Nationalismes et décolonisation : 1950 – 1970

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C’est un thème encore abordé aujourd’hui à savoir les connexions et les relations entre les mouvements indépendantistes et le processus de décolonisation qui commence dans l’entre-deux-guerres mais qui est concentré, notamment pour les grands empires coloniaux britanniques, et français dans l’après guerre.

  • Il y a une exportation du nationalisme occidental dans les pays et les continents sous tutelle des empires coloniaux : y a t-il une sorte d’exportation d’un produit européen vers les autres ?

Chaque mouvement qui se créé est dans un univers codifié : soit on est pour une nation indépendante soit pour quelque chose de beaucoup plus grand.

  • Ce choix est-il imposé ou est-ce une alternative ? Y a t-il des racines autochtones, locales et régionales notamment dans l’opposition et la résistance contre la domination coloniale ou peut-on trouver des motifs de mobilisation qui ne sont pas simplement calqués sur le modèle des nationalismes ?

Il est évidement qu’il y a un transfert naturel mais dans chaque mouvement d’autonomie il y a de forts facteurs locaux, culturels liés à la composition ethnique et sociale, des tensions qui expliquent la particularité de chaque nationalisme. Pour Thiesse, « rien n’est plus international que les mouvements nationalistes »[1].

Aujourd’hui on dénombre 193 États, il faut beaucoup de mouvements qui veulent créer des États-Nations. C’est un mouvement global.

Emergence des mouvement nationaux[modifier | modifier le wikicode]

Les mouvements nationaux dans les colonies sont assez anciens. Ils sont parfois parfaitement contemporains aux mouvements nationaux que l’on à trouvé dans l’empire des Habsbourg, dans l’Empire ottoman ou dans l'Empire du Tsar.

État actuel de la recherche : vers une histoire globale du nationalisme[modifier | modifier le wikicode]

Ce que nous discutons ici est l’état actuel de la recherche. Dans The history of nationalism[2], Breuilly prend le nationalisme comme objet pour mettre en exergue le rôle de la religion, de la langue, d’un territoire cohérent mais aussi la question de l’internationalisme : à quel moment l’internationalisme entre en dialogue et en relation avec les nationalismes ?

Problématique[modifier | modifier le wikicode]

  1. Nationalisme hors d’Europe : exportation d’une idée ou développement autonome ?
  2. L’État-Nation : un format imposé ou un modèle revendiqué ? La forme de l’État-Nation émerge avec la Révolution française et la Révolution américaine se rependant très rapidement dans les pays de l’Amérique latine. Il y a diffusion mais qu’est-ce que les gens sur place pensent ?
  3. Relation entre nationalisme anticolonial et internationalisme ? La vraie mobilisation nationaliste et les vraies luttes pour l’indépendance sont plutôt au XXème siècle. C’est un peu décalé par rapport aux empires continentaux européens. C’est pourquoi les mouvements vers un État indépendant se font dans un monde fortement internationalisé.

Les indépendances deviennent de plus en plus compliquées dans un monde déjà distribué. Pour l’après guerre de 1947 aux années 1970 c’est la période de la Guerre Froide, chaque État doit donner des signaux sur la direction qu’il souhaite opter ou bien prendre une troisième voie afin d’être non-aligné.

Il est de plus en plus répandu de devenir indépendant dans un monde dominé par des blocs.

L’Inde : la marche vers l’indépendance[modifier | modifier le wikicode]

  • 1885

Cela commence tôt avec la fondation d’un petit parti politique dont sont membres des personnes très éduqués, parlant parfaitement l’anglais et participant à la vie civile ; les personnes qui ont encouragé l’institutionnalisation de ce mouvement étaient les britanniques. C’est la fondation à Bombay de l’Indian National Council qui est le Parti du Congrès.

L’Inde n’est pas un pays, on dénombre 20 unités politiques et 120 dialectes régionaux, il n’y a jamais eu d’identité commune « Inde » ; c’est la colonisation qui dans un certain sens a créée une sorte d’unité.

L’Inde est considérée par les britanniques comme un empire dans l’empire dont la reine Victoria est la première impératrice de l’Inde étant représentée par un vice-roi qui gère avec une administration assez petite car l’Inde n’est pas une colonie de peuplement

Il y a peu de britanniques, on essaie de gérer l’Inde et aussi d’autres colonies par des élites locales, c’est pourquoi on a laissé aussi cette hétérogénéité de système ancien de gouvernance de ce pays, les dignitaires locaux restent en place. C’est une surface assez fine de vraie domination étant une porte ouverte au mouvement d’indépendance.

Beaucoup d’indiens sont formés à participer à l’administration, il va même y avoir comme un gouvernement local qui va remettre en cause l’administration britannique.

Ce qui est intéressant est l’encouragement de la part des anglais d’une forme de self-government, ce n’est pas un mouvement qui vient seulement d’en haut mais se fait aussi par une mobilisation par le bas.

  • 1906

Création à Dacca de la Ligue musulmane. Réuni à Calcutta, le Parti du Congrès se prononce pour l’indépendance (svaraj). Le Dacca mouvement s’organise pour répondre à la création du Parti du Congrès mais aussi pour affirmer une identité plus religieuse que nationale.

  • 1913

L’écrivain indien Rabindranath Tagore reçoit le prix Nobel de littérature permettant de mettre en avant d’un culture qui mérite l’appréciation du monde entier, ainsi il est possible de jouer dans la cour des grands au moins culturellement.

  • 1914 – 1918

Durant la première guerre mondiale, près de 1700000 Indiens combattent dans les rangs britanniques ; ils ont combattu dans des terrains d’opération excentriques à l’Europe en Mésopotamie, en Palestine et en Afrique de l’est ; ce sont des troupes coloniales qui faisaient la partie coloniale de la première guerre mondiale.

Il y a une guerre hors de l’Europe extrêmement importante pour les peuples qui on subi cette violence mais qui ont aussi participé ; comme en Europe la guerre a créée des attentes d’être compensé.

  • 1919

Après certains gestes comme plus d’autonomie administrative locale, il y a une certaine modernisation plus équilibrées de l’impérialisme britannique mais pas la promesse d’une indépendance.

Le Government of India Act est une réforme qui étend la représentation communautaire dans les assemblées locales et créé une chambre princière consultative. Gandhi prend la tête d’une campagne de protestation contre la répression des activités « subversives ».

Gandhi a passé une grande partie de sa carrière en Afrique du sud, il y a une migration intercontinentale à l’intérieur de l’empire britannique avec une petite diaspora indienne.

Gandhi défend des indiens en Afrique du sud contre des discriminations raciales, il est très conscient de l’existence d’une hiérarchie entre les « races », il témoigne des grands conflits et en 1915 après être revenu en Inde il devient membre du Parti du Congrès avec comme idée de lutter pour l’indépendance de l’Inde.

  • Septembre 1920

Le parti du Congrès décide de lutter pour l’indépendance par des moyens non-violents. Gandhi, ce sont des mouvements qui mobilisent et rassemblent notamment la population locale. Ce n’est pas une mobilisation armée.

Gandhi lance le mouvement de non-coopération avec les autorités coloniales et de boycott du textile anglais au profit du tissu indien fait main (khadi). En même temps il lance unmouvement de reprise des techniques et des manières de produire du tissu indien par la proto-industrie locale.

Les britanniques avaient détruit une industrie locale afin de pouvoir importer leurs produits qui étaient aussi des produits d’importation des autres régions de l’empire britannique ; dans le boycott du textile il y a une réflexion intelligente pour toucher le rapport de domination mais aussi de penser l’État.

Les britanniques tentent de neutraliser Gandhi sans que cela ne fonctionne.

  • Août 1928

Gandhi transfert le leadership du parti à Nehru afin de s’intéresser à la caste des intouchable, la future nation ne doit pas faire une différence de caste, d’origine, ou de ses moyens.

La commission présidée par Motilal Nehru préconise un statut de dominion au sein de l’Empire, mais les britanniques refusent et rejettent la communauté musulmane.

  • 1930

Le poète et philosophe Mohammad Iqbal propose la création d’un État musulman séparé[3][4].[5]

  • Janvier 1937

Il y a des élections ; victorieux aux élections provinciales, le Parti du Congrès forme des gouvernements dans sept provinces sur onze ; démocratiser un empire est une bonne chose mais on donne la chance et l’occasion aux mouvements nationalistes de s’affirmer et d’avoir une légitimité par les élections.

  • Mars 1940

Dans la guerre, la nationalise indien sont critique de l’entrée de l’Inde dans la deuxième guerre, non pas qu’ils soient favorable au régime nazi, mais ils ne veulent pas servir de réservoir de ressources pour une guerre qui n’est pas leur guerre.

La Ligue musulmane adopte à Lahore une résolution sur la création d’un État musulman indépendant, le Pakistan, après le départ des britanniques.

  • Mars 1946

Le gouvernement britannique du travailliste Attlee se prononce en faveur de l’indépendance de l’Inde. Toutefois les négociations sont un échec entre le Congrès et la Ligue musulmane.

  • 1947

Indépendance de l’Inde et du Pakistan. La partition entraine des massacres de grande ampleur au cours de l’été. Nehru devient premier ministre de l’Union indienne.

Les nationalismes sont différent dans les autres colonies mais il y a des liens qu’il est possible de faire : c’est très souvent par les élites éduquées soit dans les institutions sur place créées par le colonisateur soit dans le métropole, c’est un facteur de diffusion culturelle.

Le moment wilsonien : 1918 – 1919[modifier | modifier le wikicode]

Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes est une grande promesse qui fut entendue à travers le monde.

Ho Chi Minh[modifier | modifier le wikicode]

En 1919, Ho Chi Minh est à Paris est fréquente une association nationaliste. Quand le Président Wilson fait son annonce du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, cette association publie un manifeste reprenant cet argument.

Deux ans plus tard lorsque Lénine réorganise le Kominterm, il fait des annonces pour être attractif souhaitant la création d’une lutte anti-impérialiste. Ho Chi Minh s’intéresse à la doctrine bolchéviques et devient un acteur de la lutte internationale à Paris.

Autodétermination : l’impact international d’un concept[modifier | modifier le wikicode]

Dans The Wilsonian Moment. Self-Determination and the International Origins of Anticolonial Nationalism[6], Manela analyse dans quatre régions des soulèvements, des révoltes, des revendications. Il regarde leurs énoncés, leurs références à la politique internationale est il trouve quatre fois une admiration du président Wilson et les points qui mettent en avant l’autodétermination.

Ils réduisent l’influence d’idées internationales, la circulation de textes anticoloniaux, anti-impérialistes. L’auteur focalise cette causalité multiple au moment wilsonien. C’est un texte qui donne le droit de revendiquer des droits.

Il est aussi intéressant de dire que c’est trop linéaire et américano-centrique, mais il y a déjà des mouvements locaux qui repoussent la domination coloniale tout comme des élites qui émettent des idées anti-impérialistes. Au contraire, le moment léninien est un peu sous-estimé par Manela.

Situation géopolitique : année 1930[modifier | modifier le wikicode]

La Société des Nations - atlas-historique.net

L’étendue de tous les empires s’est encore agrandie parce que comme puissance victorieuse de la première guerre mondiale, les français et les britanniques ont occupés les anciennes colonies allemandes.

Les pays du Moyen-Orient sont donnés à la gestion sous forme de mandat aux puissances coloniales, ils les gèrent comme leurs colonies. Toutefois, ces peuples ont la possibilité de revendiquer plus de droit car il y a une commission des mandats qui surveille leur bonne gestion. On a introduit une relativisation des mandats, une instance internationale contrôle les mandats. C’est un prélude à la décolonisation.

Dans les années 1920 et 1930, avec les organisations internationales qui se créent à Genève, il y a une unification du monde ainsi qu’une circulation des informations et des idées nourrissant les mouvements nationalistes.

Toutefois, dans les années 1930, les conflits entre les États autoritaires commencent à détruire le travail de la Société des Nations et bloquent les inspirations de l’indépendance dans les pays. On ne laisse pas les mouvements indépendantistes aller plus loin.

Les États qui ont une semi-autonomie peuvent devenir membre de la Société des Nations. C’est un signal aux autres pays qui veulent le même statut. Les autres pays veulent exactement la même chose essayant d’avoir la consécration par la communauté des nations.

La décolonisation dans l’après guerre : année 1940 au années 1960[modifier | modifier le wikicode]

Les étapes de la décolonisation de l’Asie[modifier | modifier le wikicode]

La décolonisation de l'Asie - atlas-historique.net

Le Vietnam et le Cambodge, de la fin de la deuxième guerre mondiale font une guerre d’indépendance. Les nationalismes se transforment en mouvements d’indépendances et en mouvements violents.

Ho Chi Minh fait d’abord au Vietnam la guerre contre les français s’achevant sur la bataille de Dien Bien Phu.

Il y a aussi les territoires énormes de l’Union Soviétique qui ne peuvent s’émanciper qu’à la fin du XXème siècle.

Le destin est intéressant est différent.

Les étapes de la décolonisation de l’Afrique[modifier | modifier le wikicode]

La décolonisation de l'Afrique - atlas-historique.net

En Afrique, la décolonisation se fait par vagues. Une année est « miraculeuse » qui est l’année 1960. L’Algérie est une partie de la France, la Troisième République est colonialiste transformant sous l’impulsion de Jules Ferry l’Algérie en département français.

Dans les années 1960, les États sont pour la décolonisation mais dans le cadre d’une vision géostratégique de la Guerre Froide.

Lorsque les français doivent quitter le Vietnam, commencent les évènements en Algérie. Ce n’est pas seulement un mouvement indépendantiste qui devient de plus en plus militant et militaire mais c’est aussi un nationalisme français soutenu par les pieds-noirs et l’armée.

Cela reste un traumatisme important. L’exportation du nationalisme provoque un renforcement du nationalisme autochtone français. Beaucoup des ex-officiers de l’Algérie cherchent des structures pour se rassembler et s’exprimer politiquement, va aussi naitre le Front National à ce moment de l’histoire en France.

La diffusion mondiale de l’État-Nation[modifier | modifier le wikicode]

Le nationalisme n’est pas simplement une exportation. Il y a des racines culturelles et propres qui mènent à des revendications mais il y a aussi de fortes inspirations. Les sources propres de ces nationalismes ont un impact majeur sur les métropoles.

C’est une histoire transnationale des nationalismes.

Anexes[modifier | modifier le wikicode]

Références[modifier | modifier le wikicode]

  1. Anne-Marie Thiesse, La création des identités nationales, Paris, Le Seuil, 1999, p. 11.
  2. Breuilly, John, ed (2013) The Oxford handbook of the history of nationalism Oxford handbooks in history. Oxford University Press, Oxford, UK. ISBN 9780199209194
  3. Annemarie Schimmel, Gabriel’s Wing – A study into the Religious Ideas of Sir Muhammad Iqbal, Lahore, Iqbal Academy Pakistan, 1989, 4e éd. (ISBN 9789694160122), p. 377
  4. Leonard S. Klein, Encyclopedia of world literature in the 20th century, vol. 2, Ungar, 1993 (ISBN 978-0-8044-3136-1), p. 452
  5. Fritz Steppat et Thomas Scheffler, Islam als Partner, Wurtzbourg, Ergon, 2001, poche (ISBN 9783899130768, LCCN 2002411088 ), p. 351
  6. The Wilsonian Moment: Self-Determination and the International Origins of Anticolonial Nationalism. New York: Oxford University Press, 2007.