Fonctionnalisme et Systémisme

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Le fonctionnalisme et le systémisme sont deux approches théoriques en science politique qui tentent de comprendre les relations, les structures et les processus au sein des systèmes politiques.

  • Fonctionnalisme: Ce concept se concentre sur les rôles et les fonctions que divers éléments du système politique jouent pour maintenir la stabilité et l'équilibre du système dans son ensemble. Il examine comment chaque partie contribue à la stabilité du système global. En science politique, le fonctionnalisme peut être utilisé pour analyser comment différentes institutions (comme le législatif, l'exécutif, le judiciaire, etc.) contribuent à la stabilité et au fonctionnement de l'ensemble du système politique.
  • Systémisme: Le systémisme, ou théorie systémique, est une approche qui considère les phénomènes politiques comme faisant partie d'un système plus large. Il se concentre sur les interactions entre les différentes parties du système et comment ces interactions influencent le système dans son ensemble. Le systémisme tente de comprendre le système politique dans son ensemble plutôt que de se concentrer uniquement sur ses parties individuelles.

Ces deux théories peuvent être utilisées pour comprendre les relations de pouvoir, les interactions entre les différentes parties d'un système politique et comment ces éléments contribuent à la stabilité ou au changement dans le système politique.

Le Fonctionnalisme

tout comme chaque organe dans le corps humain a une fonction spécifique et contribue au bon fonctionnement de l'organisme dans son ensemble, chaque institution ou structure au sein d'une société a une fonction spécifique et contribue à la stabilité et au bien-être de la société dans son ensemble. Le fonctionnalisme repose sur l'idée que la société est un système complexe dont les différentes parties travaillent ensemble pour promouvoir la solidarité et la stabilité. En science politique, cette approche est utilisée pour analyser comment différentes institutions ou structures, comme le gouvernement, l'économie, l'éducation, les médias, etc., contribuent à la stabilité et au fonctionnement de la société dans son ensemble.

On interprète donc la société ou la politique comme un corps vivant. Cette approche anthropomorphique, comparant la société à un organisme vivant, aide à comprendre comment les différentes parties de la société interagissent pour créer un tout fonctionnel. Dans cette analogie, les différentes institutions sociales et politiques sont comparées aux organes d'un corps. Par exemple, le gouvernement pourrait être considéré comme le cerveau, fournissant des directives et des décisions pour le reste du corps. L'économie pourrait être comparée au système circulatoire, distribuant les ressources (comme le sang et l'oxygène dans un corps) à travers la société. Les écoles et les universités pourraient être vues comme le système nerveux, fournissant l'éducation et l'information (analogues aux signaux nerveux) qui permettent à la société de fonctionner. Tout comme le corps a besoin de tous ses organes pour fonctionner correctement, la société a besoin de toutes ses institutions pour maintenir l'équilibre et la stabilité. De plus, tout comme les organes du corps interagissent et dépendent les uns des autres, les institutions sociales et politiques sont également interdépendantes et leurs interactions ont un impact sur le fonctionnement global de la société.

Le fonctionnalisme est devenu une théorie dominante en sociologie et en science politique dans les années 1930 à 1960, en particulier dans le monde anglo-saxon. Des sociologues comme Talcott Parsons et Robert K. Merton ont joué un rôle crucial dans le développement de la théorie fonctionnaliste. Talcott Parsons, en particulier, est souvent considéré comme l'un des principaux contributeurs à la théorie fonctionnaliste. Sa théorie de l'action sociale, qui met l'accent sur l'interdépendance des parties d'un système social et le rôle des normes et des valeurs dans la stabilité sociale, a eu une influence majeure sur le fonctionnalisme. Robert K. Merton, quant à lui, a introduit la notion de fonctions manifestes et latentes. Les fonctions manifestes sont les effets attendus et intentionnels des actions sociales, tandis que les fonctions latentes sont les effets non intentionnels et souvent non reconnus.

Dans les années 1960, le fonctionnalisme a été critiqué pour son accent sur la stabilité et l'ordre social, et pour son incapacité à tenir compte du changement social et du conflit. En réponse à ces critiques, de nouvelles théories, comme le conflit structural et l'interactionnisme symbolique, ont commencé à émerger. Cependant, le fonctionnalisme reste une approche importante en sociologie et en science politique, et ses concepts continuent d'influencer la façon dont nous pensons les sociétés et les systèmes politiques.

Dans cette perspective, chaque élément de la société, qu'il soit matériel ou immatériel, a un rôle à jouer pour maintenir l'ensemble du système en équilibre. La stabilité et le bon fonctionnement de la société sont assurés par l'interaction et l'interdépendance de ces divers éléments, chacun remplissant ses fonctions respectives. Par exemple, dans une société, la production de biens et services est une fonction essentielle qui permet de répondre aux besoins matériels des membres de la société. Les structures familiales et sociales assurent la reproduction et la socialisation des nouveaux membres, contribuant ainsi à la continuité de la société. Les institutions politiques et juridiques assurent la protection et le maintien de l'ordre, contribuant ainsi à la stabilité et à la sécurité de la société. De même, chaque croyance, chaque valeur et chaque norme sociale a une fonction à jouer. Par exemple, les croyances religieuses peuvent contribuer à la cohésion sociale en fournissant un cadre de sens et de valeurs partagées. Les normes sociales régulent le comportement des individus et favorisent la coopération et l'harmonie au sein de la société.

Selon la théorie fonctionnaliste, bien que chaque société doive remplir certaines fonctions universelles (comme la production de biens et services, la reproduction, et la protection de ses membres), la manière dont ces fonctions sont remplies peut varier d'une société à une autre en fonction de ses institutions culturelles et sociales spécifiques. C'est là que le concept d'"équivalents fonctionnels" entre en jeu. Différentes institutions ou pratiques culturelles peuvent remplir la même fonction de manière différente. Par exemple, la socialisation - le processus par lequel les individus apprennent et intègrent les normes et les valeurs de leur société - peut se faire de différentes manières dans différentes sociétés. Dans certaines sociétés, elle peut se faire principalement par l'imitation, où les individus apprennent les normes sociales en observant et en imitant les autres. Dans d'autres sociétés, elle peut se faire par fusion, où les individus sont immergés dans un groupe social et adoptent ses normes et valeurs. Dans d'autres encore, elle peut se faire par transmission, où les normes et valeurs sont explicitement enseignées et transmises de génération en génération. Ces différentes méthodes de socialisation sont des "équivalents fonctionnels" en ce sens qu'elles remplissent toutes la même fonction - la socialisation des individus - mais de manières différentes. Cela illustre la flexibilité et la variabilité des sociétés dans la manière dont elles remplissent les fonctions universelles.

Le fonctionnalisme est en effet né de l'anthropologie et a été influencé par plusieurs penseurs importants :

  1. Bronisław Malinowski : Anthropologue polonais-britannique, Malinowski est souvent considéré comme le fondateur de l'anthropologie sociale britannique et l'un des pionniers du fonctionnalisme. Il a introduit l'idée que pour comprendre une culture, il faut examiner la façon dont ses différentes parties fonctionnent ensemble pour répondre aux besoins humains de base. Malinowski a également mis l'accent sur l'importance du travail sur le terrain et de l'observation participante dans l'étude des sociétés.
  2. Alfred Radcliffe-Brown : Un autre anthropologue britannique, Radcliffe-Brown, a développé ce qu'il appelait le "structural-fonctionnalisme". Il a considéré la société comme un système organique, où chaque partie a une fonction spécifique qui contribue à la survie du système dans son ensemble. Radcliffe-Brown a mis l'accent sur l'étude des relations sociales en tant que système structurel.
  3. Talcott Parsons : Sociologue américain, Parsons a développé une version complexe du fonctionnalisme connue sous le nom de "théorie de l'action sociale". Il a considéré la société comme un système interconnecté de parties qui travaillent ensemble pour maintenir un équilibre. Parsons a mis l'accent sur le rôle des normes sociales et des valeurs culturelles dans le maintien de la stabilité sociale et a soutenu que tout changement social doit être graduel pour préserver cet équilibre.
  4. Robert K. Merton : Merton, également un sociologue américain, a apporté plusieurs modifications importantes à la théorie fonctionnaliste. Contrairement à Parsons, Merton ne croyait pas que tout dans la société contribue à sa stabilité et à son bien-être. Il a introduit les concepts de fonctions manifestes et latentes, faisant la distinction entre les effets attendus et les effets non attendus ou non reconnus des actions sociales. Merton a également reconnu l'existence de dysfonctions, ou les effets négatifs des structures sociales sur la société.

Bronislaw Malinovski (1884 - 1942) : Le fonctionnalisme anthropologique ou le fonctionnalisme absolu

Bronisław Malinowski est l'une des figures les plus importantes de l'anthropologie du XXe siècle. Né en Pologne, Malinowski a commencé ses études universitaires à l'Université Jagellonne de Cracovie, où il a étudié la philosophie et la physique. Cependant, il s'est rapidement intéressé à l'anthropologie et a décidé de poursuivre ses études dans ce domaine. Il a ensuite déménagé à Londres, où il a commencé à étudier à la London School of Economics (LSE). À la LSE, il a travaillé sous la direction de l'anthropologue C.G. Seligman et a obtenu son doctorat en 1916. Sa thèse, basée sur ses recherches de terrain en Mélanésie, a jeté les bases de son approche fonctionnaliste de l'anthropologie. Il s'est lancer dans des travaux de terrain approfondis en Mélanésie, une région du Pacifique Sud qui comprend de nombreuses îles, dont la Papouasie-Nouvelle-Guinée, les Îles Salomon, Vanuatu, la Nouvelle-Calédonie et d'autres. Son travail sur le terrain a jeté les bases de la méthode d'observation participante, qui reste une méthode centrale en anthropologie aujourd'hui. Cette approche implique de vivre au sein de la communauté que l'on étudie pendant une longue période de temps, d'apprendre la langue locale et de participer autant que possible à la vie quotidienne de la communauté.

Son livre le plus célèbre, "Les Argonautes du Pacifique occidental", est une étude détaillée de la Kula, un système complexe d'échanges commerciaux entre les différentes îles de la Mélanésie. Dans ce travail, Malinowski a non seulement décrit le système de la Kula en détail, mais il a également cherché à comprendre comment il fonctionnait dans le contexte plus large de la société mélanésienne, y compris son rôle dans la politique, la religion et la vie sociale. La contribution de Malinowski à la théorie fonctionnaliste repose sur son idée que chaque aspect d'une culture - y compris ses rituels, ses mythes, ses systèmes économiques et sociaux - a une fonction spécifique qui contribue à la satisfaction des besoins fondamentaux des individus dans cette culture. Cette approche a eu une influence durable sur l'anthropologie et a également contribué à l'émergence de la théorie fonctionnaliste en sociologie et en science politique.

Bronisław Malinowski est célèbre pour avoir passé plusieurs années sur les îles Trobriand (aujourd'hui connues sous le nom d'îles Kiriwina en Papouasie-Nouvelle-Guinée) de 1915 à 1918. Pendant cette période, il a vécu au sein de la population locale et a participé à leurs activités quotidiennes, une méthode d'étude de terrain connue sous le nom d'observation participante. Une des observations les plus importantes de Malinowski lors de son séjour sur les îles Trobriand a été le système d'échange connu sous le nom de Kula. Ce système complexe d'échanges commerciaux entre différentes îles impliquait l'échange de colliers de coquillages rouges et de bracelets de coquillages blancs, qui étaient échangés dans des directions opposées autour d'un cercle d'îles. Malinowski a soutenu que le système Kula était non seulement une forme d'échange économique, mais aussi un moyen pour les individus d'établir et de maintenir des relations sociales et politiques.

L'approche de Malinowski était révolutionnaire à l'époque et a grandement influencé le développement de l'anthropologie. Il a montré qu'une compréhension complète et précise d'une culture ne peut être obtenue qu'en vivant au sein de cette culture et en participant à ses activités quotidiennes. Cela a permis d'obtenir une perspective de l'intérieur sur la façon dont les différentes parties de la culture - économie, politique, religion, etc. - fonctionnent ensemble pour répondre aux besoins de la population.

Phénomène de la kula.png

Le système de la Kula, observé par Bronisław Malinowski dans les îles Trobriand, est un système d'échange rituel dans lequel des objets précieux sont donnés sans attente de paiement immédiat, mais avec l'obligation implicite qu'ils seront éventuellement rendus. Il y a deux types principaux d'objets échangés dans la Kula : les colliers de coquillages rouges, appelés soulava, qui circulent dans le sens des aiguilles d'une montre autour d'un cercle de partenaires commerciaux, et les bracelets de coquillages blancs, appelés mwali, qui circulent dans le sens contraire. Ces objets n'ont pas de valeur utilitaire en soi, mais sont précieux en raison de leur histoire et de leur signification symbolique. Les individus qui participent à la Kula voyagent parfois sur de longues distances pour échanger ces objets. Lorsqu'un objet est reçu, il est gardé pendant un certain temps, puis donné à un autre partenaire commercial lors d'un échange ultérieur. En participant à la Kula, les individus établissent et renforcent des liens sociaux et politiques, acquièrent du prestige et naviguent dans des relations complexes de réciprocité et d'obligation. Le travail de Malinowski sur la Kula a été très influent et a contribué à façonner notre compréhension de l'économie, de la politique et de la culture dans les sociétés non occidentales. Il a également joué un rôle clé dans le développement de la théorie fonctionnaliste en anthropologie, qui considère les différentes parties d'une culture comme étant interconnectées et fonctionnant ensemble pour répondre aux besoins de la société.

La Kula est un système d'échange rituel qui ne correspond pas aux modèles économiques traditionnels occidentaux. Les objets échangés dans la Kula - les colliers de coquillages soulava et les bracelets de coquillages mwali - n'ont pas de valeur intrinsèque en tant que biens matériels, mais acquièrent une grande importance symbolique et sociale dans le contexte de la Kula. Ce qui est particulièrement intéressant dans la Kula, c'est qu'il ne s'agit pas d'un échange ponctuel, mais d'un système d'échange continu. Un objet reçu dans le cadre de la Kula n'est pas conservé en permanence, mais doit être donné à un autre partenaire commercial lors d'un échange ultérieur. De cette façon, les objets de la Kula sont constamment en mouvement, circulant d'un individu à un autre et d'une île à une autre. Par ailleurs, les échanges de la Kula sont accompagnés de rituels et de cérémonies complexes, et la participation à la Kula confère prestige et statut social. La Kula est donc bien plus qu'un simple système d'échange économique : c'est un phénomène social et culturel complexe qui renforce les liens sociaux, établit des relations de réciprocité et structure la vie politique et sociale des îles Trobriand. En étudiant la Kula, Malinowski a démontré que pour comprendre véritablement un phénomène social ou culturel, il faut l'étudier dans son contexte et comprendre comment il s'inscrit dans le fonctionnement global de la société. C'est l'un des principes fondamentaux de l'anthropologie et de la théorie fonctionnaliste.

La Kula est un système d'échange qui, bien que ne comportant pas d'éléments financiers au sens traditionnel du terme, a une importance cruciale pour la cohésion sociale et le maintien des liens entre les différentes communautés des îles. Les objets échangés dans la Kula sont des biens symboliques qui servent à renforcer les relations entre les personnes et à maintenir une certaine forme de stabilité et de continuité dans la société. En outre, la Kula est un processus hautement ritualisé et encadré. Il existe des règles spécifiques concernant qui peut participer à la Kula, quels objets peuvent être échangés et comment ils doivent être échangés. De plus, les échanges de la Kula sont souvent accompagnés de rituels magiques et religieux, ce qui souligne encore davantage leur importance sociale et culturelle.

L'approche de Malinowski, qui consiste à analyser les pratiques culturelles en termes de leurs fonctions au sein de la société, est une caractéristique clé de la théorie fonctionnaliste. Dans le cas de la Kula, Malinowski a montré que ce qui peut sembler être un simple système d'échange de biens est en réalité un élément crucial de la structure sociale et politique des îles Trobriand.

La vision fonctionnaliste de Bronisław Malinowski considère les pratiques et les institutions culturelles non pas comme des éléments isolés, mais comme des parties intégrantes d'un système social plus large qui fonctionne pour répondre aux besoins de la société. Dans le cas de la Kula, la fonction de ce système d'échange n'est pas principalement économique, mais plutôt sociale et politique. La Kula sert à renforcer les liens sociaux entre les individus et les communautés, à établir et à maintenir des relations de réciprocité, et à structurer les relations sociales et politiques. En obligeant les gens à se rencontrer et à échanger régulièrement, la Kula favorise la paix et la coopération entre les différentes communautés des îles Trobriand.

Ce point de vue fonctionnaliste a des implications importantes pour la façon dont nous comprenons et analysons les systèmes politiques et sociaux. Il suggère que pour comprendre pleinement une institution ou une pratique culturelle, nous devons examiner sa fonction dans le contexte de la société dans son ensemble. Cette approche peut nous aider à comprendre comment différentes institutions et pratiques contribuent à la cohésion sociale, à la stabilité politique, et à d'autres aspects du fonctionnement de la société.

Alfred Radcliffe-Brown : 1881 - 1955

Alfred Radcliffe-Brown, anthropologue britannique, a joué un rôle fondamental dans le développement du structuralisme et du fonctionnalisme dans le domaine de l'anthropologie. Il est surtout connu pour ses études des sociétés aborigènes en Australie.

Radcliffe-Brown a proposé l'idée que les sociétés peuvent être comprises comme des systèmes structurés d'interactions sociales, où chaque partie de la société a une fonction spécifique qui contribue à la stabilité et à la survie de l'ensemble. Il a comparé la société à un organisme biologique, où chaque organe a une fonction spécifique qui contribue au bien-être de l'ensemble du corps. Dans son livre "Structure and Function in Primitive Society", Radcliffe-Brown a exploré ces idées en détail. Il a soutenu que les sociétés primitives, comme celles des Aborigènes d'Australie, ont des structures sociales, politiques et spatiales complexes qui sont largement invisibles à l'œil non formé, mais qui peuvent être révélées par une analyse minutieuse. Radcliffe-Brown a également mis l'accent sur l'importance des rituels et des mythes dans ces sociétés, qu'il considérait comme des outils clés pour maintenir l'ordre social et assurer la cohésion du groupe. Pour lui, ces éléments culturels ne sont pas de simples superstitions, mais des éléments fonctionnels essentiels de la société.

La contribution de Radcliffe-Brown à l'anthropologie et à la théorie fonctionnaliste a été extrêmement influente. Son travail a jeté les bases de nombreuses études ultérieures sur la structure sociale et les systèmes politiques dans une variété de contextes culturels.

Radcliffe-Brown a fusionné les idées du structuralisme et du fonctionnalisme pour créer la théorie structuralo-fonctionnaliste.

Dans cette perspective, une société est vue comme un système de structures interconnectées, chacune ayant une fonction spécifique qui contribue à la stabilité et à l'intégrité de l'ensemble du système. Ces structures sont le résultat de pratiques et d'interactions sociales, et non de facteurs biologiques ou arbitraires. Elles sont le produit de l'activité humaine, mais elles existent en dehors des individus et les influencent. Le structuralisme insiste sur la nécessité d'examiner les sociétés dans leur ensemble et de comprendre comment les différentes parties s'articulent pour former un tout cohérent. Le fonctionnalisme, quant à lui, se concentre sur l'analyse des fonctions spécifiques que chaque partie d'une société remplit dans le contexte du système social plus large.

Le structuralo-fonctionnalisme combine ces deux approches en se concentrant à la fois sur la manière dont les structures sociales sont créées par des fonctions sociales spécifiques et sur la manière dont ces structures contribuent à la stabilité et à la cohésion de la société dans son ensemble. Cette approche a été largement utilisée dans l'anthropologie et la sociologie pour analyser une grande variété de sociétés et de cultures.

Dans le structuralo-fonctionnalisme, les structures de la société ne sont pas simplement vues comme des entités rigides et immuables, mais comme des éléments dynamiques et interactifs qui jouent un rôle actif dans l'organisation de la vie sociale. Ces structures peuvent prendre de nombreuses formes, comme les institutions sociales, les normes culturelles, les systèmes de croyance, les rituels, et même les formes de communication. Chaque structure remplit une fonction spécifique qui contribue à la stabilité et à l'ordre de la société. Par exemple, une institution comme le mariage peut avoir la fonction de réguler les relations sexuelles, de fournir un cadre pour l'éducation des enfants, et de définir les rôles et les responsabilités des hommes et des femmes dans la société. Ces structures fonctionnent également comme des mécanismes de régulation qui aident à maintenir l'équilibre social et à prévenir le chaos ou le désordre. Elles favorisent la coopération et l'harmonie entre les individus et les groupes en établissant des règles et des normes communes de comportement. En somme, dans la perspective structuralo-fonctionnaliste, les structures de la société sont vues comme des éléments essentiels qui permettent aux gens de vivre ensemble de manière ordonnée et fonctionnelle.

Le structuralo-fonctionnalisme reconnaît que les sociétés ne sont pas statiques, mais dynamiques et capables de s'adapter et d'évoluer en réponse à divers facteurs. Cette adaptabilité peut se manifester à plusieurs niveaux :

  1. Écologique : Les sociétés peuvent s'adapter à leur environnement physique et écologique, en modifiant leurs modes de subsistance, leurs technologies ou leurs pratiques environnementales en réponse à des changements dans leur environnement.
  2. Institutionnel : Les institutions sociales, politiques et économiques peuvent changer et s'adapter en réponse à des facteurs internes ou externes. Par exemple, une société peut réformer ses institutions politiques en réponse à des pressions sociales pour plus de démocratie ou de justice sociale.
  3. Culturel : Les valeurs, les normes et les croyances d'une société peuvent également évoluer et s'adapter au fil du temps. Par exemple, une société peut changer ses attitudes envers certains comportements ou groupes sociaux en réponse à des changements culturels ou idéologiques plus larges.

Ces différents niveaux d'adaptabilité peuvent interagir et se renforcer mutuellement, conduisant à des transformations profondes de la structure et de la fonction de la société. Cependant, même dans le contexte de ces changements, le structuralo-fonctionnalisme suggère que les sociétés maintiendront une certaine cohérence et stabilité, car les nouvelles structures et fonctions qui émergent serviront à maintenir l'ordre social et la cohésion de la société.

Avec le concept de système social dans la perspective structuralo-fonctionnaliste. La société est considérée comme un organisme complexe composé d'éléments interdépendants - individus, groupes, institutions - qui sont tous connectés par des relations sociales. Aucun de ces éléments n'existe de façon isolée ; ils font tous partie d'un ensemble plus grand et contribuent à sa fonctionnalité et à sa stabilité. Dans cette optique, le "système social" n'est pas simplement une collection d'individus, mais une entité organisée avec ses propres structures et fonctions. Ces structures sont non seulement façonnées par l'interaction des individus, mais elles influencent également le comportement et les attitudes des individus. Elles créent un cadre de normes, de valeurs et de règles qui guide le comportement des individus et aide à maintenir l'ordre et la cohésion sociale. En ce sens, les valeurs collectives jouent un rôle central dans le système social. Elles fournissent une base commune d'entente et d'identification qui lie les individus ensemble et facilite la coopération et l'harmonie sociale. Ces valeurs peuvent être incorporées dans les institutions et les pratiques culturelles d'une société, contribuant à façonner la manière dont les individus interagissent et se comportent les uns avec les autres.AA

a notion de système social est centrale en sociologie et en science politique, en particulier dans les perspectives structuralistes et fonctionnalistes. Un système social est un ensemble organisé d'interactions sociales, structurées autour de normes, de valeurs et d'institutions partagées. Il s'agit d'un cadre qui organise et régule les comportements des individus et des groupes au sein de la société. Dans un système social, les institutions jouent un rôle crucial. Les institutions sont des structures durables qui établissent des règles et des procédures pour les interactions sociales. Elles comprennent des organisations formelles comme le gouvernement, les écoles et les entreprises, ainsi que des normes et des valeurs culturelles informelles. Les institutions aident à structurer le comportement social, à créer de la prévisibilité et de l'ordre, et à faciliter la coopération et la coordination entre les individus et les groupes. En adhérant aux normes et aux valeurs d'un système social, les individus contribuent à la stabilité et à la continuité de ce système. Cependant, les systèmes sociaux sont également dynamiques et peuvent changer et évoluer en réponse à des facteurs internes et externes. La sociologie, en tant que discipline, s'intéresse à l'étude de ces systèmes sociaux - comment ils sont structurés, comment ils fonctionnent, et comment ils changent et se développent au fil du temps.

A.R. Radcliffe-Brown, dans son approche structural-fonctionnaliste, a mis l'accent sur le concept d'adaptabilité, la capacité d'un système social à s'ajuster et à changer en réponse à des contraintes internes et externes. Selon Radcliffe-Brown, la société est un système intégré d'institutions, chacune ayant une fonction spécifique à remplir pour le maintien de l'ensemble. Cette idée, empruntée à la biologie, postule qu'une société, comme un organisme, est un système d'éléments interdépendants qui travaillent ensemble pour la survie et l'équilibre du système global. Chaque institution ou structure sociale a une fonction à remplir dans ce système - elle doit contribuer à la stabilité et à la cohésion de la société. En ce qui concerne le lien entre structure et fonction, Radcliffe-Brown voyait la structure comme un arrangement de parties interdépendantes, chacune ayant une fonction spécifique à remplir. Il a soutenu que la fonction d'une institution ou d'une pratique sociale doit être comprise en termes de son rôle dans le maintien de la structure sociale globale. Quant à l'adaptabilité, Radcliffe-Brown a soutenu que les sociétés ont la capacité de s'adapter et de se modifier en réponse aux changements environnementaux et sociaux. Cela peut impliquer des modifications des institutions sociales, des normes, des valeurs, etc., afin de maintenir l'équilibre et la stabilité du système social dans son ensemble. C'est ainsi que Radcliffe-Brown a conçu la dynamique entre la structure, la fonction et l'adaptabilité dans une société.

Talcott Parsons : 1902 - 1979

Talcott Parsons.

Parsons est un biologiste qui a soutenu un doctorat à l’Université de Heidelberg en sociologie et en économie. Il est intéressant, car il va poursuivre ses travaux en cherchant à faire le lien entre l’action, la structure, et puis le fonctionnalisme. En 1969, il publie "Politics and Social Structure" qui traite des structures sociales et politiques, en 1977, sur les systèmes sociaux, il publie Social Systems and the Evolution of Action Theory et en 1978 un ouvrage traitant de l’action et de la condition humaine Action Theory and the Human Condition.

C’est un auteur intéressant, car il pose l’action non pas comme quelque chose d’individuel, mais comme étant incorporée dans un système de l’action. Si nous sommes dans une interprétation systémique de la société et du politique, l’action ne dépend plus d’un individu, mais d’un système d’action. Du coup, apparaissent des notions importantes sur l’analyse de la gouvernementalité et la mise en place de systèmes, car ce ne sont jamais uniquement celles d’un individu, mais c’est aussi un ensemble de données dans un système plus global renvoyant à la question du système.

Un système d’action est un élément, des unités ou des parties d’unités qui doivent fabriquer entre eux des rapports afin de pouvoir arriver à des choix d’actions. Un système d’action va engager tout un ensemble d’activités qui relient des choix individuels à des choix collectifs.

Ainsi, Parsons met en exergue quatre fonctions ou dimensions du système d’action :

  1. adaptation : consiste à puiser dans les systèmes extérieurs les diverses ressources dont le système a besoin. C’est aller chercher des ressources et les adapter aux besoins.
  2. poursuite des buts : capacité de se fixer des buts et de les poursuivre méthodiquement. Dans un système d’action, il faut d’abord s’adapter à la situation réelle puis définir des buts ; il faut les fixer puis se donner les moyens de les atteindre. Il y a une dimension logiquement instrumentale. Les buts conditionnent les moyens et les instruments.
  3. intégration : protéger le système contre des changements brusques et des perturbations majeures. C’est s’interroger sur la mise en place d’un dispositif qui va pouvoir traverser des crises et perdurer dans l’action. Si on ne construit pas, il va être balloté par les crises, c’est tout le rapport que nous avons aujourd’hui qui est la contradiction entre être présent dans l’immédiateté des évènements et poursuivre une action.
  4. latence : système de canalisation qui sert à la fois à accumuler de l’énergie sous forme de motivation et à la diffuser, elle est de l’ordre de la motivation, de l’ordre de la capacité à contenir la motivation dans la capacité d’agir. Dans les politiques publiques, on a souvent une déclaration d’intention sans la conscience des moyens pour la réaliser, en d’autres termes on fixe un objectif, mais on ne pense pas aux conditions mêmes de la résolution de la question mettant en exergue des contradictions institutionnelles. Il ne suffit pas de garder la motivation il faut la transposer, mais aussi fabriquer un dispositif qui permet de les résoudre.

Le réel montre souvent que ces fonctions du système d’action ne sont pas remplies ou n’arrivent pas à se remplir presque naturellement.

Parson moyen but.png

Le paradigme fonctionnel du système d’action est de dire que nous sommes dans une boucle qui fait qu’on doit s’adapter pour revenir aux buts qui favorisent la question de l’intégration (coordination, lutter contre les agents perturbateurs), ensuite on retombe sur la question de la latence et de la motivation et on revient à la question de l’intégration. On est dans un dispositif totalement circulaire.

Robert King Merton (1910 - 2003) : le fonctionnalisme de moyenne portée

Robert King Merton.

Influencé par Durkheim, il s’intéresse aux groupes sociaux et va raffermir ce modèle avec deux concepts importants :

  • le rôle des individus

Dans une vision fonctionnaliste, il rajoute une dimension humaine en disant qu’il y a du fonctionnalisme, des fonctions, mais que les individus sont acteurs au niveau des fonctions.

  • la question de l’anomie et du dysfonctionnement social

Une anomie est un état de décomposition, d’échec, d’arrêt, de rupture dans un système. L’anomie signifie qu’à un moment donné un système social et politique peut connaitre des formes de ruptures qui vont faire partir le système en échec.

Les systèmes fonctionnels ne sont pas garantis éternellement, ils peuvent connaitre des phénomènes de mutation ou de désagrégation interne qui mettent le système en échec. L’ensemble du système et de la fonction ne peuvent plus atteindre leur objectif, il y a dérégulation. Ainsi l’anomie se caractérise dans le dysfonctionnement social.

Lorsqu’un système social ne peut plus réguler le rôle de chacun dans la société et la place et la fonction du politique dans ces échanges, à ce moment il peut y avoir une forme d’anomie c’est-à-dire que le dysfonctionnement social met en péril l’ensemble du dispositif. Il caractérise aussi l’anomie comme passage d’un ordre ancien à un ordre futur dont on ne connait pas les règles ; c’est le sentiment de quitter un modèle sans pour autant savoir dans quelle direction nous allons.

L’anomie est décrite non seulement comme une structure sociale qui ne fonctionne plus, mais du coup comme des individus en attente de sens perdu et qui dans l’attente de ce sens perdu peuvent redéfinir des comportements spécifiques notamment des comportements de violence ou de déviance. La déviance étant un comportement qui ne répond plus aux comportements et aux aspirations de la société. La déviance surviendrait au moment où il y a disproportion entre les flux culturels considérés comme valables et les moyens légitimes auxquels les individus peuvent avoir accès pour atteindre ces buts.

En d’autres termes, la déviance intervient quand il y a une contradiction entre les finalités et les objectifs de la société et puis le fait qu’elle n’ait plus les moyens de les atteindre. À partir du moment où la société ne peut plus réguler le champ social, la mafia se substitue à la vacance d’un pourvoir de l’État dispensateur de travail et organisateur du champ social qui crée un autre pouvoir à l’intérieur qui est un pouvoir déviant. Donc il faut s’interroger sur ces questions de déviance, car ce sont des ruptures dans un système structuralo-fonctionnaliste qui montre un décalage et une tension entre l’évolution de la société et la réalité du modèle qui ne fonctionne plus.

Dans Contemporary Social Problems : An Introduction to the Sociology of Deviant Behavior and Social Disorganization écrit par Robert K. Merton et Robert A. Nisbet et publié en 1961 apparait une théorie sociologique des problèmes sociaux ou reprenant la question du normal et de l’anormal, du logique et de l’illogique disant qu’une même structure sociale et culturelle peut créer des comportements conformes, mais peut aussi créer des comportements de déviation et de désorganisation sociale.

Ainsi, ils s’interrogent sur la provenance de la désorganisation dans le système en distinguant trois éléments :

  • les conflits institutionnels ;
  • la mobilité sociale : c’est le fait qu’il y ait trop d’écart entre les individus et qu’il n’y ait plus de sentiment d’appartenance ;
  • l’anomie.

Le fonctionnalisme explique les faits sociaux par leur fonction, puis s’interroge sur les fonctions et les faits sociaux dans un système social toujours rapporté à la façon dont ils sont liés les uns aux autres. Par exemple, la Kula est un système d’échange qui a une portée sociale et fonctionnelle très importante, car au-delà de l’échange c’est un jeu de construction d’une collectivité qui a pour fonction d’éviter les guerres et les conflits.

Dans un système, les individus font partie d’un dispositif dont ils servent les fins. Cependant dans ce dispositif il peut y avoir des stratégies d’intégration et de déviance.

La théorie systémique

Dans la théorie systémique, l’action sociale ou humaine engage quatre systèmes principaux :

  • système biologique : motivations élémentaires de l’individu ;
  • système de la personnalité : organisation psychique de l’individu ;
  • système social : ensemble des rapports d’interaction ;
  • système culturel : ensemble des valeurs.

Quelle est la différence entre une approche de politique traditionnelle et une approche systémique ?

Dans l’approche traditionnelle de l’analyse du politique on étudie les acteurs en tant que tels et les prises de décisions alors que dans l’analyse systémique du politique on va réfléchir en termes d’interactions entre les acteurs, en termes de processus de répartition des ressources puis réfléchir en termes de puissance d’acteur ou des avantages sociaux des acteurs c’est-à-dire en fonction du poids des acteurs dans le système. Dans l’analyse systémique, on va interroger plutôt le champ des compétitivités, de relations, de conflictualité des acteurs dans les dispositifs.

Dans l’analyse systémique du politique on part de l’hypothèse que chaque groupe d’acteurs est doté de normes, de processus spécifiques d’action et de processus de répartition des modes d‘action afin de catégoriser les acteurs dans un processus plus complexe. Dans une analyse systémique, on met en place une analyse des interactions dans l’environnement même dans lequel se produisent ces interactions en donnant plus de place dans l’interaction entre action et environnement qui se contextualise dans la notion de système.

Dans l’analyse systémique, on garde l’hypothèse de cohérence, il faut que le processus soit cohérent. On va étudier les systèmes d’acteurs, les systèmes de cohérence ainsi que la cohérence entre les différents sous-systèmes, c’est-à-dire que l’on va analyser le processus de décisions de processus politiques comme un ensemble d’acteur et d’agent dont découlent des sous-systèmes à travers lesquels ils agissent. Nous sommes dans une analyse rétroactive ce qui signifie qu’un processus de décision est rarement un processus linéaire. Un processus d’action pose une question d’action et ensuite, cherche à définir les processus d’action, il commence à agir pour enfin revisiter les conditions de son action. Cela veut dire qu’il s’interroge pour voir si les conditions fonctionnent bien. Si ce processus ne fonctionne pas, il faut s’interroger sur la rétroaction afin de la changer. C’est ce que l’on appelle une causalité non linéaire.

David Easton (1917 - 2014) : la théorie systémique en sciences politiques

Easton s’intéresse à l’invention et à la constitution d’une théorie systémique en sciences politiques. Il va chercher à utiliser cette vision systémique des sciences sociales afin d’essayer d’analyser ce qu’est le politique.

Dans son ouvrage The Political System publié en 1953 il dit qu’au fond, cette théorie se fait dans l’interprétation de la politique comme universalité, il y a de la politique partout, mais étant dans un système on peut comparer tous les systèmes par rapport aux autres. On l’éloigne beaucoup de la vision de l’anthropologie qui est relativiste. La pensée fondamentale de l’anthropologie est le relativisme culturel, il y a des gouvernements politiques différents et ce qui est intéressant est de comprendre la nature et leurs fonctions propres.

La vision systémique en sciences politiques va partir de l’autre côté en nous tirant du côté d’une théorie politique qui considère que l’on peut bâtir des connaissances universelles d’autant plus facilement qu’elle reconnait que la vision de système politique est mondiale. En sciences-politiques quand on analyse des systèmes politiques on est dans une analyse comparative des systèmes, s’il y a des différences c’est que ce sont toujours des systèmes.

L’hypothèse d’Easton est de dire que l’on peut construire une théorie politique par l’avancement des sciences politiques sur la base de productions de modèles de compréhensions systémiques.

Ainsi, il voit la société contemporaine comme un chaos auquel l’homme pourra mettre fin s’il applique la méthode scientifique à l’analyse des phénomènes politiques afin de les caractériser tel qu’ils se sont conçus et développé.

Il est pour une théorie systémique globale,il faut décortiquer dans la société contemporaine quelles sont les différents systèmes à l’œuvre.

Les principales fonctions de la théorie politique selon Easton :

  1. proposer des critères pour identifier les variables à analyser
  2. établir des relations entre ces variables
  3. expliquer ces relations
  4. élaborer un réseau de généralisation
  5. découvrir de nouveaux phénomènes

Au fond, on est dans une vision très globale de l’analyse du champ du système dans lequel rentrent ces critères entre les différents éléments des sous-systèmes. C’est une science politique qui va décortiquer les grands systèmes sociopolitiques et qui peut avoir des interrelations avec la qualification des types de régimes concernés.

Jean-William Lapierre (1921 - 2007)

Lapierre part de l’hypothèse de l’analyse des systèmes politiques dans son ouvrage L’analyse des systèmes politiques publié en 1973.

Pour analyser les systèmes politiques, il faut partir sur l’idée d’une universalité des systèmes politiques, nous sommes dans une société globale qui est constituée par des systèmes sociaux que l’on peut analyser.

Pour Lapierre, un système politique est un système, une organisation dans laquelle les éléments sont mis en interrelations. Tout système politique est inscrit dans une vision naturaliste ; les systèmes politiques sont des inputs et des outputs.

  • input : un système politique ne peut fonctionner qu’en intégrant l’information et les données au sein de la société afin de les transformer.
  • output : reconstruit les données en processus d’action de normes, de techniques, de lois, de règles, de jugements.

Le processus politique c’est la captation de ressources. Une des explications de la Révolution française est la marginalisation du roi de la société française. Au début du XVIIIème siècle, Louis XIV et Louis XV ont peur d’émeutes parisiennes. Louis XIV va construire Versailles en tant qu’extraterritorialité pour empêcher les nobles de se rebeller en province, mais sort du territoire et ne dispose plus d’inputs pour comprendre ce qui se passe à Paris. Quand les grandes épidémies liées aux grandes crises agricoles sont arrivées le peuple s’est réveillé et a fait la révolution. Nous pouvons noter ce bref échange entre Louis XVI et La Rochefoucauld : « -monsieur le roi, il s’est passé quelque chose. –c’est une révolte ?, -non sire, c’est une révolution ! »[1]. Le rapport entre input et output est intéressant dans le sens ou un système politique doit traiter les informations en s’en saisissant, au contraire il ne peut y avoir de gestion adaptée du territoire.

Ce sont des images qui posent le champ du politique dans la confrontation entre les inputs et les outputs dans la gestion des risques calculés, c’est-à-dire qu’on a des ressources à prendre, mais elles viennent avec des contraintes qu’il faut restituer dans un espace de projet en tenant compte des contraintes héritées, si nous n’avons plus d’inputs on peut se demander qu’elle est la nature des outputs, c’est-à-dire que les réponses seront hors de la réalité.

Lapierre désigne le système politique comme un système décisionnel c’est un système qui, même s’il est programmé de manière idéologique, doit tenir compte de la réalité.

Cette théorie est intéressante, car tout système politique doit être décisionnel, mais il n’est pas programmé parce qu’il doit évoluer, s’adapter, traiter l’information dont il dispose, aussi incomplète soit-elle, car elles lui permettent de définir les outputs.

Dès lors, un système politique selon Lapierre c’est un système d’action conditionné par des ressources et des contraintes dans une situation d’informations incomplètes et d’incertitude sur les objectifs. Ainsi, on peut définir les moyens à mobiliser et anticiper les répercussions de l’action.

Au fond, un système politique cherche à gérer au mieux les intérêts de l’organisme et l’ensemble des contraintes dont il hérite. En d’autres termes, il faut parfois chercher à gérer le « moins mal ».

Les limites de ces deux approches

Limites de l’approche fonctionnaliste

C’est de tout considérer à partir de fonctions, c’est une réduction trop fonctionnaliste qui peut amener à interpréter le système d’action comme étant totalement fonctionnaliste alors qu’en réalité cela en est loin.

Limites de l’approche systémique

Tout n’est pas systèmes politiques pour faire des comparaisons. La logique est de nous mener vers des jugements de valeur, c’est-à-dire nous faire réinterpréter la valeur d’un système politique en tant que tel en fonction de catégories au détriment d’autres. Le danger serait de nous engager trop rapidement sur des analyses comparatives de systèmes politiques ou de critères de définitions des systèmes politiques. Elle globalise trop et de nous laisse imaginer que tout est comparable.

Annexes

Références

  1. Guy Chaussinand-Nogaret, La Bastille est prise, Paris, Éditions Complexe, 1988, p. 102.