Oligopole

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L'oligopole représente un type spécifique de concurrence imparfaite. Cette structure de marché se retrouve dans des secteurs où plusieurs entreprises sont en concurrence, mais sans que cette concurrence ne soit assez intense pour les transformer en "preneuses de prix". La particularité de l'oligopole est le nombre restreint d'acteurs impliqués, engendrant une compétition stratégique et minutieuse entre eux.

Dans ce contexte, on distingue différents cas selon le nombre de participants sur le marché. Par exemple, un duopole implique deux entreprises tandis qu'un oligopole caractérise un marché avec quelques offreurs. Ces marchés, où le nombre de vendeurs est relativement petit, sont qualifiés de marchés concentrés. Cette concentration confère aux entreprises un certain pouvoir de marché, leur permettant de fixer les prix et souvent de pratiquer des tarifs supérieurs aux coûts de production.

Les caractéristiques essentielles de l'oligopole incluent un équilibre délicat entre la coopération et la poursuite des intérêts individuels. Bien que ces entreprises aient le pouvoir d'influencer les prix, ce pouvoir est moindre comparé à un monopole. L'interdépendance des décisions des différents acteurs est un autre trait saillant, où chaque entreprise doit tenir compte des stratégies et actions des autres. La collusion, où les firmes coopèrent pour maximiser leurs profits collectifs, est une possibilité dans un tel marché. Enfin, la théorie des jeux, étudiant le comportement des individus dans des situations stratégiques, est particulièrement pertinente pour analyser le comportement des entreprises en situation d'oligopole, fournissant des insights sur

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Maximisation du profit avec et sans coopération

Hypothèses

L'analyse d'un marché sous les hypothèses énoncées révèle un cadre de marché oligopolistique avec des caractéristiques spécifiques.

Premièrement, l'hypothèse d'atomicité du côté de la demande indique que les consommateurs sont nombreux et aucun d'entre eux n'a suffisamment de pouvoir pour influencer le prix du marché. Cette condition assure que le pouvoir de marché est principalement détenu par les offreurs.

Deuxièmement, la nature homogène du bien implique que tous les produits offerts sur le marché sont identiques ou presque. Dans ce contexte, les entreprises ne peuvent pas se différencier par la qualité, le design ou d'autres caractéristiques du produit. Néanmoins, il est également possible d'avoir un oligopole avec des biens différenciés, connu sous le nom d'oligopole à la Bertrand, où la concurrence se fait principalement sur les prix.

Troisièmement, l'absence de libre-entrée indique que de nouvelles entreprises ne peuvent pas facilement entrer sur le marché, souvent en raison de barrières à l'entrée telles que des coûts de démarrage élevés, des technologies propriétaires ou des réglementations gouvernementales. Cela maintient le nombre d'offreurs à un niveau fixe et faible.

Les offreurs dans ce marché ont un pouvoir de marché significatif, leur permettant de fixer des prix supérieurs au coût marginal. Cela résulte du nombre limité de participants et de l'absence de produits de substitution parfaits.

Enfin, étant donné que le bien est homogène, les stratégies des entreprises se concentrent principalement sur le volume de production. Elles n'engagent pas de dépenses en publicité, en différenciation des prix ou en amélioration de la qualité, car ces aspects ne sont pas pertinents dans un marché où les produits sont indifférenciés.

Dans ce type de marché, les entreprises peuvent s'engager dans un comportement stratégique en ce qui concerne les volumes de production, potentiellement en se coordonnant pour maximiser les profits globaux. Les interactions entre les entreprises sont souvent analysées à l'aide de modèles de théorie des jeux, qui peuvent prédire des issues telles que la fixation de quantités de production pour maximiser les profits collectifs ou la compétition pour une part de marché plus importante.

La demande d'eau potable

Un exemple est un scénario de marché pour l'eau potable dans un village avec deux caractéristiques importantes : la demande d'eau et la structure du marché dictée par ses offreurs, UN et DEUX.

La demande d'eau potable est décrite par la fonction , où est la quantité demandée et est le prix. Cette fonction montre que la demande diminue à mesure que le prix augmente, ce qui est typique des marchés de biens courants. La forme inverse, , est la fonction de volonté de payer, indiquant le prix maximal que les consommateurs sont prêts à payer pour une quantité donnée d'eau.

Dans ce village, il y a deux fournisseurs uniques (UN et DEUX) pour l'eau potable. L'eau provient d'une source, et on suppose que le coût marginal de fourniture de cette eau est nul, ce qui signifie que le coût total (CT) est équivalent au coût fixe (CF).

Dans ce cadre, il est intéressant d'examiner comment le prix et la quantité offerte seraient affectés sous deux structures de marché extrêmes : la concurrence parfaite et le monopole.

Concurrence Parfaite : Dans un marché de concurrence parfaite, de nombreux vendeurs et acheteurs participent au marché, et aucun d'entre eux n'a suffisamment de pouvoir pour influencer le prix du marché. Cependant, dans votre scénario, il n'y a que deux offreurs, ce qui ne correspond pas exactement à une concurrence parfaite. Néanmoins, si UN et DEUX agissaient comme en concurrence parfaite, ils prendraient le prix du marché comme donné et produiraient en fonction de la demande. Le prix se stabiliserait au coût marginal, qui est ici nul.

Monopole : Dans un scénario de monopole, un seul vendeur contrôle l'ensemble du marché. Si UN et DEUX fusionnaient ou si l'un éliminait l'autre pour devenir le seul fournisseur, la structure du marché deviendrait monopolistique. Le monopoleur maximiserait les profits en fixant un prix où le revenu marginal est égal au coût marginal. Cependant, comme le coût marginal est nul, le monopoleur choisirait un prix et une quantité qui maximiseraient ses profits en tenant compte de la fonction de demande du marché .

Dans les deux cas, la dynamique du marché serait influencée par la manière dont UN et DEUX interagissent, soit en concurrence, soit en tant qu'entité monopolistique.

Solution en concurrence parfaite

Sous l'hypothèse de concurrence parfaite, le prix sur le marché s'aligne sur le coût marginal. Dans ce cas, comme le coût marginal de l'eau potable est zéro (), le prix serait également nul. À ce prix, la quantité totale consommée serait égale à la quantité totale demandée à un prix nul, soit . Cet équilibre serait considéré comme efficient du point de vue de l'allocation des ressources, car le prix reflète exactement le coût marginal de production.

Cependant, comme vous l'avez justement souligné, cette situation soulève un paradoxe pratique. Si l'eau est fournie gratuitement (), comment les deux fournisseurs, UN et DEUX, couvriraient-ils leurs coûts fixes et continueraient-ils à opérer? Dans la réalité, même si le coût marginal est nul, il existe des coûts fixes (comme l'entretien de l'infrastructure, les salaires, etc.) qui doivent être couverts pour assurer la viabilité économique des fournisseurs.

Ce paradoxe met en évidence une limitation du modèle de concurrence parfaite dans ce contexte. La concurrence parfaite suppose un grand nombre d'offreurs et d'acheteurs, une information parfaite, une absence de coûts de transaction, et des produits homogènes. Mais dans ce scénario, avec seulement deux offreurs et des coûts fixes non nuls, le modèle de concurrence parfaite ne semble pas être le plus approprié pour décrire de manière réaliste le fonctionnement du marché.

Ainsi, même si théoriquement, sous concurrence parfaite, le prix de l'eau serait nul et la quantité consommée maximale, dans la pratique, d'autres modèles de marché (comme l'oligopole ou le monopole) pourraient être plus pertinents pour analyser et comprendre le comportement des offreurs dans ce marché particulier.

Solution en monopole

Dans un régime de monopole où UN et DEUX coopèrent, la situation change radicalement par rapport à un marché en concurrence parfaite. Dans ce cas, le profit est maximisé quand la recette totale du marché est maximale, ce qui est particulièrement pertinent étant donné l'absence de coûts variables dans le scénario.

La maximisation du profit dans un monopole est exprimée par la formule : . Ici, π représente le profit, RT la recette totale, CT le coût total, q la quantité produite, et CF le coût fixe.

Pour trouver le niveau de production qui maximise le profit, on dérive la fonction de profit par rapport à q et on égale le résultat à zéro. Cette condition première d'ordre (CPO) est donnée par . En résolvant cette équation, on obtient et par conséquent, . Ainsi, la recette totale maximale et donc le profit maximal est .

Dans ce cadre de coopération, UN et DEUX pourraient s'accorder pour vendre une quantité totale de 60 unités au prix de 60, se partageant la recette totale de 3600 à parts égales, soit 1800 chacun.

En termes de stratégie de marché, cette coopération pourrait prendre la forme d'une collusion ou d'un cartel :

  • Collusion : Cela se produit lorsque les entreprises s'entendent secrètement sur les quantités à produire ou les prix à fixer.
  • Cartel : C'est quand des offreurs se regroupent formellement et agissent ensemble, souvent par un accord ouvert et officiel.

Cependant, il est important de noter que, bien que les producteurs en situation d'oligopole puissent être tentés de former des cartels pour réaliser des profits de monopole, ces pratiques sont souvent réglementées ou interdites par les lois antitrust. Ces lois visent à prévenir la restriction de la concurrence et à protéger les intérêts des consommateurs, rendant les accords explicites entre producteurs en oligopole illégaux dans de nombreux pays.

Oligopole solution en monopole 1.png

Ce graphique économique typique illustre la situation d'un monopole dans le contexte du marché de l'eau potable. Le graphique est divisé en deux sections principales : la courbe de demande (ou volonté de payer) sur le graphique supérieur, et la courbe de recette totale sur le graphique inférieur.

Dans le graphique supérieur, la droite de demande décroît de gauche à droite, indiquant que moins d'eau sera demandée à mesure que le prix augmente, ce qui est cohérent avec la loi de la demande. Le prix du monopole est fixé à 60, ce qui est le point où la recette marginale (non représentée) serait égale au coût marginal, qui est de zéro dans ce cas. Cela est indiqué par le fait que la droite de demande coupe l'axe des quantités à 120 unités, le maximum que les consommateurs seraient prêts à acheter si l'eau était gratuite, et le prix maximum de 120, où la quantité demandée serait nulle.

Le graphique inférieur montre la recette totale (RT), qui est une parabole avec un sommet au point où la quantité est de 60, ce qui représente la quantité optimale pour le monopoleur à vendre. À ce niveau de production, la recette totale est maximisée à 3600, comme indiqué par le pic de la courbe de recette totale. C'est le résultat de la multiplication du prix par la quantité (60 unités x 60 de prix = 3600 de recette totale).

Le commentaire sur le graphique indique que pour maximiser le profit, qui dans ce cas est égal à la recette totale en raison de l'absence de coûts variables, chaque entreprise devrait produire une quantité de 30 et obtenir un profit de 1800 chacune. Cela suppose que les deux entreprises coopèrent parfaitement, partageant le marché équitablement sous un accord de cartel. Cependant, cette situation pourrait ne pas être stable à long terme en raison de la tentation de tricher sur l'accord pour augmenter sa part du profit, un problème communément associé à la théorie des jeux dans l'étude des oligopoles et des cartels.

Il est également important de noter que, bien que cette configuration puisse être profitable pour les monopolistes, elle n'est pas nécessairement bénéfique pour les consommateurs ni pour le bien-être social. Le prix de 60 est supérieur au coût marginal de l'eau (qui est zéro), et par conséquent, la quantité produite et consommée (60 unités) est inférieure à ce qu'elle serait dans un marché concurrentiel (120 unités). Cela conduit à une perte sèche, où certains consommateurs qui auraient été disposés à payer un prix supérieur au coût marginal n'ont pas accès à l'eau.

Enfin, la législation antitrust serait un obstacle à un tel arrangement dans de nombreuses juridictions, car elle est conçue pour empêcher les entreprises de fixer des prix et de limiter la production de manière anticoncurrentielle.

Incitation à tricher

L'incitation à tricher dans un accord de cartel est un problème classique dans l'analyse économique des oligopoles. Dans l'exemple de UN et DEUX, même si les deux entreprises s'accordent initialement pour produire chacune 30 unités et fixer le prix à 60, chacune a une incitation à augmenter sa production secrètement pour capturer une plus grande part du marché.

Si UN décide de produire plus tout en anticipant que DEUX maintiendra sa production à 30 unités, la demande résiduelle à laquelle UN fait face est alors donnée par la nouvelle fonction de demande . Cela signifie que le prix que UN peut fixer diminue à mesure que sa propre quantité produite, , augmente.

La recette totale de UN est donnée par , et la recette marginale est identique en l'absence de coûts marginaux, donc . Pour maximiser son profit, UN déterminerait la quantité de production où la recette marginale égale le coût marginal, ce qui mènerait à .

En produisant 45 unités, UN augmente la quantité totale sur le marché à 75 unités (les 30 de DEUX plus ses 45), ce qui fait baisser le prix à 45 selon la fonction de demande du marché. Malgré la baisse du prix, UN améliore son revenu à , dépassant les 1800 qu'il aurait reçus en se conformant à l'accord de cartel.

Ce scénario démontre la tentation de la triche dans les cartels. Si UN augmente sa production, il peut gagner plus à court terme. Cependant, si DEUX s'aperçoit de la triche de UN et décide également de produire plus, le prix du marché pourrait chuter considérablement, potentiellement au-dessous du niveau optimal pour les deux entreprises. La nature instable des cartels est due à cette incitation à tricher et à la difficulté de maintenir la discipline de cartel, surtout en l'absence de mécanismes d'application et de surveillance. En pratique, la plupart des cartels finissent par échouer à cause de cette incitation interne à la triche, à moins qu'ils ne soient soutenus par des mécanismes de contrôle stricts ou des régulations.

Oligopole incitation à tricher 1.png


Ce graphique économique illustre la situation où l'entreprise UN envisage de tricher dans un accord de cartel avec l'entreprise DEUX pour le marché de l'eau potable. Le graphique supérieur montre la courbe de demande totale du marché, qui est une ligne droite descendant de 120 à 0 en fonction de la quantité. À côté, il y a une courbe de demande "résiduelle" pour l'entreprise UN, qui commence à 90 au lieu de 120, assumant que DEUX continue de produire 30 unités.

L'entreprise UN réalise qu'en produisant plus que sa part convenue de 30 unités — spécifiquement 45 unités — tout en s'attendant à ce que DEUX continue à produire 30 unités, elle peut augmenter ses profits. La nouvelle quantité totale sur le marché serait de 75 unités, ce qui fait baisser le prix de 60 à 45. Bien que le prix soit plus bas, le profit de UN augmente, car il est calculé en fonction de la quantité qu'elle vend elle-même. Le graphique inférieur illustre la recette totale de UN avec un pic à 2025, qui est supérieur à la recette de 1800 obtenue si chaque entreprise respecte l'accord de produire 30 unités.

La ligne pointillée verticale qui part de 45 unités sur le graphique supérieur et qui touche le point le plus haut de la courbe de recette totale de UN sur le graphique inférieur indique clairement que 45 unités est la quantité optimale pour UN si elle veut maximiser son profit en supposant que DEUX ne change pas sa quantité de production. Cependant, cette action de triche baisse le prix de marché pour les deux entreprises, ce qui signifie que DEUX verra son profit réduit à moins qu'elle ne réagisse.

Cette situation illustre le dilemme central des cartels : bien qu'ils puissent être profitables lorsqu'ils sont respectés, chaque membre a une incitation individuelle à produire plus pour augmenter ses bénéfices personnels. Cela mine l'accord de cartel et peut conduire à son effondrement, avec des conséquences potentiellement négatives pour tous les participants. De plus, si DEUX remarque la triche de UN et décide d'augmenter également sa production, le prix sur le marché pourrait tomber encore plus bas, réduisant les profits pour les deux entreprises.

La situation décrite est un exemple classique du "prisonnier's dilemme" en théorie des jeux, où les acteurs, bien que rationnels et poursuivant leur propre intérêt, aboutissent à un résultat qui n'est pas optimal pour le groupe. Cela démontre la difficulté de maintenir la coopération dans les accords de cartel, surtout en l'absence de mécanismes de surveillance et de punition pour la triche.

Équilibre sans coopération

Dans une situation où il n'y a pas de coopération entre UN et DEUX, les deux entreprises entrent dans un cycle de réaction et contre-réaction en ajustant leur production en réponse aux actions de l'autre. Si UN triche en augmentant sa production et que DEUX s'en rend compte, DEUX peut choisir d'augmenter également sa production pour récupérer une partie de son profit perdu. Cette dynamique continue jusqu'à ce qu'un équilibre de duopole soit atteint.

L'équilibre de duopole est défini par la condition où les recettes marginales des deux entreprises sont égales et où aucune n'a intérêt à changer sa quantité de production car cela ne ferait qu'abaisser leur profit marginal. Dans le cas spécifique que vous avez présenté, les conditions d'équilibre de duopole sont exprimées par les équations . En résolvant ces équations, on obtient que les quantités optimales pour les deux entreprises sont . Le prix se stabilise alors à et les recettes totales pour chacune des entreprises sont .

À cet équilibre, les deux entreprises produisent chacune 40 unités et le prix du marché est de 40. Cela se traduit par un profit de 1600 pour chaque entreprise, ce qui est inférieur au profit qu'elles auraient pu réaliser si elles avaient maintenu l'accord de cartel et coopéré pour maintenir le prix à 60, générant ainsi un profit de 1800 chacune.

Ce résultat illustre un aspect central des oligopoles : lorsque les entreprises ne coopèrent pas, elles finissent par être pénalisées par la concurrence qu'elles se font mutuellement. L'équilibre de duopole mène à un résultat où chaque entreprise gagne moins que ce qu'elle aurait pu obtenir dans un accord de cartel. Néanmoins, cet équilibre est plus stable que le cartel parce qu'il n'y a pas d'incitation à dévier unilatéralement, puisque toute tentative d'augmenter la production réduirait la recette marginale de l'entreprise concernée.

L'équilibre de duopole reflète un compromis entre la concurrence et la coopération. Bien qu'il ne soit pas aussi profitable pour les entreprises qu'une collusion totale, il est conforme aux lois antitrust et tend à être plus avantageux pour les consommateurs, car il résulte en un prix inférieur et une quantité supérieure par rapport à ce qui serait observé sous un cartel.

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Ce graphique représente la continuation de l'analyse économique du marché de l'eau potable dans une situation de duopole sans coopération, où les entreprises UN et DEUX ajustent leur production en réponse aux actions de l'autre jusqu'à atteindre un équilibre.

Le graphique supérieur montre les courbes de demande totale et résiduelle pour l'entreprise UN. La courbe de demande résiduelle démarre à un prix de 80 pour zéro quantité, supposant que DEUX produit 40 unités (comme indiqué par le point où la courbe résiduelle rencontre l'axe vertical). La courbe de demande totale décrit la volonté de payer pour l'ensemble du marché et décroît en fonction de la quantité totale. L'intersection de la quantité produite par UN et la demande résiduelle détermine le prix sur le marché.

Le graphique inférieur illustre les recettes totales (RT) pour l'entreprise UN avec une courbe en forme de parabole, atteignant son sommet à 40 unités produites par UN, ce qui correspond à la recette totale et donc au profit maximal lorsque DEUX produit également 40 unités. Le profit de chaque entreprise dans le duopole est illustré par le niveau de 1600, inférieur au profit de 2025 pour UN lorsqu'elle a triché et produit 45 unités, mais plus élevé que le profit de 1350 de DEUX lorsque UN a produit 45 et DEUX est restée à 30.

Le commentaire sur l'image indique que DEUX reconnaît que son profit a diminué en raison de la baisse du prix (à 45) lorsque UN a augmenté sa production, et donc DEUX augmente également sa production pour compenser. Finalement, les deux entreprises s'ajustent pour atteindre un équilibre où elles produisent chacune 40 unités, conduisant à un prix de marché de 40 et à un profit de 1600 pour chacune.

Cette situation d'équilibre en duopole montre que, même si les entreprises pourraient potentiellement gagner plus en coopérant (comme dans le cartel où elles gagnaient 1800 chacune), la tentation de tricher et l'absence de mécanismes de coopération les conduisent à un résultat où elles gagnent moins. Cependant, cet équilibre est plus stable car aucun des duopolistes n'a d'incitation à changer sa production, puisque toute augmentation réduirait le prix et donc les profits.

L'image illustre le concept d'équilibre de Nash dans le contexte d'un duopole, où chaque entreprise, en prenant en compte la stratégie de l'autre, choisit sa meilleure réponse. Cet équilibre n'est pas l'optimal de Pareto, car il y a une perte sèche due au fait que le prix est supérieur au coût marginal (qui est de zéro), et donc la quantité produite est inférieure à ce qu'elle serait dans un marché parfaitement concurrentiel. Cela révèle la tension intrinsèque dans les marchés oligopolistiques entre les incitations individuelles et le bien-être collectif.

Maximisation du profit en duopole : cas général

Dans un duopole, la maximisation du profit est un problème classique d'interaction stratégique entre deux entreprises. Chaque entreprise cherche à maximiser ses profits en tenant compte non seulement de ses propres coûts et de la demande du marché, mais également des actions de son concurrent.

Pour l'entreprise 1, la maximisation du profit est donnée par l'équation , où est la quantité produite par l'entreprise 1, est le prix du marché en fonction de la quantité totale offerte sur le marché, et sont les coûts totaux de l'entreprise 1. Ici, est la somme des quantités produites par les deux entreprises, soit .

La condition de premier ordre (CPO) pour la maximisation du profit pour l'entreprise 1, où la recette marginale est égale au coût marginal , est exprimée par . Cette équation montre que le coût marginal de l'entreprise 1 doit être égal au prix plus la variation du prix multipliée par la quantité produite par l'entreprise 1.

De même, pour l'entreprise 2, la maximisation du profit est exprimée par , avec une condition de premier ordre similaire à celle de l'entreprise 1 : .

L'aspect le plus crucial de ces équations est qu'elles illustrent l'interdépendance entre les entreprises dans un duopole. Les décisions de quantité de l'une affectent le prix de marché, qui à son tour affecte la recette marginale et donc les décisions de l'autre entreprise. En pratique, cela signifie que chaque entreprise doit anticiper la réaction de l'autre lorsqu'elle prend ses décisions de production.

En résumé, dans un duopole, chaque entreprise doit tenir compte non seulement de ses propres coûts de production et de la demande du marché, mais aussi des actions de son concurrent. L'équilibre du marché est atteint lorsque les deux entreprises ont ajusté leur production de manière à ce que leurs recettes marginales soient égales à leurs coûts marginaux, prenant en compte les effets de leurs propres actions sur le prix du marché et donc sur les recettes marginales de l'autre. Cela conduit à un équilibre de Cournot dans lequel chaque entreprise produit une quantité telle que sa recette marginale est égale à son coût marginal, en tenant compte de la production de l'autre entreprise.

Équilibre de l'oligopole

Dans un oligopole où les entreprises agissent individuellement et sans coopération pour déterminer leur niveau de production, les résultats sont typiquement intermédiaires entre ceux d'un monopole et d'une concurrence parfaite.

La quantité totale produite dans un oligopole est généralement plus importante que celle produite sous un monopole mais reste inférieure à la quantité qui serait produite dans un marché en concurrence parfaite. Ceci est dû à l'effet de l'interdépendance entre les firmes oligopolistiques : chaque firme, en maximisant son profit, ne prend pas en compte l'impact de sa production sur les bénéfices des autres firmes, à l'inverse d'un monopole qui contrôle l'ensemble de la production du marché.

Le prix établi par les firmes en oligopole tend à être inférieur au prix de monopole, car la présence de concurrents sur le marché pousse les prix vers le bas. Cependant, ce prix reste supérieur au prix qui prévaudrait sous une concurrence parfaite. En concurrence parfaite, le prix du marché correspondrait au coût marginal (Cm), car les entreprises sont des preneuses de prix et ne peuvent fixer leurs prix au-dessus du coût marginal sans perdre toute leur clientèle.

Les profits réalisés par les entreprises en oligopole sont également intermédiaires. Ils sont plus élevés que ce qu'ils seraient dans un marché en concurrence parfaite, où les profits économiques tendent vers zéro à long terme, mais ils sont inférieurs à ceux qu'une entreprise monopolistique pourrait réaliser. Cela s'explique par le fait qu'en concurrence parfaite, les entreprises ne peuvent pas fixer de prix au-dessus du coût marginal en raison de la présence de nombreux concurrents, tandis qu'en oligopole, le nombre réduit de concurrents confère un certain pouvoir de marché, permettant aux entreprises de maintenir les prix à un niveau supérieur au coût marginal et de réaliser ainsi un mark-up positif.

En résumé, l'équilibre de l'oligopole se caractérise par un niveau de production, de prix et de profits qui reflètent le pouvoir de marché détenu par les entreprises oligopolistiques. Ce pouvoir de marché leur permet de fixer les prix au-dessus du coût marginal, réalisant ainsi un profit supérieur à celui d'un environnement de concurrence parfaite, mais sans atteindre les niveaux de profit qu'un monopole pourrait obtenir.

L'effet de la taille

L'augmentation du nombre de vendeurs dans un marché oligopolistique a tendance à pousser le marché vers des résultats similaires à ceux d'une concurrence parfaite. Cet effet peut être analysé à travers deux mécanismes principaux : l'effet quantité et l'effet prix.

L'effet quantité est lié au fait que, dans un marché oligopolistique, le prix est généralement fixé au-dessus du coût marginal. Cela signifie que chaque unité supplémentaire vendue au prix courant va augmenter les profits, car le revenu généré par la vente de l'unité supplémentaire est supérieur au coût de sa production. Si le nombre de vendeurs augmente, la quantité totale offerte sur le marché va augmenter, ce qui devrait logiquement augmenter les profits globaux, toutes choses étant égales par ailleurs.

L’effet prix concerne la baisse du prix qui résulte de l'augmentation de l'offre totale sur le marché. En effet, l'augmentation de la production totale peut saturer le marché et entraîner une baisse du prix en raison de la concurrence accrue entre les vendeurs. Cette baisse de prix va réduire le profit réalisé sur chaque unité vendue.

Lorsque le nombre de vendeurs augmente, ces deux effets s'opposent. L'effet quantité cherche à augmenter les profits en vendant plus d'unités, tandis que l'effet prix tend à les diminuer en réduisant les revenus par unité. L'effet net sur les profits dépendra de la sensibilité de la demande aux changements de prix (l'élasticité de la demande) et de la capacité de production supplémentaire à influencer le marché.

À mesure que le nombre de vendeurs augmente, l'effet prix devient de plus en plus dominant. Les prix commencent à baisser, se rapprochant du coût marginal. Cela diminue le pouvoir de marché de chaque vendeur et réduit les profits par unité. En théorie, si le nombre de vendeurs continue d'augmenter indéfiniment, le marché deviendrait parfaitement concurrentiel, le prix convergerait vers le coût marginal, et la quantité produite se rapprocherait du niveau socialement efficace, c'est-à-dire là où le prix égale le coût marginal.

Dans un marché socialement efficace, les ressources sont allouées de la manière la plus avantageuse possible, maximisant le bien-être total des consommateurs et des producteurs. L'augmentation du nombre de vendeurs dans un marché oligopolistique peut donc mener à une allocation des ressources plus efficace, à des prix plus bas pour les consommateurs et à une augmentation de la quantité vendue, ce qui est bénéfique pour la société dans son ensemble.

La théorie des jeux et l'économie de la coopération

Eléments de théorie des jeux

La théorie des jeux est une branche mathématique et économique qui modélise et analyse comment les agents économiques prennent des décisions stratégiques dans des situations où les résultats dépendent non seulement de leurs propres décisions, mais aussi de celles des autres agents. Elle trouve des applications dans divers domaines tels que l'économie, la politique, la psychologie, la biologie et même dans les relations internationales.

Dans le contexte de la théorie des jeux, une stratégie est un plan d'action complet qui spécifie le comportement à adopter dans toutes les situations possibles qui pourraient survenir. Cela pourrait impliquer une stratégie pure, où un joueur choisit une seule action spécifique, ou une stratégie mixte, où un joueur rend ses actions aléatoires en utilisant une distribution de probabilités sur plusieurs actions possibles.

Les jeux peuvent être catégorisés comme statiques ou dynamiques. Dans un jeu statique, tous les joueurs choisissent leurs actions simultanément, ou du moins sans connaître les actions des autres. Les jeux dynamiques, quant à eux, se déroulent sur plusieurs périodes avec des actions à des moments différents, ce qui permet aux joueurs d'observer certaines des actions précédentes des autres joueurs avant de décider de leur propre stratégie. Cela peut introduire des considérations de réputation et de punition pour non-coopération, comme dans le dilemme des prisonniers répété.

L'incertitude joue également un rôle clé dans la théorie des jeux. Dans beaucoup de jeux, les joueurs n'ont pas une information parfaite concernant les stratégies ou les types des autres joueurs. Cela mène à des stratégies où les joueurs doivent maximiser leurs gains attendus en tenant compte des probabilités des différentes actions des autres joueurs.

La notion de stratégies crédibles est essentielle dans les jeux dynamiques. Une stratégie est dite crédible si un joueur a des incitations à s'y tenir même après que les étapes initiales du jeu se soient déroulées. Cela est souvent lié au concept d'engagement et aux menaces ou promesses dans des jeux séquentiels.

La théorie des jeux utilise des outils mathématiques avancés pour résoudre des jeux et trouver des équilibres stratégiques, comme l'équilibre de Nash, où aucun joueur ne peut augmenter son gain attendu en changeant unilatéralement sa stratégie, en supposant que les autres joueurs maintiennent leurs stratégies constantes. La théorie des jeux aide à comprendre les comportements complexes en situation d'interdépendance et elle est fondamentale pour analyser les marchés économiques, en particulier les oligopoles, où les entreprises doivent constamment anticiper et réagir aux stratégies de leurs concurrents.

Théorie des jeux et oligopole

L'oligopole est un terrain classique pour l'application de la théorie des jeux en raison du nombre limité de firmes et de l'interdépendance de leurs décisions. Dans un tel marché, chaque entreprise doit prendre en compte les réactions potentielles de ses concurrents lorsqu'elle prend ses propres décisions de production et de tarification.

Chaque entreprise, ou "joueur" dans le langage de la théorie des jeux, cherche à maximiser son profit. Cependant, contrairement à un marché en concurrence parfaite où chaque entreprise est une preneuse de prix et où son action individuelle n'a pas d'impact sur le marché, ou à un monopole où l'entreprise a un contrôle total sur le marché, chaque firme en oligopole sait que ses actions influenceront et seront influencées par les actions de ses concurrents. C'est un exemple de jeu à somme non nulle, où les profits de l'une ne sont pas forcément les pertes des autres, et les stratégies optimales dépendent fortement des choix des autres joueurs.

Dans un marché oligopolistique, les entreprises peuvent opérer sous une information complète mais imparfaite. Information complète signifie que toutes les entreprises connaissent toutes les stratégies possibles et les payoffs associés à chaque combinaison de stratégies pour tous les joueurs. Cependant, l'information est imparfaite car, bien que chaque entreprise connaisse les payoffs et les stratégies, elle ne connaît pas les choix de stratégie que les autres entreprises feront ou ont fait.

La simultanéité des actions ajoute à la complexité stratégique. Chaque entreprise doit choisir son niveau de production et son prix sans savoir précisément ce que les autres vont faire. Cela peut conduire à des résultats variés, y compris des équilibres précaires qui peuvent être perturbés par des changements dans les stratégies des entreprises ou des entrées de nouvelles firmes sur le marché.

Le concept d'équilibre de Nash est particulièrement pertinent ici : c'est une situation où, connaissant les stratégies des autres, aucune entreprise n'a intérêt à changer unilatéralement sa propre stratégie. Cet équilibre reflète une sorte de trêve stratégique où chaque entreprise, en supposant que les autres ne changent pas leur stratégie, choisit la meilleure réponse à ces stratégies.

En pratique, cela peut mener à des stratégies qui incluent des compromis entre agressivité et prudence, l'adoption de stratégies de signalisation, ou des tentatives de coopération tacite pour éviter des guerres de prix destructrices. La théorie des jeux fournit donc un cadre pour comprendre et prédire les comportements dans ces marchés complexes.

L'équilibre de Nash

John F. Nash a apporté une contribution fondamentale à la théorie des jeux avec sa caractérisation de l'équilibre pour les jeux non coopératifs. Cet équilibre, connu sous le nom d'équilibre de Nash, est devenu un concept central de la théorie des jeux moderne et a des applications dans de nombreux domaines allant de l'économie à la biologie et au-delà.

L'équilibre de Nash est une situation où aucun joueur n'a intérêt à changer de stratégie tant que les autres joueurs maintiennent les leurs. Cela signifie que, même si les joueurs ne coopèrent pas ou ne communiquent pas entre eux, ils arrivent à un état où les stratégies sont mutuellement les meilleures réponses les unes aux autres. Chaque joueur, en regardant ce que font les autres, choisit la meilleure stratégie possible pour lui-même.

Il est crucial de noter que l'équilibre de Nash ne correspond pas nécessairement à l'optimalité du point de vue du groupe ou du bien-être social. Dans certains jeux, comme le célèbre dilemme du prisonnier, l'équilibre de Nash peut conduire à un résultat sous-optimal pour tous les participants. Cela est dû au fait que l'équilibre de Nash reflète ce qui est meilleur pour chaque individu dans le contexte des choix des autres, mais pas nécessairement ce qui est optimal pour l'ensemble des joueurs.

Quand un joueur a une stratégie dominante, elle lui donnera le meilleur résultat peu importe ce que les autres joueurs décident de faire. Si tous les joueurs ont une stratégie dominante, l'équilibre de Nash est simple à trouver : chaque joueur choisira sa stratégie dominante. Cependant, dans de nombreux jeux plus complexes, les joueurs n'ont pas de stratégies dominantes et doivent tenir compte de manière plus nuancée des stratégies potentielles des autres joueurs pour déterminer leur meilleure réponse.

L'équilibre de Nash a été une avancée importante car il fournit un moyen de prédire les résultats dans des situations où les individus prennent des décisions qui sont interdépendantes, ce qui est un aspect commun à de nombreuses situations économiques, sociales et biologiques. La reconnaissance de l'importance de ce concept par le Comité Nobel souligne son influence étendue et sa pertinence pour les sciences sociales.

Le dilemme du prisonnier

Le dilemme du prisonnier est un exemple classique en théorie des jeux qui démontre le conflit entre les intérêts individuels et le bien-être collectif. C'est un jeu non coopératif où, malgré l'existence d'un résultat coopératif qui serait meilleur pour les deux parties, l'équilibre de Nash prédit un résultat non coopératif où chaque joueur opte pour sa stratégie dominante, conduisant à un résultat sous-optimal pour les deux.

Le jeu se déroule habituellement comme suit : deux criminels présumés sont arrêtés et interrogés séparément. Chacun a la possibilité de trahir l'autre en avouant, ou de coopérer avec l'autre en restant silencieux. Si l'un trahit et l'autre reste silencieux, le traître est libéré tandis que l'autre reçoit la peine maximale. Si tous deux trahissent, ils reçoivent tous les deux une peine sévère, mais moins que la peine maximale. Si tous deux restent silencieux, ils reçoivent tous les deux une peine plus légère.

Le dilemme réside dans le fait que, bien que la coopération (tous les deux restent silencieux) conduirait à un meilleur résultat global, la stratégie dominante pour chaque joueur est de trahir l'autre. En effet, peu importe ce que fait l'autre joueur, chaque joueur a une meilleure issue en trahissant : soit il est libéré (si l'autre coopère), soit il reçoit une peine moins lourde (si l'autre trahit également). Par conséquent, l'équilibre de Nash est que les deux joueurs trahissent, résultant en une peine plus lourde pour les deux, ce qui est un résultat pire que si les deux avaient coopéré.

Dans le contexte des marchés oligopolistiques, le dilemme du prisonnier illustre pourquoi les firmes ont du mal à maintenir la coopération, comme dans le cas d'un cartel où les firmes pourraient bénéficier de profits plus élevés en limitant la production pour maintenir les prix élevés. Malgré ces avantages potentiels, la tentation de trahir le cartel en produisant plus pour augmenter sa propre part de marché rend la coopération instable. Chaque firme sait que si elle ne trahit pas et que l'autre le fait, elle se retrouvera avec le pire résultat possible. Ainsi, le manque de confiance et l'incitation à agir dans son propre intérêt poussent les firmes vers la non-coopération, souvent au détriment du bien-être collectif.

Le dilemme du prisonnier, tel que vous le décrivez, est un exemple emblématique de la théorie des jeux qui montre comment les intérêts individuels peuvent entrer en conflit avec l'intérêt collectif, même quand la coopération serait bénéfique pour tous les participants.

Dans ce scénario, les deux prisonniers sont confrontés à un choix sans la possibilité de coordonner leurs actions. Le tableau des payoffs pour ce jeu peut être décrit comme suit :

  • Si aucun des deux prisonniers n'avoue (coopération mutuelle), ils écopent tous les deux d'une peine mineure d'un an.
  • Si l'un avoue (trahit) et l'autre non, le traître est relâché tandis que celui qui reste silencieux est sévèrement puni avec vingt ans de prison.
  • Si les deux avouent (défaut mutuel), ils reçoivent tous les deux une peine de huit ans de prison.

La difficulté vient du fait que chaque prisonnier doit prendre une décision sans savoir ce que l'autre va faire. La stratégie dominante (la meilleure action à prendre quelle que soit l'action de l'autre joueur) pour chacun est d'avouer, car cela maximise l'utilité individuelle quel que soit le choix de l'autre prisonnier. Ainsi, l'équilibre de Nash dans ce jeu est pour les deux prisonniers d'avouer, car en faisant ce choix, aucun des deux ne peut améliorer sa situation en changeant unilatéralement sa décision.

Cependant, l'équilibre de Nash n'est pas l'optimum de Pareto dans ce cas. L'optimum de Pareto est une situation où il n'est pas possible d'améliorer la situation de quelqu'un sans détériorer celle d'un autre. Si les deux prisonniers pouvaient s'entendre pour ne pas avouer, ils seraient tous les deux mieux lotis avec seulement un an de prison chacun. Mais, en raison de l'impossibilité de communiquer et de l'incertitude concernant les actions de l'autre, ils finissent par choisir une stratégie qui les conduit à un résultat mutuellement défavorable.

Le dilemme du prisonnier illustre bien le défi de la coopération dans de nombreuses situations économiques, politiques et sociales, où la confiance et la communication sont essentielles pour atteindre des résultats mutuellement avantageux. Il démontre également la complexité des interactions humaines et la difficulté de prendre des décisions rationnelles dans des situations d'incertitude.

Equilibre de Nash unique: (Avoue, Avoue). Equilibre non-optimal: les deux joueurs pourraient améliorer leur situation en se taisant. La coopération est difficile à maintenir car elle n’est pas un choix rationnel au niveau individuel. NB: ici, le jeu est symétrique, mais ce n’est pas nécessairement le cas.

La matrice des payoffs fournie représente les résultats possibles du dilemme du prisonnier pour deux suspects, "Brute" et "Truand". Chaque suspect a deux options : avouer ou se taire. Les payoffs sont exprimés en termes d'années de prison que chaque suspect encourt en fonction de la décision prise, à la fois par lui-même et par l'autre.

Analysons les payoffs :

  • Si les deux avouent, chacun reçoit une peine de 8 ans de prison.
  • Si Brute avoue mais que Truand se tait, Brute est libéré et Truand reçoit la peine maximale de 20 ans de prison.
  • Si Brute se tait mais que Truand avoue, Brute reçoit la peine maximale de 20 ans de prison et Truand est libéré.
  • Si les deux se taisent, chacun reçoit une peine mineure d'1 an de prison.

Le dilemme se situe dans le fait que bien que le meilleur résultat collectif soit atteint lorsque les deux se taisent (1 an de prison chacun), la décision rationnelle pour chaque individu, lorsque l'on considère les actions de l'autre comme données, est d'avouer. Ainsi, si Truand pense que Brute va se taire, il devrait avouer pour être libéré. De même, si Truand pense que Brute va avouer, il devrait aussi avouer pour éviter la peine de 20 ans. La même logique s'applique à Brute. Par conséquent, l'équilibre de Nash de ce jeu est que les deux avouent, puisque avouer est la meilleure réponse pour chaque suspect quel que soit le choix de l'autre.

Cet équilibre de Nash est unique et il est non-optimal car il mène à un résultat où les deux joueurs obtiennent un payoff pire que s'ils avaient choisi de se taire. Cela illustre la difficulté de maintenir la coopération, car bien que coopérer soit mutuellement avantageux, elle n'est pas un choix rationnel au niveau individuel sans une communication et une confiance entre les joueurs.

La symétrie de ce jeu signifie que les payoffs sont identiques pour les stratégies miroirs des deux joueurs. Cependant, la théorie des jeux s'applique également à des jeux non symétriques où les stratégies et les payoffs peuvent varier d'un joueur à l'autre, ce qui peut complexifier davantage l'analyse et la détermination des équilibres.

Un jeu de course à l'armement

Un jeu de course à l'armement est un exemple classique de dilemme de sécurité qui se produit souvent dans les relations internationales et peut être analysé à l'aide de la théorie des jeux. Dans ce scénario, deux pays (ou plus) doivent décider s'ils doivent augmenter leur arsenal militaire. Bien que chaque pays puisse bénéficier individuellement d'une position plus forte en s'armant davantage, si tous les pays choisissent de s'armer, cela pourrait conduire à une augmentation des tensions, à une instabilité régionale et, dans le pire des cas, à un conflit armé.

Voici comment un jeu de course à l'armement pourrait être structuré en termes de théorie des jeux :

  • Les Joueurs : Deux pays, Pays A et Pays B.
  • Les Stratégies : Chaque pays a deux options - s'armer ou ne pas s'armer.
  • Les Payoffs : Les gains sont déterminés non seulement par la décision d'un pays de s'armer ou non, mais aussi par la décision prise par l'autre pays.

Les résultats possibles sont les suivants :

  • Désarmement Mutuel : Si les deux pays choisissent de ne pas s'armer, ils évitent les coûts liés à une course aux armements et peuvent bénéficier d'une plus grande stabilité et de relations pacifiques. Cependant, ils peuvent se sentir vulnérables à des menaces extérieures.
  • Course aux Armements : Si les deux pays choisissent de s'armer, cela augmente les dépenses militaires et la tension, réduisant potentiellement la sécurité globale.
  • Déséquilibre : Si un pays s'arme et que l'autre ne le fait pas, le pays armé pourrait se sentir plus en sécurité avec un avantage militaire, tandis que le pays désarmé pourrait se sentir vulnérable et désavantagé.
  • Stabilité de Nash : L'équilibre de Nash dans ce jeu est souvent la situation où les deux pays s'arment, car chaque pays a la stratégie dominante de s'armer pour garantir sa sécurité quelles que soient les actions de l'autre.

L'ironie de la course à l'armement est que, bien que chaque pays cherche à augmenter sa propre sécurité en s'armant, l'armement mutuel peut en fait réduire la sécurité globale, un concept connu sous le nom de paradoxe de la sécurité. Ce paradoxe est semblable au dilemme du prisonnier en ce que les résultats individuellement rationnels conduisent à un résultat collectivement irrationnel ou sous-optimal.

Dans la réalité, ces jeux sont souvent répétés ou dynamiques, avec une histoire de mouvements précédents qui peuvent influencer les stratégies actuelles. En outre, les éléments tels que les alliances, les traités et les organismes internationaux peuvent jouer un rôle dans la modification des payoffs et des choix stratégiques disponibles pour les pays.

Stratégie dominante dans le jeu du dilemme du prisonnier: "avoue" ici: "s'armer".


L'image montre une matrice de payoff pour un jeu de course à l'armement entre deux superpuissances historiques, l'URSS et les États-Unis. La matrice représente les conséquences de deux stratégies disponibles pour chacun des acteurs : "s'armer" ou "se désarmer". Les résultats sont basés sur la combinaison des choix des deux pays.

Analysons les payoffs dans chaque scénario :

  • Si l'URSS et les États-Unis choisissent tous les deux de "s'armer", ils sont tous deux "soumis au risque", ce qui implique une augmentation des tensions et une sécurité réduite en raison de la probabilité accrue de confrontation militaire.
  • Si l'URSS décide de "s'armer" tandis que les États-Unis choisissent de "se désarmer", l'URSS est "en sécurité et puissante" tandis que les États-Unis sont "soumis au risque et affaiblis". Cela donne un avantage stratégique à l'URSS, laissant les États-Unis vulnérables.
  • Si l'URSS choisit de "se désarmer" tandis que les États-Unis décident de "s'armer", les rôles sont inversés avec les États-Unis en position de sécurité et de puissance, et l'URSS soumise au risque et affaiblie.
  • Si les deux décident de "se désarmer", ils sont tous les deux "en sécurité", ce qui serait l'issue la plus pacifique et la plus stable, réduisant le risque d'un conflit armé.

La stratégie dominante pour les deux joueurs dans ce jeu, similaire à la stratégie "avoue" dans le dilemme du prisonnier classique, est de "s'armer". Indépendamment de la décision prise par l'autre partie, chaque pays a un meilleur résultat (en termes de sécurité et de pouvoir) lorsqu'il choisit de s'armer. Par conséquent, l'équilibre de Nash de ce jeu est que les deux pays finissent par s'armer, car aucune des parties n'a un incitatif unilatéral à se désarmer. Cependant, tout comme dans le dilemme du prisonnier, cet équilibre n'est pas socialement optimal ; les deux pays seraient mieux si tous les deux choisissaient de se désarmer, réduisant ainsi les risques de conflit tout en économisant des ressources dépensées dans l'armement.

Cet exemple illustre clairement le paradoxe de la sécurité : en cherchant à augmenter leur sécurité par des moyens militaires, les pays peuvent en fait diminuer leur sécurité globale en raison de la réaction réciproque et de la méfiance qu'elle génère. Cela démontre la complexité de la coopération internationale et les défis associés à la prise de décisions dans un environnement international souvent incertain et basé sur la perception des actions des autres.

Le duopole comme dilemme du prisonnier

Tout comme la logique de l’intérêt individuel conduit les prisonniers à avouer, ce même intérêt individuel engendre des difficultés pour l’oligopole à maintenir une situation coopérative (qui serait la solution optimale pour les deux), caractérisée par une production faible, des prix élevés et des profits de monopole.

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Un jeu de publicité

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Un jeu de ressources communes

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Le jeu oligopolistique UN et DEUX

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Equilibre de non-coopération: (40L, 40L)

Optimum (pour les producteurs) → coopération: (30L, 30L)

La coopération dans un cadre dynamique

Avec le passage du temps et si on considère que le "jeu" entre les duopolistes se répète, on peut envisager la coopération comme plus stable, car les duopolistes se rendent compte des profits auxquels ils renoncent en trichant.

Tant que les firmes se soucient des profits futurs, elles décideront de renoncer au gain ponctuel résultant du non-respect de l’accord dans le cadre d’un jeu répété.

Lorsque UN triche, DEUX peut le “punir” par la cessation immédiate de la coopération et le retour à l’équilibre non-coopératif → punition CREDIBLE.

UN se rend compte qu’il a gagné un profit de triche de court terme mais perdu tous les profits de monopole futur....

La répétition du jeu sans date de fin, ou une incertitude, permet d’assurer un équilibre coopératif.

L'oligopole et le rôle de l'État

L'oligopole et le rôle de l'État

La coopération entre les membres de l’oligopole est désirable du point de vue des entreprises du secteur en question uniquement. Pour la société dans son ensemble, l’oligopole est indésirable car il conduit à une production trop basse et à des prix trop élevés.

La plupart des pays s’équipent d’un appareil législatif visant à empêcher les enfreintes à la concurrence par des cartels ou des ententes sur les prix.

Certaines lois sont plus souples que d’autres selon le pays.

Les économistes, de leur côté, ne sont pas toujours unanimes sur la manière de juger les restrictions à la concurrence et la nécessité de légiférer contre certaines pratiques.

États-Unis : le Sherman Antitrust Act

Loi votée déjà à la fin du XIXe siècle (1890) pour contrer le monopole de la

Standard Oil de la famille Rockfeller.

« Every contract, combination in the form of trust or otherwise, or conspiracy, in restraint of trade or commerce among the several States, or with foreign nations, is declared to be illegal.

Every person who shall make any contract or engage in any combination or conspiracy hereby declared to be illegal shall be deemed guilty of a felony, and, on conviction thereof, shall be punished by fine not exceeding $100,000,000 if a corporation, or, if any other person, $1,000,000, or by imprisonment not exceeding 10 years, or by both said punishments, in the discretion of the court. »

Le Sherman Act a été complété par le Clayton Act en 1914.

Europe : le Traité de Rome (art. 82)

Selon le Traité de Rome (1957), est incompatible avec le marché commun et interdit, dans la mesure où le commerce entre États membres est susceptible d’en être affecté, le fait pour une ou plusieurs entreprises d’exploiter de façon abusive une position dominante sur le marché commun ou dans une partie substantielle de celui-ci.

Ces pratiques abusives peuvent notamment consister à :

  1. imposer de façon directe ou indirecte des prix d’achat ou de vente ou d’autres conditions de transaction non équitables ;
  2. limiter la production, les débouchés ou le développement technique au préjudice des consommateurs ;
  3. appliquer à l’égard de partenaires commerciaux des conditions inégales à des prestations équivalentes, en leur infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence ;
  4. subordonner la conclusion de contrats à l’acceptation, par les partenaires, de prestations supplémentaires qui, par leur nature ou selon les usages commerciaux, n’ont pas de lien avec l’objet de ces contrats.

Suisse : la nouvelle LCart

La loi anti-trust en Suisse (de 1995, révisée en 2004) est fondée sur la notion d’abus (les accords anti-concurrentiels sont licites, seuls les abus sont illicites), alors qu’ailleurs (en Europe notamment) c’est le principe de l’interdiction qui prévaut.

Possibilité pour la Comco (Commission de la Concurrence) d’infliger des sanctions dès la première infraction (avant: seulement dans les cas de récidive).

La LCart prévoit un programme de clémence qui devrait inciter les entreprises à collaborer pour bénéficier d’une réduction de l’amende.

Des sanctions jusqu’à à 10% du chiffre d’affaire réalisé en Suisse au cours des trois dernières années.

LCart: l'abus de position dominante

« (...) Sont en particulier réputés illicites:

a) le refus d’entretenir des relations commerciales (p. ex. refus de livrer ou d’acheter des marchandises);

b) la discrimination de partenaires commerciaux en matière de prix ou d’autres conditions commerciales;

c) le fait d’imposer des prix ou d’autres conditions commerciales inéquitables;

d) la sous-enchère en matière de prix ou d’autres conditions commerciales, dirigée contre un concurrent déterminé;

e) la limitation de la production, des débouchés ou du développement technique;

f) le fait de subordonner la conclusion de contrats à la condition que les partenaires acceptent ou fournissent des prestations supplémentaires. »

Résumé

Les firmes en oligopole maximisent leur profit total en formant un cartel ou en agissant comme un monopole.

Si les membres du cartel prennent les décisions relatives à leur niveau de production de manière individuelle (pas de coopération), le résultat est une plus grande quantité et un prix plus bas comparé à la situation de monopole.

Plus il y a de firmes dans l’oligopole, plus les quantités et les prix se rapprochent des niveaux concurrentiels.

Le dilemme du prisonnier montre que la poursuite de l’intérêt individuel peut empêcher les individus de maintenir la coopération alors qu’elle est dans leur intérêt mutuel.

La logique du dilemme du prisonnier s’applique dans de nombreuses situations incluant la course à l’armement, la publicité, les ressources communes et les oligopoles.

Les décideurs politiques utilisent les lois sur la concurrence pour empêcher les oligopoles d’adopter des comportements qui réduisent la concurrence.

Source: Perloff, 2007
NB: MR = marginal revenu et MC = marginal cost

Annexes

  • Universalis‎, Encyclopædia. “ÉQUILIBRE ÉCONOMIQUE.” Encyclopædia Universalis, www.universalis.fr/encyclopedie/equilibre-economique/10-l-equilibre-de-nash/.

Références