Offre, demande et politiques gouvernementales

De Baripedia

L’État peut intervenir de plusieurs manières sur un marché :

  • interdiction pure et simple (marché rendu illégal, sécurité/santé/environnement) ;
  • réglementation sur le produit (normes de qualité/santé/sécurité) ;
  • contrôle des quantités (obligation d’achat, quotas, rationnements, bons) ;
  • contrôle des prix (prix-plafonds, prix-planchers);
  • impôts et subventions.

Contrôle des prix

Le contrôle des prix

L’État intervient sur le marché et en réglemente le prix lorsqu’il juge le prix d’équilibre inadapté ou injuste. Par exemple, des prix injustes peuvent être :

  • taux d’intérêt trop élevé (limite de l’usure);
  • salaire trop bas (salaire minimum) ;
  • loyer trop cher (contrôle des loyers) ;
  • prix trop bas des denrées agricoles (prix de soutien).

Il peut intervenir sur les prix aussi s'il considère que le marché ne fonctionne pas de manière efficiente en raison d’un pouvoir de marché d’un côté ou de l’autre. Le contrôle des prix est en plus une mesure moins coûteuse que l'introduction d'une subvention (qui devrait être financée par les impôts). Souvent l’État instaure un contrôle de prix suite à des pressions de lobbies, qui essayent de créer des situations de rentes (“rent seeking activities”). Pour terminer, plus rarement un contrôle de prix peut être instauré pour maîtriser une inflation très élevée.

Prix plafonds

Un prix plafond ou maximal est prix au dessus duquel il est interdit de faire des transactions. Il est appliqué lorsque le gouvernement pense que le prix d’équilibre du marché est « trop » élevé. Il faut noter qu'un prix plafond au dessus du prix d'équilibre n'est pas contraignant.

Prix plafond 1.png

La quantité effectivement échangée à un prix donné est du prix d'équilibre est la plus petite entre la quantité offerte et la quantité demandée.

Le prix plafond permet aux consommateurs fortunés de consommer à un prix plus bas que le prix d'équilibre, mais en exclut d'autres du marché → files d'attente, discrimination...

Prix plafond 2.png

Prix plafonds : court vs long terme

Dans le long terme les élasticités-prix sont beaucoup plus fortes et donc la pénurie beaucoup plus grande (aucune incitation pour les producteurs à faire des investissements car le prix est contrôlé et de toute façon il y a pénurie sur le marché). Ceci a comme conséquence que les biens vendus sont de moindre qualité.

Le résultat est qu'il y a moins d’offre, plus de pénurie et moins de qualité.

Application : contrôle des loyers = forme de prix-plafond appliquée au marché du logement. La réglementation rend illégale la fixation d’un loyer plus élevé que le niveau fixé par la loi ou limite les augmentations possibles plus que le loyer lui-même (l’effet sera semblable: le loyer est en-dessous de sa valeur d’équilibre) → pénurie sur le marché du logement.

Application : le contrôle des loyers dans le court terme

Impact du contrôle de loyer (prix plafond) dans le court terme (offre et demande inélastiques)

Application : le contrôle des loyers dans le long terme

Impact du contrôle de loyer (prix plafond) dans le long terme (offre et demande élastiques)

Gagnants et perdants du plafonnement des loyers

Le plafonnement des loyers provoque des gagnants : les locataires ayant déjà un logement ou qui en trouvent un à loyer plafonné;

et des perdants : les propriétaires qui reçoivent un loyer plus bas et les personnes qui cherchent un logement mais n’en trouvent pas.

Le problème d’équité est que les bénéficiaires d’un loyer modéré en raison du plafonnement ne sont pas nécessairement ceux qui en ont le plus besoin : à Genève, exemples récents dans les médias de personnalités politiques bénéficiant de loyers bas. Plus généralement, le loyer est inversement corrélé à l’ancienneté du bail => il touche donc davantage les personnes âgées ou dans la force de l’âge, alors que les jeunes ou les migrants font leur entrée sur le marché.

Conséquences/coûts des loyers contrôlés

La pénurie crée un marché dit “de vendeurs” et provoque :

  • Rationnement de la demande: listes d’attente, rationnement en fonction des préférences des fournisseurs de logement (connexions, discrimination, etc.);
  • Plus d'exigences de la part des fournisseurs: garanties/cautions bancaires et/ou salariales, attestations de solvabilité, “clientèle huppée” favorisée. . .

Développement d'un marché "noir": sous-location abusive.

Inefficience (pertes pour la collectivité): découragement à la mobilité (une fois rentré dans un appartement on hésite à le quitter); frein à la construction et à la rénovation (les investisseurs préfèrent se tourner vers d'autres formes de placement plus lucratives); mésallocation des ressources (personnes âgées et seules vivant dans des grands appartements à faible loyer, et des familles s’entassant dans des petits appartements chers).

Loyers contrôlés : efficience et concurrence imparfaite

Mais, attention: la situation de référence de cette analyse présuppose la concurrence parfaite sur le marché du logement! Or, dans ce marché les conditions de la concurrence parfaite ne sont clairement pas vérifiées.

  • Le logement est un service extrêmement hétérogène;
  • Les coûts de prospection et de recherche sont importants (l’information n’est pas parfaite).
  • Le marché est mince avec peu de régies et de promoteurs immobiliers qui se partagent un canton ou une région (pouvoir de marché).

Dans un contexte de concurrence imparfaite, on peut montrer qu’un contrôle des loyers peut améliorer l’efficience.

De plus, souvent, le contrôle des loyers est justifié d’un point de vue non pas d’efficience mais d’équité. Avec des contrôles sur les loyers, on garantit une certaine redistribution qui évite que les petits locataires à bas revenu ne payent de trop hauts loyers.

Prix plancher

Le prix plancher ou minimal est un prix en dessous duquel on ne peut pas avoir de transactions. Il faut noter qu'un prix plancher en dessous du prix d'équilibre n'est pas contraignant.

Prix plancher 1.png

Salaire minimum et chômage

L’excédent de travail va être plus grand, lorsque la demande de travail est élastique, et la demande de travail va être élastique lorsque le producteur ne peut pas répercuter des augmentations de coût sur les consommateurs du produit final (marchés très compétitifs et prix donné). Les produits intensifs en main-d’œuvre peu qualifiée sont souvent caractérisés par une concurrence très grande et donc la demande de travail sur ces marchés est en général très élastique => le salaire minimum peut engendrer un chômage élevé des travailleurs peu qualifiés.

Evaluation de l’impact social et de redistribution du revenu associés au salaire minimum: il faut confronter les gains en salaire pour les travailleurs qui restent sur le marché du travail et qui gagnent un salaire élevé aux pertes pour les travailleurs qui perdent leur emploi ou qui n’arrivent pas à en trouver.

Il faut garder à l'esprit que nous avons fait l’hypothèse d’un marché du travail compétitif. Si les producteurs (demande de travail) ont du pouvoir de marché, le trade-off (choix) entre salaire plus élevé et chômage n’existe pas nécessairement, comme vous verrez dans d’autres cours plus avancés en analysant le cas du monopsone.

Historiquement institution très ancienne:

  • les historiens mentionnent des villes au Royaume Uni où l’on fixait des minima déjà en 1524;
  • lois nationales sur le salaire minimum apparaissent pour la première fois en Nouvelle-Zélande (1894) et en Australie (1896) et au Royaume Uni en 1909;
  • aux États-Unis première introduction partielle en 1912 et extension à tous les travailleurs en 1966;
  • en Suisse pas de salaire minimum légal, mais des minima sont négociés entre partenaires sociaux (en 2012 aboutissement de l'initiative populaire voulue par l'USS – Union Syndicale Suisse - pour l'introduction d'un salaire minimum de 22CHF de l'heure).

Il n'y a pas de consensus empirique concernant le lien entre salaire minimum et emploi (cf. étude empirique chapitre 2).

Taxation

Les ressources financières de l’État

L'État finance son action en partie par la vente d'actifs ou de biens et services (vente de terrains ou de bâtiments, péages...).

La plus grande partie de ressources publiques proviennent de l'utilisation du "pouvoir de coercition" de l'État à savoir le prélèvement de taxes, d'impôts, de redevances...

L'activité de l'État peut aussi être financée par des emprunts (obligations) ou par des transferts.

Impôts

L'impôt représente la principale source de revenu de l'État. Il consiste dans un prélèvement fiscal SANS contrepartie directe.

On distingue:

  • l'impôt direct = impôt personnel (dépend de la situation financière de la personne physique ou morale);
  • l'impôt indirect = impôt collecté sur une transaction marchande (ne dépend pas des caractéristiques de la personne → anonyme).

L'imposition peut être:

  • ad valorem (le plus courant) = le taux d'imposition est exprimé en pourcentage et la base imposable en unités monétaires (exemple, la TVA = taxe sur la valeur ajoutée);
  • unitaire (ou spécifique) = le taux est exprimé en unités monétaires par unité physique et la base imposable en unités physiques (exemple: 73 centimes/litre d'essence sans plomb).

Pour information, les recettes de la TVA représentent près de 40% des ressources de la Confédération; le taux pour la majorité des biens est de 8%, 2.5% pour alimentation, sport et culture.

La taxation indirecte

Les taxes indirectes réduisent les incitations à produire et consommer, car le prix payé par le consommateur augmente et le prix reçu par le producteur baisse. La différence entre les deux est le montant de la taxe qui est collecté par le gouvernement ().

Donc, quand un bien est taxé, les quantités échangées sur le marché vont être plus petites qu'en situation d'équilibre sans impôt.

Le fardeau ou incidence des taxes va se répartir entre les consommateurs et les producteurs selon l’élasticité-prix des fonctions respectives.

Taxes sur les consommateurs versus taxes sur les producteurs

On va voir que l'impact sur les consommateurs et producteurs ne dépend pas de qui paie concrètement la taxe. Pareillement, la quantité d'équilibre et la recette fiscale sont les mêmes que les contribuables légaux soient les consommateurs plutôt que les producteurs.

Taxe sur les consommateurs

Une taxe de € 0.50 sur les consommateurs.

Taxes sur les producteurs

Une taxe de € 0.50 sur les producteurs.

Taxation : qui paie ? Le rôle des élasticités prix

La répartition du fardeau de la taxe entre consommateurs et producteurs ne dépend donc pas de si l'impôt est prélevé auprès des consommateurs (demande) ou des producteurs (offre), c'est-à-dire de qui est le contribuable légal.

L’incidence de la taxe dépend de l’élasticité-prix de la demande et de l’offre sur le marché, et, indépendamment de qui paie concrètement la taxe, son fardeau tombera de façon plus forte sur l’agent économique qui a une élasticité-prix relativement plus faible.

Intuition : un agent avec une élasticité-prix relativement faible n’ajuste pas son comportement de manière importante aux changements de prix (il n’est pas très flexible car son élasticité-prix est petite), et donc il va subir la plus grande partie de la taxe.

Cas extrêmes (faites les graphiques!) :

  • Demande parfaitement inélastique ou offre parfaitement élastique → la taxe est complètement transférée sur les consommateurs.
  • Demande parfaitement élastique ou offre parfaitement inélastique → la taxe est complètement supporté par les producteurs.

Offre élastique et demande inélastique

Offre élastique et demande inélastique.png

Offre inélastique et demande élastique

Offre inélastique et demande élastique.png

Détermination de l’équilibre en présence d’une taxe

En général, à l'équilibre, et .

1) L'impôt (unitaire t) est payé par les acheteurs :

et est le prix d'équilibre du marché ;

2) L'impôt (unitaire t) est payé par les vendeurs :

et est le prix d'équilibre du marché.

Fonctions linéaires :

 ;  ; .

Sous le cas (1), => ← prix d'équilibre

et => .

Résumé

Prix plafond versus prix plancher (pénuries versus excédents).

Prix plafond : prix maximum (contrôle des loyers).

Prix plancher : prix minimum (salaire minimum).

Les taxes sont coûteuses car elles diminuent les incitations à l’activité économique:

  • Prix consommateur plus élevé ;
  • Prix producteur plus bas ;
  • La différence entre les deux est la taxe collectée par le gouvernement – → Quantités échangées plus petites sur le marché qui est taxé.

Une taxe à la consommation a un impact identique à celui d’une taxe sur la production.

Le partage des taxes entre consommateurs et producteurs dépend des élasticités prix de la demande et de l’offre.

Détermination de l’équilibre avec une taxe par la condition .

Annexes

Références