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Cependant, il est important de noter que, bien que les producteurs en situation d'oligopole puissent être tentés de former des cartels pour réaliser des profits de monopole, ces pratiques sont souvent réglementées ou interdites par les lois antitrust. Ces lois visent à prévenir la restriction de la concurrence et à protéger les intérêts des consommateurs, rendant les accords explicites entre producteurs en oligopole illégaux dans de nombreux pays.
Cependant, il est important de noter que, bien que les producteurs en situation d'oligopole puissent être tentés de former des cartels pour réaliser des profits de monopole, ces pratiques sont souvent réglementées ou interdites par les lois antitrust. Ces lois visent à prévenir la restriction de la concurrence et à protéger les intérêts des consommateurs, rendant les accords explicites entre producteurs en oligopole illégaux dans de nombreux pays.


[[Fichier:Oligopole solution en monopole 1.png|400px|vignette|centré]]
[[Fichier:Oligopole solution en monopole 1.png|400px|vignette|centré]]Ce graphique économique typique illustre la situation d'un monopole dans le contexte du marché de l'eau potable. Le graphique est divisé en deux sections principales : la courbe de demande (ou volonté de payer) sur le graphique supérieur, et la courbe de recette totale sur le graphique inférieur.
 
Dans le graphique supérieur, la droite de demande décroît de gauche à droite, indiquant que moins d'eau sera demandée à mesure que le prix augmente, ce qui est cohérent avec la loi de la demande. Le prix du monopole est fixé à 60, ce qui est le point où la recette marginale (non représentée) serait égale au coût marginal, qui est de zéro dans ce cas. Cela est indiqué par le fait que la droite de demande coupe l'axe des quantités à 120 unités, le maximum que les consommateurs seraient prêts à acheter si l'eau était gratuite, et le prix maximum de 120, où la quantité demandée serait nulle.
 
Le graphique inférieur montre la recette totale (RT), qui est une parabole avec un sommet au point où la quantité est de 60, ce qui représente la quantité optimale pour le monopoleur à vendre. À ce niveau de production, la recette totale est maximisée à 3600, comme indiqué par le pic de la courbe de recette totale. C'est le résultat de la multiplication du prix par la quantité (60 unités x 60 de prix = 3600 de recette totale).
 
Le commentaire sur le graphique indique que pour maximiser le profit, qui dans ce cas est égal à la recette totale en raison de l'absence de coûts variables, chaque entreprise devrait produire une quantité de 30 et obtenir un profit de 1800 chacune. Cela suppose que les deux entreprises coopèrent parfaitement, partageant le marché équitablement sous un accord de cartel. Cependant, cette situation pourrait ne pas être stable à long terme en raison de la tentation de tricher sur l'accord pour augmenter sa part du profit, un problème communément associé à la théorie des jeux dans l'étude des oligopoles et des cartels.
 
Il est également important de noter que, bien que cette configuration puisse être profitable pour les monopolistes, elle n'est pas nécessairement bénéfique pour les consommateurs ni pour le bien-être social. Le prix de 60 est supérieur au coût marginal de l'eau (qui est zéro), et par conséquent, la quantité produite et consommée (60 unités) est inférieure à ce qu'elle serait dans un marché concurrentiel (120 unités). Cela conduit à une perte sèche, où certains consommateurs qui auraient été disposés à payer un prix supérieur au coût marginal n'ont pas accès à l'eau.
 
Enfin, la législation antitrust serait un obstacle à un tel arrangement dans de nombreuses juridictions, car elle est conçue pour empêcher les entreprises de fixer des prix et de limiter la production de manière anticoncurrentielle.


== Incitation à tricher ==
== Incitation à tricher ==

Version du 27 janvier 2024 à 15:12


L'oligopole représente un type spécifique de concurrence imparfaite. Cette structure de marché se retrouve dans des secteurs où plusieurs entreprises sont en concurrence, mais sans que cette concurrence ne soit assez intense pour les transformer en "preneuses de prix". La particularité de l'oligopole est le nombre restreint d'acteurs impliqués, engendrant une compétition stratégique et minutieuse entre eux.

Dans ce contexte, on distingue différents cas selon le nombre de participants sur le marché. Par exemple, un duopole implique deux entreprises tandis qu'un oligopole caractérise un marché avec quelques offreurs. Ces marchés, où le nombre de vendeurs est relativement petit, sont qualifiés de marchés concentrés. Cette concentration confère aux entreprises un certain pouvoir de marché, leur permettant de fixer les prix et souvent de pratiquer des tarifs supérieurs aux coûts de production.

Les caractéristiques essentielles de l'oligopole incluent un équilibre délicat entre la coopération et la poursuite des intérêts individuels. Bien que ces entreprises aient le pouvoir d'influencer les prix, ce pouvoir est moindre comparé à un monopole. L'interdépendance des décisions des différents acteurs est un autre trait saillant, où chaque entreprise doit tenir compte des stratégies et actions des autres. La collusion, où les firmes coopèrent pour maximiser leurs profits collectifs, est une possibilité dans un tel marché. Enfin, la théorie des jeux, étudiant le comportement des individus dans des situations stratégiques, est particulièrement pertinente pour analyser le comportement des entreprises en situation d'oligopole, fournissant des insights sur

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Maximisation du profit avec et sans coopération

Hypothèses

L'analyse d'un marché sous les hypothèses énoncées révèle un cadre de marché oligopolistique avec des caractéristiques spécifiques.

Premièrement, l'hypothèse d'atomicité du côté de la demande indique que les consommateurs sont nombreux et aucun d'entre eux n'a suffisamment de pouvoir pour influencer le prix du marché. Cette condition assure que le pouvoir de marché est principalement détenu par les offreurs.

Deuxièmement, la nature homogène du bien implique que tous les produits offerts sur le marché sont identiques ou presque. Dans ce contexte, les entreprises ne peuvent pas se différencier par la qualité, le design ou d'autres caractéristiques du produit. Néanmoins, il est également possible d'avoir un oligopole avec des biens différenciés, connu sous le nom d'oligopole à la Bertrand, où la concurrence se fait principalement sur les prix.

Troisièmement, l'absence de libre-entrée indique que de nouvelles entreprises ne peuvent pas facilement entrer sur le marché, souvent en raison de barrières à l'entrée telles que des coûts de démarrage élevés, des technologies propriétaires ou des réglementations gouvernementales. Cela maintient le nombre d'offreurs à un niveau fixe et faible.

Les offreurs dans ce marché ont un pouvoir de marché significatif, leur permettant de fixer des prix supérieurs au coût marginal. Cela résulte du nombre limité de participants et de l'absence de produits de substitution parfaits.

Enfin, étant donné que le bien est homogène, les stratégies des entreprises se concentrent principalement sur le volume de production. Elles n'engagent pas de dépenses en publicité, en différenciation des prix ou en amélioration de la qualité, car ces aspects ne sont pas pertinents dans un marché où les produits sont indifférenciés.

Dans ce type de marché, les entreprises peuvent s'engager dans un comportement stratégique en ce qui concerne les volumes de production, potentiellement en se coordonnant pour maximiser les profits globaux. Les interactions entre les entreprises sont souvent analysées à l'aide de modèles de théorie des jeux, qui peuvent prédire des issues telles que la fixation de quantités de production pour maximiser les profits collectifs ou la compétition pour une part de marché plus importante.

La demande d'eau potable

Un exemple est un scénario de marché pour l'eau potable dans un village avec deux caractéristiques importantes : la demande d'eau et la structure du marché dictée par ses offreurs, UN et DEUX.

La demande d'eau potable est décrite par la fonction , où est la quantité demandée et est le prix. Cette fonction montre que la demande diminue à mesure que le prix augmente, ce qui est typique des marchés de biens courants. La forme inverse, , est la fonction de volonté de payer, indiquant le prix maximal que les consommateurs sont prêts à payer pour une quantité donnée d'eau.

Dans ce village, il y a deux fournisseurs uniques (UN et DEUX) pour l'eau potable. L'eau provient d'une source, et on suppose que le coût marginal de fourniture de cette eau est nul, ce qui signifie que le coût total (CT) est équivalent au coût fixe (CF).

Dans ce cadre, il est intéressant d'examiner comment le prix et la quantité offerte seraient affectés sous deux structures de marché extrêmes : la concurrence parfaite et le monopole.

Concurrence Parfaite : Dans un marché de concurrence parfaite, de nombreux vendeurs et acheteurs participent au marché, et aucun d'entre eux n'a suffisamment de pouvoir pour influencer le prix du marché. Cependant, dans votre scénario, il n'y a que deux offreurs, ce qui ne correspond pas exactement à une concurrence parfaite. Néanmoins, si UN et DEUX agissaient comme en concurrence parfaite, ils prendraient le prix du marché comme donné et produiraient en fonction de la demande. Le prix se stabiliserait au coût marginal, qui est ici nul.

Monopole : Dans un scénario de monopole, un seul vendeur contrôle l'ensemble du marché. Si UN et DEUX fusionnaient ou si l'un éliminait l'autre pour devenir le seul fournisseur, la structure du marché deviendrait monopolistique. Le monopoleur maximiserait les profits en fixant un prix où le revenu marginal est égal au coût marginal. Cependant, comme le coût marginal est nul, le monopoleur choisirait un prix et une quantité qui maximiseraient ses profits en tenant compte de la fonction de demande du marché .

Dans les deux cas, la dynamique du marché serait influencée par la manière dont UN et DEUX interagissent, soit en concurrence, soit en tant qu'entité monopolistique.

Solution en concurrence parfaite

Sous l'hypothèse de concurrence parfaite, le prix sur le marché s'aligne sur le coût marginal. Dans ce cas, comme le coût marginal de l'eau potable est zéro (), le prix serait également nul. À ce prix, la quantité totale consommée serait égale à la quantité totale demandée à un prix nul, soit . Cet équilibre serait considéré comme efficient du point de vue de l'allocation des ressources, car le prix reflète exactement le coût marginal de production.

Cependant, comme vous l'avez justement souligné, cette situation soulève un paradoxe pratique. Si l'eau est fournie gratuitement (), comment les deux fournisseurs, UN et DEUX, couvriraient-ils leurs coûts fixes et continueraient-ils à opérer? Dans la réalité, même si le coût marginal est nul, il existe des coûts fixes (comme l'entretien de l'infrastructure, les salaires, etc.) qui doivent être couverts pour assurer la viabilité économique des fournisseurs.

Ce paradoxe met en évidence une limitation du modèle de concurrence parfaite dans ce contexte. La concurrence parfaite suppose un grand nombre d'offreurs et d'acheteurs, une information parfaite, une absence de coûts de transaction, et des produits homogènes. Mais dans ce scénario, avec seulement deux offreurs et des coûts fixes non nuls, le modèle de concurrence parfaite ne semble pas être le plus approprié pour décrire de manière réaliste le fonctionnement du marché.

Ainsi, même si théoriquement, sous concurrence parfaite, le prix de l'eau serait nul et la quantité consommée maximale, dans la pratique, d'autres modèles de marché (comme l'oligopole ou le monopole) pourraient être plus pertinents pour analyser et comprendre le comportement des offreurs dans ce marché particulier.

Solution en monopole

Dans un régime de monopole où UN et DEUX coopèrent, la situation change radicalement par rapport à un marché en concurrence parfaite. Dans ce cas, le profit est maximisé quand la recette totale du marché est maximale, ce qui est particulièrement pertinent étant donné l'absence de coûts variables dans le scénario.

La maximisation du profit dans un monopole est exprimée par la formule : . Ici, π représente le profit, RT la recette totale, CT le coût total, q la quantité produite, et CF le coût fixe.

Pour trouver le niveau de production qui maximise le profit, on dérive la fonction de profit par rapport à q et on égale le résultat à zéro. Cette condition première d'ordre (CPO) est donnée par . En résolvant cette équation, on obtient et par conséquent, . Ainsi, la recette totale maximale et donc le profit maximal est .

Dans ce cadre de coopération, UN et DEUX pourraient s'accorder pour vendre une quantité totale de 60 unités au prix de 60, se partageant la recette totale de 3600 à parts égales, soit 1800 chacun.

En termes de stratégie de marché, cette coopération pourrait prendre la forme d'une collusion ou d'un cartel :

  • Collusion : Cela se produit lorsque les entreprises s'entendent secrètement sur les quantités à produire ou les prix à fixer.
  • Cartel : C'est quand des offreurs se regroupent formellement et agissent ensemble, souvent par un accord ouvert et officiel.

Cependant, il est important de noter que, bien que les producteurs en situation d'oligopole puissent être tentés de former des cartels pour réaliser des profits de monopole, ces pratiques sont souvent réglementées ou interdites par les lois antitrust. Ces lois visent à prévenir la restriction de la concurrence et à protéger les intérêts des consommateurs, rendant les accords explicites entre producteurs en oligopole illégaux dans de nombreux pays.

Oligopole solution en monopole 1.png

Ce graphique économique typique illustre la situation d'un monopole dans le contexte du marché de l'eau potable. Le graphique est divisé en deux sections principales : la courbe de demande (ou volonté de payer) sur le graphique supérieur, et la courbe de recette totale sur le graphique inférieur.

Dans le graphique supérieur, la droite de demande décroît de gauche à droite, indiquant que moins d'eau sera demandée à mesure que le prix augmente, ce qui est cohérent avec la loi de la demande. Le prix du monopole est fixé à 60, ce qui est le point où la recette marginale (non représentée) serait égale au coût marginal, qui est de zéro dans ce cas. Cela est indiqué par le fait que la droite de demande coupe l'axe des quantités à 120 unités, le maximum que les consommateurs seraient prêts à acheter si l'eau était gratuite, et le prix maximum de 120, où la quantité demandée serait nulle.

Le graphique inférieur montre la recette totale (RT), qui est une parabole avec un sommet au point où la quantité est de 60, ce qui représente la quantité optimale pour le monopoleur à vendre. À ce niveau de production, la recette totale est maximisée à 3600, comme indiqué par le pic de la courbe de recette totale. C'est le résultat de la multiplication du prix par la quantité (60 unités x 60 de prix = 3600 de recette totale).

Le commentaire sur le graphique indique que pour maximiser le profit, qui dans ce cas est égal à la recette totale en raison de l'absence de coûts variables, chaque entreprise devrait produire une quantité de 30 et obtenir un profit de 1800 chacune. Cela suppose que les deux entreprises coopèrent parfaitement, partageant le marché équitablement sous un accord de cartel. Cependant, cette situation pourrait ne pas être stable à long terme en raison de la tentation de tricher sur l'accord pour augmenter sa part du profit, un problème communément associé à la théorie des jeux dans l'étude des oligopoles et des cartels.

Il est également important de noter que, bien que cette configuration puisse être profitable pour les monopolistes, elle n'est pas nécessairement bénéfique pour les consommateurs ni pour le bien-être social. Le prix de 60 est supérieur au coût marginal de l'eau (qui est zéro), et par conséquent, la quantité produite et consommée (60 unités) est inférieure à ce qu'elle serait dans un marché concurrentiel (120 unités). Cela conduit à une perte sèche, où certains consommateurs qui auraient été disposés à payer un prix supérieur au coût marginal n'ont pas accès à l'eau.

Enfin, la législation antitrust serait un obstacle à un tel arrangement dans de nombreuses juridictions, car elle est conçue pour empêcher les entreprises de fixer des prix et de limiter la production de manière anticoncurrentielle.

Incitation à tricher

Dans l’exemple de UN et DEUX, le choix de produire 30 au prix de 60 peut se faire par collusion.

Néanmoins, UN pourrait décider d’augmenter sa production d’eau potable en comptant sur une production constante (de 30) de DEUX et ainsi accroître ses profits.

En soustrayant la quantité de 30 de la demande totale, la demande résiduelle pour UN devient :

avec une recette totale et marginale respectivement de :

et

Le de UN serait donc maximisé s'il produisait une quantité de 45 ().

Cet accroissement de quantité fait chuter le prix à 45 (quantité totale sur le marché = et ), mais procure à UN un revenu de plutôt que les 1800 du monopole (cartel).

Oligopole incitation à tricher 1.png

Équilibre sans coopération

Bien entendu, DEUX se rendra compte que UN triche puisque le prix sur le marché diminue et elle se retrouve avec un profit diminué à plutôt que les 1800 du monopole (cartel). Elle va donc également augmenter sa production d’eau potable pour compenser la baisse de prix.

Mais cette augmentation de l'offre de DEUX va provoquer une baisse ultérieure du prix, ce qui va faire à nouveau réagir UN, etc.

Ce processus de réaction et contre-réaction s'arrête quand l'équilibre du duopole est atteint.

Condition d'équilibre du duopole dans ce cas spécifique :

Ce qui implique :

; ;

Ces deux volumes constituent l’équilibre de duopole car aucun offreur ne souhaite modifier sa quantité (les profits marginaux sont nuls pour les deux).

Remarquez que le 𝜋 de chaque entreprises à l'équilibre de duopole (1600) est plus bas que dans le cas de la solution de monopole (1800).

Oligopole équilibre sans coopération 1.png

Maximisation du profit en duopole : cas général

Maximisation du profit de l’entreprise 1 :

,

CPO (Rm = Cm):

Maximisation du profit de l’entreprise 2 :

,

CPO ():

Remarquez l’interaction des choix des deux entreprises dans ces deux conditions: en effet, les termes et dépendent tant de que de → chaque producteur tien compte des décisions de l'autre en pérennant les siennes.

Équilibre de l'oligopole

Lorsque les firmes en oligopole choisissent individuellement et sans coopérer la production qui maximise le profit:

  • La quantité totale est supérieure au niveau de monopole, mais inférieure à celle de concurrence parfaite.
  • Le prix fixé par l’oligopole est inférieur au prix de monopole, mais il est supérieur au prix concurrentiel (qui est égal au Cm).
  • Les profits sont inférieurs à ceux du monopole, mais ils sont supérieurs à ceux de concurrence parfaite.

NB: à l'équilibre de l'oligopole, (mark-up) => pouvoir de marché

L'effet de la taille

Quel va être l'impact d'une augmentation du nombre des vendeurs sur le prix et sur les quantités vendues ?

L’effet quantité : comme le prix est au-dessus du coût marginal, vendre une unité supplémentaire au prix courant augmente les profits.

L’effet prix : l’augmentation de la production accroît le montant total vendu ce qui réduit le prix ainsi que le profit par unité sur chaque unité vendue.

Au fur et à mesure que le nombre de vendeurs en situation d’oligopole augmente, le marché se rapproche d’un marché concurrentiel.

Le prix converge vers le coût marginal, et la quantité produite se rapproche du niveau socialement efficace.

La théorie des jeux et l'économie de la coopération

Eléments de théorie des jeux

La théorie des jeux est l’étude du comportement des individus placés dans des situations stratégiques.

Par stratégie, on entend un choix dans une palette de décisions possibles que l’individu confronte à toutes les réactions possibles des autres individus relativement à sa propre décision.

Un jeu est la combinaison d’un ensemble de stratégies donnant lieu à des gains (ou pertes) différents selon la réaction des autres joueurs, tous censés agir rationnellement. Le jeu peut être statique ou dynamique (répété ou séquentiel).

Il peut également être l’objet d'incertitude si on adopte une certaine stratégie avec une probabilité et une autre avec une autre probabilité.

Dans une optique dynamique, importance du choix de stratégies crédibles.

Ici: approche très sommaire de la théorie des jeux, qui fait appel à des notions mathématiques parfois très poussées.

Théorie des jeux et oligopole

Comme le nombre de firmes sur un marché oligopolistique est faible, chaque firme adopte un comportement stratégique: chacune d’entre elles sait que son profit ne dépend pas seulement de ce qu’elle produit mais de ce que les autres produisent aussi.

Chaque entreprise est un joueur qui maximise son profit (gain du jeu).

Chaque entreprise sait que l’action des autres peut affecter son profit ou gain.

Particularité absente de la concurrence parfaite, du monopole et, en partie, de la concurrence monopolistique.

L'action es simultanée → information complète (tous connaissent toutes les issues possibles du jeu) mais imparfaite (chaque joueur prend ses décisions sans savoir quel est le choix de son adversaire).

L'équilibre de Nash

John F. Nash (1951) a donné une caractérisation de l’équilibre dans la théorie des jeux non-coopératifs, qui lui a valu le prix Nobel en 1994.

Principe : l’équilibre non coopératif de Nash est atteint avec un ensemble de stratégies, lorsque, pour tout joueur, la meilleure stratégie est choisie en considérant les stratégies des autres comme données.

C’est un équilibre, car aucun participant n’est incité à changer de stratégie (déviation unilatérale non-profitable).

Remarque : cet équilibre peut être sous-optimal pour tous les participants!

En présence de stratégies dominantes (= stratégie qui est la meilleure pour un joueur, quelle que soit la stratégie jouée par les autres), chaque joueur choisit sa stratégie dominante et l'équilibre de Nash est très facilement déterminé.

Le dilemme du prisonnier

Le dilemme du prisonnier illustre le fait que la coopération est difficile à maintenir: souvent les individus (firmes) ne parviennent pas à coopérer les uns avec les autres même si la coopération est mutuellement avantageuse.

Le dilemme du prisonnier

Deux suspects sont arrêtés et mis dans des cellules séparées → impossibilité de communiquer entre eux (non-coopération).

Preuves insuffisantes en l’état, mais l’aveu d’un des deux prisonniers constitue une preuve suffisante de condamnation pour la justice, même si l’autre persiste à nier.

L’information que les prisonniers connaissent :

  • Si aucun n’avoue, ils doivent purger une peine mineure (1 an de prison);
  • Si les deux avouent, ils écopent tous deux de la peine prévue pour le délit (8 ans de prison);
  • Si un prisonnier avoue, il bénéficie d’une mesure de clémence et est immédiatement relâché. L’autre purge une peine plus grave que celle du délit pour obstruction à la justice (20 ans de prison).
Equilibre de Nash unique: (Avoue, Avoue). Equilibre non-optimal: les deux joueurs pourraient améliorer leur situation en se taisant. La coopération est difficile à maintenir car elle n’est pas un choix rationnel au niveau individuel. NB: ici, le jeu est symétrique, mais ce n’est pas nécessairement le cas.

Un jeu de course à l'armement

Stratégie dominante dans le jeu du dilemme du prisonnier: "avoue" ici: "s'armer".

Le duopole comme dilemme du prisonnier

Tout comme la logique de l’intérêt individuel conduit les prisonniers à avouer, ce même intérêt individuel engendre des difficultés pour l’oligopole à maintenir une situation coopérative (qui serait la solution optimale pour les deux), caractérisée par une production faible, des prix élevés et des profits de monopole.

Oligopole dilemme du prisonnier 3.png

Un jeu de publicité

Oligopole un jeu de publicité 1.png

Un jeu de ressources communes

Oligopole Un jeu de ressources communes.png

Le jeu oligopolistique UN et DEUX

Le jeu oligopolistique UN et DEUX1.png

Equilibre de non-coopération: (40L, 40L)

Optimum (pour les producteurs) → coopération: (30L, 30L)

La coopération dans un cadre dynamique

Avec le passage du temps et si on considère que le "jeu" entre les duopolistes se répète, on peut envisager la coopération comme plus stable, car les duopolistes se rendent compte des profits auxquels ils renoncent en trichant.

Tant que les firmes se soucient des profits futurs, elles décideront de renoncer au gain ponctuel résultant du non-respect de l’accord dans le cadre d’un jeu répété.

Lorsque UN triche, DEUX peut le “punir” par la cessation immédiate de la coopération et le retour à l’équilibre non-coopératif → punition CREDIBLE.

UN se rend compte qu’il a gagné un profit de triche de court terme mais perdu tous les profits de monopole futur....

La répétition du jeu sans date de fin, ou une incertitude, permet d’assurer un équilibre coopératif.

L'oligopole et le rôle de l'État

L'oligopole et le rôle de l'État

La coopération entre les membres de l’oligopole est désirable du point de vue des entreprises du secteur en question uniquement. Pour la société dans son ensemble, l’oligopole est indésirable car il conduit à une production trop basse et à des prix trop élevés.

La plupart des pays s’équipent d’un appareil législatif visant à empêcher les enfreintes à la concurrence par des cartels ou des ententes sur les prix.

Certaines lois sont plus souples que d’autres selon le pays.

Les économistes, de leur côté, ne sont pas toujours unanimes sur la manière de juger les restrictions à la concurrence et la nécessité de légiférer contre certaines pratiques.

États-Unis : le Sherman Antitrust Act

Loi votée déjà à la fin du XIXe siècle (1890) pour contrer le monopole de la

Standard Oil de la famille Rockfeller.

« Every contract, combination in the form of trust or otherwise, or conspiracy, in restraint of trade or commerce among the several States, or with foreign nations, is declared to be illegal.

Every person who shall make any contract or engage in any combination or conspiracy hereby declared to be illegal shall be deemed guilty of a felony, and, on conviction thereof, shall be punished by fine not exceeding $100,000,000 if a corporation, or, if any other person, $1,000,000, or by imprisonment not exceeding 10 years, or by both said punishments, in the discretion of the court. »

Le Sherman Act a été complété par le Clayton Act en 1914.

Europe : le Traité de Rome (art. 82)

Selon le Traité de Rome (1957), est incompatible avec le marché commun et interdit, dans la mesure où le commerce entre États membres est susceptible d’en être affecté, le fait pour une ou plusieurs entreprises d’exploiter de façon abusive une position dominante sur le marché commun ou dans une partie substantielle de celui-ci.

Ces pratiques abusives peuvent notamment consister à :

  1. imposer de façon directe ou indirecte des prix d’achat ou de vente ou d’autres conditions de transaction non équitables ;
  2. limiter la production, les débouchés ou le développement technique au préjudice des consommateurs ;
  3. appliquer à l’égard de partenaires commerciaux des conditions inégales à des prestations équivalentes, en leur infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence ;
  4. subordonner la conclusion de contrats à l’acceptation, par les partenaires, de prestations supplémentaires qui, par leur nature ou selon les usages commerciaux, n’ont pas de lien avec l’objet de ces contrats.

Suisse : la nouvelle LCart

La loi anti-trust en Suisse (de 1995, révisée en 2004) est fondée sur la notion d’abus (les accords anti-concurrentiels sont licites, seuls les abus sont illicites), alors qu’ailleurs (en Europe notamment) c’est le principe de l’interdiction qui prévaut.

Possibilité pour la Comco (Commission de la Concurrence) d’infliger des sanctions dès la première infraction (avant: seulement dans les cas de récidive).

La LCart prévoit un programme de clémence qui devrait inciter les entreprises à collaborer pour bénéficier d’une réduction de l’amende.

Des sanctions jusqu’à à 10% du chiffre d’affaire réalisé en Suisse au cours des trois dernières années.

LCart: l'abus de position dominante

« (...) Sont en particulier réputés illicites:

a) le refus d’entretenir des relations commerciales (p. ex. refus de livrer ou d’acheter des marchandises);

b) la discrimination de partenaires commerciaux en matière de prix ou d’autres conditions commerciales;

c) le fait d’imposer des prix ou d’autres conditions commerciales inéquitables;

d) la sous-enchère en matière de prix ou d’autres conditions commerciales, dirigée contre un concurrent déterminé;

e) la limitation de la production, des débouchés ou du développement technique;

f) le fait de subordonner la conclusion de contrats à la condition que les partenaires acceptent ou fournissent des prestations supplémentaires. »

Résumé

Les firmes en oligopole maximisent leur profit total en formant un cartel ou en agissant comme un monopole.

Si les membres du cartel prennent les décisions relatives à leur niveau de production de manière individuelle (pas de coopération), le résultat est une plus grande quantité et un prix plus bas comparé à la situation de monopole.

Plus il y a de firmes dans l’oligopole, plus les quantités et les prix se rapprochent des niveaux concurrentiels.

Le dilemme du prisonnier montre que la poursuite de l’intérêt individuel peut empêcher les individus de maintenir la coopération alors qu’elle est dans leur intérêt mutuel.

La logique du dilemme du prisonnier s’applique dans de nombreuses situations incluant la course à l’armement, la publicité, les ressources communes et les oligopoles.

Les décideurs politiques utilisent les lois sur la concurrence pour empêcher les oligopoles d’adopter des comportements qui réduisent la concurrence.

Source: Perloff, 2007
NB: MR = marginal revenu et MC = marginal cost

Annexes

  • Universalis‎, Encyclopædia. “ÉQUILIBRE ÉCONOMIQUE.” Encyclopædia Universalis, www.universalis.fr/encyclopedie/equilibre-economique/10-l-equilibre-de-nash/.

Références