. Cette tâche est généralement accomplie par le souverain et diverses institutions publiques, qui sont chargés de maintenir l'ordre et la paix à la fois à l'intérieur et à l'extérieur des frontières de l'État.  
 
Cette hypothèse évoque des éléments essentiels du système international d'États, et des raisons pour lesquelles les États peuvent entrer en conflit.
 
# Désir d'accumulation : L'idée que les États cherchent à accroître leur puissance est fondamentale en relations internationales. La puissance peut se traduire par le contrôle de plus de territoire, de ressources, d'influence politique ou économique, etc. Cette quête d'accumulation peut conduire à des tensions ou des conflits avec d'autres États.
# État de guerre : Dans une perspective hobbesienne, la situation internationale sans une autorité supranationale peut ressembler à un "état de guerre" où les États doivent constamment se préparer à se défendre contre d'éventuelles menaces.
# Le rôle du souverain et des institutions publiques : Dans ce contexte, le souverain et les institutions publiques jouent un rôle essentiel en garantissant la sécurité et en gérant les ressources de l'État.
# Gestion de la violence : Un aspect crucial du pouvoir étatique est la capacité de gérer et de contrôler la violence. Cela comprend non seulement la défense contre les menaces extérieures, mais aussi le maintien de l'ordre et de la paix à l'intérieur des frontières de l'État. Dans le système westphalien, la capacité de contrôler la violence est un attribut essentiel de la souveraineté.
 
Ces éléments mettent en évidence la complexité des relations entre les États et la façon dont la violence et la guerre peuvent être comprises dans un contexte international.
 
Dans le cadre de la théorie de Hobbes, l'État a une double fonction. Il doit se défendre contre les menaces externes, mais aussi contre la violence interne. Pour Hobbes, l'État est un moyen de contenir la violence inhérente à la nature humaine. Dans son œuvre "Le Léviathan", il postule que sans une autorité centrale pour imposer l'ordre, la société serait en proie à un "état de guerre de tous contre tous". Ainsi, l'État, en tant que "Léviathan", doit exercer un pouvoir absolu pour maintenir la paix et prévenir la violence. Cette tâche comprend non seulement la défense contre les menaces externes, mais aussi la prévention et la gestion de la violence à l'intérieur de l'État. Il doit être capable de faire respecter les lois et les règles pour éviter les conflits internes et maintenir la cohésion sociale. Pour Hobbes, ce pouvoir de l'État ne doit pas être utilisé arbitrairement, mais doit toujours viser le bien-être et la sécurité des citoyens.  
   
   
Ainsi, Hobbes nourrit l’hypothèse que la violence va être canalisée mais elle va exister au sein de l’État même si l’enjeu fondamental est la guerre entre États.  
Pour Hobbes, la violence est une caractéristique inhérente à l'état de nature de l'homme. Par conséquent, bien que l'État, en tant qu'entité souveraine, puisse canaliser et contrôler cette violence, il ne peut jamais l'éliminer complètement. L'un des rôles principaux de l'État, selon Hobbes, est de prévenir l'auto-destruction potentielle de la société en régulant la violence interne. Cependant, il reconnaît également que la violence peut émaner du conflit entre les États eux-mêmes, souvent motivé par des désirs concurrentiels de pouvoir et de ressources. Cette tension entre le désir d'accumuler du pouvoir (et potentiellement d'engendrer la violence) et la nécessité de maintenir la paix et la stabilité est une dynamique centrale dans sa théorie. Ainsi, même si l'État est capable de contenir la violence interne à un certain degré, la possibilité de la violence - que ce soit au niveau individuel, collectif ou entre États - persiste toujours dans la pensée de Hobbes.  
   
   
=== Niveau de la  guerre entre souverain et rebelle ===
=== Niveau de la  guerre entre souverain et rebelle ===
Même si il a y une violence à l’état de nature, une violence entre les État dans un système westphalien avec un contrôle de la violence au sein d’eux même, il n’empêche qu’il peut y avoir un troisième qui est la guerre entre le souverain est le rebelle entre celui qui détient le pouvoir et celui qui conteste.
Dans la théorie de Hobbes, la guerre entre le souverain et les rebelles représente une menace majeure pour la stabilité de l'État. Cette forme de violence est particulièrement préoccupante car elle déstabilise l'autorité du souverain et peut potentiellement conduire à l'anarchie et à la désintégration de l'État. Selon Hobbes, la société est établie sur un "contrat social" où les individus acceptent de se soumettre à l'autorité d'un souverain en échange de protection et de sécurité. Cependant, si certains individus ou groupes (les "rebelles") choisissent de rejeter l'autorité du souverain et de prendre les armes contre lui, cela met en péril l'ordre social et l'état de paix que le souverain est censé maintenir. La rébellion peut être motivée par divers facteurs, comme le mécontentement envers les politiques du souverain, les inégalités socio-économiques, les différences idéologiques ou religieuses, etc. Pour Hobbes, la rébellion est une forme de "retour à l'état de nature" qui doit être évitée à tout prix, car elle peut mener à un état de guerre de tous contre tous.
   
   
Ce qui est intéressent dans la théorie de [[La naissance du concept moderne de l’État|Hobbes]] est qu’il décrit la violence comme une histoire et comme l’hypothèse que la violence reste et ne peut disparaitre entant que telle.
Hobbes ne voit pas la violence comme quelque chose qui peut être complètement éliminé de la société ou de la nature humaine. Au contraire, il considère la violence comme une constante, un aspect fondamental de la condition humaine. Pour Hobbes, la violence est un élément inhérent à l'état de nature humaine, et bien que la création de l'État et l'établissement de l'autorité souveraine puissent aider à contrôler et à réguler cette violence, elle ne disparaît jamais entièrement.
 
Cette perspective peut être interprétée comme plutôt sombre, mais elle a également une dimension réaliste. Hobbes reconnaît que la violence, sous une forme ou une autre, est toujours présente dans les interactions humaines et politiques. C'est pourquoi, dans sa théorie, l'objectif principal de l'État est de contrôler et de minimiser cette violence autant que possible pour préserver l'ordre social, plutôt que de chercher à l'éliminer complètement.


== George Sorel et la violence contestataire ==
== George Sorel (1847 - 1922) et la violence contestataire ==


[[Image:Georges_Sorel.jpg|right|thumb|150px|Georges Sorel.]]
[[Image:Georges_Sorel.jpg|right|thumb|150px|Georges Sorel.]]


Sorel est un socialiste d’État, un marxiste, un syndicaliste et un révolutionnaire puis il a va dériver vers l’extrême droite. Son ouvrage intitulé ''Réflexion sur la violence'' publié en 1906<ref> Sorel, Georges. Reflexions Sur La Violence. Version electronique: http://www.ultimorecurso.org.ar/drupi/files/Sorel_Reflexions_violence.pdf</ref> est intéressent, car il va poser la violence comme un collectif. Il va reprendre des éléments qui structurent en disant que la violence n’est pas de l’ordre du spontané, elle n’est pas de l’ordre du spontané et de l’imprévisible, elle serait au contraire de l’ordre du constitué et d’une volonté en acte.  
Georges Sorel, philosophe et sociologue français, a une perspective très différente de celle de Hobbes sur la violence. Pour Sorel, la violence n'est pas seulement une menace pour l'ordre social, mais peut aussi être un outil puissant de transformation sociale et politique. Dans son œuvre la plus célèbre, "Réflexions sur la violence" (1908), Sorel développe une théorie de la violence contestataire. Selon Sorel, la violence peut être une expression légitime de la lutte des classes et un moyen nécessaire pour les travailleurs de renverser l'ordre capitaliste. Il rejette l'idée que la violence est toujours destructrice ou néfaste, et soutient que la violence révolutionnaire peut être créative et libératrice. La violence, selon Sorel, est nécessaire pour secouer l'inertie sociale et provoquer des changements radicaux. Il soutient que les grèves générales, un exemple de violence contestataire, ne sont pas simplement des tactiques de négociation, mais peuvent être des actes révolutionnaires qui perturbent l'ordre établi et ouvrent la voie à une nouvelle société. Sorel n'approuve pas toutes les formes de violence. Il distingue la violence proletarienne, qui sert un but révolutionnaire, de la violence criminelle, qu'il considère comme contre-productive et antisociale.
 
En effet, la pensée politique de Georges Sorel est complexe et a traversé de nombreuses phases et transformations au fil du temps. Initialement, Sorel était un socialiste et un marxiste qui croyait en la lutte des classes et en la nécessité d'une révolution pour établir une société socialiste. Il a également été un fervent syndicaliste, croyant que les syndicats étaient l'instrument par lequel les travailleurs pourraient se libérer de l'oppression capitaliste. Cependant, au fil du temps, Sorel s'est de plus en plus éloigné du marxisme traditionnel et a développé ses propres idées, parfois controversées, sur le rôle de la violence et de la mythologie dans la politique. Certaines de ces idées ont été récupérées par des mouvements d'extrême droite, ce qui a conduit certains à associer Sorel à l'extrême droite. Il est important de noter, cependant, que Sorel lui-même n'a jamais adhéré à l'idéologie d'extrême droite. Vers la fin de sa vie, il a même exprimé des critiques envers certains mouvements d'extrême droite de son époque. Néanmoins, l'interprétation de ses idées par certains groupes d'extrême droite a contribué à créer une certaine ambiguïté autour de sa figure. Bien que Sorel ait commencé sa carrière en tant que socialiste et marxiste, sa pensée a évolué de manière complexe et parfois contradictoire, et a été utilisée et interprétée de différentes manières par divers mouvements politiques après sa mort.
 
Dans "Réflexions sur la violence" (1906), Sorel défend l'idée que la violence n'est pas seulement un acte individuel, mais peut aussi être une force collective. Pour Sorel, la violence peut être un moyen pour un groupe, notamment la classe ouvrière, de s'affirmer face à l'oppression et d'initier un changement social. Il met en avant la notion de la grève générale, qui, dans sa vision, est une forme de violence contestataire collective. Une grève générale, pour Sorel, n'est pas seulement un outil de négociation pour améliorer les conditions de travail, mais est un moyen par lequel les travailleurs peuvent démontrer leur pouvoir, perturber l'ordre social et éventuellement catalyser une transformation sociale révolutionnaire. Ainsi, Sorel place la violence dans un contexte social et politique plus large, la considérant comme un acte qui peut avoir une signification et un impact au-delà de l'acte individuel. Il fait valoir que la violence peut servir à révéler et à défi les structures de pouvoir existantes, et peut être un outil efficace pour le changement social lorsque elle est utilisée collectivement.
 
La structure des chapitres de "Réflexions sur la violence" illustre bien les idées principales de Sorel et sa compréhension de la violence comme un phénomène social et politique complexe. Voici un aperçu de chaque chapitre :
 
# '''Lutte de classe et violence''' : Sorel examine comment la violence joue un rôle dans la lutte des classes. Il soutient que la violence est une part inévitable de cette lutte et que, loin d'être une menace à l'ordre social, elle peut être un outil de libération pour la classe ouvrière.
# '''La décadence bourgeoise et la violence''' : Sorel critique la bourgeoisie et affirme que sa décadence morale et spirituelle a contribué à la violence sociale.
# '''Les préjugés contre la violence''' : Sorel examine et conteste certains des préjugés courants contre la violence, notamment l'idée qu'elle est toujours destructrice ou néfaste.
# '''La grève prolétarienne''' : Sorel défend l'idée que les grèves peuvent être un acte révolutionnaire et pas seulement une tactique de négociation.
# '''La grève générale productive''' : Sorel développe sa vision de la grève générale, qu'il considère comme un outil puissant de changement social.
# '''La moralité de la violence''' : Sorel explore les aspects moraux de la violence. Il soutient que la violence n'est pas nécessairement immorale et peut être justifiée dans certaines circonstances.
# '''La morale des producteurs''' : Sorel explore l'idée de la morale des producteurs, ou la classe ouvrière, et comment cette morale peut influencer leur utilisation de la violence.
 
Dans l'ensemble, Sorel présente une vision de la violence qui déconstruit les préjugés courants et examine comment la violence peut être utilisée de manière productive et morale pour apporter des changements sociaux et politiques.
 
L'idée de Sorel est que la violence, lorsqu'elle est utilisée par la classe ouvrière pour lutter contre l'oppression et l'exploitation, peut être considérée comme moralement justifiée. Selon lui, la violence peut servir de moyen pour remettre en question et transformer les rapports de pouvoir injustes et inégaux qui existent dans une société capitaliste. Il voit la violence comme un outil que la classe ouvrière peut utiliser pour se libérer de l'exploitation et de l'oppression bourgeoises. C'est dans ce contexte qu'il parle de la "moralité de la violence". Il faut cependant souligner que ces vues sont controversées et ont été critiquées pour leur potentialisation de la violence. Bien que Sorel voit la violence comme un moyen potentiel de réaliser des changements sociaux, il est important de considérer les implications éthiques et les conséquences possibles de l'utilisation de la violence à ces fins.  
   
   
:Chapitre 1. Lutte de classe et violence
Dans la perspective de Sorel, la lutte des classes est un moyen de perturber et de contester les structures de pouvoir existantes dans la société. Il voit la violence comme une force potentiellement émancipatrice que la classe ouvrière peut utiliser pour s'affirmer et faire pression pour un changement social et économique. Il considère la grève générale comme un exemple clé de ce type de violence "positive". Pour Sorel, une grève générale n'est pas seulement un moyen de négocier de meilleures conditions de travail, mais aussi une façon pour les travailleurs de démontrer leur pouvoir, de perturber l'ordre social et économique existant, et de forcer les classes dirigeantes à reconnaître et à répondre à leurs demandes.  
:Chapitre 2. La décadence bourgeoise et la violence
:Chapitre 3. Les préjugés contre la violence
:Chapitre 4. La grève prolétarienne
:Chapitre 5. La grève générale productive
:Chapitre 6. La moralité de la violence
:Chapitre 7. La morale des producteurs
   
   
Si la violence est du collectif qui a pour usage de changer les rapports sociaux et de lutter contre la pauvreté et l’exploitation bourgeoise capitaliste il y a une forme de moralité  de la violence, dès lors elle n’est pas considérée comme amorale, mais profondément morale.  
Dans le contexte de mouvements politiques radicaux ou extrémistes, la théorisation de la violence comme outil légitime et moral peut mener à des abus, à une escalade de la violence, et même à des actes de terrorisme. Cette logique a été utilisée par certains mouvements anarchistes, révolutionnaires ou extrémistes pour justifier des actions violentes contre ceux qu'ils perçoivent comme leurs oppresseurs. Cela souligne le danger inhérent à la conception de la violence comme un outil légitime de changement social. Même si cette idée peut sembler séduisante dans le contexte de la lutte contre l'oppression et l'injustice, il est important de garder à l'esprit les conséquences potentiellement dévastatrices de la violence. Elle peut entraîner une escalade des tensions et des conflits, causer des souffrances et des dommages importants, et, dans les cas extrêmes, mener à des actes de terrorisme.
   
   
La lutte des classes est une violence positive, car c’est le moyen de faire pression sur les patrons pour obtenir une avancée sociale. Il faut regarder les formes de violence qui peuvent animer le prolétariat pour obtenir réponse à ces demandes légitimes.  
Certains mouvements extrémistes peuvent justifier leur recours à la violence en arguant qu'elle est nécessaire pour lutter contre l'oppression, ce qui peut mener à une escalade de la violence et à des situations extrêmement dangereuses. Cette logique peut être retrouvée dans certains courants de l'anarchisme, mais aussi dans divers autres mouvements radicaux ou extrémistes. L'anarchisme, en tant que philosophie politique, est en réalité assez diversifié et tous les anarchistes ne prônent pas l'usage de la violence. Certains courants, comme l'anarcho-pacifisme, rejettent explicitement la violence. D'autres peuvent voir la violence comme un mal nécessaire ou comme un outil de légitime défense contre l'oppression. Néanmoins, lorsque des individus ou des groupes adoptent la violence comme stratégie principale de résistance ou de révolte, cela peut mener à des actes de terrorisme ou à des situations de conflit violent et prolongé. Ces situations sont souvent contre-productives, provoquant des souffrances et des destructions massives, sans nécessairement apporter de réels progrès vers la justice ou l'égalité.
   
   
Cela permet de comprendre aussi l’une des impasses du terrorisme et des mouvements extrémistes qui part d’une légitimité de la violence au nom de l’oppression qui est la théorie de l’anarchisme. Puisque la violence est légitime, on va commencer à agresser les bourgeois ce qui justifie d’une moralité des actes. Du point de vue éthique et philosophie, à partir du moment l’on part de l’hypothèse de la violence comme morale on peut atteindre des extrêmes.
Le débat sur la morale et la violence est indissociable des discussions politiques et de notre compréhension de ce qu'est la politique. La politique est souvent considérée comme l'art de la négociation et du compromis, où l'objectif est de parvenir à une solution qui, bien qu'elle ne soit pas nécessairement parfaite pour tous les participants, est acceptable pour la majorité. Cependant, dans les situations une partie se sent systématiquement exclue ou opprimée, ou quand les mécanismes politiques traditionnels semblent incapables de résoudre les problèmes, certains peuvent se tourner vers la violence en la considérant comme une forme de communication politique ou comme le seul moyen de faire entendre leur voix. Le débat sur la moralité de la violence dans de tels contextes est complexe et souvent polarisé. Certains affirment que la violence est toujours immorale, quelles que soient les circonstances, tandis que d'autres peuvent la considérer comme un mal nécessaire ou même comme un acte moral dans certaines situations d'oppression.
Le débat sur la morale et la violence est traversé par la question de la politique et la façon dont on analyse la question du politique.


== René Girard et la violence sacrificielle ==
== René Girard (1923 - 2015) et la violence sacrificielle ==


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René Girard était un philosophe de formation né en 1923 et décéde le 4 novembre 2015<ref>Jean Birnbaum (2015). ''Mort de René Girard, anthropologue et théoricien du « désir mimétique »''. ''Le Monde.fr''. Retrieved 5 November 2015, from <nowiki>http://www.lemonde.fr/livres/article/2015/11/05/l-anthropologue-et-academicien-francais-rene-girard-est-mort_4803285_3260.html</nowiki>
René Girard était un philosophe, anthropologue, historien et critique littéraire français. Ses travaux ont principalement porté sur la violence, le désir mimétique et le sacrifice dans la culture humaine. Il a développé une théorie selon laquelle le désir humain est fondamentalement mimétique, c'est-à-dire que les gens désirent ce que les autres désirent, ce qui crée de la rivalité et peut mener à la violence. Selon Girard, cette violence mimétique est si destructrice qu'elle menace la survie de la communauté. Pour éviter l'autodestruction, les communautés trouvent un bouc émissaire à blâmer et à punir. Cette victime, qui est souvent choisie parce qu'elle est différente ou marginalisée, est ensuite sacrifiée pour restaurer l'harmonie au sein de la communauté. Cette théorie du bouc émissaire est une des contributions majeures de Girard à la compréhension de la violence dans les sociétés humaines. Girard a également développé la théorie du désir mimétique pour expliquer le rôle de la violence dans la religion. Selon lui, les religions sont des systèmes qui ont évolué pour canaliser et contrôler la violence mimétique. Le rôle central du sacrifice dans de nombreuses religions est, selon Girard, une manifestation de cette fonction de contrôle de la violence. Les idées de René Girard ont eu une grande influence dans de nombreux domaines, y compris la littérature, la philosophie, la théologie, la psychologie, l'anthropologie et les études de genre. Cependant, comme pour toutes les théories, elles ont aussi été critiquées et débattues.
</ref>. Il fut enseignant dans les plus grande universités américaines et est membre aussi de l’Académie française. Toute sa carrière a été portée sur des ouvrages de philosophie, de religion, d’éthique. Il est très intéressant, car il se situe dans la grande lignée des anthropologues structuralistes et il a travaillé toute sa vie sur la question de la violence et du sacré.
 
René Girard a consacré une grande partie de sa vie à explorer des questions de philosophie, de religion et d'éthique. Ses contributions ont largement influencé ces domaines, notamment par le biais de ses idées sur la violence, le désir mimétique et le sacrifice. Il a été professeur dans plusieurs universités prestigieuses aux États-Unis, dont l'Université Johns Hopkins, l'Université de Buffalo, et l'Université de Stanford. Il a été élu à l'Académie française en 2005, un honneur qui reconnaît son apport considérable à la pensée française. Il a écrit de nombreux livres influents, dont "La violence et le sacré" (1972), "Des choses cachées depuis la fondation du monde" (1978), et "Le bouc émissaire" (1982). Ces ouvrages présentent des perspectives innovantes sur la façon dont la violence est générée et gérée au sein des sociétés humaines. Girard s'est également intéressé à la manière dont les mécanismes de la violence et du sacrifice sont reflétés dans la littérature, analysant les œuvres de grands écrivains comme Dostoïevski, Proust, et Shakespeare pour illustrer ses théories. Son œuvre, bien que profonde et souvent complexe, offre des idées précieuses pour comprendre la nature de la violence et les moyens par lesquels les sociétés tentent de la contenir et de la gérer.
 
Les œuvres de René Girard, "La Violence et le sacré" (1972), "Le Bouc émissaire" (1982), et "Je vois Satan tomber comme l'éclair" (1999), où il traite du sacrifice, sont essentielles pour comprendre sa pensée. Dans "La Violence et le sacré", Girard développe sa théorie du désir mimétique. Selon lui, le désir humain n'est pas inné mais acquis. Les hommes désirent des objets, des statuts, des idées, non pour leur valeur intrinsèque, mais parce qu'ils sont désirés par d'autres. Ce mécanisme crée de l'envie, de la rivalité, et finalement de la violence au sein des sociétés. Pour prévenir l'escalade de la violence, les sociétés développent alors le mécanisme du bouc émissaire : la communauté se débarrasse de ses tensions internes en les projetant sur une personne ou un groupe, qui est ensuite sacrifié. Ce mécanisme est à la fois violent et sacré car il rétablit la paix sociale, et est donc considéré comme sacré par la communauté. Dans "Le Bouc émissaire", Girard pousse plus loin son analyse en montrant comment ce mécanisme est présent dans de nombreux mythes et textes religieux, et comment il structure les sociétés humaines. Girard ne justifie ni n'idéalise la violence ; il cherche à l'expliquer. En comprenant mieux les mécanismes qui génèrent la violence, il espère que nous pourrons trouver des moyens de la prévenir.
 
Pour René Girard, la violence doit être comprise comme un phénomène sociétal et non seulement individuel. Il a introduit le concept de "violence mimétique" pour expliquer comment la violence se propage dans une société. Selon lui, les êtres humains ont tendance à copier ou à "imiter" le comportement des autres, y compris le comportement violent. Ainsi, un acte violent peut en provoquer d'autres, créant une spirale de violence. Ce n'est donc pas simplement une question d'individus violents, mais d'un processus social de propagation de la violence. De plus, Girard a également théorisé le mécanisme du "bouc émissaire", selon lequel une société peut tenter de résoudre ses tensions internes en s'en prenant à un individu ou à un groupe, qui est alors persécuté. C'est une autre manière dont la violence peut se manifester de manière collective, et non seulement individuelle.
 
Le mimétisme se réfère à une tendance inhérente à l'être humain de copier les désirs, les comportements et les attitudes des autres. C'est un processus à la fois inconscient et automatique qui joue un rôle crucial dans l'apprentissage social et la formation de notre identité. Selon Girard, le mimétisme conduit à la rivalité et à la violence parce que les individus commencent à se disputer les mêmes désirs et objectifs. Par exemple, si deux personnes désirent la même chose, elles deviennent des rivaux et entrent en conflit. Dans la théorie du bouc émissaire de Girard, la violence mimétique est également importante. Lorsqu'un groupe est confronté à une escalade de violence mimétique, il cherche souvent un moyen de décharger cette violence sur un bouc émissaire - une personne ou un groupe qui est ensuite persécuté ou éliminé, rétablissant temporairement la paix dans la communauté. Cependant, puisque le mimétisme et le désir sont encore présents, le cycle de la violence est susceptible de recommencer. C'est une théorie qui offre un aperçu fascinant de la façon dont la violence peut se propager et se perpétuer dans une société, et comment les sociétés cherchent à gérer cette violence.
   
   
*La violence et le sacré<ref>La Violence et le Sacré (1990), René Girard, éd. Hachette, coll. Pluriel, 2004 (ISBN 2-01-278897-1)</ref>
La théorie de Girard soutient que toutes les cultures sont fondées sur un acte de violence originel, qui est souvent mythologisé et ritualisé à travers des pratiques sacrificielles. La violence, dans ce sens, n'est pas seulement une aberration ou une déviation de la norme sociale, mais elle est centrale dans la formation et le maintien des sociétés humaines. C'est cette violence qui, selon Girard, mène à l'émergence de la culture, des normes sociales et de l'ordre moral. En outre, Girard souligne l'importance du sacrifice comme moyen de canaliser et de contrôler la violence au sein de la société. Le sacrifice agit comme un mécanisme de défense contre l'escalade de la violence en dirigeant la violence collective vers un bouc émissaire, qui est souvent une figure marginale ou un étranger. Le bouc émissaire absorbe la violence collective, permettant à la société de maintenir la paix et l'ordre, du moins temporairement. Cette vision de la violence met en évidence la tension inhérente entre notre désir de vivre dans des sociétés pacifiques et notre dépendance historique envers la violence comme moyen de maintenir l'ordre social. C'est une tension qui, selon Girard, continue de se jouer dans les sociétés modernes.
*Le Bouc-émissaire<ref>Le Bouc émissaire, René Girard, éd. Grasset, 1982 (ISBN 2-253-03738-9)</ref>
*Le sacrifice<ref>Le sacrifice, René Girard, éd. Bibliothèque Nationale, 2003, (ISBN 2-717-72263-7)</ref>
   
   
Ce qui est intéressant est qu’il va relire tous les mythes fondateurs des sociétés pour s’interroger sur la question de la violence. Son hypothèse fondamentale est que l’acte individuel ne sert à rien en lui-même, on doit le prendre dans une question de système collectif.  
Girard soutient que la violence, en tant que partie intégrante de la structure sociale, est incorporée dans les mythes, les rituels et les pratiques sacrificielles de toutes les sociétés. Les mythes sont les histoires que les sociétés se racontent sur elles-mêmes, leurs origines et leurs valeurs. Ils servent souvent à légitimer l'ordre social existant et à expliquer pourquoi les choses sont comme elles sont. Dans de nombreux mythes, la violence joue un rôle crucial, souvent en tant que force destructive qui doit être maîtrisée pour le bien de la société. Les rituels, d'autre part, sont des actions symboliques répétitives qui servent à renforcer les normes et les valeurs sociales. Les rituels peuvent souvent impliquer des actes de violence symbolique, comme le sacrifice d'animaux ou, dans certaines sociétés, d'humains. Enfin, la pratique du sacrifice, comme mentionné précédemment, est un moyen de canaliser la violence collective. En se concentrant sur le bouc émissaire, la société est capable de libérer sa violence de manière contrôlée, évitant ainsi l'escalade de la violence non contrôlée. Dans toutes ces instances, la violence est non seulement acceptée, mais elle est même considérée comme nécessaire au maintien de l'ordre social. C'est une idée troublante, mais qui est essentielle pour comprendre comment les sociétés gèrent la violence inhérente à la condition humaine.  
   
   
Au fond tous les individus sont pris dans un processus mécanique de stratégies d’imitation, c’est ce qu’il appelle la théorie du mimétisme. Les actes individuels ne sont rien en soi et s’inscrivent dans un processus mimétique vis-à-vis de la société inscrite dans un destin collectif mimétique que cela soit dans les relations amoureuses autant que  dans les relations affectives. Ainsi la violence ne peut échapper à ce mimétisme.
La théorie du bouc émissaire de René Girard est un mécanisme par lequel une société canalise et gère sa violence inhérente. Selon cette théorie, lorsque les tensions et les conflits au sein d'une communauté atteignent un certain niveau, la communauté se tourne vers un individu ou un groupe spécifique (le bouc émissaire) sur lequel elle projette toute sa violence collective. Ce bouc émissaire est souvent quelqu'un qui est déjà marginalisé ou vu comme différent. L'acte d'accuser le bouc émissaire et de diriger la violence collective vers lui sert à restaurer l'équilibre et l'unité dans la communauté. Après l'acte, la paix est rétablie, mais cette paix est précaire car elle repose sur la violence dirigée vers le bouc émissaire. Girard a soutenu que cette pratique du bouc émissaire est au cœur de nombreuses cultures et religions, et qu'elle a joué un rôle clé dans la formation des sociétés humaines. Cependant, il a également noté que cette méthode de gestion de la violence a des limites, car elle n'aborde pas les causes profondes de la violence et peut en fait perpétuer le cycle de violence si les conditions sous-jacentes qui génèrent la violence ne sont pas résolues.  
   
   
Le premier point théorie très fort de Girard est de dire que toute société est constituée dans la violence, c’est un concept structurant. Dès lors toute société se doit de contrôler la violence. Souvent la violence est de l’ordre du mythe et de la pratique sacrificielle, elle se doit de contrôler sa violence. Le paradoxe est que les sociétés vont se construire avec de la violence et se doivent de la contrôler.
René Girard a beaucoup travaillé sur les mythes pour comprendre comment la violence est intégrée dans nos sociétés. Selon lui, les mythes ne sont pas simplement des récits, mais des représentations de la violence sociale et de la façon dont elle est gérée par les sociétés. Pour Girard, le mythe fonctionne en dissimulant la violence réelle qui se produit dans la société. Il réinterprète cette violence comme quelque chose de nécessaire, voire de sacré. En ce sens, le mythe opère comme une sorte de mécanisme de défense qui aide la société à gérer la réalité de sa propre violence. Prenons l'exemple du mythe sacrificiel, qui est commun à de nombreuses cultures. Dans ces mythes, un individu ou un animal est souvent sacrifié pour apaiser les dieux ou pour le bien de la communauté. Ce sacrifice est perçu comme nécessaire pour maintenir l'ordre social et prévenir une plus grande violence ou le chaos. La théorie du sacrifice de Girard suggère que ce type de mythe a une fonction importante dans la canalisation de la violence collective et la réintégration de cette violence dans l'ordre social. En d'autres termes, le mythe du sacrifice fournit un moyen d'exprimer la violence d'une manière contrôlée et symbolique qui maintient l'ordre social et prévient une escalade de violence. Cependant, Girard a également souligné que cette façon de gérer la violence a ses limites et peut perpétuer la violence en la justifiant et en la rendant acceptable. Par conséquent, il a plaidé pour une prise de conscience de la nature de la violence et de son rôle dans nos sociétés.
   
   
La violence est un espace du mythe, du rituel et de la pratique sacrificielle, c’est-à-dire que toute société doit avoir un rapport consensualiste historique dans sa narration avec la violence.  
Selon Girard, chaque société doit gérer sa propre violence inhérente, et cela se fait souvent par le biais de rituels et de mythes. Ces rituels et mythes servent de soupapes de sécurité pour la société, permettant une expression contrôlée de la violence qui pourrait autrement menacer de déchirer la structure sociale. Un des concepts clés dans la pensée de Girard est le "mécanisme du bouc émissaire". Dans de nombreuses sociétés, lorsqu'une tension ou un conflit atteint un certain niveau, la société se tourne vers un individu ou un groupe (le bouc émissaire) pour porter la faute. En persécutant le bouc émissaire, la société décharge sa tension violente d'une manière qui préserve l'ordre social. Cependant, bien que cette "violence contrôlée" puisse temporairement apaiser les tensions, elle ne résout pas les conflits sous-jacents. Au contraire, elle peut perpétuer un cycle de violence en justifiant l'agression contre le bouc émissaire. Cette tension non résolue peut ressurgir plus tard, nécessitant un autre bouc émissaire pour rétablir temporairement la paix. Pour Girard, comprendre ce processus est crucial pour rompre le cycle de la violence et chercher des moyens plus pacifiques de résoudre les conflits.
   
   
La violence sociétale va pouvoir se réguler dans la théorie du bouc émissaire. Toute société selon René Girard construit d‘abord un rapport spécifique à la violence non pas pour l’interdire, mais pour l’encadrer et la ritualiser. Il ne s’agit pas d’arrêter la violence, mais de la structurer et de la canaliser.  
René Girard propose une compréhension révolutionnaire du sacrifice en tant que mécanisme social et rituel religieux. Dans cette vision, le sacrifice est une sorte de technique de gestion de la violence communautaire. Dans le cadre de la théorie du bouc émissaire de Girard, le sacrifice est un moyen de diriger la violence inhérente à la communauté vers une cible spécifique (la victime sacrificielle) afin d'éviter que cette violence ne se propage et n'engendre un conflit généralisé. L'acte de sacrifice est souvent enveloppé dans le langage et la symbolique religieuse, donnant l'impression que c'est un acte demandé par les dieux pour maintenir l'ordre du monde. En réalité, c'est un acte sociétal visant à maintenir l'ordre interne de la communauté. Les individus de la communauté peuvent ne pas être conscients du véritable rôle joué par la violence dans ce processus.  
   
   
Dès lors, la cause la plus importante est de travailler sur les mythes,puisque le mythe est au fondement de notre société. Le premier travail de philosophe est un travail d’analyse culturelle des mythes pour les déchiffrer non pas comme un simple récit, mais pour comprendre la structure signifiante mimétique de la violence c’est-à-dire comment le mythe distribue et va construire la violence comme un phénomène qui va s’incorporer à la société.En les déchiffrant on voit apparaitre au fond les notions fondamentales qui permettant de comprendre comment émerge cette théorie du sacrifice nécessaire pour calmer les dieux.
La théorie de Girard propose que la violence sacrificielle est une forme de violence substitutive. Elle est mise en œuvre pour apaiser les tensions et la violence latente au sein d'une communauté, en dirigeant cette violence vers une victime sacrifiée, souvent appelée le "bouc émissaire". Dans ce processus, la violence intrinsèque de la communauté est transférée à cette victime, qui en porte la charge et est ultimement détruite ou exclue de la communauté. Cette violence sacrifiée est souvent présentée comme un acte nécessaire et juste, exigé par une divinité ou pour le bien de la communauté. Cette pratique permet d'évacuer la violence collective sans déclencher de conflit interne plus large. En identifiant un bouc émissaire, la communauté redirige sa violence et ses tensions internes, prévenant ainsi l'émergence de conflits destructeurs.  
   
   
L’hypothèse de Girard est de dire que toute société doit conjurer la violence en élaborant des mythes qui deviennent eux-mêmes des rituels pour exorciser la violence tout en s’aident ou en encourageant une violence contrôlée. Puisque la violence est constitutive de la société, il faut la contrôler et la canaliser, mais aussi encourager par moment de la violence contrôlée. La violence contrôlée fait fonctionner le système sociétal.
Selon la théorie de René Girard, le sacrifice joue un rôle fondamental dans la gestion des tensions et des conflits internes à une société. Par le biais du sacrifice, la violence et les frustrations accumulées au sein du groupe sont transférées vers une victime substitutive, le bouc émissaire, qui est alors sacrifiée pour rétablir l'harmonie et la paix. La désignation du bouc émissaire est un processus collectif qui permet d'éviter que la violence ne se déchaîne à l'intérieur du groupe, ce qui pourrait menacer sa cohésion et même sa survie. Le sacrifice devient ainsi un rituel structurant qui permet de gérer la violence intrinsèque à la société. Ce rituel de sacrifice revêt une symbolique puissante. Il représente l'expiation collective des fautes, des tensions et des conflits, et la restauration de l'ordre social. Cependant, il est important de noter que ce processus repose sur une certaine forme d'injustice, puisque le bouc émissaire est souvent choisi arbitrairement et est sacrifié pour des fautes qu'il n'a pas nécessairement commises.  
   
   
Il faut détourner la violence propre à la société dans un système de société parce que le système de sacrifice fait cohésion. La théorie est que le détournement implique que le fidèle ne connaît pas le rôle joué par la violence. La théologie du sacrifice est que les dieux réclament des victimes,c’est pour satisfaire Dieu permettant de retourner à un ordre normal.  
La théorie du bouc émissaire de René Girard se base sur cette idée de transfert de la violence collective vers un individu ou un groupe spécifique, choisi comme victime sacrificielle. Ce bouc émissaire est chargé symboliquement de tous les péchés, les tensions et les frustrations de la communauté, et son sacrifice permet de restaurer la paix et l'harmonie au sein du groupe. Ce processus permet d'éviter l'escalade de la violence au sein de la société. En effet, si la violence collective n'était pas canalisée de cette manière, elle pourrait conduire à des conflits plus graves, voire à l'autodestruction du groupe. C'est ce qui donne au sacrifice sa fonction régulatrice et apaisante.
   
   
La violence sacrificielle peut donc être entendue soit comme une violence de rechange ou une violence de substitution. On substitue une forme de violence acceptée par l’ensemble des acteurs au nom du bonheur collectif, c’est un transfert symbolique de la charge de la violence. Ce qui est en jeu est le transfert de la violence collective par un jeu collectif de redésignassions du coupable ou du fautif.  
Selon la théorie de René Girard, le bouc émissaire est une figure fondamentale dans toutes les sociétés, dans la mesure où il joue un rôle essentiel dans la régulation de la violence collective. En transférant cette violence sur le bouc émissaire, la société peut éviter une escalade de la violence qui pourrait menacer sa survie. Le bouc émissaire est donc sacrifié pour le bien de la collectivité. Cependant, ce mécanisme repose sur un paradoxe : pour contrôler la violence, la société doit elle-même recourir à la violence, sous une forme ritualisée et symbolique. Cette violence est justifiée par le mythe du bouc émissaire, qui est accusé de tous les maux de la société et sacrifié pour apaiser les tensions collectives. En outre, la désignation du bouc émissaire ne repose pas sur une rationalité objective. L'individu ou le groupe choisi comme bouc émissaire est souvent désigné de manière arbitraire, sans véritable preuve de sa culpabilité. Cette désignation sert avant tout à canaliser la violence collective, plutôt qu'à rendre justice. Cette théorie a des implications importantes pour notre compréhension des phénomènes sociaux tels que la stigmatisation, l'exclusion et la violence collective. Elle suggère également que toute tentative de créer une société totalement non-violente pourrait être vouée à l'échec, car la violence joue un rôle fondamental dans la régulation des relations sociales.  
   
   
Le sacrifice à une fonction sociale importante qui est d’apaiser les conflits internes à la société, il désigne un substitut, il désigne une tierce personne qui apaise les conflits. Le sacrifie permet d’apaiser les conflits internes à toute société d’où l’utilité de rendre le sacrifice constant calqué sur des rites symboliques très forts.  
Selon Girard, le rite du bouc émissaire permet à la société de maintenir ou de restaurer sa cohésion. Dans les moments de crise, quand la tension et la violence augmentent, la désignation et le sacrifice d'un bouc émissaire fournissent une forme de résolution collective. La violence est canalisée sur une cible précise, évitant ainsi son étalement anarchique dans la société, ce qui pourrait menacer son unité et sa stabilité. Par le sacrifice du bouc émissaire, la société espère rétablir l'ordre et l'harmonie, réduire la tension et mettre fin au conflit. En fait, la société espère un retour à la normale, à un état antérieur à la crise. Le sacrifice du bouc émissaire est alors perçu comme un moyen d'apaiser les dieux, de purifier la communauté et d'effacer la faute qui a provoqué la crise. La violence est ainsi ritualisée et contrôlée, transformée en un acte bénéfique pour la communauté.
Le sacrifice qui restaure l’état de pureté est une sorte de renaissance perpétuelle qui est le concept de bouc émissaire. C’est-à-dire que c’est la théorie ou la violence s’expulse de la violence, il doit payer et expier le péché des autres,il est sacrifié au nom de tous les autres. On limite la violence au maximum, mais on va y recourir à l’extrémité pour éviter une violence plus grand, c’est un transfert de charge.
Le paradoxe est que du coup, la violence de la société s’expulse encore par de la violence. Il ne peut pas avoir de société sans mythe qui est à l’essence même de la société, il ne peut y avoir de société sans espace mythique parce qu’il est au fondement même de la construction de ce rapport entre les individus et de la violence. De plus dans toute société il y a la capacité de production de bouc émissaire. Ainsi toute société produit des boucs émissaires, tout ceci se fait sans rationalité de jugement, on ne va pas se poser la question de la véracité de l’action néfaste du bouc émissaire.  
Le bénéfice est que le seul intérêt du dispositif et la perception selon laquelle la société gagne et a gagné quelque chose en particulier, elle gagne une forme de cohésion autour d’un objectif commun.


= État et violence politique =
= État et violence politique =
L'État et la violence politique entretiennent une relation complexe. En général, l'État détient le monopole de la violence légitime dans une société, une notion introduite par le sociologue Max Weber. Cela signifie que seul l'État a le droit d'utiliser la force physique pour maintenir l'ordre, appliquer la loi et défendre la nation contre les menaces extérieures. Cependant, la violence politique va au-delà de l'usage légitime de la force par l'État. Elle englobe également les actes de violence perpétrés par des acteurs non étatiques, comme les groupes terroristes ou rebelles, qui cherchent à atteindre leurs objectifs politiques.
La violence politique peut également comprendre la violence étatique illégitime, comme la répression, la torture, les disparitions forcées ou les exécutions extrajudiciaires. Ces actes sont généralement commis par des régimes autoritaires pour maintenir leur pouvoir, mais peuvent également se produire dans des démocraties, généralement lors de situations de crise. De plus, l'État peut également être le cible de la violence politique, comme dans les cas de coups d'État, de révolutions ou d'insurrections. Dans ces situations, des groupes d'individus tentent de renverser le gouvernement en place par la force.
Enfin, il est important de mentionner que la violence politique n'est pas toujours physique. Elle peut également être structurelle, comme lorsque certaines personnes ou groupes sont systématiquement exclus du pouvoir politique, économique ou social. De même, la violence symbolique, telle que la propagande ou le discours de haine, peut également être considérée comme une forme de violence politique.


== Violence politique et violence extrême ==
== Violence politique et violence extrême ==
Quatre concepts sont employés de nos jours :
Il existe divers concepts pour explorer la question de la violence, notamment en ce qui concerne la violence dans un contexte politique. Les quatre principaux concepts sont :
*le concept classique de violence politique ;
 
*le concept de violence infrapolitique ;
* La '''violence politique classique''' se réfère à l'utilisation de la force pour atteindre un objectif politique. Il peut s'agir de violence étatique, comme la répression ou la guerre, ou de violence non étatique, comme le terrorisme ou la rébellion armée.
*le concept de violence métapolitique ;
* La '''violence infrapolitique''' concerne les actes de violence qui sont politiques par nature, mais qui ne sont pas nécessairement reconnus comme tels. Cela peut inclure des formes de violence structurelle, comme l'exclusion systématique de certains groupes de la vie politique, économique ou sociale.
*le concept de violence extrême vs le barbare.
* La '''violence métapolitique''' est une notion plus complexe qui se réfère à la violence qui dépasse le domaine politique traditionnel. Il peut s'agir d'actes de violence qui sont motivés par des croyances ou des idéologies qui transcendent la politique traditionnelle, comme le fondamentalisme religieux ou le fanatisme idéologique.
* La '''violence extrême''', enfin, fait référence à des actes de violence qui sont si atroces et dévastateurs qu'ils dépassent notre compréhension habituelle de ce que constitue la violence. Cela peut inclure des actes tels que le génocide, les crimes contre l'humanité ou les formes les plus brutales de terrorisme. Le terme "barbare" est souvent utilisé pour désigner ceux qui commettent de tels actes, suggérant qu'ils ont transgressé les limites de ce qui est considéré comme un comportement acceptable ou civilisé.
 
Ces concepts ne sont pas mutuellement exclusifs et peuvent se chevaucher dans de nombreux cas. Par exemple, un acte de violence politique peut aussi être une forme de violence métapolitique s'il est motivé par une idéologie extrémiste.
 
=== Concept classique de violence politique ===
=== Concept classique de violence politique ===
Le concept classique de la violence politique instaure un lien entre l’usage de la violence et la puissance publique et politique. Il peut y avoir un rapport entre l’usage de la violence et la puissance publique et politique. Il n’y  a pas d’interrogation sur la légitimité de la violence, elle renvoie à la relation au politique qui s’exerce dans un cadre qui soit légitime ou illégitime.
La violence politique en tant que concept classique est intrinsèquement liée à la notion de pouvoir et d'autorité. Elle peut être employée soit par un État ou une puissance publique dans le but d'exercer, de maintenir ou d'étendre leur pouvoir, soit par des groupes ou des individus cherchant à contester ce pouvoir. Dans ce contexte, la violence peut prendre plusieurs formes, allant de la violence physique directe, telle que la guerre ou la répression, à la violence structurelle ou systémique, telle que la discrimination institutionnalisée ou l'oppression économique. La question de la légitimité de la violence politique est complexe et peut varier considérablement en fonction du contexte et de la perspective. Par exemple, une action qui peut être considérée comme une violence politique illégitime par certains (comme le terrorisme ou la rébellion armée) peut être vue par d'autres comme une résistance légitime à l'oppression. La violence politique est donc une forme complexe de violence qui implique une multitude de facteurs, y compris le pouvoir, l'autorité, la résistance, l'oppression et la légitimité.
   
   
Deux arguments évoqués pour justifier l’usage de la violence :
Les deux arguments suivants sont deux justifications courantes de l'utilisation de la violence, souvent articulées dans le cadre de la politique ou des conflits armés :


:1) La violence comme principe d’action défensive  
# La violence comme principe d'action défensive : Cet argument soutient que l'usage de la violence est justifiable s'il sert à protéger un individu, un groupe ou un État contre une menace imminente ou réelle. On peut retrouver cette notion dans le principe de légitime défense. Cela peut également s'appliquer à l'usage de la force par l'État pour maintenir l'ordre public, prévenir la criminalité ou protéger la sécurité nationale. Dans ce cas, la question clé est souvent de déterminer jusqu'à quel point l'utilisation de la violence est proportionnée à la menace, et si d'autres moyens moins violents auraient pu être utilisés à la place.
C’est l’idée selon laquelle l’usage de la force serait légitime dans la mesure où le bien est défendu :
# La violence au service d'une cause juste: Cet argument justifie l'utilisation de la violence en tant que moyen d'atteindre un objectif plus large ou plus noble. Cela peut inclure la lutte pour l'égalité sociale, la libération nationale, ou la défense de certaines valeurs ou croyances. Dans ce cas, la violence est souvent perçue comme un mal nécessaire, justifiée par la gravité de l'injustice à combattre ou l'importance de l'objectif à atteindre. Cette approche peut mener à des situations où les moyens (la violence) sont justifiés par la fin (la cause juste).
*soit l’État peut se tromper et il n’est pas infaillible ;
 
*soit l’État ne se trompe jamais et à ce moment-là il n’avait pas de raisons de remettre en cause la légitimité de sa violence.
La violence politique dans le but de défendre l'état de droit est une question complexe qui suscite de nombreux débats. L'utilisation de la force par l'État, par exemple à travers la police ou l'armée, est généralement justifiée par la nécessité de maintenir l'ordre public et la sécurité. Cependant, cette force doit toujours être utilisée de manière proportionnée et conforme aux principes de l'état de droit. L'un des défis majeurs auxquels sont confrontés les acteurs publics est de trouver le juste équilibre entre l'utilisation de la force pour maintenir l'ordre et le respect des libertés et droits fondamentaux des citoyens. Une utilisation excessive de la force peut non seulement violer ces droits, mais aussi provoquer davantage de mécontentement et de résistance de la part de la population. Par ailleurs, la violence de l'État peut également générer un cycle de violence : des actes de violence commis par l'État peuvent entraîner des représailles ou des actes de résistance violents de la part de ceux qui se sentent oppressés, ce qui peut à son tour conduire à une escalade de la violence. Ainsi, même si la violence peut sembler être un outil efficace pour maintenir l'ordre à court terme, elle peut aussi s'avérer contre-productive et déstabilisante à long terme. C'est pourquoi il est crucial que les acteurs publics cherchent toujours à utiliser des moyens non violents pour résoudre les conflits et les tensions chaque fois que cela est possible.  
:2) La violence au service d’une cause juste  
Il s’agit d’un mode de légitimation qui a toujours existé
*légitimité des intentions guerrières ou des actions violentes par des argumentations idéalistes ;
*le rapport à la religion et à la morale sont le plus évoqués.  
Dans ces considération et cette conception de la violence politique il y a la question du but de la violence dans le but de défendre l’état de droit mais avec un danger du côté de acteurs publiques qui est que  si on est trop violent il est probable de remobiliser l’opposition.  
La question symbolique et de savoir jusqu’où il est possible d’aller, la bavure qui est un acte de violence qui aboutit à une chose grave qui coûte très chère sur le plan symbolique et peut être des lors  dénoncé comme un acte barbarie et de brutalité.  
Au-delà d’un certain seuil la violence répressive  suscite du rejet expliquant pourquoi lorsque les politiques usent de la violence ils doivent l’argumenter et l’expliciter. La question de la violence politique passe souvent par la construction d’un discours. Il faut fabriquer une rationalité de jugement de l’usage de la violence.
La violence au service d’une cause juste est une interprétation morale de la violence. Le droit de la morale a un débouché important dans les années 1980 qui est la droit d’ingérence international.-
Le droit d’ingérence international a été une invention assez curieuse qui fut presque contre nature du droit international. Si des populations sont meurtries et victimes de génocides, la communauté internationale doit faire usage d’un droit d’ingérence international au nom du droit humain. Ainsi le droit humanitaire justifie l’intervention militaire dans certains pays. Dès lors l’intervention militaire peut se justifier au nom de la paix.
   
   
La question symbolique et de savoir jusqu’où il est possible d’aller. L'impact de la "bavure" - une action excessive, illégitime ou cruelle, généralement menée par les forces de l'ordre - qui peut entraîner de graves conséquences non seulement pour la personne directement concernée, mais aussi sur le plan symbolique et sociopolitique.
La notion de "bavure" souligne la frontière entre l'usage justifié de la force par l'État dans l'exercice de ses fonctions et ce qui est perçu comme une transgression de cette légitimité. Les conséquences d'une telle transgression peuvent être profondes et multiples :
# Sur le plan individuel, les victimes de bavures peuvent subir des préjudices physiques et psychologiques graves, et dans les cas les plus extrêmes, ces incidents peuvent entraîner la mort.
# Sur le plan symbolique, une bavure peut éroder la confiance du public envers les institutions de l'État et sa perception de leur légitimité. Cela peut engendrer des sentiments de méfiance et de peur, mais aussi de colère et de révolte, potentiellement menant à des mouvements de protestation ou des troubles civils.
# Sur le plan sociopolitique, les bavures peuvent susciter des débats publics intenses sur la gouvernance, les droits de l'homme, l'État de droit, et la responsabilité des institutions et des individus. Cela peut aussi engendrer des appels à des réformes structurelles.
Par conséquent, les "bavures" sont loin d'être des incidents isolés : elles sont profondément imbriquées dans le tissu sociopolitique et peuvent avoir des implications importantes pour la stabilité et la légitimité de l'État.
L'usage de la violence par le pouvoir politique nécessite une justification, souvent formulée à travers un discours public. Cette rationalisation est essentielle pour maintenir la légitimité de l'État aux yeux de la population. Elle est généralement basée sur des principes de légalité, de nécessité et de proportionnalité.
# Légalité : L'action violente doit être conforme à la loi en vigueur. Il s'agit du principe de base pour justifier l'usage de la violence par l'État. Toutefois, il convient de noter que la légalité seule n'est pas toujours suffisante pour assurer la légitimité, en particulier si les lois en question sont perçues comme injustes ou abusives.
# Nécessité : L'usage de la violence doit être présenté comme nécessaire pour atteindre un certain objectif, généralement lié à la préservation de l'ordre public, de la sécurité nationale, ou du bien-être général de la population. Le concept de nécessité est souvent invoqué dans les situations de crise ou de menace imminente.
# Proportionnalité : La violence utilisée doit être proportionnelle à la menace ou à l'infraction. Ce principe vise à éviter une répression excessive et arbitraire.
En plus de ces principes, l'État doit également faire preuve de transparence et d'accountabilité en matière d'usage de la violence. Cela implique une communication claire sur les raisons de l'usage de la violence, ainsi qu'une mise en place de mécanismes de contrôle et de responsabilisation pour prévenir les abus. Cela étant dit, il est important de rappeler que même avec une rationalisation bien construite, l'usage de la violence par l'État peut toujours susciter des contestations et des débats, en particulier si elle est perçue comme étant disproportionnée, injuste, ou discriminatoire.
Dans certains cas, la violence peut être considérée comme étant au service d'une cause juste, en particulier quand elle est utilisée pour résister à l'oppression, défendre les droits de l'homme, ou protéger les plus vulnérables. C'est ce que l'on appelle souvent la théorie de la "guerre juste" ou de la "violence justifiée". Cette approche se fonde sur l'idée que la violence peut être moralement acceptable si elle vise à atteindre un objectif plus important, comme la justice sociale, la liberté, ou la paix. Par exemple, beaucoup considèrent que l'utilisation de la violence par les mouvements de résistance pendant la Seconde Guerre mondiale était justifiée face à l'oppression nazie. Cependant, cette perspective est aussi sujette à controverse. D'une part, il y a le risque que le concept de "violence justifiée" soit utilisé pour légitimer des actes de violence abusifs ou disproportionnés. D'autre part, certains philosophes et penseurs politiques soutiennent que la violence, même au service d'une cause juste, reste fondamentalement immorale et destructrice.
Le "droit d'ingérence" est une notion qui a émergé dans les années 1980 et qui fait référence à l'idée que la communauté internationale a le droit - voire le devoir - d'intervenir dans les affaires internes d'un État pour protéger les droits de l'homme et prévenir les catastrophes humanitaires. Cela constitue une dérogation au principe traditionnel de non-ingérence, qui fait de la souveraineté de l'État une norme absolue du droit international. Cette évolution est principalement due à une prise de conscience croissante des souffrances humaines causées par les conflits internes et les régimes oppressifs. Cependant, comme la notion de "violence juste", le droit d'ingérence est aussi une notion controversée. Certains affirment qu'il peut être utilisé comme prétexte pour des interventions militaires motivées par des intérêts géopolitiques plutôt que par des considérations humanitaires. D'autres soutiennent que l'intervention internationale peut parfois aggraver les conflits qu'elle cherche à résoudre. Malgré ces débats, le droit d'ingérence a influencé la manière dont la communauté internationale aborde les crises humanitaires et a contribué à la création de la notion de "responsabilité de protéger", adoptée par les Nations Unies en 2005, qui stipule que si un État ne peut pas ou ne veut pas protéger sa population contre des atrocités de masse, il revient à la communauté internationale de le faire.
Le droit d'ingérence humanitaire représente un changement significatif dans la philosophie du droit international. Traditionnellement, le droit international est fondé sur le respect de la souveraineté des États, ce qui signifie que chaque État a le droit de contrôler ses propres affaires intérieures sans ingérence extérieure. Cependant, le droit d'ingérence humanitaire remet en question cette idée, affirmant que la communauté internationale a le droit et même le devoir d'intervenir dans les affaires intérieures d'un État lorsque les droits de l'homme sont gravement violés, comme dans les cas de génocide, de crimes de guerre ou de crimes contre l'humanité. C'est donc une notion controversée. D'un côté, elle est louée pour sa capacité à protéger les individus des violations massives des droits de l'homme. De l'autre, elle est critiquée pour son potentiel à être utilisée comme prétexte pour des interventions militaires motivées par des intérêts géopolitiques plutôt que par de véritables préoccupations humanitaires. De plus, il existe une crainte que l'ingérence humanitaire puisse aggraver les conflits qu'elle cherche à résoudre. Enfin, l'application du droit d'ingérence humanitaire pose des défis pratiques. Qui décide quand une intervention est nécessaire? Comment s'assurer que l'intervention est menée de manière éthique et efficace? Ces questions continuent d'être débattues par les juristes, les politologues et les acteurs internationaux.
=== Le concept de violence infrapolitique ===  
=== Le concept de violence infrapolitique ===  
Il rentre en relation avec les mutations économiques et politiques dans la planète des années 1980, c’est-à-dire dans l’affaiblissement de l’État-Nation avec une violence politique privatisé donnant la possibilité à des groupes armés qui vont se constituer en système de forces pour user de la violence pour avoir un certain nombre de prérogatives territoriales, spatiales et économiques. Ce sont des violences infrapolitique qui articule de façon compliquée la légalité et illégalité qui ne permet plus de démêler ce qui relèverait d’enjeux politique réelle de ce qui relèverait d’une criminalité organisé.
La violence infrapolitique se réfère généralement à la violence qui est exercée en dehors des structures traditionnelles du pouvoir étatique. Elle est souvent liée à des acteurs non étatiques, tels que des groupes armés, des organisations criminelles ou des milices privées, qui exercent leur propre forme de pouvoir et de contrôle, parfois à l'intérieur des frontières d'un État-nation, mais en dehors du contrôle direct de ce dernier. Cette forme de violence peut se manifester de différentes façons, allant du crime organisé et du trafic de drogues à la violence politique et ethnique. Elle est souvent liée à des situations de faiblesse ou de défaillance de l'État, où le pouvoir étatique est insuffisant pour maintenir l'ordre et garantir la sécurité. La violence infrapolitique est un phénomène complexe et multiforme qui pose de nombreux défis en termes de sécurité, de gouvernance et de droits de l'homme. Sa prise en compte est essentielle pour comprendre les dynamiques contemporaines de la violence et du pouvoir. Dans les années 1980 et au-delà, avec la mondialisation et les changements économiques et politiques, on a vu une augmentation de la violence infrapolitique dans de nombreux contextes, alors que des acteurs non étatiques ont acquis une influence croissante. Cette tendance a soulevé de nouvelles questions sur la façon dont nous comprenons la violence, le pouvoir et le rôle de l'État.
 
Cela  renvoie à un concept de privatisation de ressources et articule de manière conjointe légalité et illégalité dans des pays ou des régions défavorisées il y a des systèmes ou l’État-Nations n’a plus le pouvoir de contrôler le territoire.
La violence infrapolitique peut brouiller les frontières entre ce qui est considéré comme politique et ce qui est considéré comme criminel. Dans de nombreux cas, les acteurs qui exercent cette violence peuvent naviguer entre la légalité et l'illégalité, utilisant parfois des mécanismes politiques pour renforcer leur pouvoir tout en se livrant à des activités illégales. Ces acteurs peuvent, par exemple, participer à des élections ou à des processus politiques formels tout en utilisant la violence pour consolider leur pouvoir. Ils peuvent également s'engager dans des activités économiques légales tout en profitant de marchés illicites. De plus, ils peuvent utiliser des tactiques de violence et d'intimidation pour contrôler les populations locales, tout en prétendant offrir une forme de "gouvernance" ou de protection. Cette complexité rend souvent difficile la distinction entre la violence politique et la criminalité organisée. Cela peut également rendre plus difficile pour les États et les institutions internationales de répondre efficacement à ces formes de violence, car les approches traditionnelles de maintien de l'ordre ou de résolution de conflits peuvent ne pas être suffisamment adaptées à ces défis.
 
Dans certaines régions où l'État-nation est faible ou absent, divers groupes peuvent se livrer à des formes de violence infrapolitique pour contrôler les ressources et établir leur propre autorité. Ces groupes peuvent se livrer à diverses activités, allant du contrôle du trafic de drogues ou d'autres marchés illégaux à la fourniture de services sociaux dans les zones négligées par l'État. Parfois, ces groupes peuvent même créer des formes de gouvernance parallèles, remplissant des fonctions normalement assumées par l'État, comme l'application de la loi et l'arbitrage des litiges. Ces formes de gouvernance peuvent être basées sur une combinaison de force, de corruption, d'intimidation, de contrôle économique et parfois de légitimité sociale. Bien que ces groupes puissent parfois offrir une certaine stabilité ou des services dans les régions où ils opèrent, ils contribuent souvent à l'instabilité à long terme en sapant l'État-nation et en perpétuant des cycles de violence et de criminalité. De plus, ils peuvent exploiter et opprimer les populations locales, créant des conditions de vie difficiles pour de nombreuses personnes.


=== Concept de violence métapolitique ===
=== Concept de violence métapolitique ===
Le concept de violence métapolitique signifie que la violence dépasse les frontières du politique de l’État-Nation ou qui subordonne le politique à des nouveaux enjeux stratégiques. Ce sont par exemple la violence politique ou religieuse, ou encore des violences qui surgissent de la modernité,c’est-à-dire de la  forme de violence métapolitique  au nom d’un intérêt général.
Le concept de violence métapolitique désigne la violence qui dépasse les limites traditionnelles du politique, qui n'est plus uniquement (ou principalement) liée à l'État-nation, mais qui est inscrite dans des dynamiques globales, transnationales et transculturelles. Ces formes de violence peuvent être motivées par diverses causes, allant des idéologies religieuses ou politiques radicales aux réactions à la mondialisation, en passant par le désir d'établir une nouvelle forme d'ordre social ou politique. Il s'agit souvent d'actes de violence extrêmes commis au nom d'une cause plus large, telle que la défense de l'identité religieuse ou culturelle, la lutte contre l'injustice perçue ou la promotion d'une vision particulière de la justice sociale ou politique. Les groupes terroristes internationaux, par exemple, pourraient être considérés comme des acteurs de violence métapolitique. Cela pose des défis majeurs en termes de gouvernance et de sécurité, car ces formes de violence échappent souvent au contrôle des États-nations et nécessitent une réponse coordonnée à l'échelle internationale.
Origine de la violence métapolitique :
*critique de la surmodernité des sociétés avancées
*la critique de la laïcisation politique et de la perte de lien avec le spirituel
*ensemble des frustrations nées de la modernité
   
   
Plusieurs facteurs ont été identifiés comme sources possibles de violence métapolitique.
# Critique de la surmodernité des sociétés avancées : Cela peut inclure des réactions à la vitesse du changement technologique, à l'aliénation et à la désillusion causées par la mondialisation et à la rupture des liens sociaux traditionnels. La violence métapolitique peut être un moyen pour certains groupes de s'opposer à ce qu'ils considèrent comme les aspects négatifs de la modernité et d'affirmer leur propre identité culturelle, sociale ou religieuse.
# Critique de la laïcisation politique et de la perte de lien avec le spirituel : La sécularisation et l'érosion de la foi religieuse dans de nombreuses sociétés modernes peuvent être perçues par certains comme une menace pour leur identité et leurs valeurs. Dans ce contexte, la violence métapolitique peut être utilisée comme un moyen de défendre et de réaffirmer l'importance de la religion et du spirituel dans la vie publique et personnelle.
# Ensemble des frustrations nées de la modernité : Cela peut inclure des sentiments d'insécurité économique, d'injustice sociale, d'exclusion politique ou de marginalisation culturelle. Ces frustrations peuvent être exacerbées par la perception que les bénéfices de la modernité sont inégalement répartis, ce qui peut conduire à des formes de violence métapolitique visant à attirer l'attention sur ces inégalités et à les combattre.
Ces facteurs sont souvent interconnectés et peuvent se renforcer mutuellement, créant un terreau fertile pour les formes de violence qui vont au-delà des frontières traditionnelles de l'État-nation et du politique.
=== Violence extrême vs barbarie ===
=== Violence extrême vs barbarie ===
La violence extrême est la violence qui a perdue tous les modes classique de régulation qui est souvent gratuite et qui aboutit à une perte de rationalité absolue. C’est tout ce qui est de l’ordre de la violence gratuite spécifique comme le viole des femmes comme armes de guerres dans certains guerres africaines, mais aussi les guerres de purification ethnique, c’est détruire l’autre de façon absolue. Cela signifie le dérèglement des formes classique de la violence, elle est qualifiée d’extrême parce qu’elle est qualifiée de violence au-delà de la violence, c’est une violence qui n’aurait plus aucun rituel et qui est une cruauté extrême.
La violence extrême est une forme de violence qui échappe à tout contrôle, normes sociales, lois ou principes moraux généralement acceptés. Elle est souvent perçue comme étant de nature "gratuite", c'est-à-dire commise sans raison apparente, sans provocation préalable, et dépassant largement ce qui serait nécessaire pour atteindre un objectif donné. C'est une violence qui semble aller au-delà de toute justification ou explication rationnelle. La "barbarie" est un terme qui est souvent utilisé pour décrire de telles formes de violence extrême. C'est un terme qui a une connotation négative forte, et qui est souvent utilisé pour décrire des actes de violence qui sont perçus comme étant d'une cruauté, d'une brutalité ou d'une inhumanité exceptionnelles. Il est souvent utilisé pour décrire des actes de violence qui sont commis en violation flagrante des normes sociales, morales ou juridiques généralement acceptées. Les termes "violence extrême" et "barbarie" sont souvent chargés d'une grande émotion et peuvent être utilisés de manière polémique ou partisane. Il est également important de noter que la perception de ce qui constitue une "violence extrême" ou une "barbarie" peut varier en fonction du contexte culturel, historique ou individuel.


*exponentialité des violences physiques sur les personnes  
La violence extrême et la barbarie sont souvent manifestes dans des conflits armés et des guerres. Elles peuvent prendre plusieurs formes, notamment des violences sexuelles, le génocide ou l'épuration ethnique, et les massacres de civils, entre autres. Les violences sexuelles, dont le viol, sont souvent utilisées comme armes de guerre pour humilier, terrifier et dominer la population ennemie. Elles ont des conséquences dévastatrices pour les victimes et pour la société dans son ensemble, provoquant une stigmatisation durable et un traumatisme profond. L'épuration ethnique ou les guerres de purification ethnique sont une autre forme de violence extrême. Elles se caractérisent par des actes commis dans le but d'éliminer complètement un groupe ethnique, religieux ou racial spécifique d'une zone géographique. Ces actes peuvent comprendre le meurtre, le déplacement forcé, la destruction de biens et d'autres formes de violence physique. Ces formes de violence extrême ne sont pas seulement des violations flagrantes des droits de l'homme, elles constituent aussi des crimes de guerre et/ou des crimes contre l'humanité selon le droit international. Ces comportements sont condamnés par la communauté internationale et peuvent faire l'objet de poursuites par les tribunaux internationaux, comme la Cour pénale internationale.
*processus de régression par rapport au processus civilisation
 
*dérégulation des lois et principes de la guerre
Cela signifie le dérèglement des formes classique de la violence. Cette violence est qualifiée d’extrême parce qu’elle est qualifiée de violence au-delà de la violence, c’est une violence qui n’aurait plus aucun rituel et qui est une cruauté extrême.
*désinstitutionalisation de la violence : la violence n’a plus de forme institutionnelle
*L''''exponentialité des violences physiques sur les personnes''' signifie une escalade sans précédent de la violence à l'encontre des individus. Cela peut inclure une augmentation drastique des meurtres, des violences sexuelles, des tortures, entre autres actes de violence physique.
*Le '''processus de régression par rapport au processus civilisationnel''' est un retour à des comportements et des attitudes brutaux et primitifs, en contraste avec les normes et les valeurs qui sous-tendent une société civilisée. Cela peut se manifester par l'abandon de principes tels que le respect des droits de l'homme, la justice et l'équité.
Ainsi, on peut se poser la question de savoir à partir de quel seuil peut-on parler de violence extrême. C’est une question de l’ordre de la philosophie, cependant dans le cas de la violence extrême, il y aurait peut-être un passage entre rationalité et irrationalité.  
*La '''dérégulation des lois et principes de la guerre''' signifie l'abandon des règles qui ont été établies pour limiter les effets destructeurs de la guerre. Cela comprend le non-respect des conventions de Genève, qui établissent des normes minimales pour le traitement des personnes prises dans des conflits armés.
*La '''désinstitutionnalisation de la violence est l'absence de tout cadre institutionnel ou légal pour contrôler ou réguler la violence'''. Cela signifie que la violence n'est plus limitée ou contrôlée par les structures institutionnelles, telles que le gouvernement ou la justice, et qu'elle peut se manifester de manière anarchique et imprévisible.
Tous ces éléments contribuent à la nature dévastatrice de la violence extrême et à son impact sur les individus et les sociétés.
 
La détermination du seuil à partir duquel la violence devient "extrême" est subjective et peut varier en fonction des différentes perspectives. Cependant, on peut généralement convenir que la violence devient "extrême" lorsqu'elle dépasse certaines limites acceptées par la société. Dans le contexte de la violence extrême, le passage de la rationalité à l'irrationalité peut être considéré comme un facteur clé. La violence est généralement considérée comme rationnelle lorsqu'elle a un but précis, comme l'auto-défense ou la réalisation d'un objectif politique. Lorsque la violence devient gratuite, démesurée ou disproportionnée par rapport à son objectif initial, on peut alors parler d'irrationalité. Lorsqu'il s'agit de violence extrême, les actes de violence ne sont plus liés à des objectifs tangibles, mais sont souvent motivés par la haine, le désir de destruction ou d'autres motivations irrationnelles. Cette violence peut être chaotique, imprévisible et souvent sans aucun respect pour la vie humaine ou la dignité. C'est dans ces circonstances que la violence est généralement qualifiée d'extrême. C'est un sujet de recherche en cours dans plusieurs disciplines, y compris la philosophie, la sociologie, la psychologie et les études de conflits, entre autres.  
   
   
La théorie de la violence extrême met à mal toutes les théories de [[Guerre|Clausewitz]] et de [[La Renaissance italienne|Machiavel]] sur la guerre, on est au-delà de toute rationalité, on rentre dans la barbarie à l’état pure.  
La violence extrême diffère significativement des conceptions classiques de la violence et de la guerre que nous retrouvons dans les œuvres de Machiavel et de Clausewitz. Machiavel et Clausewitz voyaient la guerre et la violence comme des outils de la politique, utilisés pour atteindre des objectifs politiques spécifiques. Ils présentaient la guerre comme un acte rationnel qui sert les intérêts d'un État ou d'un leader. Dans leurs théories, la guerre est encadrée par des règles et des conventions, comme le respect des non-combattants ou la proportionnalité de l'usage de la force. La violence extrême, en revanche, représente une rupture avec ces idées. Elle est souvent dépourvue de tout objectif politique clair, sans respect pour les conventions de la guerre ou les droits de l'homme. Elle se caractérise par sa gratuité, sa démesure, et son manque de discernement entre combattants et non-combattants. Dans ces circonstances, la violence est utilisée de manière irrationnelle et indiscriminée, souvent pour inspirer la terreur ou pour détruire l'adversaire. Il est donc vrai que la violence extrême remet en question les théories classiques de la guerre et de la violence politique, en montrant que la violence peut aller au-delà de la rationalité et devenir une fin en soi, un acte de barbarie pure. Cela représente un défi majeur pour les chercheurs, les décideurs politiques et les acteurs humanitaires qui cherchent à comprendre et à prévenir ce type de violence.  
   
   
Michel Henry né en 1922 et décédé en 2000 rédigea un ouvrage intitulé ''La barbarie'' en 1987 constatant la montée de la violence extrême en s’interrogeant sur ce qu’est la barbarie et sur comment se joue l’amputation de l’homme dans un système de barbarie.
Michel Henry, un philosophe français, a écrit un ouvrage intitulé "La Barbarie" en 1987. Il s'est concentré dans cet ouvrage sur le concept de la barbarie, ce qu'elle signifie et comment elle se manifeste dans la société moderne. Pour Henry, la barbarie n'est pas simplement un acte de violence extrême, mais un système qui nie et déshumanise l'individu. Il perçoit la barbarie comme une conséquence de la modernité et de la rationalisation de la société, ce qui mène à une dépersonnalisation et à une déshumanisation. Il distingue deux formes de barbarie. La première est la "barbarie extérieure", caractérisée par des actes de violence et de brutalité physique. La deuxième, plus subtile mais tout aussi dévastatrice selon lui, est la "barbarie intérieure", qui se manifeste par une déshumanisation et une aliénation de l'individu dans la société moderne. Pour Henry, le système moderne, avec son insistance sur la technologie, la science et la rationalité, tend à négliger et à mépriser les aspects subjectifs et émotionnels de l'existence humaine. Cela mène à une "barbarie intérieure" où l'individu est réduit à un objet, un rouage dans une machine plus grande. Dans son œuvre, il met donc en avant l'importance de reconnaître et de valoriser la subjectivité et l'expérience intérieure de l'individu pour contrecarrer cette tendance barbare de la modernité.


== Hannah Arendt [1906 - 1975] et le Mal radical ==
== Hannah Arendt (1906 - 1975) : Le Mal radical et la violence politique ==


[[Image:Hannah Arendt.jpg|right|thumb|150px|Extrait d'un timbre allemand imprimé en 1988 à l'effigie de Hannah Arendt.]]
[[Image:Hannah Arendt.jpg|right|thumb|150px|Extrait d'un timbre allemand imprimé en 1988 à l'effigie de Hannah Arendt.]]


Hannah Arendt est philosophe de formation, élève de Heidegger, elle s’exile en France entre 1933 et 1940 avant de s’installer aux États-Unis à partir de 1941. Elle est une philosophe politique très importante sur la société, la culture, le totalitarisme, la violence. C’est une philosophe incontournable du XXème siècle.
Hannah Arendt est une figure de proue de la philosophie politique du XXème siècle. Elle est née en Allemagne en 1906 et a été fortement influencée par son professeur et amant, Martin Heidegger. Juive, elle a dû fuir l'Allemagne en 1933 pour la France à cause de la montée du nazisme. Puis, en 1941, elle s'installe aux États-Unis où elle reste jusqu'à sa mort en 1975. Arendt a apporté des contributions significatives à notre compréhension de la politique, de l'autorité, du totalitarisme et de la violence. Parmi ses œuvres les plus connues, on trouve "Les Origines du totalitarisme" (1951), "La Condition de l'homme moderne" (1958) et "Eichmann à Jérusalem : Un rapport sur la banalité du mal" (1963). Dans "Les Origines du totalitarisme", elle cherche à comprendre comment des régimes totalitaires tels que ceux de l'Allemagne nazie et de l'Union soviétique ont pu émerger. Elle y analyse les éléments qui ont contribué à l'avènement de ces régimes, notamment l'antisémitisme, l'impérialisme et le totalitarisme lui-même. Dans "Eichmann à Jérusalem", elle examine le procès d'Adolf Eichmann, un fonctionnaire nazi responsable de l'organisation de la logistique de l'Holocauste. Elle y introduit le concept controversé de "la banalité du mal", suggérant que des actes atroces peuvent être commis par des personnes ordinaires qui ne font que suivre des ordres sans se questionner. Son œuvre a eu une influence significative sur une variété de disciplines, de la philosophie politique à la théorie critique en passant par les études de genre. Sa pensée continue d'être pertinente pour de nombreuses questions contemporaines, y compris les questions de pouvoir, d'autorité et de violence.
   
   
Arendt a vue les deux guerres mondiales, la Guerre froide, tous les totalitarismes, dans son ouvrage ''Le système totalitaire'' elle postule que le mal est en l’homme, au fond, le XXème siècle a inventé un mal inédit qui est un mal radical. C’est quelque chose qui était inconnu des hommes auparavant car c’est quelque chose qui résiste à toutes les catégories théologiques et philosophiques occidentales. Au fond, c’est quelque chose qui échappe à toute la connaissance qui  été accumulé sur la société, la guerre, la violence pendant des générations.
L'œuvre de Hannah Arendt est largement informée par les événements tragiques et turbulents du XXème siècle, notamment les deux guerres mondiales et l'émergence des régimes totalitaires. Son concept du "mal radical", développé en partie en réponse à sa réflexion sur le nazisme et l'Holocauste, est une notion particulièrement importante de sa pensée. Selon Arendt, le mal radical ne se manifeste pas nécessairement par des actes de cruauté exceptionnellement violents ou haineux, mais peut se présenter de manière banale et routinière, une idée qu'elle développe dans son compte rendu du procès d'Adolf Eichmann, "Eichmann à Jérusalem : Un rapport sur la banalité du mal". Pour Arendt, le "mal radical" est un mal qui dépasse la compréhension humaine traditionnelle du bien et du mal, dans le sens où il est commis par des personnes qui ne se perçoivent pas elles-mêmes comme maléfiques et qui, en fait, peuvent considérer leurs actions comme normales ou même nécessaires. C'est un mal qui, selon elle, a été rendu possible par les structures et les systèmes de la modernité, et qui constitue une rupture avec les modèles traditionnels de moralité et de responsabilité.


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C’est quelque chose qui est un mal absolu en l’homme. Il faut remonter à Kant car il abordé le mal absolu dans l’être humain, ainsi, il a montré qu’il y avait en l’homme une potentialité du mal impossible à penser et à conceptualiser. Ainsi, sa théorie est une tentative de penser le mal et le nouveau mal ainsi que la transformation du monde moderne qui était incompréhensible dépassant les formes de rationalités.
La conception de Hannah Arendt du "mal radical" est en partie influencée par la pensée du philosophe Immanuel Kant. Cependant, l'approche d'Arendt est distincte de celle de Kant à des égards importants. Kant introduit la notion de "mal radical" dans sa Religion au-delà du seul domaine de la raison. Pour Kant, le mal radical est un potentiel inhérent à la nature humaine, c'est-à-dire une propension naturelle à prioriser nos propres désirs et intérêts au-dessus des exigences de la loi morale. Toutefois, il souligne aussi la capacité de l'être humain à surmonter cette propension par l'exercice de la liberté et de la rationalité. D'un autre côté, Arendt reprend la notion de mal radical dans un contexte complètement différent, celui des crimes de masse et du totalitarisme du XXe siècle. Pour Arendt, le mal radical devient manifeste lorsque des actions inhumaines et destructrices deviennent normalisées au point de perdre leur caractère exceptionnel. Ce mal radical se manifeste dans la banalité de ses exécuteurs, qui commettent des actes horribles non pas par une volonté maléfique mais par indifférence, par conformité ou par incapacité à penser par eux-mêmes. Ces deux conceptions, bien que liées, diffèrent dans leur compréhension de la nature et de la manifestation du mal radical. Kant voit le mal comme une potentialité inhérente à l'humain qui peut être surmontée, tandis qu'Arendt voit le mal comme une manifestation d'un système social et politique, qui dépasse l'individualité et se manifeste dans des structures et des comportements normalisés.
 
Pour Hannah Arendt, le concept de "mal radical" représente un changement fondamental dans notre compréhension traditionnelle du mal. C'est une tentative de conceptualiser les atrocités de masse perpétrées pendant la Seconde Guerre mondiale et le totalitarisme. Ces événements représentaient, pour elle, un type de mal qui était différent de ce que la philosophie et la morale traditionnelles étaient équipées pour comprendre. Selon Arendt, le mal radical était lié à la banalité du mal, une phrase qu'elle a utilisée pour décrire le fait que des personnes ordinaires pouvaient commettre des actes terribles sous l'influence d'un régime totalitaire ou lorsqu'elles se conformaient à l'autorité. Elle a notamment développé cette idée dans son livre "Eichmann à Jérusalem : un rapport sur la banalité du mal", où elle a étudié le cas d'Adolf Eichmann, un bureaucrate nazi qui a joué un rôle clé dans la mise en œuvre de l'Holocauste. Arendt a souligné que Eichmann n'était pas un monstre, mais un individu ordinaire qui ne pensait pas par lui-même et qui a simplement suivi les ordres. Ainsi, pour Arendt, le mal radical du XXe siècle était profondément lié à la déshumanisation, à la normalisation de l'inhumanité et à l'abdication de la pensée personnelle et de la responsabilité morale.
   
   
Arendt va contester la théorie du bouc émissaire à propos des juifs, ils ne porteraient pas simplement la mal des autres mais c’est l’antisémitisme nazi, on les tue avant tout parce qu’ils sont juifs.
Arendt a examiné l'Holocauste et la persécution des Juifs sous le régime nazi non pas comme un exemple de mécanisme de bouc émissaire, mais plutôt comme une manifestation de ce qu'elle a appelé la "banalité du mal". L'antisémitisme nazi, selon Arendt, n'était pas simplement une question de rejeter la culpabilité ou le mal sur un autre groupe. Au lieu de cela, il était profondément enraciné dans l'idéologie nazie et a été mené par des individus ordinaires qui ont commis des actes terribles non pas par haine personnelle ou par désir de faire du mal, mais simplement parce qu'ils suivaient les ordres et la logique du système totalitaire. Selon Arendt, l'Holocauste était le produit d'une structure de pouvoir totalitaire qui dépouillait les individus de leur capacité à penser par eux-mêmes et à exercer un jugement moral. Les Juifs ont été ciblés non pas parce qu'ils étaient des boucs émissaires portant la culpabilité des autres, mais plutôt parce qu'ils étaient considérés par le régime nazi comme une menace pour leur vision d'une société homogène et racialement pure.
 
La théorie du bouc émissaire de René Girard repose sur l'idée que la violence collective est générée par des tensions mimétiques au sein d'une communauté, qui sont ensuite déplacées sur une victime sacrificielle - le "bouc émissaire". Cette victime est accusée de causer le désordre et est punie ou expulsée pour rétablir l'harmonie au sein de la communauté. Cependant, Hannah Arendt remet en question cette idée dans le contexte de l'Holocauste. Pour Arendt, les Juifs n'étaient pas simplement des boucs émissaires portant le poids de la faute ou de la violence collective. Au contraire, ils étaient les victimes d'une idéologie haineuse et d'un système totalitaire qui les ciblait spécifiquement pour leur extermination. Leur persécution et leur meurtre n'étaient pas le résultat de tensions mimétiques au sein de la communauté allemande, mais plutôt d'un plan systématique d'extermination mené par le régime nazi. En ce sens, Arendt conteste l'idée que le mal puisse simplement être déplacé ou projeté sur une victime sacrificielle. Au lieu de cela, elle soutient que le mal est une manifestation de l'action humaine et des structures de pouvoir, et peut être perpétré par des individus ordinaires dans certaines conditions. C'est ce qu'elle a appelé la "banalité du mal".
 
Hannah Arendt, dans sa réflexion sur le totalitarisme et spécifiquement sur le génocide perpétré par le régime nazi, a introduit l'idée de "superfluité" humaine. Pour Arendt, la "superfluité" se réfère à la condition d'être en trop, de n'avoir aucune place ou utilité dans une société ou un système donné. Dans le contexte de l'Holocauste, cette idée de superfluité était manifeste dans la façon dont les Juifs étaient considérés par le régime nazi. Ils étaient vus comme des êtres sans valeur, qui pouvaient être exterminés sans conséquence. Cette idée de superfluité est un élément essentiel du mal radical d'Arendt, dans le sens où elle suggère que la capacité de traiter les autres comme superflus, de les déshumaniser à un tel point qu'ils peuvent être massivement exterminés, est une forme de mal qui dépasse nos conceptions traditionnelles de ce qu'est le mal. Arendt suggère que cette forme de mal radical n'est pas seulement le fait de psychopathes ou de monstres, mais peut être perpétrée par des gens ordinaires qui sont intégrés dans des systèmes totalitaires et qui, pour diverses raisons, n'ont pas la capacité ou la volonté de remettre en question les ordres qu'ils reçoivent ou les idéologies qu'on leur présente. C'est ce qu'elle appelle la "banalité du mal".
 
Dans son analyse du totalitarisme et des camps de concentration, Hannah Arendt a distingué trois types de camps, qui correspondent à trois fonctions différentes du système totalitaire.
 
# Les camps de type "Hadès" étaient destinés à la gestion des apatrides, des asociaux, et de tous ceux qui étaient considérés comme indésirables ou superflus dans la société. Ces camps étaient destinés à contenir, contrôler et isoler ces personnes, plutôt qu'à les rééduquer ou les exterminer.
# Les camps de type "Purgatoire" étaient des camps de rééducation destinés à ceux qui étaient considérés comme des menaces potentielles pour le régime, mais qui étaient aussi considérés comme réformables. L'objectif dans ces camps était de contraindre les individus à adopter l'idéologie et les comportements approuvés par le régime.
# Enfin, les camps de type "Enfer" étaient des camps d'extermination, où les personnes jugées indésirables étaient systématiquement tuées. Ces camps représentaient la forme la plus extrême et la plus effroyable de la violence totalitaire, où la vie humaine était systématiquement détruite à une échelle industrielle.
 
Dans les camps de type "Enfer", comme ceux des camps de concentration et d'extermination nazis, Hannah Arendt a décrit un processus de déshumanisation et de dépersonnalisation systématique.
 
# Dépossession juridique : Les détenus des camps étaient dépossédés de leurs droits juridiques, réduits à un état d'extrême vulnérabilité en étant exclus de la protection des lois. Ils n'étaient plus considérés comme des sujets de droit, mais comme des objets à disposer à la volonté du régime.
# Abandon à toute régulation : Les camps étaient des espaces de non-droit où la loi n'était pas appliquée, et où la violence et la brutalité étaient la norme. C'est ici que les détenus étaient souvent livrés à la merci des "kapos" ou des gardes du camp, qui étaient souvent des criminels.
# Destruction de la personnalité et de l'individualité : Les détenus étaient systématiquement dépouillés de leur identité personnelle et réduits à un numéro ou à une catégorie. Les nazis cherchaient à anéantir tout ce qui faisait de chaque détenu une personne unique, y compris leur nom, leur histoire personnelle, leurs croyances et leurs aspirations.
# Réduction à l'état animal : Les conditions de vie extrêmement dures dans les camps, marquées par la faim, la soif, le froid, le travail forcé, la maladie et la violence omniprésente, réduisaient souvent les détenus à un état proche de l'animalité. Le régime nazi a intentionnellement créé des conditions dans lesquelles les détenus étaient contraints de se battre pour leur survie de la manière la plus basique, souvent aux dépens de leur humanité.
 
Ce processus de déshumanisation avait pour but ultime de faciliter et de rationaliser le meurtre de masse. En réduisant les détenus à un état moins qu'humain, les auteurs de la Shoah ont cherché à justifier et à dissimuler leurs crimes.
 
Jorge Semprún était un écrivain et homme politique espagnol qui a survécu à l'horreur du camp de concentration de Buchenwald pendant la Seconde Guerre mondiale. Il a relaté son expérience de survivant de l'Holocauste dans plusieurs de ses œuvres, notamment dans son livre "L'Écriture ou la Vie". Dans ses mémoires, il décrit comment il a trouvé une certaine forme de réconfort et d'espoir en regardant un arbre depuis l'enceinte du camp. Cet arbre, qu'il pouvait voir mais auquel il ne pouvait pas accéder, est devenu pour lui un symbole de liberté, de résistance et de vie face à l'horreur et à la mort omniprésentes dans le camp. Il a utilisé cette image comme une évasion mentale et une source d'espoir, lui permettant de maintenir une certaine forme d'humanité et de résilience face à l'inhumanité de sa situation. C'est un exemple de la façon dont, même dans les situations les plus désespérées, les êtres humains peuvent trouver des moyens de résister et de préserver leur humanité. La force de l'esprit humain peut être extraordinaire et c'est ce genre d'histoires qui nous le rappellent.
   
   
Ainsi, elle va travailler sur le mal radical dont apparait une notion importante qui est le concept de superfluité. Dès lors, il y a la possibilité de tuer en masse parce qu’a un moment donné l’homme n’est plus rien, il n’est plus un être conscient, dès lors il n’appartient plus à l’humanité. Elle dénote  trois types de camps de concentrations :
Les tactiques utilisées dans les camps de concentration visaient non seulement à infliger des souffrances physiques, mais aussi à détruire l'humanité de ceux qui y étaient enfermés. En plus des traitements cruels et inhumains, les détenus étaient également privés de leur identité personnelle et de leur individualité. Cette dégradation psychologique faisait partie intégrante de la stratégie de terreur et de contrôle. L'idée de réduire les détenus à un état "d'animalité" était clairement manifeste dans de nombreux aspects de la vie du camp. Les conditions de vie sordides, le manque de nourriture, l'absence d'hygiène, et la violence constante étaient conçus pour déshumaniser les détenus et les priver de leur dignité. Par ailleurs, l'absence de perspective temporelle, l'incertitude constante et le manque d'information sur le monde extérieur contribuaient également à cet effet de déshumanisation. En privant les détenus de la possibilité de planifier ou même d'imaginer un avenir, les bourreaux cherchaient à les maintenir dans un état d'angoisse et de désespoir constant. Enfin, la destruction de la solidarité et de la conscience morale était également une partie essentielle de cette stratégie. En créant un environnement où la survie individuelle devenait l'objectif principal, les bourreaux cherchaient à briser les liens de solidarité et d'empathie qui pourraient aider les détenus à résister ou à maintenir leur humanité. Toutes ces tactiques visaient à déshumaniser complètement les détenus et à les transformer en "êtres inférieurs", afin de justifier et de faciliter leur extermination. Cette déshumanisation était une composante essentielle de l'horreur des camps de concentration, et elle est aujourd'hui largement reconnue comme une caractéristique des génocides et des crimes contre l'humanité.
*Hadès : tout ce qui est au XXème siècle la gestion des apatrides, des asociaux ;
*Purgatoire : ce sont les camps de rééducation des individus que l’on considère dangereux ;
*Enfer : c’est le camp d’extermination qui est la mort concrétisé par les camps d’extermination des juifs.  
L’enfer est le lieu de la dépossession en tant qu’homme, l’homme est dépossédé d’abord juridiquement. La première chose qui arrive dans un camp de concentration est la soustraction de l’individu à la protection des lois. La deuxième chose est l’abandon à toute régulation, le camp devient un lieu sauvage ou il n’y a pas de gestion, les aristocrates sont les criminels ; c’est le lieu où se détruit la personnalité. La dernière phase est la destruction de l’individualité. Le projet nazi en tant que tel est de faire de l’homme un animal en l’obligeant à l’animalité pour survivre et se nourrir, en faire un être sans conscience.
Jorge Semprun raconte comment pour arriver survire dans cette violence absolue il fixe son regard sur un arbre qui représente une métaphore mythologie de la liberté.
Dès lors, l’absurde devient le mode de gestion pour arriver à l’animalité afin de faire perdre à l’homme la conscience de la solidarité qui lui aurait permis de survivre dans les camps expliquant la destruction de la conscience morale de l’homme avant son assassinat. Il faut noter qu’afin de réduire l’homme à l’état d’animal il faut réduire la capacité à penser le temps où on est projeté dans une immédiateté absolue qui détruit la cohésion.


== Hannah Arendt et la banalité du mal ==
== Hannah Arendt et la banalité du mal ==
[[File:Adolf Eichmann at Trial1961.jpg|thumb|Adolf Eichmann en avril 1961 lors de son procès à Jérusalem.]]
[[File:Adolf Eichmann at Trial1961.jpg|thumb|Adolf Eichmann en avril 1961 lors de son procès à Jérusalem.]]


Arendt va s’interroger sur le pardon et le procès Eichmann. [http://fr.wikipedia.org/wiki/Adolf_Eichmann Eichmann] est un petit fonctionnaire nazi, il est chargé de la logistique de la déportation des juifs d’Europe. Son emploi  de petit fonctionnaire est d’encadrer les trains pour qu’ils partent vers l’est. Il sera récupéré par les services secrets israéliens en Argentine l’amenant à Jérusalem où il sera jugé.
Hannah Arendt, dans son rapport sur le procès d'Adolf Eichmann à Jérusalem en 1961, a introduit le concept de "banalité du mal". Eichmann, un bureaucrate de haut rang du régime nazi, était l'un des principaux organisateurs de l'Holocauste. Pourtant, au cours de son procès, il a affirmé qu'il n'avait fait que suivre les ordres et qu'il n'avait pas agi par haine ou par malveillance personnelle. 
 
Pour Arendt, le cas d'Eichmann incarnait une forme de mal qui n'était pas enracinée dans la monstruosité personnelle ou la perversité, mais qui découlait plutôt de la pensée superficielle et de l'adhésion aveugle à un système de commandement. Elle l'a décrit comme "terriblement et effroyablement normal", insinuant que n'importe qui, dans certaines conditions, pourrait devenir un acteur du mal. La "banalité du mal", pour Arendt, ne minimise pas l'horreur des actions commises, mais plutôt souligne la façon dont des structures systémiques et des pressions sociales peuvent amener des individus ordinaires à participer à des actes de violence extrême. Cette théorie a suscité une grande controverse et un débat philosophique intense, et elle reste aujourd'hui l'un des aspects les plus discutés de la pensée d'Arendt.
 
Adolf Eichmann n'était pas seulement un "petit fonctionnaire" mais un haut fonctionnaire nazi chargé de l'organisation logistique de la déportation et de l'extermination des Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale. Eichmann a été capturé en Argentine par les services secrets israéliens (Mossad) en 1960, puis emmené en Israël pour être jugé. Ce qui a particulièrement intéressé Hannah Arendt dans le procès d'Eichmann, c'est la déclaration de celui-ci selon laquelle il n'avait fait que "suivre les ordres" et qu'il n'était donc pas directement responsable des atrocités commises. C'est cette position, alliée à son apparente normalité, qui a conduit Arendt à formuler sa théorie de la "banalité du mal". Selon Arendt, Eichmann n'était pas un monstre au sens traditionnel du terme, mais plutôt un individu ordinaire qui s'était laissé entraîner dans le système bureaucratique nazi et qui s'était abstrait de la réalité et de l'humanité des victimes. Arendt a souligné que ce genre de mal, commis par des gens ordinaires qui se dissocient de leurs actions, est peut-être le plus terrifiant de tous.
 
La Conférence de Wannsee, qui s'est tenue le 20 janvier 1942 à Berlin, est généralement considérée comme le moment où la "solution finale de la question juive", c'est-à-dire l'extermination systématique des Juifs, a été formellement décidée par les dirigeants nazis. Bien que la majorité des documents de la conférence aient été détruits par les nazis à la fin de la Seconde Guerre mondiale, un exemplaire du procès-verbal de la réunion a été découvert en 1947. Ce document a fourni une preuve concrète de l'intention des nazis d'exterminer les Juifs.
 
Dans le cas d'Eichmann, sa culpabilité n'était pas vraiment en question lors de son procès. Il avait déjà reconnu son rôle dans l'organisation de la déportation des Juifs vers les camps de concentration et d'extermination. La question était plutôt de savoir dans quelle mesure il était responsable de ses actions, compte tenu de sa revendication de n'avoir fait que suivre les ordres. C'est là que la théorie de la "banalité du mal" d'Arendt est entrée en jeu. Eichmann a été reconnu coupable de crimes contre l'humanité, de crimes de guerre et d'autres charges, et il a été exécuté en 1962. Son procès a mis en évidence la responsabilité personnelle des individus pour leurs actions, même lorsqu'ils agissent dans le cadre d'un système bureaucratique ou en suivant des ordres.
 
Hannah Arendt a été frappée par l'apparente normalité d'Eichmann, ce qu'elle a appelé la "banalité du mal". Selon elle, Eichmann n'était pas un monstre assoiffé de sang ou un fanatique idéologique, mais plutôt un bureaucrate moyen qui se contentait de faire son travail sans questionner la moralité de ses actions. Pour Arendt, cela représentait un nouveau type de mal, un mal commis par des personnes ordinaires qui se conformaient simplement au système en place sans réfléchir aux conséquences de leurs actes. Elle a soutenu que cela était en partie possible parce que la bureaucratie nazie avait déshumanisé l'acte d'extermination, le transformant en une simple tâche administrative. Cela ne signifie pas qu'Eichmann n'était pas coupable de ses crimes. Au contraire, Arendt a souligné que, même dans un système bureaucratique, les individus ont toujours la responsabilité morale de leurs actions. Cependant, cela montre que le mal peut se produire dans des circonstances ordinaires et être perpétré par des personnes ordinaires. C'est cette idée qui a donné lieu au concept de "banalité du mal".  
   
   
La grande question est de juger de sa culpabilité parce qu’au chef de l’accusation il va y avoir la question de l’extermination des juifs qui a été décidé en 1942 lors de la [http://fr.wikipedia.org/wiki/Conf%C3%A9rence_de_Wannsee conférence de Wannsee], cependant aucune trace écrite n’a été conservée.  
Le terme "banalité du mal" qu'Hannah Arendt a inventé pour décrire Adolf Eichmann et les criminels de guerre nazis similaires se réfère précisément à ce paradoxe. Eichmann n'était pas un psychopathe démoniaque ou un sadique dérangé, mais plutôt un fonctionnaire obsédé par l'efficacité de son travail. Arendt a avancé que le mal, loin d'être l'apanage de monstres inhumains, peut être perpétré par des personnes tout à fait ordinaires qui acceptent le système tel qu'il est et ne remettent pas en question les ordres qu'on leur donne. Elle a décrit Eichmann comme un homme qui, pour reprendre ses termes, était "terriblement et terrifiantement normal". Cette "banalité du mal" repose sur l'idée que les individus peuvent commettre des actes atroces non pas parce qu'ils sont intrinsèquement mauvais ou haineux, mais simplement parce qu'ils ne pensent pas aux conséquences de leurs actions. Il est important de noter qu'Arendt n'excuse pas les actes d'Eichmann, mais cherche plutôt à comprendre comment de tels crimes peuvent se produire. C'est une invitation à la vigilance et à l'éveil moral de tous pour empêcher que de tels actes ne se reproduisent.  
   
   
Ce qui frappe Arendt est qu’Eichmann est un petit fonctionnaire qui se comporte comme un petit fonctionnaire se défendant sur le fait qu’il a agi en tant que fonctionnaire en s’occupant de logistique de l’appareil de déportation. Ainsi ayant obéit aux ordres il ne se sent pas coupable, il n’a fait que son devoir.  
« Nous nous attendions à rencontrer un monstre humain, nous avons eu à faire un homme ordinaire soit moins un monstre qu’un clown ». Cette citation d'Hannah Arendt reflète bien la conception de la "banalité du mal" qu'elle a développée. Pour elle, Eichmann et d'autres responsables de crimes de masse n'étaient pas des figures monstrueuses et inhumaines, mais des personnes ordinaires, qui dans le cas d'Eichmann, semblaient parfois dérisoires, voire ridicules ("un clown"). Arendt suggère ici que la vraie nature de l'horreur ne réside pas tant dans la monstruosité exceptionnelle que dans l'ordinaire, le quotidien, l'habitude, la routine. Dans le cas d'Eichmann, il n'était pas motivé par une haine raciale fervente, mais il exécutait simplement ses fonctions bureaucratiques de manière efficace et zélée, sans remettre en question les conséquences dévastatrices de ses actions. Cette conception de la "banalité du mal" remet en question notre perception traditionnelle du mal et de la responsabilité individuelle dans les crimes de masse, soulignant le rôle de la pensée critique et de l'éthique personnelle dans la prévention de tels actes.
   
   
Le discours d’Arendt et de dire que l’on n’a pas à faire a un monstre inhumain mais un homme ordinaire. Ce n’est pas un monstre parce qu’il est simplement stupide ne comprenant pas le lien entre particulier et universel ne se sentant pas responsable.  
La théorie de la "banalité du mal" développée par Hannah Arendt nous met face à l'ordinaire et à l'habitude qui peuvent conduire à l'extrême dans certaines conditions. Arendt met en évidence la capacité d'un individu apparemment "normal" à commettre des actes inimaginables de cruauté et d'injustice lorsqu'il est inséré dans un système qui non seulement permet, mais encourage de telles actions. En déshumanisant leurs victimes et en refusant de reconnaître leur propre rôle dans le mal commis, des individus comme Eichmann étaient capables de se détacher de la réalité de leurs actions et de les justifier comme étant simplement l'exécution des ordres ou le respect de la loi. Cela révèle une vérité troublante et profondément inquiétante : le mal n'est pas toujours commis par des individus profondément perturbés ou intrinsèquement mauvais. Parfois, il peut être perpétré par des personnes ordinaires qui, dans certaines circonstances, sont capables d'actes extraordinairement horribles. Cela souligne l'importance de la vigilance morale, de l'éducation et de la capacité de jugement individuel pour prévenir la répétition de tels événements dans l'avenir.
   
   
{{citation bloc|Nous nous attendions à rencontrer un monstre humain, nous avons eu à faire un homme ordinaire soit moins un monstre qu’un clown;}}
La théorie de la "banalité du mal" de Hannah Arendt tire sa signification précisément de cette constatation : l'individu, comme Adolf Eichmann, peut participer à des actes de mal extrême sans pleinement intégrer ou reconnaître la réalité de ce qu'ils font. Dans le cas d'Eichmann, il s'est considéré comme un simple fonctionnaire qui "faisait son travail". Arendt souligne qu'Eichmann n'était pas un psychopathe ou un fanatique, mais plutôt quelqu'un qui s'était déconnecté de sa capacité de jugement moral, permettant ainsi à son sens de la moralité d'être défini entièrement par le système au sein duquel il travaillait. Il a suivi les ordres et les règlements sans jamais remettre en question l'éthique ou les conséquences de ses actions. Pour lui, les victimes de l'Holocauste n'étaient pas des individus réels avec leurs propres vies et expériences, mais plutôt des numéros et des statistiques dans son système de logistique. Par conséquent, Eichmann n'a pas reconnu la réalité de ses actions et leur impact dévastateur sur les personnes réelles. C'est cette déconnexion de la réalité, cette incapacité à voir les implications morales et humaines de ses actions, qui incarne la "banalité du mal" d'Arendt. Elle nous rappelle qu'il est possible pour des individus ordinaires de commettre des actes de mal extrême lorsqu'ils sont coupés de leur empathie et de leur compréhension de la réalité de leurs actions.
 
Selon Arendt, la capacité de penser est essentielle pour le jugement moral. Penser, dans ce contexte, signifie plus que simplement réfléchir ou avoir des pensées - c'est une activité qui nécessite de la réflexion, de la remise en question, de la prise en compte de différentes perspectives et de l'empathie. C'est une sorte de conversation interne où l'on examine les implications morales de ses actions et où l'on prend des décisions informées et éthiques. Dans le cas d'Eichmann et de nombreux autres qui ont participé à des actes de grande envergure, Arendt suggère que leur incapacité à penser de cette manière a rendu possible leur participation. Ils ont simplement suivi des ordres, sans prendre le temps de réfléchir aux implications morales ou aux conséquences humaines de leurs actions. Par conséquent, l'absence de pensée - dans le sens de la réflexion morale et de l'empathie - peut conduire à des actions immorales. Les individus peuvent alors se dissocier de la réalité de leurs actions et éviter toute responsabilité morale. C'est ce qui rend le mal si "banal" ou ordinaire, selon Arendt - il ne nécessite pas une méchanceté inhérente, mais simplement une absence de pensée réfléchie.
 
"Nous nous attendions à rencontrer un monstre humain, mais nous avons affaire à un homme ordinaire… soit moins un monstre qu’un clown… L’homme mauvais serait donc chacun d’entre nous… S’il se laisse glisser et entraîner insensiblement il parvient dans des circonstances historiques et politiques à commettre les plus grands crimes. Il n’y a pas plus de génie dans le mal que dans le bien, mais seulement des hommes ordinaires, en qui l’esprit du mal veille et n’attend que le moment favorable pour souffler et les pousser au mal radical, de sorte qu’il y a disproportion entre le mal commis et l’apparence tout ordinaire de l’être humain qui l’a accompli".
 
C'est une citation puissante qui résume bien la thèse de Hannah Arendt sur la "banalité du mal". Cette citation fait référence à sa couverture du procès d'Adolf Eichmann, un fonctionnaire nazi qui avait joué un rôle clé dans l'organisation de l'Holocauste. Eichmann n'était pas un homme particulièrement cruel ou sadique par nature, mais un fonctionnaire zélé qui se contentait d'exécuter les ordres de ses supérieurs sans réfléchir aux conséquences morales de ses actions. C'est cette absence de pensée, cette incapacité à considérer les implications éthiques de ses actions, que Arendt qualifie de "banalité du mal". La citation souligne l'idée que le mal n'est pas nécessairement l'oeuvre de "monstres", mais peut être commis par des personnes ordinaires qui se détachent de leur propre responsabilité morale. Il s'agit d'un rappel important que l'éthique et la responsabilité personnelle sont essentielles, même (et surtout) dans des situations où l'on est poussé à agir contrairement à sa conscience.
 
Le professeur Rémi Baudoui  affirme qu'il n'y a pas d'action sans pensée. Cette affirmation souligne une conclusion fondamentale de la philosophie d'Hannah Arendt : l'action et la pensée sont intimement liées. Pour Arendt, la capacité de penser est fondamentale pour la moralité humaine et la responsabilité éthique. Dans le cas d'Eichmann, Arendt soutient qu'il a pu participer à des actes d'une cruauté indicible précisément parce qu'il n'a pas réfléchi aux implications morales de ses actions. Il a simplement "suivi les ordres", se détachant de sa responsabilité personnelle. Cette absence de pensée est, pour Arendt, ce qui rend le mal "banal" et effrayant, car elle suggère que n'importe qui peut devenir capable de commettre des actes terribles s'il renonce à penser et à faire preuve de jugement moral. C'est pourquoi l'affirmation de Baudoui est si importante : elle souligne la nécessité de la réflexion et de l'engagement éthique dans tout ce que nous faisons. Sans la pensée, nous risquons de nous laisser entraîner dans des actions que nous pourrions autrement reconnaître comme immorales ou injustes.
 
== Reconsidérer le concept de violence ==
La vision de la violence par Hannah Arendt est complexe. Elle distingue entre la violence, le pouvoir, l'autorité et la force, et soutient qu'il s'agit de concepts distincts qui sont souvent confondus. Selon Arendt, le pouvoir est une capacité collective qui émerge lorsque les gens se réunissent et agissent en concert. Il est fondé sur le consentement mutuel et la coopération, et c'est la base de tout gouvernement politique. La violence, d'autre part, est une action qui détruit, blesse ou tue. Elle peut être utilisée pour défendre le pouvoir, ou pour le détruire, mais elle ne peut pas le créer. C'est une forme d'action instrumentale, souvent utilisée comme un moyen de parvenir à une fin, comme la domination ou la coercition. L'autorité est un type particulier de pouvoir qui découle du respect ou de l'estime pour une personne ou une institution. Elle est fondée sur la légitimité et le consentement. La force, quant à elle, est une capacité physique ou matérielle qui peut être utilisée pour exercer une contrainte ou une domination. Pour Arendt, donc, la violence et le pouvoir sont en réalité opposés. Le pouvoir vient du peuple et de leur consentement à être gouverné, tandis que la violence est un acte de destruction ou de contrainte. Elle est utilisée lorsque le pouvoir est absent ou a échoué. En cela, Arendt nous rappelle que la violence peut renverser le pouvoir, mais elle ne peut pas le remplacer ou le créer. C'est une distinction cruciale dans sa philosophie politique.
   
   
Le mal est dès lors ordinaire. Ce que décrit Eichmann est une réalité ordinaire, c’est quelque chose qui peut être en chacun de nous qui en fonction de circonstances particulières peut mener à commettre les plus grands crimes. L’homme dans des circonstances historique et politiques, s’il n’a pas une conscience spécifique il peut faire de choses dramatiques. L’esprit du mal veille est n’attend que le moment favorable pour pousser l’individu au mal radical.
Hannah Arendt  a contesté le concept de violence légitime formulé par Max Weber. Selon Weber, l'État détient le monopole de la violence légitime, c'est-à-dire le droit exclusif d'utiliser la force physique pour maintenir l'ordre et appliquer la loi. Cette notion est fondamentale pour la définition de Weber de l'État et pour sa théorie plus générale du pouvoir politique. Cependant, Arendt a remis en question cette idée. Selon elle, la violence et le pouvoir sont des concepts distincts et souvent opposés. Le pouvoir, comme elle l'a défini, découle du consentement et de l'action collective, tandis que la violence est une forme d'action coercitive et destructrice. Elle soutient que la violence peut être utilisée pour défendre ou détruire le pouvoir, mais qu'elle ne peut pas le créer. Arendt remet en question la légitimité de l'utilisation de la violence par l'État, soutenant que toute utilisation de la violence est potentiellement illégitime parce qu'elle contredit la nature du pouvoir politique, qui est basé sur le consentement et l'action collective. Elle met en garde contre les dangers de l'usage de la violence par l'État, en particulier dans les situations où l'État utilise la violence pour maintenir son pouvoir en l'absence de consentement ou de soutien populaire. Cela ne veut pas dire qu'Arendt ne reconnaisse aucune légitimité à l'usage de la violence par l'État - par exemple, pour maintenir l'ordre ou défendre la communauté contre une agression externe. Cependant, elle souligne que cette violence doit être justifiée par des principes éthiques et moraux, et non simplement par le fait que l'État possède le monopole de la force.  
Ce que montre le procès Eichmann est la banalité du mal. Au fond, dans la banalité du mal, il se passe que l’individu n’est pas dans la possibilité d’intégrer le réelle. Sa thèse fondamentale est que la méchanceté peut être causée par l’absence de pensée. Ce qui aurait poussé Eichmann à faire cela est qu’il ait été incapable de penser son action. Dès lors, il n’y a pas d’action sans pensé. Si on ne pense plus l’action on est dans la compulsion, on reproduit un dispositif sans le penser, des lors on a plus la capacité de penser sa propre action.  


{{citation bloc|Nous nous attendions à rencontrer un monstre humain mais nous avons affaire à un homme ordinaire… soit moins un monstre qu’un clown… L’homme mauvais serait donc chacun d’entre nous… S’il se laisse glisser et entraîner insensiblement il parvient dans des circonstances historiques et politiques à commettre les plus grands crimes. Il n’y a pas plus de génie dans le mal que dans le bien, mais seulement des hommes ordinaires, en qui l’esprit du mal veille et n’attend que le moment favorable pour souffler et les pousser au mal radical, de sorte qu’il y a disproportion entre le mal commis et l’apparence tout ordinaire de l’être humain qui l’a accompli;}}
Hannah Arendt suggère que la violence peut être utilisée comme un instrument par les gouvernements, mais qu'aucun gouvernement ne peut se baser exclusivement sur la violence pour maintenir son pouvoir. L'idée ici est que la violence peut être une méthode utilisée par le gouvernement pour atteindre certains objectifs, mais elle n'est pas la source du pouvoir elle-même. Dans son livre "Sur la violence", Arendt explore cette idée plus en détail. Elle soutient que la violence et le pouvoir sont des concepts distincts et souvent opposés. Le pouvoir, selon elle, provient du consensus et de la coopération entre les personnes ; c'est un attribut collectif qui émane de l'adhésion et du soutien des gens. La violence, par contre, est coercitive et destructrice. Elle peut être utilisée pour défendre ou détruire le pouvoir, mais elle ne peut pas le créer. Un régime qui dépend uniquement de la violence pour maintenir son contrôle est intrinsèquement instable, car la violence provoque souvent une résistance et une opposition. L'idée de "violence instrumentale" se réfère à l'utilisation de la violence comme un moyen d'atteindre certains objectifs. Par exemple, un gouvernement peut utiliser la violence pour faire respecter les lois ou pour réprimer la dissidence. Cependant, Arendt soutient que l'usage de la violence de cette manière est fondamentalement différent de l'exercice du pouvoir, qui repose sur le consentement et la coopération des citoyens.


Comme aime à le souligner le professeur Rémi Baudoui, admirateur de Arendt, {{citation|IL N’Y A PAS D’ACTION SANS PENSÉE.}}
Dans la perspective de Hannah Arendt, l'utilisation répétée de la violence par un gouvernement peut être vue comme un signe de faiblesse plutôt que de force. Si un gouvernement doit recourir constamment à la violence pour faire respecter ses directives, cela indique que ce gouvernement a du mal à obtenir le consentement et le soutien de ses citoyens, et qu'il est donc en position de faiblesse. La violence est un outil de coercition, pas de persuasion. Elle peut forcer les gens à se conformer par peur des conséquences, mais elle ne gagne pas leur consentement ou leur soutien volontaire. Un gouvernement qui peut persuader ses citoyens de soutenir volontairement ses politiques est beaucoup plus fort et stable qu'un gouvernement qui doit recourir à la violence pour faire respecter ses décisions. C'est pourquoi Arendt a souligné que le pouvoir et la violence sont des concepts distincts. Le pouvoir, selon elle, provient du consentement et de la coopération entre les individus. La violence, d'autre part, est une méthode de coercition qui peut être utilisée pour défendre ou détruire le pouvoir, mais ne peut pas le créer. Dans ce contexte, l'usage répété de la violence est donc un indicateur d'une faiblesse politique. Cela suggère que le gouvernement est incapable de persuader ses citoyens de soutenir volontairement ses politiques et doit donc recourir à la force pour faire respecter ses directives.


== Le concept de violence ==
Lorsqu'un gouvernement ou un régime ne recourt qu'à la violence pour maintenir l'ordre, on peut dire qu'il a cessé de faire de la politique au sens véritable du terme. Pour Arendt, la politique implique le dialogue, la persuasion et le consensus. Lorsque la violence devient l'outil principal du gouvernement, il ne s'agit plus de politique mais de tyrannie ou de dictature. La Terreur pendant la Révolution française est un exemple de ce concept. Robespierre et les Jacobins ont utilisé la violence et la peur pour supprimer l'opposition et maintenir le contrôle, justifiant leurs actions au nom de la Révolution et de la "vertu" républicaine. Ils ont recours à des exécutions massives, notamment par la guillotine, pour éliminer ceux qu'ils considéraient comme des ennemis de la Révolution. Cependant, ce régime de terreur n'était pas durable. Il a engendré une peur et une instabilité généralisées, et a finalement mené à la chute de Robespierre et à la fin de la Terreur. Cet exemple illustre le point d'Arendt selon lequel la violence peut détruire le pouvoir, mais elle ne peut pas le créer ou le maintenir de manière durable.  
La violence possède un caractère instrumental, elle s’apparente à la puissance mais elle n’est pas la puissance, le pouvoir et une aptitude de l’homme à agir. La violence peut détruire le pouvoir en place mais elle est incapable de le créer.
   
   
Arendt va contester le concept de violence légitime de Max Weber : il ne faut pas parler de violence légitime parce qu’il y a un usage de la violence fait par les États qui est illégitime ; d’autre part il n’a jamais eu de gouvernement exclusivement fondé sur la violence mais il faut parler de violence instrumentale, c’est-à-dire de l’usage de la violence comme un instrument d’action. L’usage de la violence ou l’usage répété de la violence peut être considéré comme une forme d’impuissance absolue du politique.  
Arendt croyait que la violence était un outil de contrôle inefficace à long terme et qu'elle ne pouvait pas engendrer un véritable pouvoir. Pour Arendt, le pouvoir est basé sur la légitimité et le consentement mutuel, ce qui est totalement absent dans les régimes qui utilisent la violence comme moyen de contrôle. En effet, elle affirme que la violence peut détruire le pouvoir existant, mais elle n'a pas la capacité de le créer. La violence peut effrayer et contraindre les gens à obéir, mais elle ne peut pas établir la véritable légitimité ou le respect nécessaire pour le fonctionnement à long terme d'un gouvernement. De plus, elle met en garde contre le danger que la violence puisse devenir une fin en soi. Cela se produit lorsque les régimes deviennent de plus en plus dépendants de la violence pour maintenir leur contrôle, la violence devient alors non seulement un moyen, mais aussi un objectif en soi. Cette situation, selon Arendt, marque la fin de la véritable politique, qui devrait être basée sur le dialogue, la persuasion et le consensus plutôt que sur la contrainte et la force.
 
Si à un moment donné, il n’y a plus que le recours à la violence, cela n’est plus faire de la politique. Dès lors, il y a des risques de substituer la violence au pouvoir, c’est-à-dire de rentrer dans des régimes de terreur tout comme l’avait énoncé Robespierre sous la terreur révolutionnaire en justifiant le cycle de violence et de terreur absolue afin de gouverner au nom de la morale, de la justice et au nom de la République française.  
"En résumé, il ne suffit pas de dire que, dans le domaine politique, il ne faut pas confondre pouvoir et violence. Le pouvoir et la violence s’opposent pas leur nature même ; lorsque l’un des deux prédomine de façon absolue, l’autre est éliminé. La violence se manifeste lorsque le pouvoir est menacé, mais si on la laisse se développer, elle provoquera finalement la disparition du pouvoir. Il en résulte que la non-violence ne devrait pas être considérée comme le contraire de la violence. Parler d’un pouvoir non violent est en fait une tautologie. La violence peut détruire le pouvoir, elle est parfaitement incapable de le créer."
Le danger que pointe Arendt est que la violence peut devenir dans certains cas une fin en soi, alors, c’est la fin du politique et de la politique. Ainsi, la violence détruit le pouvoir, mais ne peut le créer.


{{citation bloc|En résumé, il ne suffit pas de dire que, dans le domaine politique, il ne faut pas confondre pouvoir et violence. Le pouvoir et la violence s’opposent pas leur nature même ; lorsque l’un des deux prédomine de façon absolue, l’autre est éliminé. La violence se manifeste lorsque le pouvoir est menacé, mais si on la laisse se développer, elle provoquera finalement la disparition du pouvoir. Il en résulte que la non-violence ne devrait pas être considérée comme le contraire de la violence. Parler d’un pouvoir non violent est en fait une tautologie. La violence peut détruire le pouvoir, elle est parfaitement incapable de le créer.|Hannah Arendt, Du mensonge à la violence, trad. fr G. Durand, Paris, Calmann-Lévy, 1972, p.166}}
C'est une citation puissante qui résume les vues d'Hannah Arendt sur le pouvoir, la violence et la non-violence. Selon Arendt, le pouvoir est intrinsèquement non violent. Lorsqu'on parle de pouvoir, on parle en fait de la capacité de travailler ensemble, d'atteindre des objectifs communs et de créer des conditions mutuellement bénéfiques. Dans cette optique, la violence est contraire à la nature du pouvoir car elle divise, détruit et force plutôt que de rassembler, créer et persuader. L'importance de cette vision d'Arendt est claire, en particulier lorsqu'on considère des contextes politiques ou sociaux dans lesquels la violence est souvent considérée comme un outil nécessaire pour obtenir ou maintenir le pouvoir. Arendt rejette cette idée, affirmant que la violence peut détruire le pouvoir, mais elle ne peut pas le créer. Sa référence à la non-violence en tant que tautologie pour le pouvoir renforce cette idée. En d'autres termes, le pouvoir, par nature, est non violent - il nécessite le consentement, l'engagement et la coopération, et ne peut pas être maintenu par la force ou la contrainte. Cette perspective a des implications importantes pour la façon dont nous concevons la politique, le leadership et les relations sociales.


= Annexes =
= Annexes =
*Arendt, Hannah, and Dominique Séglard. "Édifier Un Monde": Interventions, 1971-1975. Paris: Éditions Du Seuil, 2007. Print.
*Arendt, Hannah, and Dominique Séglard. "Édifier Un Monde": Interventions, 1971-1975. Paris: Éditions Du Seuil, 2007. Print.
*Sorel, George : [http://www.singulier.eu/textes/reference/texte/pdf/Sorel_Reflexions_violence.pdf Reflexion sur la violence] (livre)
*Sorel, George : [http://www.singulier.eu/textes/reference/texte/pdf/Sorel_Reflexions_violence.pdf Reflexion sur la violence] (livre)
*“How Do People Rebel? Mechanisms of Insurgent Alliance Formation.” The Graduate Institute of International and Development Studies, http://www.graduateinstitute.ch/home/research/research-news.html/_/news/research/2018/how-do-people-rebel-mechanisms-o


= Références =
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<references />
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L'étude de la violence en science politique est un domaine de recherche qui examine les différentes formes de violence, leur origine, leurs causes et leurs conséquences dans le contexte politique. La violence peut prendre de nombreuses formes, telles que la violence physique, la violence symbolique, la violence structurelle, la violence politique, etc. Comprendre ces différentes formes de violence et leur rôle dans la politique est essentiel pour analyser les conflits, les mouvements sociaux, la gouvernance et les relations internationales.

Les théories classiques sur la violence sont importantes à étudier pour plusieurs raisons. Tout d'abord, elles constituent les fondements théoriques de notre compréhension de la violence dans les sciences sociales. Elles ont établi les concepts et les cadres d'analyse utilisés dans l'étude contemporaine de la violence. En comprenant ces théories classiques, nous avons une base solide pour aborder les questions de violence dans un contexte plus large. De plus, ces théories classiques offrent une perspective historique sur les problèmes de violence. Elles ont émergé à différentes époques de l'histoire de la pensée sociale et politique, et nous permettent ainsi de comprendre comment les idées sur la violence ont évolué au fil du temps et ont façonné les approches actuelles. Les concepts et la terminologie introduits par les théories classiques sur la violence sont également essentiels à étudier. Par exemple, la distinction entre la violence directe et la violence structurelle proposée par Johan Galtung est fondamentale pour comprendre les différentes formes de violence et leurs impacts. En étudiant ces théories, nous acquérons une connaissance approfondie de ces concepts et de leur application dans l'analyse de la violence contemporaine. Il est également important d'examiner de manière critique les théories classiques sur la violence. En les étudiant, nous sommes en mesure de remettre en question leurs hypothèses et leurs limites. Cette démarche critique favorise le développement de nouvelles théories et de nouvelles perspectives sur la violence, contribuant ainsi à l'évolution des connaissances dans ce domaine. Enfin, les théories classiques sur la violence restent pertinentes aujourd'hui. Bien que certaines d'entre elles puissent sembler datées, de nombreux concepts et idées qu'elles ont développés sont toujours utiles pour comprendre les dynamiques de la violence contemporaine. En étudiant ces théories, nous pouvons établir des liens entre les idées du passé et les réalités actuelles, ce qui nous permet de mieux appréhender les enjeux contemporains liés à la violence.

L'étude des théories classiques sur la violence est essentielle pour acquérir une compréhension approfondie de ce phénomène complexe. Elles fournissent les fondements théoriques, la perspective historique, les concepts clés et les cadres d'analyse nécessaires pour comprendre la nature et les implications de la violence dans différents contextes. De plus, elles jouent un rôle important dans le développement de nouvelles connaissances et de nouvelles approches pour prévenir et résoudre les problèmes de violence.

Étymologie du mot « violence »[modifier | modifier le wikicode]

L'étymologie, qui consiste à étudier l'origine et l'évolution des mots, peut apporter des éclaircissements sur les réflexions en matière de science politique sur le concept de violence. En examinant les racines et les significations étymologiques des termes liés à la violence, nous pouvons mieux comprendre les différentes conceptions et interprétations de ce phénomène complexe.

Par exemple, le mot "violence" lui-même dérive du latin "violentia", qui signifie "force excessive" ou "violence". Cette racine met en évidence l'idée d'une action violente qui dépasse les limites acceptables. L'étymologie de ce terme suggère donc une notion de contrainte ou de coercition exercée de manière excessive. De même, l'étymologie de certains autres mots associés à la violence peut également offrir des éclairages intéressants. Par exemple, le mot "agression" provient du latin "aggressio", qui signifie "attaque". Cela souligne l'idée d'une action offensive ou d'une attaque contre autrui. En étudiant l'étymologie de ce terme, nous pouvons mieux appréhender le caractère intentionnel et offensif de certains comportements violents. L'étymologie peut également révéler des nuances dans les différentes formes de violence. Par exemple, le terme "violence symbolique", popularisé par le sociologue Pierre Bourdieu, met en lumière la dimension symbolique ou non physique de certaines formes de violence. L'étymologie du mot "symbole" renvoie à l'idée de "mettre ensemble", soulignant ainsi l'importance des symboles, des représentations et des pratiques culturelles dans la perpétuation de la violence sociale et politique. En étudiant l'étymologie des mots liés à la violence, les chercheurs en science politique peuvent donc approfondir leur compréhension des conceptions et des implications de ce phénomène. Cela peut les aider à analyser les discours politiques, à décoder les significations implicites et à examiner les différentes dimensions de la violence, qu'elles soient physiques, symboliques, structurelles ou politiques. En fin de compte, l'étymologie peut contribuer à une meilleure appréhension de la violence dans le domaine de la science politique en éclairant les origines et les significations profondes des termes utilisés pour la décrire.

L'étymologie du mot "violence" remonte au mot latin "violentia" qui signifie "force excessive" ou "violence". Cependant, il est également pertinent de noter que le mot français "violence" est étroitement lié au mot "violer" qui est apparu au 11ème siècle et qui est dérivé du latin "violare". Le terme "violer" implique l'idée d'une atteinte à l'intégrité d'une personne, que ce soit physiquement, moralement ou dans son être même. Cette connotation d'atteinte à l'intégrité renforce la notion de violence en tant qu'acte qui transgresse les limites acceptables et qui porte préjudice à autrui. Elle met en évidence la dimension profonde de la violence, allant au-delà de la simple notion de force physique excessive, pour englober des aspects moraux, psychologiques et existentiels. Cela souligne l'importance de considérer la violence comme une atteinte à la personne dans son ensemble, affectant sa dignité, sa sécurité et son bien-être. En examinant l'étymologie du mot "violence" et sa relation avec le terme "violer", nous comprenons mieux la gravité et l'impact profond de la violence sur les individus et les sociétés. Cela renforce également l'importance d'analyser les différentes formes de violence et leurs conséquences multidimensionnelles dans le domaine de la science politique.

Au fil du temps, le sens du terme s'est étendu pour englober non seulement les atteintes à l'intégrité personnelle, mais aussi les abus de force et les actions contraires aux normes et aux bonnes conventions. Au XIIIe siècle, le terme "violence" a commencé à être associé à l'abus de la force. Cela signifie que la violence ne se limite plus seulement à l'usage de la force excessive, mais englobe également l'utilisation de la force dans des desseins contraires aux normes et aux bonnes conventions. Cela met en évidence l'aspect normatif de la violence, soulignant que certaines actions violentes sont perçues comme étant en contradiction avec les principes éthiques, moraux ou juridiques de la société. Cette extension du sens du mot "violence" pour inclure les actions contraires aux bonnes conventions souligne l'importance du contexte social et culturel dans la compréhension de la violence. Les normes et les conventions varient d'une société à l'autre, et ce qui peut être considéré comme violent dans une culture peut ne pas l'être dans une autre. Cette évolution du sens de la violence est pertinente. Elle souligne l'importance de prendre en compte les normes, les valeurs et les conventions sociales dans l'analyse de la violence politique. Les actions qui sont perçues comme violentes peuvent varier en fonction des attentes de la société et des normes politiques établies.

L'introduction du verbe "violenter" à partir de 1342 renforce l'idée que la violence implique une action intentionnelle. Le verbe "violenter" indique qu'il y a une action en cours, soulignant ainsi la dimension active de la violence. Il met l'accent sur le fait que la violence est le résultat d'une intention délibérée d'agir de manière abrupte et immédiate envers autrui. Cette notion d'intentionnalité souligne que la violence n'est pas simplement le produit du hasard ou de circonstances accidentelles, mais qu'elle est le résultat d'une volonté délibérée de causer du tort, de dominer ou de contraindre autrui. Elle implique une certaine agressivité dans l'action, avec une volonté d'obtenir des résultats immédiats et souvent coercitifs. L'apparition de l'adjectif "violemment" et de l'expression "faire violence" confirme davantage que la violence est associée à une action spécifique. L'adjectif "violemment" qualifie une action accomplie avec force et intensité. Il souligne l'idée d'une action brutale, rapide et intense, caractéristique de la violence. L'utilisation de cet adjectif renforce l'aspect dynamique et puissant de la violence. L'expression "faire violence" met en évidence le fait que la violence implique une action délibérée et intentionnelle. L'emploi du verbe "faire" souligne l'aspect actif de la violence, indiquant qu'elle est le résultat d'une action entreprise de manière déterminée. Cette expression souligne également que la violence est une action qui s'impose à autrui, une action qui va à l'encontre de la volonté ou des intérêts de la personne concernée. Ainsi, l'émergence de l'adjectif "violemment" et de l'expression "faire violence" dans le langage renforce l'idée que la violence est une action intentionnelle et dynamique. Cela souligne la dimension active de la violence, caractérisée par une utilisation délibérée de la force ou de la coercition.

Dans le domaine de la science politique, cette dimension intentionnelle de la violence est cruciale pour comprendre les motivations et les objectifs des acteurs politiques qui recourent à la violence. . Elle nous permet de distinguer la violence des accidents ou des événements non intentionnels, et de l'analyser comme une stratégie délibérée utilisée pour atteindre des fins politiques spécifiques. Cela met en évidence la nécessité de considérer les motivations, les intentions et les dynamiques d'action derrière les comportements violents dans le contexte politique.

La violence est indissociable de l'action humaine et de l'intentionnalité. Elle implique une intention d'agir et de causer des dommages ou de contraindre autrui. La composante de force est centrale dans la violence, qu'elle soit physique, morale, psychologique ou autre. Il est important de reconnaître que la violence ne se limite pas uniquement à des actes d'agression physique. Elle peut également prendre des formes non physiques, telles que la violence morale ou psychologique. La violence morale peut se manifester par des actes d'intimidation, de dévalorisation, de manipulation ou d'abus émotionnel qui visent à nuire à la dignité et au bien-être psychologique d'une personne. La violence psychologique englobe des formes d'abus ou de coercition qui agissent sur le psychisme de l'individu, pouvant inclure des actes de manipulation, de chantage émotionnel, de menace, de privation affective, etc. Ces formes de violence peuvent avoir des conséquences profondes sur la santé mentale, le bien-être émotionnel et les relations sociales des individus. Il est essentiel de comprendre que la violence ne se réduit pas uniquement à la manifestation physique de la force, mais qu'elle peut également prendre des formes subtiles et insidieuses qui portent atteinte à l'intégrité, à la dignité et au bien-être des individus. Dans le domaine de la science politique, cette compréhension de la violence dans ses différentes dimensions est cruciale pour analyser les relations de pouvoir, les conflits politiques, les dynamiques sociales et les conséquences politiques de la violence. Cela permet de prendre en compte les diverses formes de violence et d'élaborer des stratégies de prévention et de résolution des conflits plus holistiques et efficaces.

La violence est intrinsèquement liée à l'action et implique une intentionnalité. Elle se manifeste souvent par l'utilisation de la force et de la contrainte, ce qui peut entraîner une modification de la position, de la situation ou du comportement d'une personne en raison de l'atteinte qui lui est infligée. Lorsqu'une personne fait violence à autrui, elle cherche à imposer sa volonté par la force ou la contrainte, poussant ainsi la personne visée à changer de position ou de comportement. Cela peut se produire dans divers contextes, tels que les relations interpersonnelles, les relations de pouvoir, les conflits politiques ou sociaux. La contrainte imposée par la violence peut être physique, par exemple lorsqu'une personne est physiquement agressée ou soumise à des actes de force. Elle peut également être psychologique, sociale ou politique, où la personne est forcée ou contrainte de se conformer à certaines normes, exigences ou demandes sous la menace de conséquences négatives. Il est important de noter que l'utilisation de la force et de la contrainte ne sont pas les seuls modes d'expression de la violence. Comme nous l'avons mentionné précédemment, la violence peut prendre d'autres formes telles que la violence morale, psychologique, symbolique ou structurelle, qui peuvent également avoir des effets néfastes sur les individus et les sociétés.

Hannah Arendt, philosophe politique du XXe siècle, a apporté une contribution importante à la réflexion sur la violence et le pouvoir. Selon elle, il convient de distinguer la violence du pouvoir et de la puissance, car la violence requiert des instruments spécifiques, tandis que le pouvoir est plus directement lié à la capacité d'agir et d'influencer. Arendt soutient que la violence est associée à l'utilisation de la force physique ou de moyens coercitifs pour imposer sa volonté. Elle est souvent caractérisée par la destruction, la soumission ou la domination de l'autre. Pour exercer la violence, on a besoin d'instruments, d'armes ou de moyens tangibles pour imposer cette volonté par la force. En revanche, Arendt fait une distinction entre la violence et le pouvoir, qu'elle décrit comme étant plus directement instrumentale. Le pouvoir, selon elle, est la capacité d'agir collectivement, de se rassembler et de prendre des décisions politiques. Il est fondé sur la coopération, le consentement et la participation active des individus. Contrairement à la violence, le pouvoir n'exige pas nécessairement l'utilisation de la force physique ou de moyens coercitifs. Arendt souligne que le pouvoir est une force plus durable et légitime que la violence. Le pouvoir repose sur la capacité des individus à se rassembler et à agir de manière concertée, tandis que la violence est souvent utilisée pour surmonter les obstacles ou les résistances au pouvoir. Elle met également en évidence les dangers inhérents à l'utilisation de la violence pour atteindre des objectifs politiques, car elle peut conduire à une spirale de violence et à la destruction des relations politiques et sociales. Dans son œuvre, Arendt s'interroge sur les différentes formes d'expression de la violence, notamment dans le contexte du totalitarisme, où la violence est utilisée de manière systématique pour contrôler et opprimer les individus. Elle explore les implications politiques et éthiques de la violence et du pouvoir, cherchant à comprendre comment les individus peuvent préserver leur dignité et leur liberté face aux forces violentes et oppressives.

Champs scientifiques de réflexion[modifier | modifier le wikicode]

Le terme "cognitiviste" fait généralement référence à un type de psychologue qui se concentre sur la manière dont les gens perçoivent, pensent, se souviennent, apprennent et résolvent les problèmes. Les cognitivistes s'intéressent principalement à l'information entrante et à la manière dont elle est traitée par le cerveau. Ils étudient la violence du point de vue de la façon dont elle est perçue et traitée par le cerveau. Depuis environ trente ans, les cognitivistes ont abordé la question de la violence d'un point de vue scientifique. Leur travail a permis de mettre en évidence certains processus cognitifs qui peuvent conduire à la violence. Par exemple, ils ont étudié comment les biais cognitifs (comme la pensée dichotomique, où tout est perçu comme bon ou mauvais, sans nuance) peuvent conduire à la violence. Ils ont également étudié comment les schémas de pensée dysfonctionnels (comme la rumination, où une personne reste bloquée sur des pensées négatives) peuvent augmenter le risque de comportements violents. Les recherches ont également montré que les personnes ayant une tendance à la violence ont souvent une capacité réduite à reconnaître et à comprendre les émotions des autres, un phénomène connu sous le nom d'alexithymie. Ils peuvent aussi avoir du mal à réguler leurs propres émotions, en particulier la colère. Ces recherches ont des implications importantes pour la prévention et le traitement de la violence. Par exemple, elles suggèrent que les interventions qui visent à améliorer la régulation des émotions et à modifier les schémas de pensée dysfonctionnels peuvent être efficaces pour réduire la violence. De plus, en comprenant les processus cognitifs qui sous-tendent la violence, nous pouvons être mieux en mesure d'identifier les personnes à risque et de les aider avant qu'elles ne deviennent violentes. Cependant, il est important de noter que la violence est un phénomène complexe qui est influencé par de nombreux facteurs, y compris mais sans s'y limiter, les facteurs sociaux, économiques et environnementaux.

Konrad Lorenz était un éthologue autrichien qui a largement contribué à notre compréhension des comportements animaux, y compris de l'agressivité. Dans son livre de 1963, "On Aggression" (ou "L'Agression, une histoire naturelle du mal" en français), Lorenz présente la théorie selon laquelle l'agressivité est un instinct inné chez les animaux et les humains. Lorenz définit l'agression comme une force motrice qui pousse l'individu à se battre. Pour lui, l'agression n'est pas nécessairement destructrice ou antisociale, elle peut être essentielle à la survie et à l'évolution des espèces. Par exemple, l'agression peut favoriser la compétition, ce qui peut, à son tour, favoriser l'adaptation et la survie. Lorenz croit également que l'agression est liée à des processus neurobiologiques spécifiques et qu'elle est déclenchée par des stimuli spécifiques, qu'il appelle des "signaux de déclenchement fixe". Ces signaux peuvent varier d'une espèce à l'autre, et chez les humains, ils peuvent être très complexes. En ce qui concerne l'humanité, Lorenz suggère que notre agressivité innée pourrait être exacerbée par certains aspects de la société moderne. Il soutient que les sociétés traditionnelles avaient des moyens de canaliser l'agressivité de manière productive et de minimiser les conflits violents, mais que ces mécanismes pourraient être absents ou dysfonctionnels dans la société moderne.

Certains chercheurs, y compris Lorenz, ont suggéré que l'agression est une caractéristique commune à toutes les espèces, et peut-être même un instinct biologique fondamental. Cela ne signifie pas que tous les êtres sont constamment agressifs, mais plutôt que tous ont la capacité d'exprimer des comportements agressifs dans certaines circonstances. Dans le monde animal, l'agression peut jouer un rôle important dans différentes situations, comme la défense du territoire, l'accès aux ressources alimentaires, ou l'établissement de la dominance au sein d'un groupe. Certains de ces comportements peuvent être observés dans l'espèce humaine également. Toutefois, il convient de noter que l'agressivité humaine a des caractéristiques uniques qui la distinguent de l'agressivité chez les autres animaux. Par exemple, les humains sont capables d'agression symbolique et indirecte (comme l'humiliation ou le rejet social), et ils sont également capables de violence à grande échelle, comme la guerre. De plus, bien que la biologie et l'instinct puissent jouer un rôle dans l'agression, de nombreux chercheurs soulignent également l'importance des facteurs environnementaux et sociaux. Par exemple, des facteurs tels que la pauvreté, le stress, l'abus de substances, l'exposition à la violence dans les médias, et le manque de compétences en résolution de conflits peuvent tous augmenter le risque de comportement agressif. Il est également important de souligner que, bien que l'agressivité puisse être une caractéristique commune à toutes les espèces, cela ne signifie pas qu'elle est inévitable ou irréversible. De nombreuses recherches montrent que l'agressivité peut être modifiée par des interventions appropriées, comme l'éducation, la thérapie, et les changements dans l'environnement social et physique.

L'agressivité peut aussi être comprise comme un mode d'expression et d'action. Elle peut être une réponse à un environnement perçu comme menaçant ou stressant, et peut représenter une tentative de défendre des ressources perçues comme étant en danger, que ce soient des ressources physiques ou psychologiques. L'agressivité peut également être une manière d'exprimer des sentiments de frustration, de colère, d'anxiété ou de peur. Cela ne justifie pas nécessairement l'agression, mais aide à comprendre pourquoi elle peut se produire. Comprendre l'agressivité comme un mode d'expression peut également aider à développer des moyens plus efficaces de gérer et de prévenir l'agression. Par exemple, il peut être utile d'apprendre à exprimer ses sentiments de manière plus constructive, ou à résoudre les conflits de manière non violente. Il est également important de noter que l'agressivité n'est pas la seule façon d'exprimer ces sentiments ou de réagir à ces situations. De nombreuses personnes et cultures ont développé des façons non agressives de gérer les conflits, l'adversité et les émotions négatives. Ainsi, bien que l'agressivité puisse être une réponse instinctive à certaines situations, elle n'est pas la seule réponse possible, et elle peut souvent être modifiée ou contrôlée par l'apprentissage et la pratique. Cependant, il est également crucial de distinguer entre l'agressivité et l'assertivité. Alors que l'agressivité implique souvent l'intimidation, la domination ou la violation des droits d'autrui, l'assertivité est une manière de s'exprimer qui respecte les droits et les sentiments des autres tout en défendant efficacement ses propres droits et besoins.

Les questions de violence et d'agressivité transcendent les disciplines et impliquent un large éventail de facteurs, des aspects biologiques et cognitifs individuels aux influences socioculturelles et politiques. Au niveau individuel, la psychologie cognitive et les neurosciences ont beaucoup apporté à notre compréhension des mécanismes cérébraux et cognitifs qui peuvent conduire à la violence ou à l'agressivité. Par exemple, des recherches ont montré que certains types de biais cognitifs, de dysfonctionnements dans le traitement de l'information ou de difficultés dans la régulation des émotions peuvent augmenter le risque de comportements agressifs. Cependant, il est également essentiel de comprendre que la violence et l'agressivité sont profondément influencées par des facteurs socioculturels et politiques. La culture peut influencer la manière dont la violence est perçue, acceptée ou sanctionnée, et elle peut offrir des modèles de comportement violent ou non violent. Par exemple, une culture qui valorise la domination ou l'agression peut encourager des comportements violents, tandis qu'une culture qui valorise la coopération ou la résolution pacifique des conflits peut encourager des comportements non violents. De même, la politique peut influencer la violence à tous les niveaux, des politiques gouvernementales qui peuvent favoriser ou dissuader la violence (par exemple, par le biais de lois sur le contrôle des armes ou de politiques d'éducation) à la manière dont les conflits politiques ou les inégalités peuvent conduire à la violence à grande échelle, comme les guerres ou les révolutions.

La violence et l'agressivité sont des phénomènes multidimensionnels qui sont influencés par une multitude de facteurs. Il est donc nécessaire d'adopter une approche interdisciplinaire pour les comprendre pleinement. Parmi ces disciplines, on peut citer la biologie, la psychologie, la sociologie, l'anthropologie, la criminologie, la science politique et d'autres encore.

  • La biologie et la psychologie se concentrent souvent sur les facteurs individuels qui peuvent conduire à la violence, tels que les processus neurologiques, les biais cognitifs, les troubles de la personnalité, la régulation des émotions, etc.
  • La sociologie et l'anthropologie examinent souvent comment les facteurs sociaux et culturels peuvent influencer la violence, par exemple, comment la structure sociale, les normes culturelles, les rôles de genre, les inégalités, etc., peuvent favoriser ou dissuader la violence.
  • La criminologie se concentre sur les facteurs qui peuvent conduire à la violence criminelle, y compris les facteurs individuels, sociaux, économiques et environnementaux.
  • La science politique examine souvent la violence à un niveau plus macroscopique, par exemple, comment les conflits politiques, les politiques gouvernementales, le terrorisme, la guerre, etc., peuvent conduire à la violence à grande échelle.

Ces disciplines, et d'autres, apportent des perspectives uniques et importantes sur la violence et l'agressivité. Par conséquent, une compréhension complète de ces phénomènes nécessite une approche interdisciplinaire qui intègre les perspectives de toutes ces disciplines.

L'agressivité peut certainement être une forme d'expression, et dans certains cas, elle peut être utilisée pour exprimer l'individualité. Par exemple, une personne peut recourir à l'agressivité pour affirmer son autonomie, pour résister à une autorité perçue comme oppressante, ou pour se distinguer des autres. L'expression de l'individualité est intrinsèquement liée à la communication. Qu'elle soit exprimée à travers l'art, la parole, le comportement, le style vestimentaire ou d'autres moyens, cette expression sert à transmettre des informations sur soi aux autres. C'est une façon d'exprimer ses sentiments, ses pensées, ses valeurs, ses intérêts et sa personnalité unique. De plus, l'expression de l'individualité n'est pas seulement une communication à sens unique - c'est aussi une façon d'interagir avec les autres et de participer à la vie sociale. Par exemple, lorsqu'on exprime son individualité, on peut inspirer les autres, les défier, les inviter à nous connaître mieux, ou simplement partager une partie de nous-même avec eux. C'est un aspect fondamental de la communication humaine.

Pour comprendre pleinement la violence et l'agressivité, il est crucial de prendre en compte plusieurs dimensions. Ces dimensions incluent les facteurs biologiques, les traits de personnalité individuels et l'interaction sociale.

  1. Facteurs biologiques : Il est bien établi que les facteurs biologiques peuvent influencer la propension à la violence et à l'agressivité. Par exemple, les déséquilibres chimiques dans le cerveau, les anomalies génétiques ou lésions cérébrales peuvent augmenter le risque de comportements violents ou agressifs.
  2. Traits de personnalité : Les traits de personnalité individuels peuvent également jouer un rôle important. Par exemple, des traits de personnalité tels que l'impulsivité, la faible maîtrise de soi, ou la tendance à l'irritabilité peuvent augmenter le risque d'agressivité. De même, certaines conditions psychologiques, comme les troubles de la personnalité antisociale, sont également associées à une plus grande propension à la violence.
  3. Interaction sociale : la socialisation joue un rôle clé dans le développement de comportements agressifs ou violents. Les enfants qui sont insuffisamment socialisés, ou qui grandissent dans des environnements où la violence est courante ou acceptée, peuvent être plus enclins à recourir à l'agression. De plus, les personnes qui ont des difficultés à gérer les relations sociales ou à comprendre et à répondre aux signaux sociaux peuvent également être plus susceptibles d'agir de manière agressive.

Ces trois dimensions sont interconnectées et se renforcent mutuellement. Par exemple, les facteurs biologiques peuvent influencer les traits de personnalité, qui à leur tour peuvent influencer la façon dont une personne interagit avec les autres. De même, les expériences sociales peuvent affecter à la fois les traits de personnalité et la biologie d'une personne. Il est donc nécessaire de prendre en compte ces trois dimensions pour comprendre pleinement la violence et l'agressivité et pour développer des interventions efficaces pour prévenir ou gérer ces comportements. Ces interventions peuvent impliquer des stratégies biologiques (comme la médication), psychologiques (comme la thérapie comportementale) et sociales (comme l'éducation à la résolution pacifique des conflits ou la création d'environnements sociaux plus sûrs et plus inclusifs).

La maîtrise de l'environnement est un facteur clé pour limiter l'agressivité et la violence. Cela peut se comprendre de plusieurs façons. Premièrement, la capacité à contrôler les aspects physiques de son environnement peut aider à réduire l'agressivité. Par exemple, une personne qui est capable de créer un environnement de vie sûr et confortable peut être moins susceptible de ressentir le stress et la frustration qui peuvent conduire à l'agressivité. Deuxièmement, la maîtrise de l'environnement social peut également être importante. Une personne qui a de bonnes compétences sociales et qui est capable de naviguer efficacement dans ses relations avec les autres peut être moins susceptible de recourir à l'agressivité comme moyen de résoudre les conflits. Troisièmement, la maîtrise de l'environnement émotionnel intérieur est également cruciale. Une personne qui a développé des compétences efficaces de régulation des émotions et de résilience face au stress peut être mieux équipée pour gérer les situations qui pourraient autrement conduire à l'agressivité. Enfin, la maîtrise de l'environnement peut aussi signifier la capacité de changer son environnement lorsque cela est nécessaire. Par exemple, une personne qui est capable de quitter un environnement violent ou d'en éviter la création peut être moins susceptible de recourir à la violence elle-même. Pour développer cette maîtrise de l'environnement, il peut être utile d'adopter une approche holistique qui inclut la promotion de la santé mentale, l'éducation à la résolution non violente des conflits, le développement de compétences sociales, l'amélioration des conditions de vie, et d'autres stratégies similaires.

L'émotion joue un rôle central dans l'agressivité et la violence. Les émotions intenses, comme la colère, la frustration ou la peur, peuvent souvent déclencher des comportements agressifs. De plus, la manière dont nous percevons et interprétons nos émotions peut aussi influencer notre propension à l'agressivité. Par exemple, si nous interprétons nos émotions de colère comme une indication que nous avons été traités injustement, cela peut nous inciter à agir de manière agressive pour rétablir ce que nous percevons comme un équilibre juste. De même, si nous avons du mal à gérer ou à exprimer nos émotions de manière saine, cela peut nous rendre plus susceptibles de recourir à l'agression comme moyen d'expression. C'est pourquoi la régulation émotionnelle - c'est-à-dire la capacité à comprendre, à gérer et à répondre de manière appropriée à nos émotions - est souvent un élément clé pour prévenir l'agressivité et la violence. Les stratégies de régulation émotionnelle peuvent inclure des choses comme la prise de conscience de ses propres émotions, l'apprentissage de techniques de relaxation ou de réduction du stress, la pratique de la communication assertive, le développement de compétences de résolution de problèmes, et d'autres techniques similaires. Il est également important de noter que notre perception de ce qui constitue une "agression" peut varier grandement d'une personne à l'autre et d'une culture à l'autre. Ce qui est perçu comme une agression par une personne peut être perçu comme une action neutre ou même positive par une autre. Cela signifie que la compréhension et la prise en compte de ces différences de perception peuvent être cruciales pour prévenir l'agressivité et la violence.

L'agressogénicité est un terme qui désigne la capacité d'une situation à provoquer ou à encourager des comportements agressifs, et cette capacité est souvent déterminée par les trois dimensions mentionnées précédement : les facteurs biologiques, les traits de personnalité, et les interactions sociales. La perception joue un rôle clé dans l'agressogénicité. Par exemple, si une personne perçoit une situation comme étant menaçante, injuste, ou frustrante, elle peut être plus susceptible de répondre de manière agressive. De même, si une personne a une propension biologique ou personnelle à percevoir les situations de manière négative, ou si elle a été socialisée dans un environnement où l'agression est considérée comme une réponse appropriée, elle peut être plus susceptible de trouver des situations agressogènes. Il est également important de noter que les situations agressogènes ne sont pas forcément intrinsèquement agressives. Par exemple, une discussion animée ou un débat intense peut être perçu comme agressogène par une personne, mais pas par une autre. Cela signifie que la manière dont nous interprétons et réagissons aux situations peut avoir un impact majeur sur leur agressogénicité. C'est pourquoi il est crucial de développer des compétences de régulation émotionnelle, de résolution de conflits, et de communication assertive. Ces compétences peuvent nous aider à naviguer de manière plus saine et efficace dans les situations agressogènes, et à les transformer en opportunités de croissance et de compréhension mutuelle.

La science politique, en tant que discipline, s'intéresse beaucoup à la violence. La violence, en particulier la violence politique, est un aspect fondamental de l'organisation des sociétés humaines, et sa compréhension peut aider à éclairer de nombreux aspects de la politique, tels que la formation de l'État, les conflits ethniques et religieux, la révolution, le terrorisme, la guerre et la paix, entre autres. Dans la science politique, la violence est généralement considérée comme une forme d'action politique. C'est-à-dire que la violence est souvent utilisée comme un moyen d'atteindre des objectifs politiques, qu'il s'agisse de prendre le pouvoir, de défendre des droits, de résister à l'oppression, de promouvoir un changement social, ou d'autres objectifs similaires. Cependant, il est important de noter que, bien que la violence soit une forme d'action, elle n'est pas la seule, ni nécessairement la meilleure, manière d'atteindre ces objectifs. Il existe de nombreuses autres formes d'action politique, telles que le militantisme, la négociation, le dialogue, l'éducation, et d'autres stratégies non violentes, qui peuvent souvent être plus efficaces et moins destructrices. En ce qui concerne l'hypothèse que "la violence est de l'action", elle pourrait servir de point de départ pour forger une théorie sur les conditions sous lesquelles la violence devient une forme d'action politique acceptable ou préférée. Par exemple, cette théorie pourrait explorer des questions telles que : Quels sont les facteurs qui incitent les individus ou les groupes à choisir la violence comme moyen d'action politique ? Comment les structures politiques, économiques et sociales influencent-elles cette décision ? Quels sont les impacts de la violence sur la politique et la société, et comment peuvent-ils être gérés ou minimisés ?

La théorie contextuelle joue un rôle essentiel dans la compréhension de la violence, surtout dans le champ de la science politique. En se concentrant sur le rapport entre l'individu et le collectif, on peut examiner comment le contexte social, économique et politique influence le comportement violent. La dimension collective de la violence se manifeste de plusieurs façons. Par exemple, des groupes d'individus peuvent s'engager dans la violence ensemble, comme lors des émeutes ou des guerres. Dans ces cas, la dynamique de groupe peut renforcer la violence, car les individus se sentent souvent moins responsables de leurs actions lorsqu'ils agissent en groupe. De plus, la violence peut être utilisée comme un moyen d'affirmer l'identité de groupe ou de défendre les intérêts du groupe. Par exemple, des groupes ethniques, religieux ou politiques peuvent recourir à la violence pour lutter contre la discrimination ou l'oppression, ou pour revendiquer le pouvoir. Cependant, il est important de noter que la dimension collective de la violence n'est pas seulement une question de dynamique de groupe. Les structures sociales, économiques et politiques plus larges jouent également un rôle majeur dans la facilitation ou la limitation de la violence. Par exemple, des institutions politiques fortes et équitables peuvent aider à prévenir la violence en résolvant pacifiquement les conflits, tandis que l'inégalité économique ou la discrimination sociale peuvent encourager la violence en créant des frustrations et des tensions. Par conséquent, la compréhension de la dimension collective de la violence nécessite une analyse du contexte dans lequel la violence se produit, y compris les normes sociales, les institutions politiques, les conditions économiques, et d'autres facteurs similaires. C'est là que la théorie contextuelle peut être particulièrement utile.

Passer d'un fait individuel à un fait collectif implique une analyse approfondie des mécanismes de socialisation et de formation de groupe. Les comportements individuels ne deviennent des phénomènes collectifs que lorsqu'ils sont adoptés et répétés par un groupe de personnes. Ce processus peut être influencé par une variété de facteurs, tels que les normes sociales, les institutions politiques, l'éducation, les médias, et d'autres influences culturelles. Dans le cas de la violence, un acte violent peut devenir un phénomène collectif lorsque la violence est perçue comme un moyen acceptable ou nécessaire de résoudre les conflits, d'affirmer l'identité de groupe, de défendre les droits, ou d'atteindre d'autres objectifs sociaux ou politiques. Par exemple, si une société est marquée par des conflits armés, la violence peut devenir un comportement social accepté, voire attendu. La violence peut être qualifiée de fait sociétal lorsqu'elle devient un phénomène répandu et accepté au sein d'une société. Cela peut se produire lorsque la violence est institutionnalisée, comme dans le cas de la violence d'État, ou lorsque la violence est culturellement acceptée, comme dans le cas de certaines formes de violence domestique ou de violence de genre. La gestion politique de la violence est un enjeu fondamental dans la mesure où elle influe sur la manière dont la violence est perçue, gérée et prévenue dans une société. Les politiques publiques peuvent aider à prévenir la violence en promouvant l'éducation, en améliorant les conditions de vie, en mettant en place des mesures de prévention et de répression de la violence, et en promouvant la résolution pacifique des conflits.

Les théories classiques de la violence[modifier | modifier le wikicode]

Hobbes (1588 - 1979) et la théorie de la violence comme utilité sociale[modifier | modifier le wikicode]

Thomas Hobbes.

Thomas Hobbes, philosophe politique anglais du XVIIe siècle, est bien connu pour sa théorie sur l'état de nature et le contrat social, qui a des implications importantes pour notre compréhension de la violence. Dans son œuvre la plus célèbre, "Le Léviathan", Hobbes décrit l'état de nature comme un état de "guerre de tous contre tous" où la violence est omniprésente. Selon Hobbes, en l'absence d'une autorité centrale (un "Léviathan") pour imposer l'ordre, les individus sont en perpétuelle compétition pour les ressources, ce qui conduit à un état constant de peur et de violence. Cependant, Hobbes considère que les individus sont rationnels et cherchent à éviter cette condition de vie brutale. Par conséquent, ils décident de conclure un contrat social, abandonnant une partie de leur liberté en échange de la protection offerte par un État ou une autorité centrale. L'État, en retour, a le devoir de maintenir l'ordre et de protéger les citoyens de la violence. Selon la perspective de Hobbes, la violence a donc une certaine "utilité sociale" en ce sens qu'elle sert de motivation pour la création de l'État et l'établissement du contrat social. La peur de la violence dans l'état de nature incite les individus à s'unir et à créer une société organisée pour assurer leur sécurité collective. Il est important de noter, cependant, que bien que Hobbes reconnaisse cette "utilité" de la violence dans la création de l'État, il ne promeut pas la violence en soi. Au contraire, l'objectif de la constitution de l'État est précisément d'éliminer la violence de la vie quotidienne des individus. Pour Hobbes, la violence n'est donc pas une caractéristique souhaitable de la société, mais plutôt un mal à éviter.

Thomas Hobbes a détaillé trois niveaux de violence possibl dans ses écrits :

  • Les relations interindividuelles dans l'état de nature : Hobbes a dépeint l'état de nature comme un lieu de violence brutale, où il n'existe aucune autorité pour protéger les individus les uns des autres. Dans cet état, dit Hobbes, la vie de l'homme est "solitaire, pauvre, brutale, et courte". Les individus sont en conflit constant pour des ressources limitées, ce qui conduit à un état de "guerre de tous contre tous".
  • La guerre internationale : Hobbes considérait que les relations internationales existaient dans un état de nature similaire, où chaque État est souverain et où il n'existe pas d'autorité mondiale pour réguler leurs interactions. Cela peut conduire à des guerres internationales, où chaque État agit selon ses propres intérêts et utilise la force pour atteindre ses objectifs.
  • La guerre entre le souverain et les rebelles : Hobbes a également discuté de la violence qui peut survenir au sein d'un État, notamment entre le souverain et les rebelles. Pour Hobbes, toute rébellion contre le souverain est illégitime car elle viole le contrat social et peut faire retomber la société dans l'état de nature. Cependant, il admet que si le souverain ne remplit pas ses obligations (en particulier celle de protéger les citoyens), alors les citoyens ont le droit de se défendre.

Chacun de ces niveaux de violence illustre un aspect différent de la théorie politique de Hobbes. Ils mettent en évidence son point de vue selon lequel la violence est une conséquence inévitable de l'état de nature et que l'État et le contrat social sont nécessaires pour maintenir la paix et l'ordre.

Dans son ouvrage "Le Léviathan", Hobbes a identifié trois principales causes de conflit dans l'état de nature, qui mènent à la violence :

  • Rivalité : Selon Hobbes, la rivalité est causée par la compétition pour les ressources limitées. Dans l'état de nature, les individus sont en concurrence constante pour les ressources nécessaires à leur survie, comme la nourriture, l'eau et l'abri. Cette compétition peut entraîner des conflits et de la violence.
  • Méfiance : La méfiance peut aussi conduire à la violence, car dans l'état de nature, les individus ne peuvent pas faire confiance aux autres pour respecter leurs droits ou leurs biens. Dans un tel état, les individus peuvent recourir à la violence pour se protéger ou protéger leurs biens par précaution, même s'il n'y a pas de menace immédiate.
  • Fièreté (ou Gloire) : Hobbes a aussi considéré que le désir de gloire ou de réputation peut mener à la violence. Les individus peuvent se battre pour préserver leur honneur, pour gagner le respect des autres ou pour assurer leur place dans la hiérarchie sociale.

Ces causes de conflit et de violence dépeignent l'état de nature comme un lieu de peur et d'insécurité, où les individus sont constamment sur leurs gardes et prêts à se battre pour leur survie. C'est pourquoi, selon Hobbes, les individus ont un intérêt rationnel à quitter cet état de nature et à établir un contrat social, pour créer un état qui peut assurer la paix et la sécurité.

Selon la théorie de Hobbes, ces trois causes principales de conflit (rivalité, méfiance et fierté) peuvent entraîner des guerres et des conflits. Sans une autorité centrale pour maintenir l'ordre, imposer des règles et réguler le comportement, les individus sont susceptibles de se battre pour des ressources limitées, de se protéger par précaution en raison de la méfiance, et de chercher à affirmer leur réputation ou leur place dans la hiérarchie sociale. Dans l'état de nature décrit par Hobbes, ces conflits ne sont pas régulés et peuvent facilement dégénérer en violence généralisée ou en guerre. C'est pourquoi Hobbes a soutenu l'idée de la création d'un "Léviathan", ou d'un État puissant, qui pourrait contrôler la violence et maintenir l'ordre. De plus, ces concepts peuvent être extrapolés à l'échelle internationale. Les États, tout comme les individus dans l'état de nature, peuvent se retrouver en conflit pour des ressources, par méfiance mutuelle, ou pour des raisons de fierté nationale. Ces tensions peuvent déboucher sur des guerres ou des conflits internationaux. Bien que Hobbes ait décrit un état de nature potentiellement violent, son but n'était pas de promouvoir la violence, mais plutôt de souligner l'importance de l'autorité centrale (l'État) pour maintenir la paix et l'ordre.

Niveau des relations interindividuelles dans l’état de nature[modifier | modifier le wikicode]

Dans la philosophie de Hobbes, la violence est associée à un manque de raison et est souvent liée à des passions débridées. Pour Hobbes, les individus rationnels chercheraient à éviter la violence car elle mène à l'insécurité et à l'instabilité. C'est l'un des principaux arguments de Hobbes pour expliquer pourquoi les individus décident de former un État via un contrat social : pour échapper à la violence et à l'incertitude de l'état de nature. Cependant, Hobbes ne considère pas la violence comme totalement irrationnelle. Il la voit plutôt comme le produit inévitable de la poursuite rationnelle des intérêts dans une situation où il n'existe pas d'autorité pour réguler le comportement des individus. En d'autres termes, dans l'état de nature, il peut être rationnel pour un individu de recourir à la violence pour assurer sa survie ou pour protéger ses biens.

C'est l'un des paradoxes centraux dans la philosophie politique de Thomas Hobbes : la violence, bien que souvent déclenchée par des passions déraisonnables, pousse à une action rationnelle pour éviter de tels conflits à l'avenir. Dans l'état de nature, où règnent la méfiance, la rivalité et la quête de gloire, les individus peuvent être amenés à agir violemment pour garantir leur propre sécurité et leurs intérêts. Cependant, la vie dans cet état de guerre perpétuelle est dangereuse et instable, et selon Hobbes, les individus sont rationnels et cherchent naturellement à éviter ces conditions de vie brutales. C'est donc la perspective de cette violence qui incite les individus à conclure un contrat social et à créer un État. Ce passage de la violence déraisonnable à une action rationnelle pour la prévenir illustre le paradoxe au cœur de la philosophie de Hobbes. Le désir d'éviter la violence, en dépit de sa nature passionnelle et déraisonnable, motive la création d'une structure politique et sociale rationnelle et ordonnée. Bien que Hobbes propose cette théorie comme une explication du développement de la société et de l'État, il ne suggère pas que la violence soit un prérequis nécessaire ou souhaitable pour ce processus. L'objectif ultime, selon Hobbes, est d'établir un État qui puisse maintenir la paix et la sécurité, minimisant ainsi la possibilité de violence.

Il est possible d'établir une chaîne conceptuelle reliant "opposition" à "déraison", puis "passion" et enfin "anarchie". Cela peut être interprété de la façon suivante dans le contexte de la philosophie politique :

  1. Opposition : Ceci pourrait se référer à la concurrence ou à la lutte pour les ressources dans l'état de nature, tel que décrit par Hobbes. Sans une autorité pour imposer l'ordre, les individus se trouvent en opposition les uns avec les autres pour garantir leur survie.
  2. Déraison : L'opposition constante et la lutte pour la survie peuvent conduire à des comportements déraisonnables, comme la violence. Sans réglementation ou protection, les individus peuvent agir de manière impulsive ou irrationnelle pour assurer leur propre sécurité.
  3. Passion : Hobbes considérait les passions humaines comme une cause majeure de conflit et de violence. Dans l'état de nature, sans règles pour modérer ces passions, elles peuvent conduire à la déraison et à la violence.
  4. Anarchie : Si les passions humaines ne sont pas régulées par une autorité, l'état de nature peut se transformer en anarchie. Hobbes a décrit cet état comme une "guerre de tous contre tous", où il n'y a aucune loi ou ordre, et où la violence est omniprésente.

Hobbes voyait cette chaîne d'événements comme un potentiel, et non comme une fatalité. Il soutenait qu'en reconnaissant la possibilité de cette suite d'événements, les individus pouvaient choisir de former un contrat social et de créer un État, pour prévenir la déraison, modérer les passions et éviter l'anarchie.

La question de la rationalité de l'action est un sujet central en philosophie et en sciences sociales. La plupart des théories de l'action partent du principe que les individus agissent de manière rationnelle, c'est-à-dire qu'ils choisissent les moyens les plus efficaces pour atteindre leurs objectifs, compte tenu de leurs croyances et de leurs valeurs. L'idée que toute action est rationnelle peut être néanmoins remise en question. Par exemple, nous savons que les individus peuvent agir sous l'effet de l'émotion, de l'impulsion, ou à cause de contraintes cognitives qui les empêchent de faire des choix parfaitement rationnels. En outre, ce que nous considérons comme "rationnel" peut varier en fonction du contexte culturel ou personnel. En ce qui concerne la violence, il peut être difficile de considérer des actes violents comme étant "rationnels". Cependant, du point de vue de l'acteur, la violence peut sembler être une réponse rationnelle à une situation perçue comme une menace. De plus, dans certaines circonstances, la violence peut être utilisée comme un moyen stratégique pour atteindre des objectifs spécifiques. Dans le cadre de la théorie de Hobbes, par exemple, la violence dans l'état de nature peut être considérée comme une réponse rationnelle à une situation d'insécurité et de compétition pour les ressources. Cependant, Hobbes lui-même reconnaît que cette violence est néfaste et déstabilisante, et soutient que la solution la plus rationnelle est de créer un État qui peut assurer la paix et la sécurité.

Niveau de la guerre internationale[modifier | modifier le wikicode]

Le concept d'État westphalien fait référence à un certain type d'ordre international qui a émergé à la suite des traités de Westphalie en 1648, qui ont mis fin à la guerre de Trente Ans en Europe. Ces traités ont établi l'idée de la souveraineté de l'État, selon laquelle chaque État a une autorité exclusive et incontestable sur son territoire et sa population. L'ordre westphalien est donc caractérisé par un système international d'États souverains qui ne reconnaissent aucune autorité supérieure à la leur.

Dans un tel système, les États peuvent entrer en conflit ou en guerre pour diverses raisons, comme la rivalité pour le pouvoir ou les ressources, les différends territoriaux, ou les différences idéologiques. Dans ce contexte, la guerre peut être vue comme une extension de la politique par d'autres moyens, pour reprendre la célèbre formule de Carl von Clausewitz.

La théorie de Hobbes sur l'état de nature et l'état de guerre peut être appliquée à l'échelle internationale dans le système westphalien. En l'absence d'une autorité mondiale supérieure pour réguler les relations entre les États, ces derniers peuvent se retrouver dans une situation semblable à l'état de nature décrit par Hobbes, où le conflit est constant et où la sécurité est toujours menacée. De même, tout comme les individus dans l'état de nature, les États peuvent choisir de former des alliances ou des organisations internationales pour garantir leur sécurité et promouvoir leurs intérêts.

L'État, guidé par un désir intrinsèque d'accumulation de pouvoir, se trouve souvent en situation de compétition ou de conflit avec d'autres États pour l'acquisition de ressources supplémentaires. Cela peut conduire à un état de guerre latent, où chaque État cherche à maximiser sa puissance relative. Cependant, pour que l'État puisse fonctionner efficacement et assurer le bien-être de ses citoyens, il doit également être capable de gérer et de réguler sa propre violence, tant interne qu'externe. Cette tâche est généralement accomplie par le souverain et diverses institutions publiques, qui sont chargés de maintenir l'ordre et la paix à la fois à l'intérieur et à l'extérieur des frontières de l'État.

Cette hypothèse évoque des éléments essentiels du système international d'États, et des raisons pour lesquelles les États peuvent entrer en conflit.

  1. Désir d'accumulation : L'idée que les États cherchent à accroître leur puissance est fondamentale en relations internationales. La puissance peut se traduire par le contrôle de plus de territoire, de ressources, d'influence politique ou économique, etc. Cette quête d'accumulation peut conduire à des tensions ou des conflits avec d'autres États.
  2. État de guerre : Dans une perspective hobbesienne, la situation internationale sans une autorité supranationale peut ressembler à un "état de guerre" où les États doivent constamment se préparer à se défendre contre d'éventuelles menaces.
  3. Le rôle du souverain et des institutions publiques : Dans ce contexte, le souverain et les institutions publiques jouent un rôle essentiel en garantissant la sécurité et en gérant les ressources de l'État.
  4. Gestion de la violence : Un aspect crucial du pouvoir étatique est la capacité de gérer et de contrôler la violence. Cela comprend non seulement la défense contre les menaces extérieures, mais aussi le maintien de l'ordre et de la paix à l'intérieur des frontières de l'État. Dans le système westphalien, la capacité de contrôler la violence est un attribut essentiel de la souveraineté.

Ces éléments mettent en évidence la complexité des relations entre les États et la façon dont la violence et la guerre peuvent être comprises dans un contexte international.

Dans le cadre de la théorie de Hobbes, l'État a une double fonction. Il doit se défendre contre les menaces externes, mais aussi contre la violence interne. Pour Hobbes, l'État est un moyen de contenir la violence inhérente à la nature humaine. Dans son œuvre "Le Léviathan", il postule que sans une autorité centrale pour imposer l'ordre, la société serait en proie à un "état de guerre de tous contre tous". Ainsi, l'État, en tant que "Léviathan", doit exercer un pouvoir absolu pour maintenir la paix et prévenir la violence. Cette tâche comprend non seulement la défense contre les menaces externes, mais aussi la prévention et la gestion de la violence à l'intérieur de l'État. Il doit être capable de faire respecter les lois et les règles pour éviter les conflits internes et maintenir la cohésion sociale. Pour Hobbes, ce pouvoir de l'État ne doit pas être utilisé arbitrairement, mais doit toujours viser le bien-être et la sécurité des citoyens.

Pour Hobbes, la violence est une caractéristique inhérente à l'état de nature de l'homme. Par conséquent, bien que l'État, en tant qu'entité souveraine, puisse canaliser et contrôler cette violence, il ne peut jamais l'éliminer complètement. L'un des rôles principaux de l'État, selon Hobbes, est de prévenir l'auto-destruction potentielle de la société en régulant la violence interne. Cependant, il reconnaît également que la violence peut émaner du conflit entre les États eux-mêmes, souvent motivé par des désirs concurrentiels de pouvoir et de ressources. Cette tension entre le désir d'accumuler du pouvoir (et potentiellement d'engendrer la violence) et la nécessité de maintenir la paix et la stabilité est une dynamique centrale dans sa théorie. Ainsi, même si l'État est capable de contenir la violence interne à un certain degré, la possibilité de la violence - que ce soit au niveau individuel, collectif ou entre États - persiste toujours dans la pensée de Hobbes.

Niveau de la guerre entre souverain et rebelle[modifier | modifier le wikicode]

Dans la théorie de Hobbes, la guerre entre le souverain et les rebelles représente une menace majeure pour la stabilité de l'État. Cette forme de violence est particulièrement préoccupante car elle déstabilise l'autorité du souverain et peut potentiellement conduire à l'anarchie et à la désintégration de l'État. Selon Hobbes, la société est établie sur un "contrat social" où les individus acceptent de se soumettre à l'autorité d'un souverain en échange de protection et de sécurité. Cependant, si certains individus ou groupes (les "rebelles") choisissent de rejeter l'autorité du souverain et de prendre les armes contre lui, cela met en péril l'ordre social et l'état de paix que le souverain est censé maintenir. La rébellion peut être motivée par divers facteurs, comme le mécontentement envers les politiques du souverain, les inégalités socio-économiques, les différences idéologiques ou religieuses, etc. Pour Hobbes, la rébellion est une forme de "retour à l'état de nature" qui doit être évitée à tout prix, car elle peut mener à un état de guerre de tous contre tous.

Hobbes ne voit pas la violence comme quelque chose qui peut être complètement éliminé de la société ou de la nature humaine. Au contraire, il considère la violence comme une constante, un aspect fondamental de la condition humaine. Pour Hobbes, la violence est un élément inhérent à l'état de nature humaine, et bien que la création de l'État et l'établissement de l'autorité souveraine puissent aider à contrôler et à réguler cette violence, elle ne disparaît jamais entièrement.

Cette perspective peut être interprétée comme plutôt sombre, mais elle a également une dimension réaliste. Hobbes reconnaît que la violence, sous une forme ou une autre, est toujours présente dans les interactions humaines et politiques. C'est pourquoi, dans sa théorie, l'objectif principal de l'État est de contrôler et de minimiser cette violence autant que possible pour préserver l'ordre social, plutôt que de chercher à l'éliminer complètement.

George Sorel (1847 - 1922) et la violence contestataire[modifier | modifier le wikicode]

Georges Sorel.

Georges Sorel, philosophe et sociologue français, a une perspective très différente de celle de Hobbes sur la violence. Pour Sorel, la violence n'est pas seulement une menace pour l'ordre social, mais peut aussi être un outil puissant de transformation sociale et politique. Dans son œuvre la plus célèbre, "Réflexions sur la violence" (1908), Sorel développe une théorie de la violence contestataire. Selon Sorel, la violence peut être une expression légitime de la lutte des classes et un moyen nécessaire pour les travailleurs de renverser l'ordre capitaliste. Il rejette l'idée que la violence est toujours destructrice ou néfaste, et soutient que la violence révolutionnaire peut être créative et libératrice. La violence, selon Sorel, est nécessaire pour secouer l'inertie sociale et provoquer des changements radicaux. Il soutient que les grèves générales, un exemple de violence contestataire, ne sont pas simplement des tactiques de négociation, mais peuvent être des actes révolutionnaires qui perturbent l'ordre établi et ouvrent la voie à une nouvelle société. Sorel n'approuve pas toutes les formes de violence. Il distingue la violence proletarienne, qui sert un but révolutionnaire, de la violence criminelle, qu'il considère comme contre-productive et antisociale.

En effet, la pensée politique de Georges Sorel est complexe et a traversé de nombreuses phases et transformations au fil du temps. Initialement, Sorel était un socialiste et un marxiste qui croyait en la lutte des classes et en la nécessité d'une révolution pour établir une société socialiste. Il a également été un fervent syndicaliste, croyant que les syndicats étaient l'instrument par lequel les travailleurs pourraient se libérer de l'oppression capitaliste. Cependant, au fil du temps, Sorel s'est de plus en plus éloigné du marxisme traditionnel et a développé ses propres idées, parfois controversées, sur le rôle de la violence et de la mythologie dans la politique. Certaines de ces idées ont été récupérées par des mouvements d'extrême droite, ce qui a conduit certains à associer Sorel à l'extrême droite. Il est important de noter, cependant, que Sorel lui-même n'a jamais adhéré à l'idéologie d'extrême droite. Vers la fin de sa vie, il a même exprimé des critiques envers certains mouvements d'extrême droite de son époque. Néanmoins, l'interprétation de ses idées par certains groupes d'extrême droite a contribué à créer une certaine ambiguïté autour de sa figure. Bien que Sorel ait commencé sa carrière en tant que socialiste et marxiste, sa pensée a évolué de manière complexe et parfois contradictoire, et a été utilisée et interprétée de différentes manières par divers mouvements politiques après sa mort.

Dans "Réflexions sur la violence" (1906), Sorel défend l'idée que la violence n'est pas seulement un acte individuel, mais peut aussi être une force collective. Pour Sorel, la violence peut être un moyen pour un groupe, notamment la classe ouvrière, de s'affirmer face à l'oppression et d'initier un changement social. Il met en avant la notion de la grève générale, qui, dans sa vision, est une forme de violence contestataire collective. Une grève générale, pour Sorel, n'est pas seulement un outil de négociation pour améliorer les conditions de travail, mais est un moyen par lequel les travailleurs peuvent démontrer leur pouvoir, perturber l'ordre social et éventuellement catalyser une transformation sociale révolutionnaire. Ainsi, Sorel place la violence dans un contexte social et politique plus large, la considérant comme un acte qui peut avoir une signification et un impact au-delà de l'acte individuel. Il fait valoir que la violence peut servir à révéler et à défi les structures de pouvoir existantes, et peut être un outil efficace pour le changement social lorsque elle est utilisée collectivement.

La structure des chapitres de "Réflexions sur la violence" illustre bien les idées principales de Sorel et sa compréhension de la violence comme un phénomène social et politique complexe. Voici un aperçu de chaque chapitre :

  1. Lutte de classe et violence : Sorel examine comment la violence joue un rôle dans la lutte des classes. Il soutient que la violence est une part inévitable de cette lutte et que, loin d'être une menace à l'ordre social, elle peut être un outil de libération pour la classe ouvrière.
  2. La décadence bourgeoise et la violence : Sorel critique la bourgeoisie et affirme que sa décadence morale et spirituelle a contribué à la violence sociale.
  3. Les préjugés contre la violence : Sorel examine et conteste certains des préjugés courants contre la violence, notamment l'idée qu'elle est toujours destructrice ou néfaste.
  4. La grève prolétarienne : Sorel défend l'idée que les grèves peuvent être un acte révolutionnaire et pas seulement une tactique de négociation.
  5. La grève générale productive : Sorel développe sa vision de la grève générale, qu'il considère comme un outil puissant de changement social.
  6. La moralité de la violence : Sorel explore les aspects moraux de la violence. Il soutient que la violence n'est pas nécessairement immorale et peut être justifiée dans certaines circonstances.
  7. La morale des producteurs : Sorel explore l'idée de la morale des producteurs, ou la classe ouvrière, et comment cette morale peut influencer leur utilisation de la violence.

Dans l'ensemble, Sorel présente une vision de la violence qui déconstruit les préjugés courants et examine comment la violence peut être utilisée de manière productive et morale pour apporter des changements sociaux et politiques.

L'idée de Sorel est que la violence, lorsqu'elle est utilisée par la classe ouvrière pour lutter contre l'oppression et l'exploitation, peut être considérée comme moralement justifiée. Selon lui, la violence peut servir de moyen pour remettre en question et transformer les rapports de pouvoir injustes et inégaux qui existent dans une société capitaliste. Il voit la violence comme un outil que la classe ouvrière peut utiliser pour se libérer de l'exploitation et de l'oppression bourgeoises. C'est dans ce contexte qu'il parle de la "moralité de la violence". Il faut cependant souligner que ces vues sont controversées et ont été critiquées pour leur potentialisation de la violence. Bien que Sorel voit la violence comme un moyen potentiel de réaliser des changements sociaux, il est important de considérer les implications éthiques et les conséquences possibles de l'utilisation de la violence à ces fins.

Dans la perspective de Sorel, la lutte des classes est un moyen de perturber et de contester les structures de pouvoir existantes dans la société. Il voit la violence comme une force potentiellement émancipatrice que la classe ouvrière peut utiliser pour s'affirmer et faire pression pour un changement social et économique. Il considère la grève générale comme un exemple clé de ce type de violence "positive". Pour Sorel, une grève générale n'est pas seulement un moyen de négocier de meilleures conditions de travail, mais aussi une façon pour les travailleurs de démontrer leur pouvoir, de perturber l'ordre social et économique existant, et de forcer les classes dirigeantes à reconnaître et à répondre à leurs demandes.

Dans le contexte de mouvements politiques radicaux ou extrémistes, la théorisation de la violence comme outil légitime et moral peut mener à des abus, à une escalade de la violence, et même à des actes de terrorisme. Cette logique a été utilisée par certains mouvements anarchistes, révolutionnaires ou extrémistes pour justifier des actions violentes contre ceux qu'ils perçoivent comme leurs oppresseurs. Cela souligne le danger inhérent à la conception de la violence comme un outil légitime de changement social. Même si cette idée peut sembler séduisante dans le contexte de la lutte contre l'oppression et l'injustice, il est important de garder à l'esprit les conséquences potentiellement dévastatrices de la violence. Elle peut entraîner une escalade des tensions et des conflits, causer des souffrances et des dommages importants, et, dans les cas extrêmes, mener à des actes de terrorisme.

Certains mouvements extrémistes peuvent justifier leur recours à la violence en arguant qu'elle est nécessaire pour lutter contre l'oppression, ce qui peut mener à une escalade de la violence et à des situations extrêmement dangereuses. Cette logique peut être retrouvée dans certains courants de l'anarchisme, mais aussi dans divers autres mouvements radicaux ou extrémistes. L'anarchisme, en tant que philosophie politique, est en réalité assez diversifié et tous les anarchistes ne prônent pas l'usage de la violence. Certains courants, comme l'anarcho-pacifisme, rejettent explicitement la violence. D'autres peuvent voir la violence comme un mal nécessaire ou comme un outil de légitime défense contre l'oppression. Néanmoins, lorsque des individus ou des groupes adoptent la violence comme stratégie principale de résistance ou de révolte, cela peut mener à des actes de terrorisme ou à des situations de conflit violent et prolongé. Ces situations sont souvent contre-productives, provoquant des souffrances et des destructions massives, sans nécessairement apporter de réels progrès vers la justice ou l'égalité.

Le débat sur la morale et la violence est indissociable des discussions politiques et de notre compréhension de ce qu'est la politique. La politique est souvent considérée comme l'art de la négociation et du compromis, où l'objectif est de parvenir à une solution qui, bien qu'elle ne soit pas nécessairement parfaite pour tous les participants, est acceptable pour la majorité. Cependant, dans les situations où une partie se sent systématiquement exclue ou opprimée, ou quand les mécanismes politiques traditionnels semblent incapables de résoudre les problèmes, certains peuvent se tourner vers la violence en la considérant comme une forme de communication politique ou comme le seul moyen de faire entendre leur voix. Le débat sur la moralité de la violence dans de tels contextes est complexe et souvent polarisé. Certains affirment que la violence est toujours immorale, quelles que soient les circonstances, tandis que d'autres peuvent la considérer comme un mal nécessaire ou même comme un acte moral dans certaines situations d'oppression.

René Girard (1923 - 2015) et la violence sacrificielle[modifier | modifier le wikicode]

René Girard.

René Girard était un philosophe, anthropologue, historien et critique littéraire français. Ses travaux ont principalement porté sur la violence, le désir mimétique et le sacrifice dans la culture humaine. Il a développé une théorie selon laquelle le désir humain est fondamentalement mimétique, c'est-à-dire que les gens désirent ce que les autres désirent, ce qui crée de la rivalité et peut mener à la violence. Selon Girard, cette violence mimétique est si destructrice qu'elle menace la survie de la communauté. Pour éviter l'autodestruction, les communautés trouvent un bouc émissaire à blâmer et à punir. Cette victime, qui est souvent choisie parce qu'elle est différente ou marginalisée, est ensuite sacrifiée pour restaurer l'harmonie au sein de la communauté. Cette théorie du bouc émissaire est une des contributions majeures de Girard à la compréhension de la violence dans les sociétés humaines. Girard a également développé la théorie du désir mimétique pour expliquer le rôle de la violence dans la religion. Selon lui, les religions sont des systèmes qui ont évolué pour canaliser et contrôler la violence mimétique. Le rôle central du sacrifice dans de nombreuses religions est, selon Girard, une manifestation de cette fonction de contrôle de la violence. Les idées de René Girard ont eu une grande influence dans de nombreux domaines, y compris la littérature, la philosophie, la théologie, la psychologie, l'anthropologie et les études de genre. Cependant, comme pour toutes les théories, elles ont aussi été critiquées et débattues.

René Girard a consacré une grande partie de sa vie à explorer des questions de philosophie, de religion et d'éthique. Ses contributions ont largement influencé ces domaines, notamment par le biais de ses idées sur la violence, le désir mimétique et le sacrifice. Il a été professeur dans plusieurs universités prestigieuses aux États-Unis, dont l'Université Johns Hopkins, l'Université de Buffalo, et l'Université de Stanford. Il a été élu à l'Académie française en 2005, un honneur qui reconnaît son apport considérable à la pensée française. Il a écrit de nombreux livres influents, dont "La violence et le sacré" (1972), "Des choses cachées depuis la fondation du monde" (1978), et "Le bouc émissaire" (1982). Ces ouvrages présentent des perspectives innovantes sur la façon dont la violence est générée et gérée au sein des sociétés humaines. Girard s'est également intéressé à la manière dont les mécanismes de la violence et du sacrifice sont reflétés dans la littérature, analysant les œuvres de grands écrivains comme Dostoïevski, Proust, et Shakespeare pour illustrer ses théories. Son œuvre, bien que profonde et souvent complexe, offre des idées précieuses pour comprendre la nature de la violence et les moyens par lesquels les sociétés tentent de la contenir et de la gérer.

Les œuvres de René Girard, "La Violence et le sacré" (1972), "Le Bouc émissaire" (1982), et "Je vois Satan tomber comme l'éclair" (1999), où il traite du sacrifice, sont essentielles pour comprendre sa pensée. Dans "La Violence et le sacré", Girard développe sa théorie du désir mimétique. Selon lui, le désir humain n'est pas inné mais acquis. Les hommes désirent des objets, des statuts, des idées, non pour leur valeur intrinsèque, mais parce qu'ils sont désirés par d'autres. Ce mécanisme crée de l'envie, de la rivalité, et finalement de la violence au sein des sociétés. Pour prévenir l'escalade de la violence, les sociétés développent alors le mécanisme du bouc émissaire : la communauté se débarrasse de ses tensions internes en les projetant sur une personne ou un groupe, qui est ensuite sacrifié. Ce mécanisme est à la fois violent et sacré car il rétablit la paix sociale, et est donc considéré comme sacré par la communauté. Dans "Le Bouc émissaire", Girard pousse plus loin son analyse en montrant comment ce mécanisme est présent dans de nombreux mythes et textes religieux, et comment il structure les sociétés humaines. Girard ne justifie ni n'idéalise la violence ; il cherche à l'expliquer. En comprenant mieux les mécanismes qui génèrent la violence, il espère que nous pourrons trouver des moyens de la prévenir.

Pour René Girard, la violence doit être comprise comme un phénomène sociétal et non seulement individuel. Il a introduit le concept de "violence mimétique" pour expliquer comment la violence se propage dans une société. Selon lui, les êtres humains ont tendance à copier ou à "imiter" le comportement des autres, y compris le comportement violent. Ainsi, un acte violent peut en provoquer d'autres, créant une spirale de violence. Ce n'est donc pas simplement une question d'individus violents, mais d'un processus social de propagation de la violence. De plus, Girard a également théorisé le mécanisme du "bouc émissaire", selon lequel une société peut tenter de résoudre ses tensions internes en s'en prenant à un individu ou à un groupe, qui est alors persécuté. C'est une autre manière dont la violence peut se manifester de manière collective, et non seulement individuelle.

Le mimétisme se réfère à une tendance inhérente à l'être humain de copier les désirs, les comportements et les attitudes des autres. C'est un processus à la fois inconscient et automatique qui joue un rôle crucial dans l'apprentissage social et la formation de notre identité. Selon Girard, le mimétisme conduit à la rivalité et à la violence parce que les individus commencent à se disputer les mêmes désirs et objectifs. Par exemple, si deux personnes désirent la même chose, elles deviennent des rivaux et entrent en conflit. Dans la théorie du bouc émissaire de Girard, la violence mimétique est également importante. Lorsqu'un groupe est confronté à une escalade de violence mimétique, il cherche souvent un moyen de décharger cette violence sur un bouc émissaire - une personne ou un groupe qui est ensuite persécuté ou éliminé, rétablissant temporairement la paix dans la communauté. Cependant, puisque le mimétisme et le désir sont encore présents, le cycle de la violence est susceptible de recommencer. C'est une théorie qui offre un aperçu fascinant de la façon dont la violence peut se propager et se perpétuer dans une société, et comment les sociétés cherchent à gérer cette violence.

La théorie de Girard soutient que toutes les cultures sont fondées sur un acte de violence originel, qui est souvent mythologisé et ritualisé à travers des pratiques sacrificielles. La violence, dans ce sens, n'est pas seulement une aberration ou une déviation de la norme sociale, mais elle est centrale dans la formation et le maintien des sociétés humaines. C'est cette violence qui, selon Girard, mène à l'émergence de la culture, des normes sociales et de l'ordre moral. En outre, Girard souligne l'importance du sacrifice comme moyen de canaliser et de contrôler la violence au sein de la société. Le sacrifice agit comme un mécanisme de défense contre l'escalade de la violence en dirigeant la violence collective vers un bouc émissaire, qui est souvent une figure marginale ou un étranger. Le bouc émissaire absorbe la violence collective, permettant à la société de maintenir la paix et l'ordre, du moins temporairement. Cette vision de la violence met en évidence la tension inhérente entre notre désir de vivre dans des sociétés pacifiques et notre dépendance historique envers la violence comme moyen de maintenir l'ordre social. C'est une tension qui, selon Girard, continue de se jouer dans les sociétés modernes.

Girard soutient que la violence, en tant que partie intégrante de la structure sociale, est incorporée dans les mythes, les rituels et les pratiques sacrificielles de toutes les sociétés. Les mythes sont les histoires que les sociétés se racontent sur elles-mêmes, leurs origines et leurs valeurs. Ils servent souvent à légitimer l'ordre social existant et à expliquer pourquoi les choses sont comme elles sont. Dans de nombreux mythes, la violence joue un rôle crucial, souvent en tant que force destructive qui doit être maîtrisée pour le bien de la société. Les rituels, d'autre part, sont des actions symboliques répétitives qui servent à renforcer les normes et les valeurs sociales. Les rituels peuvent souvent impliquer des actes de violence symbolique, comme le sacrifice d'animaux ou, dans certaines sociétés, d'humains. Enfin, la pratique du sacrifice, comme mentionné précédemment, est un moyen de canaliser la violence collective. En se concentrant sur le bouc émissaire, la société est capable de libérer sa violence de manière contrôlée, évitant ainsi l'escalade de la violence non contrôlée. Dans toutes ces instances, la violence est non seulement acceptée, mais elle est même considérée comme nécessaire au maintien de l'ordre social. C'est une idée troublante, mais qui est essentielle pour comprendre comment les sociétés gèrent la violence inhérente à la condition humaine.

La théorie du bouc émissaire de René Girard est un mécanisme par lequel une société canalise et gère sa violence inhérente. Selon cette théorie, lorsque les tensions et les conflits au sein d'une communauté atteignent un certain niveau, la communauté se tourne vers un individu ou un groupe spécifique (le bouc émissaire) sur lequel elle projette toute sa violence collective. Ce bouc émissaire est souvent quelqu'un qui est déjà marginalisé ou vu comme différent. L'acte d'accuser le bouc émissaire et de diriger la violence collective vers lui sert à restaurer l'équilibre et l'unité dans la communauté. Après l'acte, la paix est rétablie, mais cette paix est précaire car elle repose sur la violence dirigée vers le bouc émissaire. Girard a soutenu que cette pratique du bouc émissaire est au cœur de nombreuses cultures et religions, et qu'elle a joué un rôle clé dans la formation des sociétés humaines. Cependant, il a également noté que cette méthode de gestion de la violence a des limites, car elle n'aborde pas les causes profondes de la violence et peut en fait perpétuer le cycle de violence si les conditions sous-jacentes qui génèrent la violence ne sont pas résolues.

René Girard a beaucoup travaillé sur les mythes pour comprendre comment la violence est intégrée dans nos sociétés. Selon lui, les mythes ne sont pas simplement des récits, mais des représentations de la violence sociale et de la façon dont elle est gérée par les sociétés. Pour Girard, le mythe fonctionne en dissimulant la violence réelle qui se produit dans la société. Il réinterprète cette violence comme quelque chose de nécessaire, voire de sacré. En ce sens, le mythe opère comme une sorte de mécanisme de défense qui aide la société à gérer la réalité de sa propre violence. Prenons l'exemple du mythe sacrificiel, qui est commun à de nombreuses cultures. Dans ces mythes, un individu ou un animal est souvent sacrifié pour apaiser les dieux ou pour le bien de la communauté. Ce sacrifice est perçu comme nécessaire pour maintenir l'ordre social et prévenir une plus grande violence ou le chaos. La théorie du sacrifice de Girard suggère que ce type de mythe a une fonction importante dans la canalisation de la violence collective et la réintégration de cette violence dans l'ordre social. En d'autres termes, le mythe du sacrifice fournit un moyen d'exprimer la violence d'une manière contrôlée et symbolique qui maintient l'ordre social et prévient une escalade de violence. Cependant, Girard a également souligné que cette façon de gérer la violence a ses limites et peut perpétuer la violence en la justifiant et en la rendant acceptable. Par conséquent, il a plaidé pour une prise de conscience de la nature de la violence et de son rôle dans nos sociétés.

Selon Girard, chaque société doit gérer sa propre violence inhérente, et cela se fait souvent par le biais de rituels et de mythes. Ces rituels et mythes servent de soupapes de sécurité pour la société, permettant une expression contrôlée de la violence qui pourrait autrement menacer de déchirer la structure sociale. Un des concepts clés dans la pensée de Girard est le "mécanisme du bouc émissaire". Dans de nombreuses sociétés, lorsqu'une tension ou un conflit atteint un certain niveau, la société se tourne vers un individu ou un groupe (le bouc émissaire) pour porter la faute. En persécutant le bouc émissaire, la société décharge sa tension violente d'une manière qui préserve l'ordre social. Cependant, bien que cette "violence contrôlée" puisse temporairement apaiser les tensions, elle ne résout pas les conflits sous-jacents. Au contraire, elle peut perpétuer un cycle de violence en justifiant l'agression contre le bouc émissaire. Cette tension non résolue peut ressurgir plus tard, nécessitant un autre bouc émissaire pour rétablir temporairement la paix. Pour Girard, comprendre ce processus est crucial pour rompre le cycle de la violence et chercher des moyens plus pacifiques de résoudre les conflits.

René Girard propose une compréhension révolutionnaire du sacrifice en tant que mécanisme social et rituel religieux. Dans cette vision, le sacrifice est une sorte de technique de gestion de la violence communautaire. Dans le cadre de la théorie du bouc émissaire de Girard, le sacrifice est un moyen de diriger la violence inhérente à la communauté vers une cible spécifique (la victime sacrificielle) afin d'éviter que cette violence ne se propage et n'engendre un conflit généralisé. L'acte de sacrifice est souvent enveloppé dans le langage et la symbolique religieuse, donnant l'impression que c'est un acte demandé par les dieux pour maintenir l'ordre du monde. En réalité, c'est un acte sociétal visant à maintenir l'ordre interne de la communauté. Les individus de la communauté peuvent ne pas être conscients du véritable rôle joué par la violence dans ce processus.

La théorie de Girard propose que la violence sacrificielle est une forme de violence substitutive. Elle est mise en œuvre pour apaiser les tensions et la violence latente au sein d'une communauté, en dirigeant cette violence vers une victime sacrifiée, souvent appelée le "bouc émissaire". Dans ce processus, la violence intrinsèque de la communauté est transférée à cette victime, qui en porte la charge et est ultimement détruite ou exclue de la communauté. Cette violence sacrifiée est souvent présentée comme un acte nécessaire et juste, exigé par une divinité ou pour le bien de la communauté. Cette pratique permet d'évacuer la violence collective sans déclencher de conflit interne plus large. En identifiant un bouc émissaire, la communauté redirige sa violence et ses tensions internes, prévenant ainsi l'émergence de conflits destructeurs.

Selon la théorie de René Girard, le sacrifice joue un rôle fondamental dans la gestion des tensions et des conflits internes à une société. Par le biais du sacrifice, la violence et les frustrations accumulées au sein du groupe sont transférées vers une victime substitutive, le bouc émissaire, qui est alors sacrifiée pour rétablir l'harmonie et la paix. La désignation du bouc émissaire est un processus collectif qui permet d'éviter que la violence ne se déchaîne à l'intérieur du groupe, ce qui pourrait menacer sa cohésion et même sa survie. Le sacrifice devient ainsi un rituel structurant qui permet de gérer la violence intrinsèque à la société. Ce rituel de sacrifice revêt une symbolique puissante. Il représente l'expiation collective des fautes, des tensions et des conflits, et la restauration de l'ordre social. Cependant, il est important de noter que ce processus repose sur une certaine forme d'injustice, puisque le bouc émissaire est souvent choisi arbitrairement et est sacrifié pour des fautes qu'il n'a pas nécessairement commises.

La théorie du bouc émissaire de René Girard se base sur cette idée de transfert de la violence collective vers un individu ou un groupe spécifique, choisi comme victime sacrificielle. Ce bouc émissaire est chargé symboliquement de tous les péchés, les tensions et les frustrations de la communauté, et son sacrifice permet de restaurer la paix et l'harmonie au sein du groupe. Ce processus permet d'éviter l'escalade de la violence au sein de la société. En effet, si la violence collective n'était pas canalisée de cette manière, elle pourrait conduire à des conflits plus graves, voire à l'autodestruction du groupe. C'est ce qui donne au sacrifice sa fonction régulatrice et apaisante.

Selon la théorie de René Girard, le bouc émissaire est une figure fondamentale dans toutes les sociétés, dans la mesure où il joue un rôle essentiel dans la régulation de la violence collective. En transférant cette violence sur le bouc émissaire, la société peut éviter une escalade de la violence qui pourrait menacer sa survie. Le bouc émissaire est donc sacrifié pour le bien de la collectivité. Cependant, ce mécanisme repose sur un paradoxe : pour contrôler la violence, la société doit elle-même recourir à la violence, sous une forme ritualisée et symbolique. Cette violence est justifiée par le mythe du bouc émissaire, qui est accusé de tous les maux de la société et sacrifié pour apaiser les tensions collectives. En outre, la désignation du bouc émissaire ne repose pas sur une rationalité objective. L'individu ou le groupe choisi comme bouc émissaire est souvent désigné de manière arbitraire, sans véritable preuve de sa culpabilité. Cette désignation sert avant tout à canaliser la violence collective, plutôt qu'à rendre justice. Cette théorie a des implications importantes pour notre compréhension des phénomènes sociaux tels que la stigmatisation, l'exclusion et la violence collective. Elle suggère également que toute tentative de créer une société totalement non-violente pourrait être vouée à l'échec, car la violence joue un rôle fondamental dans la régulation des relations sociales.

Selon Girard, le rite du bouc émissaire permet à la société de maintenir ou de restaurer sa cohésion. Dans les moments de crise, quand la tension et la violence augmentent, la désignation et le sacrifice d'un bouc émissaire fournissent une forme de résolution collective. La violence est canalisée sur une cible précise, évitant ainsi son étalement anarchique dans la société, ce qui pourrait menacer son unité et sa stabilité. Par le sacrifice du bouc émissaire, la société espère rétablir l'ordre et l'harmonie, réduire la tension et mettre fin au conflit. En fait, la société espère un retour à la normale, à un état antérieur à la crise. Le sacrifice du bouc émissaire est alors perçu comme un moyen d'apaiser les dieux, de purifier la communauté et d'effacer la faute qui a provoqué la crise. La violence est ainsi ritualisée et contrôlée, transformée en un acte bénéfique pour la communauté.

État et violence politique[modifier | modifier le wikicode]

L'État et la violence politique entretiennent une relation complexe. En général, l'État détient le monopole de la violence légitime dans une société, une notion introduite par le sociologue Max Weber. Cela signifie que seul l'État a le droit d'utiliser la force physique pour maintenir l'ordre, appliquer la loi et défendre la nation contre les menaces extérieures. Cependant, la violence politique va au-delà de l'usage légitime de la force par l'État. Elle englobe également les actes de violence perpétrés par des acteurs non étatiques, comme les groupes terroristes ou rebelles, qui cherchent à atteindre leurs objectifs politiques.

La violence politique peut également comprendre la violence étatique illégitime, comme la répression, la torture, les disparitions forcées ou les exécutions extrajudiciaires. Ces actes sont généralement commis par des régimes autoritaires pour maintenir leur pouvoir, mais peuvent également se produire dans des démocraties, généralement lors de situations de crise. De plus, l'État peut également être le cible de la violence politique, comme dans les cas de coups d'État, de révolutions ou d'insurrections. Dans ces situations, des groupes d'individus tentent de renverser le gouvernement en place par la force.

Enfin, il est important de mentionner que la violence politique n'est pas toujours physique. Elle peut également être structurelle, comme lorsque certaines personnes ou groupes sont systématiquement exclus du pouvoir politique, économique ou social. De même, la violence symbolique, telle que la propagande ou le discours de haine, peut également être considérée comme une forme de violence politique.

Violence politique et violence extrême[modifier | modifier le wikicode]

Il existe divers concepts pour explorer la question de la violence, notamment en ce qui concerne la violence dans un contexte politique. Les quatre principaux concepts sont :

  • La violence politique classique se réfère à l'utilisation de la force pour atteindre un objectif politique. Il peut s'agir de violence étatique, comme la répression ou la guerre, ou de violence non étatique, comme le terrorisme ou la rébellion armée.
  • La violence infrapolitique concerne les actes de violence qui sont politiques par nature, mais qui ne sont pas nécessairement reconnus comme tels. Cela peut inclure des formes de violence structurelle, comme l'exclusion systématique de certains groupes de la vie politique, économique ou sociale.
  • La violence métapolitique est une notion plus complexe qui se réfère à la violence qui dépasse le domaine politique traditionnel. Il peut s'agir d'actes de violence qui sont motivés par des croyances ou des idéologies qui transcendent la politique traditionnelle, comme le fondamentalisme religieux ou le fanatisme idéologique.
  • La violence extrême, enfin, fait référence à des actes de violence qui sont si atroces et dévastateurs qu'ils dépassent notre compréhension habituelle de ce que constitue la violence. Cela peut inclure des actes tels que le génocide, les crimes contre l'humanité ou les formes les plus brutales de terrorisme. Le terme "barbare" est souvent utilisé pour désigner ceux qui commettent de tels actes, suggérant qu'ils ont transgressé les limites de ce qui est considéré comme un comportement acceptable ou civilisé.

Ces concepts ne sont pas mutuellement exclusifs et peuvent se chevaucher dans de nombreux cas. Par exemple, un acte de violence politique peut aussi être une forme de violence métapolitique s'il est motivé par une idéologie extrémiste.

Concept classique de violence politique[modifier | modifier le wikicode]

La violence politique en tant que concept classique est intrinsèquement liée à la notion de pouvoir et d'autorité. Elle peut être employée soit par un État ou une puissance publique dans le but d'exercer, de maintenir ou d'étendre leur pouvoir, soit par des groupes ou des individus cherchant à contester ce pouvoir. Dans ce contexte, la violence peut prendre plusieurs formes, allant de la violence physique directe, telle que la guerre ou la répression, à la violence structurelle ou systémique, telle que la discrimination institutionnalisée ou l'oppression économique. La question de la légitimité de la violence politique est complexe et peut varier considérablement en fonction du contexte et de la perspective. Par exemple, une action qui peut être considérée comme une violence politique illégitime par certains (comme le terrorisme ou la rébellion armée) peut être vue par d'autres comme une résistance légitime à l'oppression. La violence politique est donc une forme complexe de violence qui implique une multitude de facteurs, y compris le pouvoir, l'autorité, la résistance, l'oppression et la légitimité.

Les deux arguments suivants sont deux justifications courantes de l'utilisation de la violence, souvent articulées dans le cadre de la politique ou des conflits armés :

  1. La violence comme principe d'action défensive : Cet argument soutient que l'usage de la violence est justifiable s'il sert à protéger un individu, un groupe ou un État contre une menace imminente ou réelle. On peut retrouver cette notion dans le principe de légitime défense. Cela peut également s'appliquer à l'usage de la force par l'État pour maintenir l'ordre public, prévenir la criminalité ou protéger la sécurité nationale. Dans ce cas, la question clé est souvent de déterminer jusqu'à quel point l'utilisation de la violence est proportionnée à la menace, et si d'autres moyens moins violents auraient pu être utilisés à la place.
  2. La violence au service d'une cause juste: Cet argument justifie l'utilisation de la violence en tant que moyen d'atteindre un objectif plus large ou plus noble. Cela peut inclure la lutte pour l'égalité sociale, la libération nationale, ou la défense de certaines valeurs ou croyances. Dans ce cas, la violence est souvent perçue comme un mal nécessaire, justifiée par la gravité de l'injustice à combattre ou l'importance de l'objectif à atteindre. Cette approche peut mener à des situations où les moyens (la violence) sont justifiés par la fin (la cause juste).

La violence politique dans le but de défendre l'état de droit est une question complexe qui suscite de nombreux débats. L'utilisation de la force par l'État, par exemple à travers la police ou l'armée, est généralement justifiée par la nécessité de maintenir l'ordre public et la sécurité. Cependant, cette force doit toujours être utilisée de manière proportionnée et conforme aux principes de l'état de droit. L'un des défis majeurs auxquels sont confrontés les acteurs publics est de trouver le juste équilibre entre l'utilisation de la force pour maintenir l'ordre et le respect des libertés et droits fondamentaux des citoyens. Une utilisation excessive de la force peut non seulement violer ces droits, mais aussi provoquer davantage de mécontentement et de résistance de la part de la population. Par ailleurs, la violence de l'État peut également générer un cycle de violence : des actes de violence commis par l'État peuvent entraîner des représailles ou des actes de résistance violents de la part de ceux qui se sentent oppressés, ce qui peut à son tour conduire à une escalade de la violence. Ainsi, même si la violence peut sembler être un outil efficace pour maintenir l'ordre à court terme, elle peut aussi s'avérer contre-productive et déstabilisante à long terme. C'est pourquoi il est crucial que les acteurs publics cherchent toujours à utiliser des moyens non violents pour résoudre les conflits et les tensions chaque fois que cela est possible.

La question symbolique et de savoir jusqu’où il est possible d’aller. L'impact de la "bavure" - une action excessive, illégitime ou cruelle, généralement menée par les forces de l'ordre - qui peut entraîner de graves conséquences non seulement pour la personne directement concernée, mais aussi sur le plan symbolique et sociopolitique.

La notion de "bavure" souligne la frontière entre l'usage justifié de la force par l'État dans l'exercice de ses fonctions et ce qui est perçu comme une transgression de cette légitimité. Les conséquences d'une telle transgression peuvent être profondes et multiples :

  1. Sur le plan individuel, les victimes de bavures peuvent subir des préjudices physiques et psychologiques graves, et dans les cas les plus extrêmes, ces incidents peuvent entraîner la mort.
  2. Sur le plan symbolique, une bavure peut éroder la confiance du public envers les institutions de l'État et sa perception de leur légitimité. Cela peut engendrer des sentiments de méfiance et de peur, mais aussi de colère et de révolte, potentiellement menant à des mouvements de protestation ou des troubles civils.
  3. Sur le plan sociopolitique, les bavures peuvent susciter des débats publics intenses sur la gouvernance, les droits de l'homme, l'État de droit, et la responsabilité des institutions et des individus. Cela peut aussi engendrer des appels à des réformes structurelles.

Par conséquent, les "bavures" sont loin d'être des incidents isolés : elles sont profondément imbriquées dans le tissu sociopolitique et peuvent avoir des implications importantes pour la stabilité et la légitimité de l'État.

L'usage de la violence par le pouvoir politique nécessite une justification, souvent formulée à travers un discours public. Cette rationalisation est essentielle pour maintenir la légitimité de l'État aux yeux de la population. Elle est généralement basée sur des principes de légalité, de nécessité et de proportionnalité.

  1. Légalité : L'action violente doit être conforme à la loi en vigueur. Il s'agit du principe de base pour justifier l'usage de la violence par l'État. Toutefois, il convient de noter que la légalité seule n'est pas toujours suffisante pour assurer la légitimité, en particulier si les lois en question sont perçues comme injustes ou abusives.
  2. Nécessité : L'usage de la violence doit être présenté comme nécessaire pour atteindre un certain objectif, généralement lié à la préservation de l'ordre public, de la sécurité nationale, ou du bien-être général de la population. Le concept de nécessité est souvent invoqué dans les situations de crise ou de menace imminente.
  3. Proportionnalité : La violence utilisée doit être proportionnelle à la menace ou à l'infraction. Ce principe vise à éviter une répression excessive et arbitraire.

En plus de ces principes, l'État doit également faire preuve de transparence et d'accountabilité en matière d'usage de la violence. Cela implique une communication claire sur les raisons de l'usage de la violence, ainsi qu'une mise en place de mécanismes de contrôle et de responsabilisation pour prévenir les abus. Cela étant dit, il est important de rappeler que même avec une rationalisation bien construite, l'usage de la violence par l'État peut toujours susciter des contestations et des débats, en particulier si elle est perçue comme étant disproportionnée, injuste, ou discriminatoire.

Dans certains cas, la violence peut être considérée comme étant au service d'une cause juste, en particulier quand elle est utilisée pour résister à l'oppression, défendre les droits de l'homme, ou protéger les plus vulnérables. C'est ce que l'on appelle souvent la théorie de la "guerre juste" ou de la "violence justifiée". Cette approche se fonde sur l'idée que la violence peut être moralement acceptable si elle vise à atteindre un objectif plus important, comme la justice sociale, la liberté, ou la paix. Par exemple, beaucoup considèrent que l'utilisation de la violence par les mouvements de résistance pendant la Seconde Guerre mondiale était justifiée face à l'oppression nazie. Cependant, cette perspective est aussi sujette à controverse. D'une part, il y a le risque que le concept de "violence justifiée" soit utilisé pour légitimer des actes de violence abusifs ou disproportionnés. D'autre part, certains philosophes et penseurs politiques soutiennent que la violence, même au service d'une cause juste, reste fondamentalement immorale et destructrice.

Le "droit d'ingérence" est une notion qui a émergé dans les années 1980 et qui fait référence à l'idée que la communauté internationale a le droit - voire le devoir - d'intervenir dans les affaires internes d'un État pour protéger les droits de l'homme et prévenir les catastrophes humanitaires. Cela constitue une dérogation au principe traditionnel de non-ingérence, qui fait de la souveraineté de l'État une norme absolue du droit international. Cette évolution est principalement due à une prise de conscience croissante des souffrances humaines causées par les conflits internes et les régimes oppressifs. Cependant, comme la notion de "violence juste", le droit d'ingérence est aussi une notion controversée. Certains affirment qu'il peut être utilisé comme prétexte pour des interventions militaires motivées par des intérêts géopolitiques plutôt que par des considérations humanitaires. D'autres soutiennent que l'intervention internationale peut parfois aggraver les conflits qu'elle cherche à résoudre. Malgré ces débats, le droit d'ingérence a influencé la manière dont la communauté internationale aborde les crises humanitaires et a contribué à la création de la notion de "responsabilité de protéger", adoptée par les Nations Unies en 2005, qui stipule que si un État ne peut pas ou ne veut pas protéger sa population contre des atrocités de masse, il revient à la communauté internationale de le faire.

Le droit d'ingérence humanitaire représente un changement significatif dans la philosophie du droit international. Traditionnellement, le droit international est fondé sur le respect de la souveraineté des États, ce qui signifie que chaque État a le droit de contrôler ses propres affaires intérieures sans ingérence extérieure. Cependant, le droit d'ingérence humanitaire remet en question cette idée, affirmant que la communauté internationale a le droit et même le devoir d'intervenir dans les affaires intérieures d'un État lorsque les droits de l'homme sont gravement violés, comme dans les cas de génocide, de crimes de guerre ou de crimes contre l'humanité. C'est donc une notion controversée. D'un côté, elle est louée pour sa capacité à protéger les individus des violations massives des droits de l'homme. De l'autre, elle est critiquée pour son potentiel à être utilisée comme prétexte pour des interventions militaires motivées par des intérêts géopolitiques plutôt que par de véritables préoccupations humanitaires. De plus, il existe une crainte que l'ingérence humanitaire puisse aggraver les conflits qu'elle cherche à résoudre. Enfin, l'application du droit d'ingérence humanitaire pose des défis pratiques. Qui décide quand une intervention est nécessaire? Comment s'assurer que l'intervention est menée de manière éthique et efficace? Ces questions continuent d'être débattues par les juristes, les politologues et les acteurs internationaux.

Le concept de violence infrapolitique[modifier | modifier le wikicode]

La violence infrapolitique se réfère généralement à la violence qui est exercée en dehors des structures traditionnelles du pouvoir étatique. Elle est souvent liée à des acteurs non étatiques, tels que des groupes armés, des organisations criminelles ou des milices privées, qui exercent leur propre forme de pouvoir et de contrôle, parfois à l'intérieur des frontières d'un État-nation, mais en dehors du contrôle direct de ce dernier. Cette forme de violence peut se manifester de différentes façons, allant du crime organisé et du trafic de drogues à la violence politique et ethnique. Elle est souvent liée à des situations de faiblesse ou de défaillance de l'État, où le pouvoir étatique est insuffisant pour maintenir l'ordre et garantir la sécurité. La violence infrapolitique est un phénomène complexe et multiforme qui pose de nombreux défis en termes de sécurité, de gouvernance et de droits de l'homme. Sa prise en compte est essentielle pour comprendre les dynamiques contemporaines de la violence et du pouvoir. Dans les années 1980 et au-delà, avec la mondialisation et les changements économiques et politiques, on a vu une augmentation de la violence infrapolitique dans de nombreux contextes, alors que des acteurs non étatiques ont acquis une influence croissante. Cette tendance a soulevé de nouvelles questions sur la façon dont nous comprenons la violence, le pouvoir et le rôle de l'État.

La violence infrapolitique peut brouiller les frontières entre ce qui est considéré comme politique et ce qui est considéré comme criminel. Dans de nombreux cas, les acteurs qui exercent cette violence peuvent naviguer entre la légalité et l'illégalité, utilisant parfois des mécanismes politiques pour renforcer leur pouvoir tout en se livrant à des activités illégales. Ces acteurs peuvent, par exemple, participer à des élections ou à des processus politiques formels tout en utilisant la violence pour consolider leur pouvoir. Ils peuvent également s'engager dans des activités économiques légales tout en profitant de marchés illicites. De plus, ils peuvent utiliser des tactiques de violence et d'intimidation pour contrôler les populations locales, tout en prétendant offrir une forme de "gouvernance" ou de protection. Cette complexité rend souvent difficile la distinction entre la violence politique et la criminalité organisée. Cela peut également rendre plus difficile pour les États et les institutions internationales de répondre efficacement à ces formes de violence, car les approches traditionnelles de maintien de l'ordre ou de résolution de conflits peuvent ne pas être suffisamment adaptées à ces défis.

Dans certaines régions où l'État-nation est faible ou absent, divers groupes peuvent se livrer à des formes de violence infrapolitique pour contrôler les ressources et établir leur propre autorité. Ces groupes peuvent se livrer à diverses activités, allant du contrôle du trafic de drogues ou d'autres marchés illégaux à la fourniture de services sociaux dans les zones négligées par l'État. Parfois, ces groupes peuvent même créer des formes de gouvernance parallèles, remplissant des fonctions normalement assumées par l'État, comme l'application de la loi et l'arbitrage des litiges. Ces formes de gouvernance peuvent être basées sur une combinaison de force, de corruption, d'intimidation, de contrôle économique et parfois de légitimité sociale. Bien que ces groupes puissent parfois offrir une certaine stabilité ou des services dans les régions où ils opèrent, ils contribuent souvent à l'instabilité à long terme en sapant l'État-nation et en perpétuant des cycles de violence et de criminalité. De plus, ils peuvent exploiter et opprimer les populations locales, créant des conditions de vie difficiles pour de nombreuses personnes.

Concept de violence métapolitique[modifier | modifier le wikicode]

Le concept de violence métapolitique désigne la violence qui dépasse les limites traditionnelles du politique, qui n'est plus uniquement (ou principalement) liée à l'État-nation, mais qui est inscrite dans des dynamiques globales, transnationales et transculturelles. Ces formes de violence peuvent être motivées par diverses causes, allant des idéologies religieuses ou politiques radicales aux réactions à la mondialisation, en passant par le désir d'établir une nouvelle forme d'ordre social ou politique. Il s'agit souvent d'actes de violence extrêmes commis au nom d'une cause plus large, telle que la défense de l'identité religieuse ou culturelle, la lutte contre l'injustice perçue ou la promotion d'une vision particulière de la justice sociale ou politique. Les groupes terroristes internationaux, par exemple, pourraient être considérés comme des acteurs de violence métapolitique. Cela pose des défis majeurs en termes de gouvernance et de sécurité, car ces formes de violence échappent souvent au contrôle des États-nations et nécessitent une réponse coordonnée à l'échelle internationale.

Plusieurs facteurs ont été identifiés comme sources possibles de violence métapolitique.

  1. Critique de la surmodernité des sociétés avancées : Cela peut inclure des réactions à la vitesse du changement technologique, à l'aliénation et à la désillusion causées par la mondialisation et à la rupture des liens sociaux traditionnels. La violence métapolitique peut être un moyen pour certains groupes de s'opposer à ce qu'ils considèrent comme les aspects négatifs de la modernité et d'affirmer leur propre identité culturelle, sociale ou religieuse.
  2. Critique de la laïcisation politique et de la perte de lien avec le spirituel : La sécularisation et l'érosion de la foi religieuse dans de nombreuses sociétés modernes peuvent être perçues par certains comme une menace pour leur identité et leurs valeurs. Dans ce contexte, la violence métapolitique peut être utilisée comme un moyen de défendre et de réaffirmer l'importance de la religion et du spirituel dans la vie publique et personnelle.
  3. Ensemble des frustrations nées de la modernité : Cela peut inclure des sentiments d'insécurité économique, d'injustice sociale, d'exclusion politique ou de marginalisation culturelle. Ces frustrations peuvent être exacerbées par la perception que les bénéfices de la modernité sont inégalement répartis, ce qui peut conduire à des formes de violence métapolitique visant à attirer l'attention sur ces inégalités et à les combattre.

Ces facteurs sont souvent interconnectés et peuvent se renforcer mutuellement, créant un terreau fertile pour les formes de violence qui vont au-delà des frontières traditionnelles de l'État-nation et du politique.

Violence extrême vs barbarie[modifier | modifier le wikicode]

La violence extrême est une forme de violence qui échappe à tout contrôle, normes sociales, lois ou principes moraux généralement acceptés. Elle est souvent perçue comme étant de nature "gratuite", c'est-à-dire commise sans raison apparente, sans provocation préalable, et dépassant largement ce qui serait nécessaire pour atteindre un objectif donné. C'est une violence qui semble aller au-delà de toute justification ou explication rationnelle. La "barbarie" est un terme qui est souvent utilisé pour décrire de telles formes de violence extrême. C'est un terme qui a une connotation négative forte, et qui est souvent utilisé pour décrire des actes de violence qui sont perçus comme étant d'une cruauté, d'une brutalité ou d'une inhumanité exceptionnelles. Il est souvent utilisé pour décrire des actes de violence qui sont commis en violation flagrante des normes sociales, morales ou juridiques généralement acceptées. Les termes "violence extrême" et "barbarie" sont souvent chargés d'une grande émotion et peuvent être utilisés de manière polémique ou partisane. Il est également important de noter que la perception de ce qui constitue une "violence extrême" ou une "barbarie" peut varier en fonction du contexte culturel, historique ou individuel.

La violence extrême et la barbarie sont souvent manifestes dans des conflits armés et des guerres. Elles peuvent prendre plusieurs formes, notamment des violences sexuelles, le génocide ou l'épuration ethnique, et les massacres de civils, entre autres. Les violences sexuelles, dont le viol, sont souvent utilisées comme armes de guerre pour humilier, terrifier et dominer la population ennemie. Elles ont des conséquences dévastatrices pour les victimes et pour la société dans son ensemble, provoquant une stigmatisation durable et un traumatisme profond. L'épuration ethnique ou les guerres de purification ethnique sont une autre forme de violence extrême. Elles se caractérisent par des actes commis dans le but d'éliminer complètement un groupe ethnique, religieux ou racial spécifique d'une zone géographique. Ces actes peuvent comprendre le meurtre, le déplacement forcé, la destruction de biens et d'autres formes de violence physique. Ces formes de violence extrême ne sont pas seulement des violations flagrantes des droits de l'homme, elles constituent aussi des crimes de guerre et/ou des crimes contre l'humanité selon le droit international. Ces comportements sont condamnés par la communauté internationale et peuvent faire l'objet de poursuites par les tribunaux internationaux, comme la Cour pénale internationale.

Cela signifie le dérèglement des formes classique de la violence. Cette violence est qualifiée d’extrême parce qu’elle est qualifiée de violence au-delà de la violence, c’est une violence qui n’aurait plus aucun rituel et qui est une cruauté extrême.

  • L'exponentialité des violences physiques sur les personnes signifie une escalade sans précédent de la violence à l'encontre des individus. Cela peut inclure une augmentation drastique des meurtres, des violences sexuelles, des tortures, entre autres actes de violence physique.
  • Le processus de régression par rapport au processus civilisationnel est un retour à des comportements et des attitudes brutaux et primitifs, en contraste avec les normes et les valeurs qui sous-tendent une société civilisée. Cela peut se manifester par l'abandon de principes tels que le respect des droits de l'homme, la justice et l'équité.
  • La dérégulation des lois et principes de la guerre signifie l'abandon des règles qui ont été établies pour limiter les effets destructeurs de la guerre. Cela comprend le non-respect des conventions de Genève, qui établissent des normes minimales pour le traitement des personnes prises dans des conflits armés.
  • La désinstitutionnalisation de la violence est l'absence de tout cadre institutionnel ou légal pour contrôler ou réguler la violence. Cela signifie que la violence n'est plus limitée ou contrôlée par les structures institutionnelles, telles que le gouvernement ou la justice, et qu'elle peut se manifester de manière anarchique et imprévisible.

Tous ces éléments contribuent à la nature dévastatrice de la violence extrême et à son impact sur les individus et les sociétés.

La détermination du seuil à partir duquel la violence devient "extrême" est subjective et peut varier en fonction des différentes perspectives. Cependant, on peut généralement convenir que la violence devient "extrême" lorsqu'elle dépasse certaines limites acceptées par la société. Dans le contexte de la violence extrême, le passage de la rationalité à l'irrationalité peut être considéré comme un facteur clé. La violence est généralement considérée comme rationnelle lorsqu'elle a un but précis, comme l'auto-défense ou la réalisation d'un objectif politique. Lorsque la violence devient gratuite, démesurée ou disproportionnée par rapport à son objectif initial, on peut alors parler d'irrationalité. Lorsqu'il s'agit de violence extrême, les actes de violence ne sont plus liés à des objectifs tangibles, mais sont souvent motivés par la haine, le désir de destruction ou d'autres motivations irrationnelles. Cette violence peut être chaotique, imprévisible et souvent sans aucun respect pour la vie humaine ou la dignité. C'est dans ces circonstances que la violence est généralement qualifiée d'extrême. C'est un sujet de recherche en cours dans plusieurs disciplines, y compris la philosophie, la sociologie, la psychologie et les études de conflits, entre autres.

La violence extrême diffère significativement des conceptions classiques de la violence et de la guerre que nous retrouvons dans les œuvres de Machiavel et de Clausewitz. Machiavel et Clausewitz voyaient la guerre et la violence comme des outils de la politique, utilisés pour atteindre des objectifs politiques spécifiques. Ils présentaient la guerre comme un acte rationnel qui sert les intérêts d'un État ou d'un leader. Dans leurs théories, la guerre est encadrée par des règles et des conventions, comme le respect des non-combattants ou la proportionnalité de l'usage de la force. La violence extrême, en revanche, représente une rupture avec ces idées. Elle est souvent dépourvue de tout objectif politique clair, sans respect pour les conventions de la guerre ou les droits de l'homme. Elle se caractérise par sa gratuité, sa démesure, et son manque de discernement entre combattants et non-combattants. Dans ces circonstances, la violence est utilisée de manière irrationnelle et indiscriminée, souvent pour inspirer la terreur ou pour détruire l'adversaire. Il est donc vrai que la violence extrême remet en question les théories classiques de la guerre et de la violence politique, en montrant que la violence peut aller au-delà de la rationalité et devenir une fin en soi, un acte de barbarie pure. Cela représente un défi majeur pour les chercheurs, les décideurs politiques et les acteurs humanitaires qui cherchent à comprendre et à prévenir ce type de violence.

Michel Henry, un philosophe français, a écrit un ouvrage intitulé "La Barbarie" en 1987. Il s'est concentré dans cet ouvrage sur le concept de la barbarie, ce qu'elle signifie et comment elle se manifeste dans la société moderne. Pour Henry, la barbarie n'est pas simplement un acte de violence extrême, mais un système qui nie et déshumanise l'individu. Il perçoit la barbarie comme une conséquence de la modernité et de la rationalisation de la société, ce qui mène à une dépersonnalisation et à une déshumanisation. Il distingue deux formes de barbarie. La première est la "barbarie extérieure", caractérisée par des actes de violence et de brutalité physique. La deuxième, plus subtile mais tout aussi dévastatrice selon lui, est la "barbarie intérieure", qui se manifeste par une déshumanisation et une aliénation de l'individu dans la société moderne. Pour Henry, le système moderne, avec son insistance sur la technologie, la science et la rationalité, tend à négliger et à mépriser les aspects subjectifs et émotionnels de l'existence humaine. Cela mène à une "barbarie intérieure" où l'individu est réduit à un objet, un rouage dans une machine plus grande. Dans son œuvre, il met donc en avant l'importance de reconnaître et de valoriser la subjectivité et l'expérience intérieure de l'individu pour contrecarrer cette tendance barbare de la modernité.

Hannah Arendt (1906 - 1975) : Le Mal radical et la violence politique[modifier | modifier le wikicode]

Extrait d'un timbre allemand imprimé en 1988 à l'effigie de Hannah Arendt.

Hannah Arendt est une figure de proue de la philosophie politique du XXème siècle. Elle est née en Allemagne en 1906 et a été fortement influencée par son professeur et amant, Martin Heidegger. Juive, elle a dû fuir l'Allemagne en 1933 pour la France à cause de la montée du nazisme. Puis, en 1941, elle s'installe aux États-Unis où elle reste jusqu'à sa mort en 1975. Arendt a apporté des contributions significatives à notre compréhension de la politique, de l'autorité, du totalitarisme et de la violence. Parmi ses œuvres les plus connues, on trouve "Les Origines du totalitarisme" (1951), "La Condition de l'homme moderne" (1958) et "Eichmann à Jérusalem : Un rapport sur la banalité du mal" (1963). Dans "Les Origines du totalitarisme", elle cherche à comprendre comment des régimes totalitaires tels que ceux de l'Allemagne nazie et de l'Union soviétique ont pu émerger. Elle y analyse les éléments qui ont contribué à l'avènement de ces régimes, notamment l'antisémitisme, l'impérialisme et le totalitarisme lui-même. Dans "Eichmann à Jérusalem", elle examine le procès d'Adolf Eichmann, un fonctionnaire nazi responsable de l'organisation de la logistique de l'Holocauste. Elle y introduit le concept controversé de "la banalité du mal", suggérant que des actes atroces peuvent être commis par des personnes ordinaires qui ne font que suivre des ordres sans se questionner. Son œuvre a eu une influence significative sur une variété de disciplines, de la philosophie politique à la théorie critique en passant par les études de genre. Sa pensée continue d'être pertinente pour de nombreuses questions contemporaines, y compris les questions de pouvoir, d'autorité et de violence.

L'œuvre de Hannah Arendt est largement informée par les événements tragiques et turbulents du XXème siècle, notamment les deux guerres mondiales et l'émergence des régimes totalitaires. Son concept du "mal radical", développé en partie en réponse à sa réflexion sur le nazisme et l'Holocauste, est une notion particulièrement importante de sa pensée. Selon Arendt, le mal radical ne se manifeste pas nécessairement par des actes de cruauté exceptionnellement violents ou haineux, mais peut se présenter de manière banale et routinière, une idée qu'elle développe dans son compte rendu du procès d'Adolf Eichmann, "Eichmann à Jérusalem : Un rapport sur la banalité du mal". Pour Arendt, le "mal radical" est un mal qui dépasse la compréhension humaine traditionnelle du bien et du mal, dans le sens où il est commis par des personnes qui ne se perçoivent pas elles-mêmes comme maléfiques et qui, en fait, peuvent considérer leurs actions comme normales ou même nécessaires. C'est un mal qui, selon elle, a été rendu possible par les structures et les systèmes de la modernité, et qui constitue une rupture avec les modèles traditionnels de moralité et de responsabilité.

La conception de Hannah Arendt du "mal radical" est en partie influencée par la pensée du philosophe Immanuel Kant. Cependant, l'approche d'Arendt est distincte de celle de Kant à des égards importants. Kant introduit la notion de "mal radical" dans sa Religion au-delà du seul domaine de la raison. Pour Kant, le mal radical est un potentiel inhérent à la nature humaine, c'est-à-dire une propension naturelle à prioriser nos propres désirs et intérêts au-dessus des exigences de la loi morale. Toutefois, il souligne aussi la capacité de l'être humain à surmonter cette propension par l'exercice de la liberté et de la rationalité. D'un autre côté, Arendt reprend la notion de mal radical dans un contexte complètement différent, celui des crimes de masse et du totalitarisme du XXe siècle. Pour Arendt, le mal radical devient manifeste lorsque des actions inhumaines et destructrices deviennent normalisées au point de perdre leur caractère exceptionnel. Ce mal radical se manifeste dans la banalité de ses exécuteurs, qui commettent des actes horribles non pas par une volonté maléfique mais par indifférence, par conformité ou par incapacité à penser par eux-mêmes. Ces deux conceptions, bien que liées, diffèrent dans leur compréhension de la nature et de la manifestation du mal radical. Kant voit le mal comme une potentialité inhérente à l'humain qui peut être surmontée, tandis qu'Arendt voit le mal comme une manifestation d'un système social et politique, qui dépasse l'individualité et se manifeste dans des structures et des comportements normalisés.

Pour Hannah Arendt, le concept de "mal radical" représente un changement fondamental dans notre compréhension traditionnelle du mal. C'est une tentative de conceptualiser les atrocités de masse perpétrées pendant la Seconde Guerre mondiale et le totalitarisme. Ces événements représentaient, pour elle, un type de mal qui était différent de ce que la philosophie et la morale traditionnelles étaient équipées pour comprendre. Selon Arendt, le mal radical était lié à la banalité du mal, une phrase qu'elle a utilisée pour décrire le fait que des personnes ordinaires pouvaient commettre des actes terribles sous l'influence d'un régime totalitaire ou lorsqu'elles se conformaient à l'autorité. Elle a notamment développé cette idée dans son livre "Eichmann à Jérusalem : un rapport sur la banalité du mal", où elle a étudié le cas d'Adolf Eichmann, un bureaucrate nazi qui a joué un rôle clé dans la mise en œuvre de l'Holocauste. Arendt a souligné que Eichmann n'était pas un monstre, mais un individu ordinaire qui ne pensait pas par lui-même et qui a simplement suivi les ordres. Ainsi, pour Arendt, le mal radical du XXe siècle était profondément lié à la déshumanisation, à la normalisation de l'inhumanité et à l'abdication de la pensée personnelle et de la responsabilité morale.

Arendt a examiné l'Holocauste et la persécution des Juifs sous le régime nazi non pas comme un exemple de mécanisme de bouc émissaire, mais plutôt comme une manifestation de ce qu'elle a appelé la "banalité du mal". L'antisémitisme nazi, selon Arendt, n'était pas simplement une question de rejeter la culpabilité ou le mal sur un autre groupe. Au lieu de cela, il était profondément enraciné dans l'idéologie nazie et a été mené par des individus ordinaires qui ont commis des actes terribles non pas par haine personnelle ou par désir de faire du mal, mais simplement parce qu'ils suivaient les ordres et la logique du système totalitaire. Selon Arendt, l'Holocauste était le produit d'une structure de pouvoir totalitaire qui dépouillait les individus de leur capacité à penser par eux-mêmes et à exercer un jugement moral. Les Juifs ont été ciblés non pas parce qu'ils étaient des boucs émissaires portant la culpabilité des autres, mais plutôt parce qu'ils étaient considérés par le régime nazi comme une menace pour leur vision d'une société homogène et racialement pure.

La théorie du bouc émissaire de René Girard repose sur l'idée que la violence collective est générée par des tensions mimétiques au sein d'une communauté, qui sont ensuite déplacées sur une victime sacrificielle - le "bouc émissaire". Cette victime est accusée de causer le désordre et est punie ou expulsée pour rétablir l'harmonie au sein de la communauté. Cependant, Hannah Arendt remet en question cette idée dans le contexte de l'Holocauste. Pour Arendt, les Juifs n'étaient pas simplement des boucs émissaires portant le poids de la faute ou de la violence collective. Au contraire, ils étaient les victimes d'une idéologie haineuse et d'un système totalitaire qui les ciblait spécifiquement pour leur extermination. Leur persécution et leur meurtre n'étaient pas le résultat de tensions mimétiques au sein de la communauté allemande, mais plutôt d'un plan systématique d'extermination mené par le régime nazi. En ce sens, Arendt conteste l'idée que le mal puisse simplement être déplacé ou projeté sur une victime sacrificielle. Au lieu de cela, elle soutient que le mal est une manifestation de l'action humaine et des structures de pouvoir, et peut être perpétré par des individus ordinaires dans certaines conditions. C'est ce qu'elle a appelé la "banalité du mal".

Hannah Arendt, dans sa réflexion sur le totalitarisme et spécifiquement sur le génocide perpétré par le régime nazi, a introduit l'idée de "superfluité" humaine. Pour Arendt, la "superfluité" se réfère à la condition d'être en trop, de n'avoir aucune place ou utilité dans une société ou un système donné. Dans le contexte de l'Holocauste, cette idée de superfluité était manifeste dans la façon dont les Juifs étaient considérés par le régime nazi. Ils étaient vus comme des êtres sans valeur, qui pouvaient être exterminés sans conséquence. Cette idée de superfluité est un élément essentiel du mal radical d'Arendt, dans le sens où elle suggère que la capacité de traiter les autres comme superflus, de les déshumaniser à un tel point qu'ils peuvent être massivement exterminés, est une forme de mal qui dépasse nos conceptions traditionnelles de ce qu'est le mal. Arendt suggère que cette forme de mal radical n'est pas seulement le fait de psychopathes ou de monstres, mais peut être perpétrée par des gens ordinaires qui sont intégrés dans des systèmes totalitaires et qui, pour diverses raisons, n'ont pas la capacité ou la volonté de remettre en question les ordres qu'ils reçoivent ou les idéologies qu'on leur présente. C'est ce qu'elle appelle la "banalité du mal".

Dans son analyse du totalitarisme et des camps de concentration, Hannah Arendt a distingué trois types de camps, qui correspondent à trois fonctions différentes du système totalitaire.

  1. Les camps de type "Hadès" étaient destinés à la gestion des apatrides, des asociaux, et de tous ceux qui étaient considérés comme indésirables ou superflus dans la société. Ces camps étaient destinés à contenir, contrôler et isoler ces personnes, plutôt qu'à les rééduquer ou les exterminer.
  2. Les camps de type "Purgatoire" étaient des camps de rééducation destinés à ceux qui étaient considérés comme des menaces potentielles pour le régime, mais qui étaient aussi considérés comme réformables. L'objectif dans ces camps était de contraindre les individus à adopter l'idéologie et les comportements approuvés par le régime.
  3. Enfin, les camps de type "Enfer" étaient des camps d'extermination, où les personnes jugées indésirables étaient systématiquement tuées. Ces camps représentaient la forme la plus extrême et la plus effroyable de la violence totalitaire, où la vie humaine était systématiquement détruite à une échelle industrielle.

Dans les camps de type "Enfer", comme ceux des camps de concentration et d'extermination nazis, Hannah Arendt a décrit un processus de déshumanisation et de dépersonnalisation systématique.

  1. Dépossession juridique : Les détenus des camps étaient dépossédés de leurs droits juridiques, réduits à un état d'extrême vulnérabilité en étant exclus de la protection des lois. Ils n'étaient plus considérés comme des sujets de droit, mais comme des objets à disposer à la volonté du régime.
  2. Abandon à toute régulation : Les camps étaient des espaces de non-droit où la loi n'était pas appliquée, et où la violence et la brutalité étaient la norme. C'est ici que les détenus étaient souvent livrés à la merci des "kapos" ou des gardes du camp, qui étaient souvent des criminels.
  3. Destruction de la personnalité et de l'individualité : Les détenus étaient systématiquement dépouillés de leur identité personnelle et réduits à un numéro ou à une catégorie. Les nazis cherchaient à anéantir tout ce qui faisait de chaque détenu une personne unique, y compris leur nom, leur histoire personnelle, leurs croyances et leurs aspirations.
  4. Réduction à l'état animal : Les conditions de vie extrêmement dures dans les camps, marquées par la faim, la soif, le froid, le travail forcé, la maladie et la violence omniprésente, réduisaient souvent les détenus à un état proche de l'animalité. Le régime nazi a intentionnellement créé des conditions dans lesquelles les détenus étaient contraints de se battre pour leur survie de la manière la plus basique, souvent aux dépens de leur humanité.

Ce processus de déshumanisation avait pour but ultime de faciliter et de rationaliser le meurtre de masse. En réduisant les détenus à un état moins qu'humain, les auteurs de la Shoah ont cherché à justifier et à dissimuler leurs crimes.

Jorge Semprún était un écrivain et homme politique espagnol qui a survécu à l'horreur du camp de concentration de Buchenwald pendant la Seconde Guerre mondiale. Il a relaté son expérience de survivant de l'Holocauste dans plusieurs de ses œuvres, notamment dans son livre "L'Écriture ou la Vie". Dans ses mémoires, il décrit comment il a trouvé une certaine forme de réconfort et d'espoir en regardant un arbre depuis l'enceinte du camp. Cet arbre, qu'il pouvait voir mais auquel il ne pouvait pas accéder, est devenu pour lui un symbole de liberté, de résistance et de vie face à l'horreur et à la mort omniprésentes dans le camp. Il a utilisé cette image comme une évasion mentale et une source d'espoir, lui permettant de maintenir une certaine forme d'humanité et de résilience face à l'inhumanité de sa situation. C'est un exemple de la façon dont, même dans les situations les plus désespérées, les êtres humains peuvent trouver des moyens de résister et de préserver leur humanité. La force de l'esprit humain peut être extraordinaire et c'est ce genre d'histoires qui nous le rappellent.

Les tactiques utilisées dans les camps de concentration visaient non seulement à infliger des souffrances physiques, mais aussi à détruire l'humanité de ceux qui y étaient enfermés. En plus des traitements cruels et inhumains, les détenus étaient également privés de leur identité personnelle et de leur individualité. Cette dégradation psychologique faisait partie intégrante de la stratégie de terreur et de contrôle. L'idée de réduire les détenus à un état "d'animalité" était clairement manifeste dans de nombreux aspects de la vie du camp. Les conditions de vie sordides, le manque de nourriture, l'absence d'hygiène, et la violence constante étaient conçus pour déshumaniser les détenus et les priver de leur dignité. Par ailleurs, l'absence de perspective temporelle, l'incertitude constante et le manque d'information sur le monde extérieur contribuaient également à cet effet de déshumanisation. En privant les détenus de la possibilité de planifier ou même d'imaginer un avenir, les bourreaux cherchaient à les maintenir dans un état d'angoisse et de désespoir constant. Enfin, la destruction de la solidarité et de la conscience morale était également une partie essentielle de cette stratégie. En créant un environnement où la survie individuelle devenait l'objectif principal, les bourreaux cherchaient à briser les liens de solidarité et d'empathie qui pourraient aider les détenus à résister ou à maintenir leur humanité. Toutes ces tactiques visaient à déshumaniser complètement les détenus et à les transformer en "êtres inférieurs", afin de justifier et de faciliter leur extermination. Cette déshumanisation était une composante essentielle de l'horreur des camps de concentration, et elle est aujourd'hui largement reconnue comme une caractéristique des génocides et des crimes contre l'humanité.

Hannah Arendt et la banalité du mal[modifier | modifier le wikicode]

Adolf Eichmann en avril 1961 lors de son procès à Jérusalem.

Hannah Arendt, dans son rapport sur le procès d'Adolf Eichmann à Jérusalem en 1961, a introduit le concept de "banalité du mal". Eichmann, un bureaucrate de haut rang du régime nazi, était l'un des principaux organisateurs de l'Holocauste. Pourtant, au cours de son procès, il a affirmé qu'il n'avait fait que suivre les ordres et qu'il n'avait pas agi par haine ou par malveillance personnelle.

Pour Arendt, le cas d'Eichmann incarnait une forme de mal qui n'était pas enracinée dans la monstruosité personnelle ou la perversité, mais qui découlait plutôt de la pensée superficielle et de l'adhésion aveugle à un système de commandement. Elle l'a décrit comme "terriblement et effroyablement normal", insinuant que n'importe qui, dans certaines conditions, pourrait devenir un acteur du mal. La "banalité du mal", pour Arendt, ne minimise pas l'horreur des actions commises, mais plutôt souligne la façon dont des structures systémiques et des pressions sociales peuvent amener des individus ordinaires à participer à des actes de violence extrême. Cette théorie a suscité une grande controverse et un débat philosophique intense, et elle reste aujourd'hui l'un des aspects les plus discutés de la pensée d'Arendt.

Adolf Eichmann n'était pas seulement un "petit fonctionnaire" mais un haut fonctionnaire nazi chargé de l'organisation logistique de la déportation et de l'extermination des Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale. Eichmann a été capturé en Argentine par les services secrets israéliens (Mossad) en 1960, puis emmené en Israël pour être jugé. Ce qui a particulièrement intéressé Hannah Arendt dans le procès d'Eichmann, c'est la déclaration de celui-ci selon laquelle il n'avait fait que "suivre les ordres" et qu'il n'était donc pas directement responsable des atrocités commises. C'est cette position, alliée à son apparente normalité, qui a conduit Arendt à formuler sa théorie de la "banalité du mal". Selon Arendt, Eichmann n'était pas un monstre au sens traditionnel du terme, mais plutôt un individu ordinaire qui s'était laissé entraîner dans le système bureaucratique nazi et qui s'était abstrait de la réalité et de l'humanité des victimes. Arendt a souligné que ce genre de mal, commis par des gens ordinaires qui se dissocient de leurs actions, est peut-être le plus terrifiant de tous.

La Conférence de Wannsee, qui s'est tenue le 20 janvier 1942 à Berlin, est généralement considérée comme le moment où la "solution finale de la question juive", c'est-à-dire l'extermination systématique des Juifs, a été formellement décidée par les dirigeants nazis. Bien que la majorité des documents de la conférence aient été détruits par les nazis à la fin de la Seconde Guerre mondiale, un exemplaire du procès-verbal de la réunion a été découvert en 1947. Ce document a fourni une preuve concrète de l'intention des nazis d'exterminer les Juifs.

Dans le cas d'Eichmann, sa culpabilité n'était pas vraiment en question lors de son procès. Il avait déjà reconnu son rôle dans l'organisation de la déportation des Juifs vers les camps de concentration et d'extermination. La question était plutôt de savoir dans quelle mesure il était responsable de ses actions, compte tenu de sa revendication de n'avoir fait que suivre les ordres. C'est là que la théorie de la "banalité du mal" d'Arendt est entrée en jeu. Eichmann a été reconnu coupable de crimes contre l'humanité, de crimes de guerre et d'autres charges, et il a été exécuté en 1962. Son procès a mis en évidence la responsabilité personnelle des individus pour leurs actions, même lorsqu'ils agissent dans le cadre d'un système bureaucratique ou en suivant des ordres.

Hannah Arendt a été frappée par l'apparente normalité d'Eichmann, ce qu'elle a appelé la "banalité du mal". Selon elle, Eichmann n'était pas un monstre assoiffé de sang ou un fanatique idéologique, mais plutôt un bureaucrate moyen qui se contentait de faire son travail sans questionner la moralité de ses actions. Pour Arendt, cela représentait un nouveau type de mal, un mal commis par des personnes ordinaires qui se conformaient simplement au système en place sans réfléchir aux conséquences de leurs actes. Elle a soutenu que cela était en partie possible parce que la bureaucratie nazie avait déshumanisé l'acte d'extermination, le transformant en une simple tâche administrative. Cela ne signifie pas qu'Eichmann n'était pas coupable de ses crimes. Au contraire, Arendt a souligné que, même dans un système bureaucratique, les individus ont toujours la responsabilité morale de leurs actions. Cependant, cela montre que le mal peut se produire dans des circonstances ordinaires et être perpétré par des personnes ordinaires. C'est cette idée qui a donné lieu au concept de "banalité du mal".

Le terme "banalité du mal" qu'Hannah Arendt a inventé pour décrire Adolf Eichmann et les criminels de guerre nazis similaires se réfère précisément à ce paradoxe. Eichmann n'était pas un psychopathe démoniaque ou un sadique dérangé, mais plutôt un fonctionnaire obsédé par l'efficacité de son travail. Arendt a avancé que le mal, loin d'être l'apanage de monstres inhumains, peut être perpétré par des personnes tout à fait ordinaires qui acceptent le système tel qu'il est et ne remettent pas en question les ordres qu'on leur donne. Elle a décrit Eichmann comme un homme qui, pour reprendre ses termes, était "terriblement et terrifiantement normal". Cette "banalité du mal" repose sur l'idée que les individus peuvent commettre des actes atroces non pas parce qu'ils sont intrinsèquement mauvais ou haineux, mais simplement parce qu'ils ne pensent pas aux conséquences de leurs actions. Il est important de noter qu'Arendt n'excuse pas les actes d'Eichmann, mais cherche plutôt à comprendre comment de tels crimes peuvent se produire. C'est une invitation à la vigilance et à l'éveil moral de tous pour empêcher que de tels actes ne se reproduisent.

« Nous nous attendions à rencontrer un monstre humain, nous avons eu à faire un homme ordinaire soit moins un monstre qu’un clown ». Cette citation d'Hannah Arendt reflète bien la conception de la "banalité du mal" qu'elle a développée. Pour elle, Eichmann et d'autres responsables de crimes de masse n'étaient pas des figures monstrueuses et inhumaines, mais des personnes ordinaires, qui dans le cas d'Eichmann, semblaient parfois dérisoires, voire ridicules ("un clown"). Arendt suggère ici que la vraie nature de l'horreur ne réside pas tant dans la monstruosité exceptionnelle que dans l'ordinaire, le quotidien, l'habitude, la routine. Dans le cas d'Eichmann, il n'était pas motivé par une haine raciale fervente, mais il exécutait simplement ses fonctions bureaucratiques de manière efficace et zélée, sans remettre en question les conséquences dévastatrices de ses actions. Cette conception de la "banalité du mal" remet en question notre perception traditionnelle du mal et de la responsabilité individuelle dans les crimes de masse, soulignant le rôle de la pensée critique et de l'éthique personnelle dans la prévention de tels actes.

La théorie de la "banalité du mal" développée par Hannah Arendt nous met face à l'ordinaire et à l'habitude qui peuvent conduire à l'extrême dans certaines conditions. Arendt met en évidence la capacité d'un individu apparemment "normal" à commettre des actes inimaginables de cruauté et d'injustice lorsqu'il est inséré dans un système qui non seulement permet, mais encourage de telles actions. En déshumanisant leurs victimes et en refusant de reconnaître leur propre rôle dans le mal commis, des individus comme Eichmann étaient capables de se détacher de la réalité de leurs actions et de les justifier comme étant simplement l'exécution des ordres ou le respect de la loi. Cela révèle une vérité troublante et profondément inquiétante : le mal n'est pas toujours commis par des individus profondément perturbés ou intrinsèquement mauvais. Parfois, il peut être perpétré par des personnes ordinaires qui, dans certaines circonstances, sont capables d'actes extraordinairement horribles. Cela souligne l'importance de la vigilance morale, de l'éducation et de la capacité de jugement individuel pour prévenir la répétition de tels événements dans l'avenir.

La théorie de la "banalité du mal" de Hannah Arendt tire sa signification précisément de cette constatation : l'individu, comme Adolf Eichmann, peut participer à des actes de mal extrême sans pleinement intégrer ou reconnaître la réalité de ce qu'ils font. Dans le cas d'Eichmann, il s'est considéré comme un simple fonctionnaire qui "faisait son travail". Arendt souligne qu'Eichmann n'était pas un psychopathe ou un fanatique, mais plutôt quelqu'un qui s'était déconnecté de sa capacité de jugement moral, permettant ainsi à son sens de la moralité d'être défini entièrement par le système au sein duquel il travaillait. Il a suivi les ordres et les règlements sans jamais remettre en question l'éthique ou les conséquences de ses actions. Pour lui, les victimes de l'Holocauste n'étaient pas des individus réels avec leurs propres vies et expériences, mais plutôt des numéros et des statistiques dans son système de logistique. Par conséquent, Eichmann n'a pas reconnu la réalité de ses actions et leur impact dévastateur sur les personnes réelles. C'est cette déconnexion de la réalité, cette incapacité à voir les implications morales et humaines de ses actions, qui incarne la "banalité du mal" d'Arendt. Elle nous rappelle qu'il est possible pour des individus ordinaires de commettre des actes de mal extrême lorsqu'ils sont coupés de leur empathie et de leur compréhension de la réalité de leurs actions.

Selon Arendt, la capacité de penser est essentielle pour le jugement moral. Penser, dans ce contexte, signifie plus que simplement réfléchir ou avoir des pensées - c'est une activité qui nécessite de la réflexion, de la remise en question, de la prise en compte de différentes perspectives et de l'empathie. C'est une sorte de conversation interne où l'on examine les implications morales de ses actions et où l'on prend des décisions informées et éthiques. Dans le cas d'Eichmann et de nombreux autres qui ont participé à des actes de grande envergure, Arendt suggère que leur incapacité à penser de cette manière a rendu possible leur participation. Ils ont simplement suivi des ordres, sans prendre le temps de réfléchir aux implications morales ou aux conséquences humaines de leurs actions. Par conséquent, l'absence de pensée - dans le sens de la réflexion morale et de l'empathie - peut conduire à des actions immorales. Les individus peuvent alors se dissocier de la réalité de leurs actions et éviter toute responsabilité morale. C'est ce qui rend le mal si "banal" ou ordinaire, selon Arendt - il ne nécessite pas une méchanceté inhérente, mais simplement une absence de pensée réfléchie.

"Nous nous attendions à rencontrer un monstre humain, mais nous avons affaire à un homme ordinaire… soit moins un monstre qu’un clown… L’homme mauvais serait donc chacun d’entre nous… S’il se laisse glisser et entraîner insensiblement il parvient dans des circonstances historiques et politiques à commettre les plus grands crimes. Il n’y a pas plus de génie dans le mal que dans le bien, mais seulement des hommes ordinaires, en qui l’esprit du mal veille et n’attend que le moment favorable pour souffler et les pousser au mal radical, de sorte qu’il y a disproportion entre le mal commis et l’apparence tout ordinaire de l’être humain qui l’a accompli".

C'est une citation puissante qui résume bien la thèse de Hannah Arendt sur la "banalité du mal". Cette citation fait référence à sa couverture du procès d'Adolf Eichmann, un fonctionnaire nazi qui avait joué un rôle clé dans l'organisation de l'Holocauste. Eichmann n'était pas un homme particulièrement cruel ou sadique par nature, mais un fonctionnaire zélé qui se contentait d'exécuter les ordres de ses supérieurs sans réfléchir aux conséquences morales de ses actions. C'est cette absence de pensée, cette incapacité à considérer les implications éthiques de ses actions, que Arendt qualifie de "banalité du mal". La citation souligne l'idée que le mal n'est pas nécessairement l'oeuvre de "monstres", mais peut être commis par des personnes ordinaires qui se détachent de leur propre responsabilité morale. Il s'agit d'un rappel important que l'éthique et la responsabilité personnelle sont essentielles, même (et surtout) dans des situations où l'on est poussé à agir contrairement à sa conscience.

Le professeur Rémi Baudoui affirme qu'il n'y a pas d'action sans pensée. Cette affirmation souligne une conclusion fondamentale de la philosophie d'Hannah Arendt : l'action et la pensée sont intimement liées. Pour Arendt, la capacité de penser est fondamentale pour la moralité humaine et la responsabilité éthique. Dans le cas d'Eichmann, Arendt soutient qu'il a pu participer à des actes d'une cruauté indicible précisément parce qu'il n'a pas réfléchi aux implications morales de ses actions. Il a simplement "suivi les ordres", se détachant de sa responsabilité personnelle. Cette absence de pensée est, pour Arendt, ce qui rend le mal "banal" et effrayant, car elle suggère que n'importe qui peut devenir capable de commettre des actes terribles s'il renonce à penser et à faire preuve de jugement moral. C'est pourquoi l'affirmation de Baudoui est si importante : elle souligne la nécessité de la réflexion et de l'engagement éthique dans tout ce que nous faisons. Sans la pensée, nous risquons de nous laisser entraîner dans des actions que nous pourrions autrement reconnaître comme immorales ou injustes.

Reconsidérer le concept de violence[modifier | modifier le wikicode]

La vision de la violence par Hannah Arendt est complexe. Elle distingue entre la violence, le pouvoir, l'autorité et la force, et soutient qu'il s'agit de concepts distincts qui sont souvent confondus. Selon Arendt, le pouvoir est une capacité collective qui émerge lorsque les gens se réunissent et agissent en concert. Il est fondé sur le consentement mutuel et la coopération, et c'est la base de tout gouvernement politique. La violence, d'autre part, est une action qui détruit, blesse ou tue. Elle peut être utilisée pour défendre le pouvoir, ou pour le détruire, mais elle ne peut pas le créer. C'est une forme d'action instrumentale, souvent utilisée comme un moyen de parvenir à une fin, comme la domination ou la coercition. L'autorité est un type particulier de pouvoir qui découle du respect ou de l'estime pour une personne ou une institution. Elle est fondée sur la légitimité et le consentement. La force, quant à elle, est une capacité physique ou matérielle qui peut être utilisée pour exercer une contrainte ou une domination. Pour Arendt, donc, la violence et le pouvoir sont en réalité opposés. Le pouvoir vient du peuple et de leur consentement à être gouverné, tandis que la violence est un acte de destruction ou de contrainte. Elle est utilisée lorsque le pouvoir est absent ou a échoué. En cela, Arendt nous rappelle que la violence peut renverser le pouvoir, mais elle ne peut pas le remplacer ou le créer. C'est une distinction cruciale dans sa philosophie politique.

Hannah Arendt a contesté le concept de violence légitime formulé par Max Weber. Selon Weber, l'État détient le monopole de la violence légitime, c'est-à-dire le droit exclusif d'utiliser la force physique pour maintenir l'ordre et appliquer la loi. Cette notion est fondamentale pour la définition de Weber de l'État et pour sa théorie plus générale du pouvoir politique. Cependant, Arendt a remis en question cette idée. Selon elle, la violence et le pouvoir sont des concepts distincts et souvent opposés. Le pouvoir, comme elle l'a défini, découle du consentement et de l'action collective, tandis que la violence est une forme d'action coercitive et destructrice. Elle soutient que la violence peut être utilisée pour défendre ou détruire le pouvoir, mais qu'elle ne peut pas le créer. Arendt remet en question la légitimité de l'utilisation de la violence par l'État, soutenant que toute utilisation de la violence est potentiellement illégitime parce qu'elle contredit la nature du pouvoir politique, qui est basé sur le consentement et l'action collective. Elle met en garde contre les dangers de l'usage de la violence par l'État, en particulier dans les situations où l'État utilise la violence pour maintenir son pouvoir en l'absence de consentement ou de soutien populaire. Cela ne veut pas dire qu'Arendt ne reconnaisse aucune légitimité à l'usage de la violence par l'État - par exemple, pour maintenir l'ordre ou défendre la communauté contre une agression externe. Cependant, elle souligne que cette violence doit être justifiée par des principes éthiques et moraux, et non simplement par le fait que l'État possède le monopole de la force.

Hannah Arendt suggère que la violence peut être utilisée comme un instrument par les gouvernements, mais qu'aucun gouvernement ne peut se baser exclusivement sur la violence pour maintenir son pouvoir. L'idée ici est que la violence peut être une méthode utilisée par le gouvernement pour atteindre certains objectifs, mais elle n'est pas la source du pouvoir elle-même. Dans son livre "Sur la violence", Arendt explore cette idée plus en détail. Elle soutient que la violence et le pouvoir sont des concepts distincts et souvent opposés. Le pouvoir, selon elle, provient du consensus et de la coopération entre les personnes ; c'est un attribut collectif qui émane de l'adhésion et du soutien des gens. La violence, par contre, est coercitive et destructrice. Elle peut être utilisée pour défendre ou détruire le pouvoir, mais elle ne peut pas le créer. Un régime qui dépend uniquement de la violence pour maintenir son contrôle est intrinsèquement instable, car la violence provoque souvent une résistance et une opposition. L'idée de "violence instrumentale" se réfère à l'utilisation de la violence comme un moyen d'atteindre certains objectifs. Par exemple, un gouvernement peut utiliser la violence pour faire respecter les lois ou pour réprimer la dissidence. Cependant, Arendt soutient que l'usage de la violence de cette manière est fondamentalement différent de l'exercice du pouvoir, qui repose sur le consentement et la coopération des citoyens.

Dans la perspective de Hannah Arendt, l'utilisation répétée de la violence par un gouvernement peut être vue comme un signe de faiblesse plutôt que de force. Si un gouvernement doit recourir constamment à la violence pour faire respecter ses directives, cela indique que ce gouvernement a du mal à obtenir le consentement et le soutien de ses citoyens, et qu'il est donc en position de faiblesse. La violence est un outil de coercition, pas de persuasion. Elle peut forcer les gens à se conformer par peur des conséquences, mais elle ne gagne pas leur consentement ou leur soutien volontaire. Un gouvernement qui peut persuader ses citoyens de soutenir volontairement ses politiques est beaucoup plus fort et stable qu'un gouvernement qui doit recourir à la violence pour faire respecter ses décisions. C'est pourquoi Arendt a souligné que le pouvoir et la violence sont des concepts distincts. Le pouvoir, selon elle, provient du consentement et de la coopération entre les individus. La violence, d'autre part, est une méthode de coercition qui peut être utilisée pour défendre ou détruire le pouvoir, mais ne peut pas le créer. Dans ce contexte, l'usage répété de la violence est donc un indicateur d'une faiblesse politique. Cela suggère que le gouvernement est incapable de persuader ses citoyens de soutenir volontairement ses politiques et doit donc recourir à la force pour faire respecter ses directives.

Lorsqu'un gouvernement ou un régime ne recourt qu'à la violence pour maintenir l'ordre, on peut dire qu'il a cessé de faire de la politique au sens véritable du terme. Pour Arendt, la politique implique le dialogue, la persuasion et le consensus. Lorsque la violence devient l'outil principal du gouvernement, il ne s'agit plus de politique mais de tyrannie ou de dictature. La Terreur pendant la Révolution française est un exemple de ce concept. Robespierre et les Jacobins ont utilisé la violence et la peur pour supprimer l'opposition et maintenir le contrôle, justifiant leurs actions au nom de la Révolution et de la "vertu" républicaine. Ils ont recours à des exécutions massives, notamment par la guillotine, pour éliminer ceux qu'ils considéraient comme des ennemis de la Révolution. Cependant, ce régime de terreur n'était pas durable. Il a engendré une peur et une instabilité généralisées, et a finalement mené à la chute de Robespierre et à la fin de la Terreur. Cet exemple illustre le point d'Arendt selon lequel la violence peut détruire le pouvoir, mais elle ne peut pas le créer ou le maintenir de manière durable.

Arendt croyait que la violence était un outil de contrôle inefficace à long terme et qu'elle ne pouvait pas engendrer un véritable pouvoir. Pour Arendt, le pouvoir est basé sur la légitimité et le consentement mutuel, ce qui est totalement absent dans les régimes qui utilisent la violence comme moyen de contrôle. En effet, elle affirme que la violence peut détruire le pouvoir existant, mais elle n'a pas la capacité de le créer. La violence peut effrayer et contraindre les gens à obéir, mais elle ne peut pas établir la véritable légitimité ou le respect nécessaire pour le fonctionnement à long terme d'un gouvernement. De plus, elle met en garde contre le danger que la violence puisse devenir une fin en soi. Cela se produit lorsque les régimes deviennent de plus en plus dépendants de la violence pour maintenir leur contrôle, la violence devient alors non seulement un moyen, mais aussi un objectif en soi. Cette situation, selon Arendt, marque la fin de la véritable politique, qui devrait être basée sur le dialogue, la persuasion et le consensus plutôt que sur la contrainte et la force.

"En résumé, il ne suffit pas de dire que, dans le domaine politique, il ne faut pas confondre pouvoir et violence. Le pouvoir et la violence s’opposent pas leur nature même ; lorsque l’un des deux prédomine de façon absolue, l’autre est éliminé. La violence se manifeste lorsque le pouvoir est menacé, mais si on la laisse se développer, elle provoquera finalement la disparition du pouvoir. Il en résulte que la non-violence ne devrait pas être considérée comme le contraire de la violence. Parler d’un pouvoir non violent est en fait une tautologie. La violence peut détruire le pouvoir, elle est parfaitement incapable de le créer."

C'est une citation puissante qui résume les vues d'Hannah Arendt sur le pouvoir, la violence et la non-violence. Selon Arendt, le pouvoir est intrinsèquement non violent. Lorsqu'on parle de pouvoir, on parle en fait de la capacité de travailler ensemble, d'atteindre des objectifs communs et de créer des conditions mutuellement bénéfiques. Dans cette optique, la violence est contraire à la nature du pouvoir car elle divise, détruit et force plutôt que de rassembler, créer et persuader. L'importance de cette vision d'Arendt est claire, en particulier lorsqu'on considère des contextes politiques ou sociaux dans lesquels la violence est souvent considérée comme un outil nécessaire pour obtenir ou maintenir le pouvoir. Arendt rejette cette idée, affirmant que la violence peut détruire le pouvoir, mais elle ne peut pas le créer. Sa référence à la non-violence en tant que tautologie pour le pouvoir renforce cette idée. En d'autres termes, le pouvoir, par nature, est non violent - il nécessite le consentement, l'engagement et la coopération, et ne peut pas être maintenu par la force ou la contrainte. Cette perspective a des implications importantes pour la façon dont nous concevons la politique, le leadership et les relations sociales.

Annexes[modifier | modifier le wikicode]

Références[modifier | modifier le wikicode]