Analyse des Politiques Publiques : mise à l'agenda et formulation

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Erreur Lua : impossible de créer le processus : proc_open n’est pas disponible. Vérifiez la directive de configuration PHP « disable_functions ». Cette séance traite des deux premières étapes d’une politique publique, à savoir la mise à l’agenda et la formulation. Une politique publique est un ensemble d’actions et de décisions que prennent les pouvoirs publics dans le but de résoudre un problème. Ont été identifiées quatre étapes que suivent toutes les politiques publiques. La première commence par l’inscription à l’agenda du problème public que l’on va chercher à résoudre. Cette phase de mise à l’agenda a pour fonction de répondre à une question qui est de savoir quel est le problème que doit résoudre l’État, pourquoi doit-il intervenir. La phase de formulation de la politique publique ou de programmation va, elle, répondre à la question de savoir quelle est la solution envisagée, quelle est la solution légitimée, quelle est la solution acceptable pour la politique.

Avec l’étape de la mise à l’agenda on essaie d’expliquer pourquoi les problèmes dont traitent les politiques publiques sont des construits, pourquoi il est très difficile d’initier une nouvelle politique publique parce que la construction de ces problèmes ne leur assure pas mécaniquement un accès à l’agenda.

Mise à l’agenda politique : « construction » des problèmes publics

Définition d'un problème public

L’agenda politique est l’ensemble des problèmes qui sont considérés comme prioritaire par les autorités politiques et administratives. On parle d’« agenda politique », mais on peut très bien aussi parler d’« agenda médiatique ». L’agenda médiatique est les principales histoires qui sont raconté dans un journal, un téléjournal ou à la radio ou même sur les quelques pages d’un site web d’un journal. L’agenda des autorités politiques peut se retrouver par exemple au niveau du parlement. L’agenda du parlement n’est rien d’autre que les sujets dont traite les différents parlementaires, de quoi par les motions, les initiatives parlementaires, les postulats, les questions ou encore les interpellations que formule les parlementaires, sur quels sujets se concentrent-ils. L’agenda du gouvernement est de quoi parle le Conseil fédéral pendant ses séances. En Suisse, il n’y a aucune transparence sur les délibérations du Conseil fédéral, donc on ne sait pas de quoi il parle exactement. Il fait des communiqués de presse quand il a pris des décisions, mais on ne sait pas en particulier sur quoi il a décidé de décider ou de ne pas intervenir ou de ne pas communiquer.

L’agenda est l’ensemble des thèmes prioritaires, des enjeux de politique publique et des problèmes publics dont traitent les acteurs politiques. Lorsqu’on parle d’agenda des médias, ce sont les médias, quand on parle d’agenda des partis politiques, c’est l’agenda des partis politiques qui se traduit par les thèmes dont il parle dans leur campagne électorale.

Ces agendas sont excessivement limités. Lorsqu’on lit, un journal, il y a un nombre excessivement réduit de thèmes qui sont abordés. Si on regarde les thèmes traités dans une session parlementaire, par rapport à tous les problèmes qui se posent, il y au n nombre très limité de politique publique qui font l’objet d’un débat parlementaire. Donc, il y a une difficulté, lorsqu’on veut lancer une politique publique, à retenir l’attention, soit des médias, soit des partis politiques, soit des parlementaires, soit des acteurs membres du gouvernement par rapport au problème. Ils sont très peu d’espace afin de discuter les choses. Un journal discute en moyen de douze à très historie de manière prioritaire sur sa première page par rapport à tout ce qui se passe excepté lorsqu’il y a quelques feuillets exceptionnels, un journal a toujours la même structure et le même nombre de pages. C’est un agenda qui est très limité est il y a une sélection très forte de savoir de quoi est-ce que l’on va parler, quelles sont les priorités que donnent, avec leur ligne éditoriale, les comités de directions des journaux, quelles sont les priorités que vont fixer les partis lorsqu’ils lancent une campagne électorale. Un parti politique discute de peu de thèmes, peut être trois ou quatre thèmes parce qu’il cherche à se profiler sur ces politiques précises et non sur le reste. Il en va de même au niveau du gouvernement. Le Conseil fédéral se réuni généralement un après-midi par semaine pour discuter et décider de la direction de l’État. Il ne va pas pouvoir aborder de manière illimité un nombre important de problèmes ; il se concentre et se focalise sur certaines priorités limitées. Cela veut dire qu’il y a une concurrence entre les différents thèmes. Si un thème prend une place sur l’agenda, c’est un autre qui est évacué. Les agendas ne sont pas extensibles, les commissions parlementaires ont une durée prédéterminée donc, l’accès à l’agenda, même celui des médias, est très difficile. Les acteurs qui veulent mettre à l’agenda un problème vont essayer à construire ce problème afin qu’il retienne l’attention des médias, des partis, des parlementaires et du gouvernement. C’est le principal enjeu de la mise à l’agenda, c’set-à-dire comment pouvoir utiliser cette ressource très rare qui est l’attention des décideurs politiques, des médias ou même des citoyens. Pour être écouté ou arriver à inscrire son problème à l‘agenda, il faut passer le long d’un processus avec différentes étapes.

L’agenda représente donc l’ensemble des problèmes publics considérés comme étant prioritaire. Nous lisons, par exemple, tous les jours, la première page d’un journal, et nous codons après sa lecture, quels domaines de politiques publiques et quels enjeux est concrètement concerné. C’est une pathologie à coder systématiquement, dans différents pays, les agendas médiatiques des partis politiques et gouvernementaux, parlementaire ou budgétaire avec la même technique. Ont été défini 200 catégories de politiques publiques, qui sont 200 champs d’interventions dans lesquels l’État peut intervenir et on applique cette grille de codage avec ces 200 catégories de politiques publiques à différents agendas comme par exemple savoir quelle est l’attention relative accordée à l’économie ou encore aux enjeux environnementaux mais aussi à des thèmes monétaires. Sur cette base d’analyse pluriannuelle, il est possible de véritablement voir quels thèmes est prioritairement à l’agenda des médias ou encore du parlement. Pour le parlement suisse a été par exemple codé plus de 22000 interventions de parlementaires qui posent des questions formulent des interpellations ou encore déposent des postulats, des initiatives parlementaires afin de savoir quelles sont les priorités des parlementaires.

Afin de coder les gouvernements, il est possible de coder ses communiqués de presse mais aussi éventuellement coder les accords de gouvernement que l’on a dans certains pays, à savoir l’accord que la coalition de différent parti qui va former le gouvernement négocie en début de législateur en stipulant leurs axes prioritaires. Si on est dans un système à la « Westminster », ce que l’on code sont les « speech of the queen », à savoir quand le gouvernement annonce ses priorités thématiques, cela est une longue liste d’actions prioritaires que se donne un gouvernement au Royaume-Uni, rédigé par le gouvernement et lu par la reine.

Au niveau du budget, cela est exactement la même chose. Il est possible de relire le budget c’est-à-dire prendre chaque poste budgétaire et se demander à quelle politique publique cela se réfère et il est donc possible de montrer les priorités budgétaires en fonction de différents thèmes.

La grande question qui se pose une fois que tous ces agendas ont été codé sur une longue période dans différents pays est de savoir comment expliquer que certains thèmes sont prioritaires dans tel agenda et dans tel autre, est-ce que les médias et la presse parlent de la même chose et admettons qu’ils ne parlent pas de la même chose, la question est de savoir quels sont les enjeux en terme démocratique qui se pose. S’ils parlent de la même chose, la question est de savoir qui influence qui, à savoir si les médias reflètent ce quoi dont parlent les parlementaires ou ce que parlent les parlementaires en soucis de visibilité et de reconnaissance médiatique, répercute ce que disent les médias. En croisant deux agendas, on se pose la question de savoir qui contrôle l’agenda qui est une question essentielle en terme d’analyse de pouvoir ou même d’enjeu démocratique.

Analyse les agendas, il est possible de le faire de manière quantitative en mesurant pour chaque agenda l’importance relative accordée à une politique publique. Il est possible de faire quelque chose en amont, à savoir d’essayer de comprendre pourquoi un thème arrive à l’agenda, trouve un cheminement institutionnel, arrive à retenir l’attention des acteurs politiques et le cheminement que doivent suivre les acteurs qui veulent porter en tout cas un nouveau problème à l’agenda ; comment vont-ils le construire afin qu’il arrive à l’agenda. Les problèmes ne sont jamais donnés, ils sont toujours construits. C’est un constructivisme modéré, parce qu’il se passe des choses subjectives dans la vraie vie, mais elles n’ont d’importance politique que si elles sont reprises, articulés et cadrées par des acteurs politiques.

À tire d’exemple, il y a les OGM agroalimentaires ; quel est le problème ? Si on regarde les débats sur les OGM agroalimentaires, selon des analyses internationales, ont été construit comme problème de manière très différente. Pour certains, c’est un problème purement agricole, les OGM agroalimentaires permettent-elle « oui » ou « non » une croissance de la productivité des agriculteurs. Pour d’autres, cela été un problème environnemental, à savoir si la transgénèse végétale que l’on fait sur une plante ne va pas amener à des risques de pollution génétique avec des croisements non voulus avec d’autres plantes qui n’ont pas été modifiées génétiquement. Dans le même registre environnemental, certains ont rétorqué qu’effectivement, c’est un problème environnemental mais ce n’est pas du tout un problème de pollution entre espèces non voulu mais c’est simplement un problème de réduction des herbicides. D’autre ont encore argumentés en terme de santé en disant que le problème des OGM n’est pas un problème de productivité de l’agriculture et de savoir comment sauver la faim dans le monde, ce n’est pas non plus un problème environnemental positif ou négatif, c’et un problème de comment notre corps va réagir et de savoir si on ne va pas développer des allergies à certains OGM une fois qu’ils seront introduits soit comme aliments pour le bétail soit directement dans les aliments à consommation humaine. D’autres acteurs ont encore cadrés et défini le problème de manière totalement différente en parlement purement de rapport de force économique ; les grands semenciers et les grandes firmes biotech comme Monsanto qui produisent des OGM agroalimentaires sont plutôt des entreprises de type nord-américaine, qui, en contrôlant le marché des semences, ils vont créer une asymétrie entre le marché nord-américain et les marchés en Amérique latine, en Inde ou en Europe qui seront dépendants économiquement de ces grands semenciers.

On voit que à partir du même développement technologique des OGM agroalimentaires, il y a de perceptions de l’ampleur du problème qui est forcément multidimensionnel, qui sont très différents. La question qui se pose est de savoir quelle définition du problème retient le plus l’attention des décideurs politiques et est-ce qu’il y a une des dimensions qui va favoriser l’accès à l’agenda politique ; y a-t-il plus de chances de voir la thématique des OGM agroalimentaires inscrit dans les débats parlementaires si on parle d’environnement plutôt que des dépendances économiques. C’est la question empirique qui se pose pour le chercheur en analyse des politiques publiques mais aussi la question très pratique que se posent les gens qui participent à ces politiques publiques et qui de manière stratégique se demandent comment cadre le problème. On parle de « framing », à savoir comment trouver la bonne définition, la bonne construction sociale du problème afin de retenir l’attention des décideurs politiques.

La construction des problèmes est compliquée parce que pour véritablement arriver à l’agenda politique et déboucher éventuellement sur le début d’un cycle d’une politique publique, il faut franchir différentes étapes et à chacune de ces étapes, il y a des écueils possibles, des dérives possibles, on sort du cycle, on n’arrive jamais à atteindre l’agenda.

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Ce graphique représente le long chemin que doit suivre les promoteurs d’un problème public afin de la construire.

Généralement, on part d’une situation privée qui est jugé problématique et on va essaye de dire que la situation qui touche beaucoup de personnes dans leur sphère privée et parfois même dans le sur intégrité physique, cela n’est pas purement problème qui touche le secteur privé mais c’est certainement un problème plus large, un problème dit « collectif », un problème dit « sociétal ». Il faut essayer d’articuler ce premier lien qui est de dire que la situation qui affecte ces personnes n’est pas un problème privé mais c’est un problème collectif ou un problème social. La barrière est généralement très élevée, c’est la plus élevée que l’on observe dans tout le processus de construction d’un problème. Le principal écueil ici est simplement la non-reconnaissance sociale du problème, il n’y a pas de mobilisation à titre individuel, il n’y a pas d’acteurs associatifs qui porte le problème permettant de lui donner une certaine résonance, parlant au nom des gens qui souffrent de ce problème.

Par exemple, si on regarde la la situation des violence domestiques, de façon objective et selon les statistiques, ce n’est pas un problème qui est visiblement mineur. Si on regarde les difficultés qu’il y a eu à articuler ce problème pour le faire reconnaître comme étant un problème collectif, on se rend compte du premier handicape qu’il y a une difficulté à faire cheminer le problème. Cela en est de même pour l’inceste ou encore le dopage sportif. Passe du choix individuel à la thématisassions en tant que problème collectif mais pas comme un thème public, c’est un saut qui a du mal à être franchie. Admettons que la situation privée qui concerne un certain nombre de personne et qu’il se trouve une association qui est porte-parole, dès fois, il ne faut qu’un seul individu.

Si le premier saut à été franchie devenant un problème social ou collectif, il faut encore faire un second saut, procéder à une étape suivante afin de faire en sorte que ce problème soit reconnu comme un problème public, c’est-à-dire qu’il devrait être résolu non pas de manière associative par un collectif d’acteurs corporatif ou autres mais qu’il doit être résolu par les autorités politiques, qu’il doit déboucher sur une politique publique. Bien souvent, les problèmes articulés peuvent ne pas être mis à l’agenda politique, ils ne sont pas thématisés comme des problèmes politiques ou en tout cas pas comme des thèmes politiques prioritaires. Les réseaux de pédophilie et le travail des enfants sont des problèmes qui sont connus, pour lesquels sil y a des associations qui plaident depuis des années ou des décennies, qui sont souvent discutés dans les médias mais qui ont de la difficulté à être discuté au niveau politique simplement parce que les politiciens préfèrent évacuer de leur propre agenda ce thème. Souvent, le pouvoir politique, s’il n’’entrevoit pas une solution simple, facile et immédiate, il va préférer évacuer de l’agenda un problème plutôt que de vouloir le traiter. C’est ce que l’on appel notamment des « non mise à l’agenda » ou des « non-decision ». Un des articles les plus cités en science politique s’appelle "La Non-Décision[1]" (Baratz et Bachrach). Il dit qu’afin de comprendre qui a du pouvoir dans une démocratie, il ne faut pas regarder qui influence les décisions qui sont prises dans les politiques publiques mais il faut plutôt regarder qui est en mesure d’évacuer de l’agenda certains problèmes, d’éviter que l’État ne se mêle de leurs affaires. Donc, une non-décision, une décision délibérée de ne pas mettre à l’agenda et de ne pas intervenir est aussi une politique publique par défaut et c’est une politique publique qui s’applique à une majorité de cas. Une minorité de problèmes suivent cette chaine causale et une majorité de problèmes publics finissent dans ses écueils.

Admettons qu’il y ait eu thématisation à l’agenda d’un problème social qui soit devenu un problème public, rien ne nous dit encore que la phase suivante, celle de de la formulation d’une politique publique, va aboutir et qu’il y aura effectivement une solution trouvée au problème, qu’il y aura effectivement des actions menées par l’État. Il se peut, par exemple, qu’en l’absence de consensus politique, il n’y ait pas de politique qui soit adoptée mais le thème reste à l’agenda et parfois même pour une longue période. L’assurance maternité a mis quelque décennies avant d’être accepté ; donc, entre un article constitutionnel, sa concrétisation par sa loi et les assurances qui reconnaissent cette « maladie » qu’est la maternité, cela est un cas emblématique où véritablement ce lien a été très difficile. En ce qui concerne la taxe Taubin sur les transactions financières, on en parle depuis 1972, cela s’est même retrouvé dans des déclarations présidentielles, dans des accords de gouvernements, cependant elle n’est pas prête d’être mise en œuvre et prélevé sur toutes les transactions.

Donc, la définition d’un problème public est un processus difficile avec des étapes successives à franchir. Les analystes de politiques publiques qui se sont intéressé à cette phase de construction des problèmes et de séquence dans la mise à l’agenda se sont demandé quelles sont les dimensions que manipule les acteurs qui essaient de construire un problème et quelles sont les dimensions qui leur permettent d’arriver à leurs fins et d’inscrire un problème à l’agenda.

Construction (stratégique) des problèmes

Plusieurs études empiriques se sont dit que les problèmes que l’on retrouve à l’agenda ont certaines caractéristiques, qui ne sont pas forcément des caractéristiques objectives mais des caractéristiques qui peuvent être construites.

La première est qu’ils affichent tous une certaine sévérité, c’est-à-dire que les gens qui ont voulu porter le problème à l’agenda ont dit au pouvoir politique que ce problème et sérieux et sévère et que les conséquences estimées en cas de non intervention sont dramatiques. Souvent, les gens qui construisent ce problème le font aussi en utilisant des labelles. Le terme même afin de caractériser le problème renvoi à l’idée de sévérité et de conséquences du problème par rapport aux effets négatifs surtout si on ne fait rien. Il vaut mieux dire que le problème est sévère plutôt que pas si important que cela.

La deuxième dimension qui vient en complément de la première est la question du périmètre. Si la première s’interroge sur ce qui se passe de dramatique, la deuxième dimension, dit qui est concerné. A priori, plus le périmètre d’un problème est élevé, plus son audience est large, plus il y aura la possibilité de retenir l’attention des décideurs politiques. Cette question du périmètre ou de l’audience n’est pas seulement une question quantitative, il se peut que c’est la nature des gens concernés par le problème, affecté par le problème qui compte plus que leur nombre. Il y a une analyse très intéressante qui avait été faite en sont temps sur le SIDA, à savoir pourquoi le SIDA retient l’attention des décideurs politiques au niveau du Congrès américain ; aujourd’hui le SIDA n’est pas très présent dans nos débats, entre l’attention des politiciens et les chiffres objectifs et par rapport à la problématique, il n’y a pas de lien direct. La question était de savoir comment le parlement discute des enjeux liés au SIDA regardant les auditions que faisaient les différentes commissions du Congrès et avait aussi été regardé le budget qu’avait accordé le Congrès américain pour lutter contre le SIDA. Des sortes de paliers avaient été constaté dans l’attention relative qu’accordaient les parlementaires : au début, cela était assez peu, puis d’un coup un saut. Ces chercheurs se sont interrogé sur savoir ce qui explique pourquoi l’attention varie dans le temps, que les budgets alloués varient dans le temps. Ils se sont rendu compte que cela dépendant largement de l’audience, à savoir qui était concerné, qui était construit politiquement, dans les discours politiques, dans les revendications des associations comme étant les gens qui pâtissaient de ce problème du SIDA. Dans un premier temps, la clientèle, l’audience et le périmètre de ce problème était circonscrit aux communautés homosexuelles gays et aux toxicodépendants ; ce sont des groupes sociaux qui ont une certaine image plutôt négative à l’époque où ceci avait éclaté, ayant un pouvoir politique assez fort dans le cas des gays et très faible dans le cas de toxicodépendants. Tant que le problème était limité à ces acteurs, l’attention était assez faible, il y avait même des gens qui disaient que le problème et sa solution en même temps, si cela ne concerne qu’eux, cela va permettre d’éradiquer ces personnes, il y avait des discours assez nauséabonds à cette poque. Tout d’un coup, on observe un saut en 1991 dans l’attention relative qu’accorde les commissions du Congrès et qui se traduit dans le budget. Lorsqu'en 1991, Magic Johnson, un joueur de basket, déclare qu’il a contracté le SIDA, cela renverse complètement l’image que l’on a du problème, de qui est affecté, et on se dit que même si une telle personnalité peut pâtir de ce problème, alors, il faut vraiment faire quelque chose. La déclaration de Magic Johnson s’est traduit par une attention qui a augmentée au niveau du Congrès et du budget qui est alloué. Une troisième étape dans le développement de cette politique et l’inscription à l’agenda de cette politique ou le maintien à l’agenda de cette politique est quand on a découvert qu’un autre groupe encore pâtissait de ce problème, à savoir les hémophiles qui, eux, s’étaient vu transfuser du sang, qui n’avait pas été suffisamment chauffé, ils sont déjà malades, ayant une construction sociale plutôt positive, ils venaient pour se faire soigner, revenaient toujours hémophile et en plus ils avaient contracté le SIDA. Donc, c’est une situation véritablement problématique qui est d’un point de vue stratégique facile à construire pour dire à l’État qu’il doit faire quelque chose pour ces personnes. Donc, le périmètre de qui est concerné est une deuxième dimension sur laquelle les acteurs jouent pour essayer de retenir l’attention.

La troisième attention qui a été démontrée du point de vue empirique est la nouveauté du problème. Les politiciens n’aiment pas traiter de vieux problèmes, ils n’aiment pas ressasser les mêmes histoires. Donc, indépendamment de la nature foncière du problème que l’on souhaite mettre à l’agenda, il faut le relabéliser, il faut le reformuler, le mettre au goût du jour, il faut le coupler à une préoccupation qui semble prioritaire. Si on prend le cas de la pollution atmosphérique, cela fut au début perçu comme quelque chose d’excessivement localisé, à savoir du « smog » urbain, maintenant l’attention quelques années, mais par la suite, l’attention contre la pollution atmosphérique a été remise à l’agenda grâce à quelque chose qui était la mort des forêts qui a traumatisé une partie de la Suisse alémanique, beaucoup plus les gens que le smog urbain en terme d’attention et en terme de politique qui a été menée, aujourd’hui, on voit l’élargissement de ce problème dans une double dimension, certes, le changement climatique, mais aussi une relocalisation au niveau des agglomérations avec le débat sur les particules fines. Un problème doit être nouveau pour être attractif.

La quatrième dimension est que les gens construisent leurs problèmes comme urgent avec une nécessité d’intervenir immédiatement. Il faut construire son problème comme une situation de crise. C’est dès fois évident de le faire comme avec le cas des attentats qui est un cas très facile puisqu’il n’y a même pas besoin de déclarer l’état d’urgence, le politique s’en saisie tout de suite. C’est quelque chose que l’on observe fréquemment dans des pandémies ou des épidémies. Les gens qui ont des difficultés à construire leur problème comme urgent sont des gens comme la fondation suisse pour la protection du paysage qui essaie d’expliquer que la dégradation du paysage est un problème prioritaire et qu’il est urgent d’agir aujourd’hui pour éviter que l’on ne fasse rien pendant cinquante ans et que graduellement le paysage soit dégradé. Selon le type d’enjeu que l’on souhaite porter, il va être très difficile de ne pas se faire déclasser par des problèmes qui sont considérés comme plus urgent.

Lorsqu’on construit un problème, on va dire quelles sont les causes du problème mais aussi dire quels sont les gens qui pâtissent du problème. Ne définissant les causes du problème, on va identifier, on va désigner politiquement, on va des fois stigmatiser politiquement des acteurs comme responsables voir coupable du problème. La question est de savoir quel type de cause va t-on pouvoir invoquer lorsqu’on raconte en quoi consiste son problème. On identifie des comportements de certains acteurs comme étant la cause du problème mais la question est de savoir s’ils le font exprès, par négligence ou si c’est quelque chose de purement accidentel. Un débat permet de faire une analyse qui a eu lieu après l’effondrement de maison suite à un tremblement de terre au Maroc. On essaie de remédier à cette situation. Pour certains, ces une cause accidentelle, il n’y a pas de politique publique qui puisse empêcher les tremblements de terres. Pour d’autres, c’est une négligence de l’État car on savait pertinemment qu’il allait y avoir des tremblements de terre mais on n’a pas désigné de zones non-constructibles sur des zones particulièrement sismique, ou on n’a pas identifié des normes de sécurité pour la construction des bâtiments de sorte qu’ils résistent en cas de tremblement de terre ; donc, c’est une négligence de l’État ou de certains acteurs locaux dans l’identification des zones sismiques ou dans la non-définition de normes antisismiques pour la construction des bâtiments. Dans le premier cas, on ne peut pas interdira par la constitution la survenue d’un tremblement de terre mais dans le deuxième cas on peut déjà mener une politique publique en disant qu’on va faire un aménagement du territoire et des lois sur des constructions qui visent à prévenir l’effondrement des maisons. Il y a aussi une cause intentionnelle qui est la situation où, toujours dans le même cas, on dit qu’on savait qu’il y avait des tremblements de terre, en plus, l’État avait fait des zones sismiques, avait adopté des normes de construction particulières sévères pour les maisons dans ces zones sismiques. Ce qui s’est passé, est qu’il y a des promoteurs et des constructeurs qui, de manière intentionnelle, délibérée, n’ont pas respectés les normes de construction pour gagner plus d’argent et c’est pour cela que les maisons se sont effondrés. Ce que nous apprend la littérature est que les problèmes où il y a une cause intentionnelle s’imposent beaucoup plus facilement à l’agenda que les autres. Quand on identifie quelqu’un comme étant responsable du problème et intentionnellement même coupable de ce problème, il savait les conséquences de ses actes et il l’a fait délibérément, alors, on peut identifier facilement un groupe cible et intervenir afin d’essayer d’en modifier le comportement. Généralement, les histoires qui s’imposent lorsqu’on débat d’un problème sont celles où on a identifié un coupable et une cause intentionnelle. Lorsqu’on lit la presse de façon critique, il faut essayer de savoir de quelle nature est la cause invoquée.

La complexité du problème ou des causes que l’on énonce est aussi un facteur qui explique pourquoi un problème retient l’agenda ou ne retient pas l’agenda. La simplicité des hypothèses, et cela est un peu navrant pour les gens qui essaient de lutter contre le populisme, est que plus l’histoire est simple et plus elle a de chances de s’imposer à l’agenda. Si on raconte une histoire complexe avec une multitude de causes et qu’on ne sait pas exactement où les pouvoirs publiques doivent mettre une action prioritaire, alors, cela va être plus difficile. Les pires choses comme qu’on a pu faire est de stigmatiser des populations. Dans le case moins dramatique avec le débat sur il faut réguler les bonus des top managers pour lutter contre la crise financière, cela est assez simpliste et c’est une historie qui s’est bien imposée en limitant la part flexible de la rémunération des top managers on va résoudre les problèmes d’incitations perverses et des déséquilibres dans le marché financiers. Pour les gens qui travaillent dans le domaine, cela est un peu simpliste mais cela retient rapidement l’opinion publique et éventuellement celle de certains partis.

La dernière dimension est celle de la quantification du problème, du fait de pouvoir objectiver, de pouvoir rendre visible voire de pouvoir monétarisé, donner une valeur au problème ou aux effet négatifs du problème que l’on veut inscrire à l’agenda. La pollution de l’air, généralement n’existe pas tant que l’on n’a pas de statistiques démontrant les effets nocifs par exemple des particules fines ou la radioactivité. Donc, il faut des acteurs qui puissent construire le problème notamment au travers de statistiques voire donner un coup à la nature du problème pour interpeler les esprits. Cela présuppose certaines capacités d’action des acteurs.

Quels acteurs jouent un rôle important ?

Pourquoi est-ce qu’un problème suit ce cheminement causal jusqu’au bout ? Cela est peut-être parce qu’il a certaines caractéristiques qui font référence à la manière par laquelle dont il est construit par les acteurs parce qu’il est sévère, parce qu’il a un large périmètre parce qu’il a été objectivé, quantifié, parce qu’il a trouvé une cause intentionnelle. La question qui se pose aussi est de savoir quels sont les acteurs qui construisent ces problèmes, qui est en mesure de manipuler ces décisions sur la construction du problème. En d’autres termes, qui construit les problèmes publics que l’on retrouve à l’agenda.

Il y a différentes approches et différentes hypothèses théoriques qui ont été proposées dans la littérature. Cinq sont assez dominantes et on trouve pour ces hypothèses des démonstrations empiriques tout à fait probantes.

Certains parlent d’un modèle de la médiatisation en disant que le pouvoir politique va retenir à l’agenda que ce qui se trouve à l’agenda. Les médias parlent de certains thèmes qui sont en suite repris par les pouvoirs politiques, que cela soit la presse, les réseaux sociaux, les instituts de sondages qui expriment par exemple quels sont les problèmes considérés prioritaires. On trouve des évidences empiriques de ce mécanisme de médiatisation donc de construction par les médias du problème qui sera inscrit à l’agenda dans des cas de scandales politico-financier ou autres ou bien dans d’autres cas soulevés par des journalistes d’investigation. On le trouve aussi parfois dans des cas plus étonnants comme le cas des chiens dangereux. Les médias peuvent construire l’attention des acteurs politiques.

Certains font l’hypothèse que c’est l’offre politique donc les thèmes mis en avant alors des campagnes électorales qui vont être en suite repris par le gouvernement et le parlement. C’est une hypothèse assez logique et assez séduisante, on est élu en faisant des promesses et on va tenir ses promesses une fois élu. Cela marche très bien pour certains partis comme par exemple les partis de la droite radicale et les questions d’immigration. Des analyses montrent la part relative qu’accorde certains partis à la thématique de l’immigration et quelles sont en suite les interventions parlementaires que font ces partis sur les thématiques de l’immigration et quel est le contrôle qu’ont ces partis sur le cadrage dans le débats politiques, et on constate qu’il y a une forte congruence entre ces différents agendas. Donc, si on croit à cette hypothèse, il faut regarder de quoi parle les partis lors des campagnes électorales et on comprendra de quoi parlent les gouvernements et les parlements dans la législature qui suit.

Ces deux premières hypothèses assez évidentes nient le fait que les acteurs privés ou associatifs jouent aussi un rôle décisif dans la construction des problèmes. Plusieurs hypothèses ont été formulé pour dire que ce sont les groupes d’intérêts, les groupes de pression et les lobbys qui formulent des demandes tout à fait sectorielles qui concernent uniquement leur propre champ d’activité et qui arrivent à retenir l’attention des décideurs politiques. C’est ce qu’on appel le modèle de l’action corporatiste silencieuse. Les agriculteurs mais aussi les banquiers semblent avoir fréquemment recourt à ce type de mise à l’agenda. Dans le cas d’espèce, c’est une association professionnelle, par exemple, l’Union suisse des paysans ou l’association suisse des banquiers ou l’association des banquiers privés qui anticipe un problème et qui formule des demandes directement au travers, par exemple, d’un parti ou d’un département pour que l’on intervienne dans leur champ. Généralement, ils disent qu’il y a un problème et qu’il faudrait intervenir, il y a une solution et il faut déléguer la résolution de ce problème et ils veulent une caution de l’État, contrôler l’agenda politique en disant qu’il ne faut pas que cela soit d’autres qui thématisent des problèmes qui nous concernent. Cette action corporatiste silencieuse passe par des activités de lobbying qui, elles, ne sont pas généralement médiatisées, qui sont parfois politisées par certains partis mais pas forcément et qui débouchent sur des inscriptions à l’agenda du gouvernement ou du parlement.

Les nouveaux mouvements sociaux sont des acteurs qui ne sont pas constitués en organisation mais qui mobilisent néanmoins des masses importantes sur des thématiques particulières comme par exemple dans le cas de la lutte antinucléaire ou des luttes altermondialistes et qui, au travers des manifestations, voire des manifestations violentes non institutionnelles essayent d’inscrire à l’agenda un thématique dont personne ne veut parler. Les grandes hypothèses qui ont été formulés ici est quel type de manifestation et particulièrement porteuse pour une inscription à l’agenda. Ont été débattues trois grandes hypothèses : est-ce que c’est la fréquence des manifestations qui va rendre la thématisassions du problème plus élevée, est-ce que plus souvent il y a des gens dans la rue et plus le thème qui les préoccupe sera l’agenda. D’autres ont dit que ce n’est pas la fréquence des manifestations mais la taille de la manifestation, est-ce que plus il y a de monde dans la rue, plus le thème sera à l’agenda. Donc, il ne faut pas avoir quelques manifestations de fonctionnaires d’un canton mais il faut une manifestation très importante pas seulement des fonctionnaires mais d’une frange beaucoup plus large de la population une fois pour faire bouger par exemple un gouvernement dans une micro-république. La troisième hypothèse n’est ni la fréquence, ni la taille de la manifestation qui compte, c’est le degré de violence de la manifestation. Si la manifestation est conventionnelle, policée, d’abord, elle a peut-être moins d’attractivité médiatique mais elle aura beaucoup moins d’impacts que si la manifestation est non institutionnalisée, non encadrée, non permise, voire carrément violente. Ces trois hypothèses n’ont pas donné de résultats définitifs et confirmés dans tous les pays ou dans tous les secteurs. Certains ont démontrés que c’était la fréquence, d’autre l’importance et d’autres le degré de violence de la manifestation qui expliquait ceci.

Exemple de la peine de mort aux États-Unis

Formulation d’une politique publique : objectifs et instruments

Exemple de la politique d'efficacité énergétique

Annnexes

Références

  1. http://www.columbia.edu/itc/sipa/U6800/readings-sm/bachrach.pdf