Les sujets du droit international : les États

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Les sujets du droit international : les États
Professeur(s) Robert Kolb

Lectures


Le vocable « sujet » a un sens tout à fait particulier en droit. Il signifie une entité susceptible de posséder des droits et des devoirs dans un ordre juridique particulier. Ainsi, peut-on être sujet du droit suisse ou du droit international, le sujet est titulaire en fonction de l’ordre juridique.

La définition juridique de l’État

Les principaux sujets du droit international sont les États. La toute première chose à faire est de le définir parce que l’État a sa définition juridique propre. Peu importe ce que les sociologues, historiens, politologues appellent un État, en droit international, il y a une définition propre.

Par exemple, Genève est un État, mais ne l’est pas au sens du droit international, il est en fonction de l’ordre juridique suisse. Il vaut la peine d’y regarder d’un peu plus près.

L’État, au sens du droit international, se défini par quatre qualités cumulatives, une entité qui veut être un État doit posséder quatre caractéristiques :

  1. une population
  2. un territoire
  3. un gouvernement
  4. l’entité possède la souveraineté

Cela donne synthétiquement la définition suivante : l’État est une entité composée d’une population, d’un territoire, d’un gouvernement et qui est souverain.

Les trois premiers éléments ne méritent pas beaucoup de commentaires puisqu’ils sont toujours à la marge de la sociologie et du droit, car le droit se greffe sur un fait réel. Lorsqu’on décrit une population et un territoire, on navigue entre les faits sociologiques et la qualification juridique qu’on lui donne.

Le critère de la souveraineté est quant à lui une notion juridique qui mérite des commentaires plus approfondis.

Population

Un État n’est pas seulement un espace vierge comme le territoire de la Lune ou de Jupiter quoique cette planète ne soit composée que de gaz. Pour un État, il faut des personnes, c’est la base physique de l’existence d’un État.

La population n’est pas tout à chacun qui se pose sur le territoire d’un État, car à ce compte-là on a aussi des personnes qui se trouvent en Antarctique, mais qui n’est pas un État.

Ce qui compte est les personnes liées à l’État par un lien de nationalité. Il y a une population de l’État lorsqu’il y a une personne possédant la nationalité de cet État. La manière dont la nationalité est acquise ou perdue est réglée en principe par le droit interne.

Il n’y a pas de limites minimales dans la population d’un État, il n’y a pas de règle. Il existe des micro-États notamment des États insulaires qui sont menés à disparaître de par la montée des eaux.

Un cas tout à fait particulier serait celui de la cité du Vatican. Il y a des théories diverses, mais toute une multitude de personnes accepte que la cité du Vatican soit un État en vertu des traités du Latran de 1929, si c’est un État c’est un État tout particulier du point de vue de la population, car la cité du Vatican a certains passeports fonctionnels, mais n’a pas de ressortissants automatiquement propres, car chaque ressortissant a la nationalité de son pays d’origine.

Que ce soit des États multiethniques où la population est en partie nomade cela n’a pas d’influence, ce sont des faits sociologiques qui n’enlèvent pas à l’État sa population.

Territoire

L’État est constitué d’un territoire tandis que la population est la base physique de l’État, le territoire est quant à lui l’assise spatiale de l’État.

L’État se manifeste dans l’espace, il occupe une portion d’espace dans le monde. D’ailleurs, des populations qui ont subi des diasporas savent bien l’importance du territoire et l’attachement que les populations ont porté à leur territoire.

Comment le territoire se définie-t-il du point de vue juridique ?

Il faut d’abord disposer d’une erreur fréquente qui est de penser que l’espace est quelque chose de plat. L’espace, donc le territoire de l’État est un espace tridimensionnel à savoir la dimension plate et tout ce qui est dans les airs et dans le sous-sol.

Si l’espace comporte la dimension plate et verticale que comporte-t-il exactement dans la dimension plate et verticale ?

Pour ce qui est de la dimension plate, le territoire de l’État comporte le territoire continental, à savoir celui sur lequel on peut marcher y compris les lacs et les rivières, mais aussi les eaux intérieures comme, par exemple, les ports ainsi que la mer territoriale qui peut s’étendre selon le droit de la mer et la convention de 1982 sur le droit de la mer jusqu’à 12000 marins à partir des lignes de basse marré.

Tout ce qui se passe dans ces douze milles marins se passe sur le territoire de l’État, mais des navires peuvent transiter y compris les navires de guerre en période de paix qui doivent s’annoncer tandis que les sous-marins militaires doivent venir en surface et border le pavillon.

Au-delà de la mer territoriale, le territoire s’arrête. Si l’État côtier à d’autres zones maritimes, cela ne constitue pas son territoire, ce sont les portions de mer dans lesquels il a certains droits particuliers à savoir la zone contiguë à partir de 12000 marins c’est-à-dire 12000 de plus soit 24000 marins. Les zones économiques exclusives donnent lieu à certains droits à savoir d’explorer et d’exploiter les ressources, aucun autre État ne peut y pratiquer des activités.

Toutefois sur ces zones les droits sont limités, les États étrangers ont certains droits sur la zone économique exclusive en dehors de l’exploitation économique.

Les frontières s’arrêtent aux frontières du territoire soit aux frontières terrestres et à la mer territoriale. Quant aux deux dimensions verticales, il ne faut pas perdre de temps à les définir.

La question de savoir jusqu’où s’étend la frontière de l’État verticalement ne s’est jamais avérée est nécessaire à être déterminé. Dans la pratique, toute activité qui suppose l’air afin que des moyens de locomotions aériens puissent circuler, dans tout espace où il y a des activités d’avion, c’est le territoire de l’État sous-jacent qui prévaut.

Tout ce qui n’est pas basé sur l’existence de l’air comme moyen de circulation, à savoir l’orbite la plus basse des satellites, l’espace extra-atmosphérique forment est un espace commun aux États est il n’y a pas de souveraineté.

Il est évident que l’État peut exploiter ses ressources minérales situées dans le sous-sol, on n’a jamais eu besoin de se demander jusqu’à quel point on peut aller, car certaines limites ne peuvent pas être atteintes. En réalité, la souveraineté territoriale en dessous du territoire va aussi loin que l’État peut exister théoriquement.

On peut avoir des micro-États très exigus en kilomètres carrés, il n’y a pas de taille minimale. La cité du Vatican est un sujet séparé du Saint-Siège, le Saint-Siège est indubitablement un sujet de droit international.

Un État peut avoir des enclaves au sein d’un État étranger comme le Portugal en Inde jusqu’en 1962 – 1963, même en Suisse des cantons ont des enclaves dans d’autres cantons.

Les frontières du territoire ne doivent pas être totalement et définitivement définies. Autrement dit, des disputes sur l’étendue du territoire ou sur l’emplacement de certaines frontières ne font pas en sorte que certains États ne possèdent pas un territoire, il suffit que l’État exerce son autorité effective sur un territoire du globe même si ses frontières sont contestées.

Israël a un territoire sur lequel il applique sa puissance publique même si presque toutes ses frontières sont contestées.

Il ne s'agit pas de territoire, lorsqu'on parle d'un espace artificiellement créé comme, par exemple, les plateformes maritimes pour pétrole qui ont un régime particulier.

Gouvernement

Il faut un gouvernement effectif et exclusif. Ces mots ont leurs sens, le mot effectivement à son sens, il faut que le gouvernement exerce les fonctions étatiques et il doit être exclusive cela veut dire que c’est ce gouvernement et lui seul qui exerce les fonctions étatiques excluant tout autre État.

Quels ont les fonctions étatiques ?

Les fonctions étatiques centrales : taxes, police, tribunaux, sécurité extérieure, registres civils, etc. ce sont les prérogatives de puissance publique qu’exerce le gouvernement.

Parfois, il peut être douteux si un gouvernement suffisamment effectif existe et ce doute peut se cristalliser dans des directions différentes. Ainsi, il a pu être douteux qu’il existe un gouvernement lorsqu’il s’agissait de territoires peuplés de tribus qui se regroupaient lors de conférences à travers leurs chefs et la question était de savoir si cela formait un gouvernement suffisant.

Dans la question du Sahara occidental[1] il se posait la question de savoir si les tribus au moment de la colonisation et encore après qui étaient sur ce territoire formaient un gouvernement ou non. La Cour s’est débattue avec la question, car on ne veut pas calibrer sur le territoire africain des modèles occidentaux et d’autre part le gouvernement a une définition propre juridique.

La Cour a dégagé dans le paragraphe 149[2] le critère qu’il faille des organes supérieurs communs afin d’avoir des gouvernements, une simple conférence ne suffit pas, il faut des organes supérieurs communs.

Quelles sont les conséquences de la situation ?

Dans le cas des failing-states, le gouvernement s’est effondré, il n’y a plus de gouvernement comme ce fut le cas en Somalie.

Le droit international distingue de manière très nette entre la formation d’un État nouveau et le maintien d’un État constitué.

Pour le maintien d’un gouvernement, il faut un gouvernement même s’il est difficile parfois de déterminer si le gouvernement est effectif, car le gouvernement peut imposer son autorité de façon transitoire.

Lorsqu’il s’agit du maintien d’un État déjà constitué, s’il y a une population, un État et pas de gouvernement, cet argument n’est pas soutenu ; on maintient l’État contre « vents et marées ». La Somalie avait son État aux Nations Unies dans les années 1990.

Pourquoi maintient-on un État ?

Si du point de la vue juridique on accepte l’argument qu’un État n’existe plus parce que le gouvernement s’est effondré alors le territoire deviendrait un territoire sans maitre et il serait accaparé par le premier venant.

On ne le veut pas en vertu du principe d’autodétermination des peuples qui s’impose dans le droit moderne, c’est cette fiction qui prédomine, car on ne souhaite pas que le territoire devienne un territoire sans maitre soumis à l’appropriation.

Le type de gouvernement est traditionnellement indiffèrent au droit international général, qu’on soit une démocratie, une dictature, une royauté, une théocratie, etc. cela est une affaire intérieure et cela n’a aucune incidence pour son existence. En matière des droits de l’homme, la distinction est constante.

La souveraineté du point de vue du droit international

On ne parlera que de la souveraineté au sens juridique du terme, on peut utiliser le mot « souveraineté » dans toute une autre série de sciences et avec des connotations différentes. Nous allons seulement parler du sens juridique que revêt ce terme.

En droit international, la souveraineté est le pouvoir de décision ultime, c’est le pouvoir de décider en dernier ressort.

En d’autres termes, c’est le fait que relativement à une compétence, il n’y ait pas d’instances humaines supérieures à « nous », si tel est le cas on est souverain. Il n’y a pas de recours, un organe, une instance d’humains qui ne soit supérieure et qui attrait vers lui la décision. S’il y a quelqu’un de supérieur, c’est lui le souverain.

Il n’y a pas d’organes ou d’instances humaines supérieures. La souveraineté porte uniquement sur le fait de décider, il faut considérer si quelqu’un d’autre peut décider à sa place, c’est « quelqu’un » de supérieur qui décide.

La souveraineté est nécessaire et compatible au droit international. Ce n’est pas parce qu’un État est souverain qu’il n’est pas soumis au droit international, l’État est un ordre normatif, c’est l’État lui-même qui décide d‘appliquer le droit international, s’il l’applique ou le méconnait.

La souveraineté est compatible avec l’existence d’un ordre juridique supérieure, car c’est le droit international lui-même qui reconnaît la souveraineté des États et l’organise. Ce serait contradictoire de vouloir affranchir la souveraineté du droit international.

Toutefois cela ne signifie pas qu’on est libre de méconnaitre le droit international, car cela signifierait qu’il n’est pas contraignant, il reste simplement le pouvoir de fait de violer le droit international.

Certains auteurs récusent ce terme, car ils estiment que ce terme a été trop abusé dans le passé alors ils ont proposé une autre conceptualisation, c’est l’École de Vienne avec Hans Kelsen.

L’État a une immédiateté internationale. Cela veut donc dire que l’État au sens du droit international n’est soumis qu’au droit international et à rien d’autre il n’y a rien entre l’État et le droit international, il n’est soumis à rien d’autre que le droit international. On retrouve l’idée que personne ne décide à la place d’un autre, la seule chose à laquelle on est soumis est le droit supérieur.

L’image de l’immédiateté soumise qu’au droit international explique aussi pourquoi un État fédéré comme le canton de Genève est considéré comme un État au sens du droit fédéral suisse parce qu’il possède une population, un territoire, et un gouvernement, mais il n’est pas un État au sens du droit international parce qu’entre Genève et le droit international il y a quelque chose qui est le droit fédéral, du coup Genève n’est pas soumise qu’au droit international, mais aussi au droit fédéral. En ce sens, Genève n’est pas souveraine et donc elle n’est pas un État au sens du droit international, mais un État au sens du droit suisse par une longue tradition.

En Suisse, on dit que les cantons sont souverains. C’est un concept de souveraineté du droit fédéral suisse. Il faut garder l’idée que la souveraineté est le pouvoir de décision ultime, mais pas l’affranchissement par rapport à un ordre juridique supérieur, en même temps si on peut décider en dernier ressort alors on est souverain.

Lorsque l’État est constitué, on maintient par fiction l’existence de l’État même si le gouvernement est en défaillance pendant un certain laps de temps tant que l’État n’est pas dissout.

La même chose n’est évidemment pas vraie pour le territoire et la population, un État qui est sans territoire ni population alors s’éteint de la même manière que s’il est dissout comme, par exemple, ce fut le cas de la Yougoslavie.

La fiction de maintien de l’État est uniquement dans le cas où l’État est temporairement défaillant.

Il peut arriver dans un État sans fonctions gouvernementales qu’on envoie une administration civile internationale des Nations Unies, toutefois en aucun cas cette administration est souveraine sur le territoire, l’ONU n’acquiert pas des territoires, mais les administres afin de le rendre. La politique des Nations Unies n’est jamais de vouloir rester très longtemps, car un gouvernement pourrait se défausser sur les Nations Unies.

Dans la souveraineté il y a encore certains points qu’on peut ajouté dont certains sont assez épineux.

Le degré d’indépendance que la souveraineté suppose

La souveraineté est le pouvoir de décider en dernier ressort sur les questions qui portent sur les prérogatives de l’État, mais quel est le degré d’indépendance ?

Cela soulève la question du degré d’indépendance, par exemple il y a des cas extrêmes ou l’indépendance fait totalement défaut comme dans le cas des États fantoches qui sont des États purement télécommandés, on établit une façade de gouvernement indépendant, mais en réalité ce gouvernement prétendument indépendant et télécommandé par un autre.

L’exemple classique est l’État du Mandchoukouo créé en 1932 par le japonais sur la Mandchourie, mais sous allégeance chinoise. Cet État n’avait absolument rien d’indépendant. Un tel État n’est pas un État au sens du droit international, il lui manque la souveraineté, le pouvoir de décision ultime lui fait défaut.

Mis à part ces cas extrêmes la pratique est assez libérale, elle ne demande pas un très grand degré d’indépendance afin qu’existe un État souverain et en sont la preuve les zones d’influence de l’URSS en Europe de l’Est. Ces États pouvaient décider sur une toute série de questions de manière autonome, mais sur toute une autre série ils pouvaient décider de façon autonome s’ils étaient prêts à voir débarquer les chars soviétiques.

La pratique s’est orientée dans un sens très libéral, il suffit s’avoir un minimum de décisions automnes soit le minimum de pouvoir d’indépendance qui est celui qu’on n’a pas quand on est un État fantoche et plus particulier une « entité fantoche » puisque ce n’est justement pas un État. Pour tout État non télécommandé, on considère que c’est un État.

Une autre question liée à l’indépendance et à la souveraineté est qu’il faille une volonté d’être indépendant et souverain afin d’être indépendant

Il arrive parfois qu’une entité, en tout cas pendant longtemps, ne se considère pas comme un État indépendant, mais se considère comme une partie d’un territoire ou d’un État existant avec le gouvernement légitime comme c’est le cas de la Chine continentale et Taïwan. La Chine nationale considère qu’ils ne forment pas un État séparé même s’ils le sont ; on considérait ce problème comme un problème de légitimité de gouvernement.

Il y a cette question de légitimée du gouvernement qui vient se superposer aux autres questions, il peut arriver qu’un État ne puisse être considéré comme un État souverain s’il ne le fait valoir lui-même.

Ensuite, il y a le problème des intégrations fédérales

Il y a des ensembles qui s’intègrent peu un peu comme ce fut le cas de la Suisse. Le processus fédératif pose une question de savoir que lorsque des entités se rapprochent restent-elles indépendantes ; ils forment des États au sens du droit international, mais à partir d’un certain moment on bascule vers l’État fédéral et il peut être difficile de déterminer la souveraineté ; la souveraineté peut se perdre par étapes, elle peut se fragmenter, le pouvoir de décision peut se perdre progressivement.

Si l’Union européenne doit s’intégrer, il y aura des transferts vers Bruxelles. Le processus d’intégration met à nu que la souveraineté peut exister par degré dans le sens où elle est peu à peu cédée. Cela soulève une question de degré. Les grandes décisions en Europe relèvent des États nationaux dès lors on ne peut douter qu’ils ne soient des États souverains.

Du point de vue juridique la souveraineté est vraiment chez elle en conjonction avec le territoire, cela veut dire que c’est surtout sur son territoire que l’État a sa souveraineté

La souveraineté touche à son apogée, « je dicte pour ce qui se passe sur mon territoire précisément parce que c’est mon territoire ».

Tout se renverse en revanche du point de vue extraterritorial, la souveraineté est en manque de justification, pour faire valoir des compétences extraterritoriales il faut des titres plus spécifiques, il ne suffit pas de faire valoir sa souveraineté.

Il est des cas où on peut faire valoir sa souveraineté.

Imagions des navires qui battent pavillon suisse en haute-mer, si on veut faire des actes de souveraineté vis-à-vis de ce navire en antarctique on pourrait le faire c’est extraterritorial, mais il y a des titres reconnus. Si on est dans un autre État, la souveraineté fléchie au profit de l’autre, ce serait nier la souveraineté de l’autre, si on fait des actes de souveraineté sur un autre État on ne lui laisse pas le pouvoir de décision ultime, on décide à sa place.

Dernière remarque sur la souveraineté, c’est une remarque sur la terminologie, il est vrai que la terminologie n’est pas entièrement fixée.

La conclusion d’un accord c’est-à-dire un traité est toujours un acte de souveraineté

On est libre de le conclure ou de ne pas le conclure, on peut aussi le moduler à travers des réserves. Ensuite, on ratifie ou on ne ratifie pas, c’est ici que s’exerce la souveraineté, il y a la décision ultime d’accepter ou non ces normes ; on décide en dernier ressort.

Une fois accepté on n’est pas plus aussi libre juridiquement qu’avant, on a des droits, mais aussi des obligations qu’on doit à l’autre État ; on dira que les positions subjectives de cet État ont été augmentées.

Cela limite sa liberté d’action, incline sa liberté d’action à une certaine direction, cela n’affecte pas sa souveraineté, il n’est pas moins souverain puisqu’il a accepté le traité. Il y a la question de savoir si on accepte oui ou non le traité qui est une question de souveraineté et est une liberté de décision de dernier ressort, ensuite il y a la liberté d’action qu’on réduit d’un côté et augmente de l’autre, mais n’affecte pas la souveraineté, car on a été libre de le choisir.

Les pouvoirs

Au fond le terme « compétence » est meilleur même en français, mais en anglais on utilise le terme « power » donc le terme « pouvoir » est aussi un pont par rapport au vocabulaire anglo-saxon.

Toutefois selon les auteurs on peut faire toute une série de distinctions entre « pouvoir » et « compétence ». Nous allons considérer que chacun de ces deux termes sont équivalent.

La souveraineté n’est pas qu’un pouvoir de décider de manière ultime, elle a aussi pour corolaire toute une série de conséquences particulières. La souveraineté forme des normes de droit international, la souveraineté en action c’est le pouvoir de décider, la souveraineté est aussi une norme qui garantit à l’État ce pouvoir de décision ultime.

Cette norme de la souveraineté donne lieu à toute une série de concrétisations normatives soit d’autres normes qui se greffent à la souveraineté comme les immunités de l’État ; l’État jouit d’immunités par rapport à la juridiction civile et pénale d’autres États. On ne peut astreindre le président français à un tribunal suisse. Un autre exemple est la protection des affaires intérieures soit la non-intervention dans les affaires intérieures qui protège le pouvoir de décider indépendamment et de conduire une politique qui soit propre.

Les compétences aussi découlent de la souveraineté, l’État possède des compétences par cela qu’il est souverain, l’État a ses compétences originellement, il ne les acquiert pas parce qu’on lui a donné.

Les Nations Unies n’ont aucun pouvoir sur Genève, tous les pouvoirs des Nations Unies ressortent de la Charte de Nations Unies, pour qu’elles fassent quelqu’un chose il faut que cela leur soit reconnu dans la Charte.

L’État peut automatiquement agir, il n’a pas besoin qu’on lui confère une compétence pour la posséder, il la possède originellement. L’État possède la compétence originelle qui est inhérente à la souveraineté, ainsi la souveraineté se prolonge dans un pouvoir d’action très concret, le pouvoir de décider en dernier ressort se concrétise dans les diverses actions de l’État.

Quelles sont les compétences que possède un État ?

Il y a fondamentalement trois types de compétences, mais elles ne sont pas toutes de première importance.

  • compétences territoriales : c’est la compétence de faire des actions sur son territoire.
  • compétences relatives aux personnes : la compétence de faire des choses par rapport à ses ressortissants.
  • compétences relatives aux engins : compétence exercée sur les navires qui battent son pavillon ou encore les engins extra-atmosphériques.

On peut se pose la question de savoir qu’est-ce qu’une compétence ?

La compétence est tout simplement un pouvoir juridique. Il y a un pouvoir qui est reconnu par une norme de droit d’agir dans un certain sens, c’est une compétence. On parle surtout de « compétences » dans le domaine public, on parlera de « pouvoirs » dans un sens plus neutre.

C’est un pouvoir de faire quelque chose reconnu par le droit ; on peut faire quelque chose, mais ce pouvoir est reconnu par une norme juridique.


Compétence territoriale

Parfois, on dit souveraineté territoriale. Cette compétence territoriale comporte deux volets dont le deuxième et plus important :

  • la plénitude
  • l’exclusivité

La compétence territoriale se distingue par sa plénitude et son exclusivité. La plénitude est tournée vers l’intérieur de l’État, l’exclusivité et tournée vers les autres États soit l’extérieur de l’État.

Qu’est-ce que la plénitude ?

C’est une présomption juridique que l’État possède toute compétence de faire n’importe quel acte sur son territoire à moins que le droit international ne l’interdise. On présume que l’État possède toutes les compétences sur son territoire. C‘est ce qui notamment distingue l’État d’une organisation internationale. L’État possède automatiquement toutes les compétences sur son territoire, il ne faut pas lui donner un pouvoir, il le possède déjà, il ne peut tout au plus que le limiter par la suite.

Au contraire une organisation internationale est basée sur le principe de spécialité, elle ne possède que des compétences qui lui sont attribuées.

Des compétences nouvelles acquises par l’État en matière de nouvelles technologies, il est évident que l’État a automatiquement le pouvoir de règlement, de prendre des mesures administratives et de soumettre les activés qui se passent sur son territoire. Ils ont toutes les compétences sauf celles interdites par le droit international et donc qui sont les compétences auxquels les États ont accepté de renoncer.

Qu’est-ce l’exclusivité ?

C’est un point très important, une pièce maitresse du droit international public ; c’est le fait dont l’État sur son territoire est le seul à l’exclusion de tous les autres qui peut faire acte de puissance publique sur ce territoire-là. En Suisse ce n’est que la Suisse qui peut faire des actes de puissance publique à l’exclusion de tout autre État.

Cette règle de l’imperméabilité du territoire est évidemment tout à fait fondamentale, car elle permet d’expliquer et de délimiter la souveraineté de l’un par rapport à la compétence et la souveraineté de l’autre.

Le droit international moderne est basé sur les États territoriaux, dès lors on peut faire des actes de souveraineté sur son territoire, mais on doit s’abstenir de le faire sur d’autres. C’est un principe de base, la délimitation des sphères de chacun, la souveraineté sur son territoire et non pas sur celui des autres et certains droits sur les espaces communs.

La règle est en effet très importante et c’est la raison pourquoi on trouve dans la jurisprudence des prises de positions très fortes ; la Cour Internationale de Justice a pu insister plusieurs fois sur cette règle.

Dans l’affaire du Lotus de 1927, un navire portant ce nom, série A numéro X page 18[3], « hors la limitation primordiale qu’impose le droit international à l’État est celle d’exclure – sauf l’existence d’une règle permissive contraire – tout exercice de sa puissance sur le territoire d’un autre État. Dans ce sens, la juridiction est certainement territoriale ; elle ne pourrait être exercée hors du territoire, sinon en vertu d’une règle permissive découlant du droit international coutumier ou d’une convention ».

La Cour actuelle dans l’affaire du détroit de Corfou[4][5] à la page 35 de 1949 dit qu’ « entre États indépendants, le respect de la souveraineté territoriale est l’une des bases essentielles des rapports internationaux et le droit international exige aussi le respect de l’intégrité politique »

Il faut voir jusqu’où cela porte par car principe a une portée d’une importance et d’une densité surprenante.

Il y a des activités qui violent l’exclusivité de la compétence territoriale de l’État

Enlèvement sur le territoire étranger

Un État envoie des agents sur un territoire d’un autre État pour y enlever une personne et l’amener sur le territoire de l’État commanditaire. L’affaire Eichmann est la plus célèbre lorsqu’Israël a envoyé des agents sur le territoire de l’Argentine afin d’y capturer et d’enlever Eichmann jugé au district de Jérusalem.

Dans ce cas, il y avait évidemment une violation de la souveraine territoriale de l’Argentine si bien que le Conseil de Sécurité a constaté cette violation et Israël a présenté des excuses ; l’Argentin n’a pas insisté à la vue des antécédents de Eichmann.

Savoir si une personne enlevée peut être jugée sur le territoire où il a été amené dépend du droit interne, il y a des États où ce n’est pas possible, car on refuse de donner à la police la possibilité de faire des arrestations arbitraires, dans toute une série d’autres États le droit interne permet de juger des personnes capturées par des méthodes contraires au droit international.

Mainœuvres frauduleuses pour enlever un individu afin de contourner les mesures d’extradition

Des agents de l’État allemand sous couvert peuvent inviter un allemand à Zurich pour l’arrêter. Ce genre de mainœuvres frauduleuse a été condamné plusieurs fois. Ce type de violation de la souveraineté territoriale se fait par le fait de contourner les mesures d’extradition, par des mainœuvres frauduleuses on contourne la possibilité de décider en dernière instance.

Dans l’Arrêt du Tribunal fédéral ATF 117 I 337 il est stipulé : « la règle de la bonne foi interdit à un État d'user de contrainte ou d'astuce pour s'emparer d'une personne qu'il recherche et qui séjourne sur le territoire d'un autre État où elle bénéficierait de l'immunité extraditionnelle. Est prohibée toute machination abusive visant à soustraire un individu à cette immunité pour l'amener à se rendre sur le territoire de l'État poursuivant ou sur le territoire d'un autre État qui serait en principe obligé de l'extrader. L'État requis sur le territoire duquel un individu a été attiré par de tels procédés a le devoir de ne pas les cautionner en accueillant une demande d'extradition qui lui serait adressée par l'État fautif »[6].

Enquêtes et toutes formes de prélèvements de preuves

Il arrive que certaines personnes soient directement des agents d’un État étranger ou parfois des personnes n’ayant pas un lien direct avec un État étranger comme un avocat qui fait des actes réservés au cadre de l’entraide judiciaire.

Concernant les agents envoyés à l’étranger, en Suisse, il est arrivé à l’époque de Mitterrand de voir des fuites de capitaux massifs en provenance de France ; il y eut des enquêtes de douaniers en Suisse afin de découvrir des comptes bancaires de ressortissants français, mais cela était une violation envers la Suisse de sa compétence de territorialité, car la France s’était adjugé des compétences d’extraterritorialité.

Dans le cadre d’un avocat que l’on retrouve dans un arrêt fédéral, un certain H contre Zurich avait fait des enquêtes et relevé des preuves dans le cadre d’une enquête en Australie. Cet avocat zurichois a été condamné et confirmé par le Tribunal fédéral sur la base du Code pénal fédéral parce que ses actes avaient la nature d’actes d’entraide judiciaire donc de puissance publique au profit d’un État étranger.

Ces actes sont réservés aux autorités d’entraide judiciaire, l’État étranger doit faire une demande afin qu’elle fasse une enquête et relève des preuves dans le cadre d’une entraide judiciaire, le cas contraire relève d’une violation de la souveraineté de la Confédération helvétique ce qui est punissable par le code fédéral.

Envoie par la poste de documents officiels à l’étranger

Envoyer des documents officiels comme un courrier d’obligation de comparaitre devant un tribunal pénal ou civil est un acte de puissance publique, on ne peut le faire en envoyant une lettre à l’étranger sauf s’il y a une autorisation à travers des accords, là encore, de tels envois de tribunaux se font à travers les organes d’entraide judiciaire. Tout cela est fait à travers les organes étatiques.

Exercice du droit de vote à l’étranger et vote par correspondance

Si cela est par correspondance, cela relève de l’envoi officiel de documents à l’étranger, toutefois les votes peuvent être faits dans les ambassades ou consulats, voter est un acte de puissance publique, ce n’est consenti que dans le cas d’accords.

En 1989, la pratique de l’État Suisse a changée en admettant qu’il y ait un vote dans les ambassades. L’ambassade ne relève pas du territoire étranger, l’ambassade est sur le territoire de l’État hôte, toutefois il y a des immunités, donc le territoire d’une ambassade relève du pays hôte.

La Suisse craignait qu’ayant beaucoup d’étrangers il y ait des campagnes assez « allumées » est des violences sur son territoire en particulier dans le cas de la guerre froide ; dans une déclaration du 12 avril 1989, la Confédération helvétique a motivé le changement de pratique et s’est réservé de revenir à cette pratique.

Prélèvement d’impôts

Prélever des impôts est un acte de puissance publique. On ne peut prélever l’impôt sur un territoire étranger par exemple à travers une ambassade.

Il y eut un contentieux entre les autorités fédérales et l’ambassade de Bosnie-Herzégovine. De 1992 à 1995, il y eut la guerre de Bosnie, il se trouvait que la représentation diplomatique de la Bosnie-Herzégovine a prélevé un impôt de guerre sur les ressortissants yougoslaves en Suisse.

La Bosnie a trouvé qu’il était une bonne idée afin de financer l’effort de guerre de prélever un impôt en Suisse sur les ressortissants bosniaques. Or les autorités fédérales eurent vent de cette pratique envoyant une lettre à l’ambassade déclarant que ce prélèvement d’impôts était illicite.

Quid de la protection de ressortissant au sens plus large du terme, c’est-à-dire d’un service quasi consulaire qui conseille ses ressortissants et promeut sa culture ?

Il y avait de tels centres conformément aux droits italiens d’une loi de 1985. L’Italie voulait maintenir le contact avec ses ressortissants.

Est-ce que ces comités d’immigrations italiens étaient contraires à l’exclusivité de la souveraineté territoriale helvétique ?

La conclusion a été que ces comités d’immigration n’étaient pas contraires à l’intégrité de la souveraineté Suisse puisqu’il ne s’agissait pas d’activités de puissance publique, conseiller des ressortissants n’est pas un acte de puissance publique.

L’intégrité et l’exclusivité territoriale ne sont pas simplement une question d’invasion par les forces militaires, mais c’est une question beaucoup plus subtile ; les États sont soucieux sur la souveraineté territoriale et suspectent à chaque fois qu’un État étranger veut faire un acte de puissance publique sur son territoire avec, éventuellement, des pratiques répréhensibles qui peuvent mettre en danger son autorité.

En même temps, un principe aussi rigide d’imperméabilité du territoire n’a jamais été praticable et l’est encore moins aujourd’hui dans une période de globalisation ; toutefois, il y a toute une série d’exceptions :

Exceptions basées sur des traités ou des accords

Les traités sont des textes écrits alors qu’un accord n’est pas nécessairement écrit. Il y a toute une série d’accords qui prévoit des exceptions et notamment des exceptions massives à l’intégrité territoriale et l’exclusivité de la compétence territoriale comme :

  • bases militaires

Les bases militaires dans le monde qui sont basées parfois sur des accords en stipulant la bonne volonté de l’adversaire par des pressions plus ou moins douces ou par des accords conclus tout à fait librement comme le Japon dans les années 1950 entourées alors par des États communistes à l’exception de la Chine nationaliste qui ne faisait pas le poids du point de vue militaire.

  • accords douaniers

En 1923, il y eut un accord entre la Suisse et le Liechtenstein dans le domaine des activités douanières, le Liechtenstein a dévolu les douanes à la Suisse qui fait des actes de souveraineté sur un autre territoire ne remettant pas en cause la souveraineté territoriale du Liechtenstein.

Permission ad-hoc en dehors d’un accord ou d’un traité

Ce sont des permissions particulières pour que des autorités étrangères puissent faire certains actes sur le territoire d’un État. Parfois, les États accordent des autorisations à des enquêteurs étrangers en dehors des accords d’entraide. Il peut y avoir des accords particuliers afin que des juges de la Cour Internationale de Justice puissent venir dans le cadre de leurs fonctions.

La dernière fois que c’est arrivé, c’était en 1997 lorsque la Cour s’est déplacée concernant le projet hydraulique entre la Hongrie et la Slovaquie[7]. Le litige porté a permis à la Cour de descendre sur les lieux pour constater et s’informer.

Les juges de la Cour Internationale sont des agents des Nations Unies ne pouvant faire des actes d’autorité hors de ce cadre, et la Hongrie et la Slovaquie les avaient invités à faire leur constat.

Exception à la coutume du droit international général

  • l’occupation de guerre

Il arrive lors d’un conflit armé international que l’armée d’un État progresse alors que l’armée d’un autre État recule à cause fortunes de la guerre. L’armée qui progresse, progresse sur le territoire de l’ennemie qu’elle va contrôler en faisant du territoire un territoire occupé qui est contrôlé par des conventions. Lors d’une période de conflit armé, il n’y a pas seulement d’occupation d’un territoire si on s’en trouve de position de fait l’occuper, mais on en a le devoir de l’administrer, on ne peut refuser son de devoir de force occupante, on est l’unique puissance publique sur le territoire.

L’occupation de guerre est l’une des situations prévues où l’État a le droit et le devoir d’administrer à la place du souverain un territoire qui ne lui appartient pas.

  • les services diplomatiques et consulaires

Chaque État a des ambassades et consulats à l’étranger, les ambassades, surtout, font des actes de puissance publique.

Ces actes sont faits sur le territoire d’un État étranger, les locaux de l’ambassade restent sur le territoire hôte.

En vertu du droit international coutumier ancien, codifié dans les conventions de Vienne sur les relations diplomatiques et consulaires, les agents de l’État d’envoie qui opèrent dans le cadre de missions diplomatiques voire consulaires peuvent faire sur l’État étranger tous les actes de puissance publique consentis par le droit international.

L’espionnage n’en fait pas partie. N’en font pas partie une série d’autres actes comme ce fut le cas de l’ambassade du Maroc qui avait prononcé un divorce entre ressortissants marocains. Il s’agissait de savoir si ce divorce pouvait être reconnu en Suisse ; le tribunal fédéral a refusé, car en droit Suisse, selon l’ordre public suisse, un divorce ne peut être prononcé par une ambassade, mais uniquement par un tribunal c’est pourquoi ce divorce ne peut être prononcé en Suisse et au-delà de ce qui est permis par la fonction diplomatique avec une violation de la souveraineté.

  • organisations internationales

Ce ne sont pas des États, mais elles font des actes de puissance publique, or, bien entendu, ces organisations internationales en vertu du droit international coutumier et des accords de siège ont le pouvoir de faire tous les actes qui leur sont reconnus soit en vertu du droit international ou des accords de siège.

Une organisation internationale n’est pas nécessairement une organisation intergouvernementale, cela peut être aussi un organe international quelconque. Tous ces organes font des actes de puissance publique.

Exceptions basées sur la coutume bilatérale

Dans le cas des enclaves le droit de passage est basé sur une coutume bilatérale impliquant qu’on doit passer sur le territoire d’un État pour rejoindre ses enclaves.

Le principe de l’exclusivité territoriale est bien assis et il y a toute une série d’exceptions, une grande masse d’accords et d’exceptions plus ou moins large, ce n’est pas en violation de la souveraineté, mais cela est accepté.

Compétence personnelle

Qu’entend-on par « compétence personnelle » ?

C’est la compétence qu’a un État sur l’ensemble de ses citoyens. Peu importe où se trouvent les ressortissants, il y a une compétence personnelle de l’État, sur son État la compétence personnelle se confond à sa compétence territoriale, un État peut faire tout un tas de choses sur son territoire.

La compétence personnelle a sa valeur propre lorsque les ressortissants ne se trouvent pas sur le territoire de l’État, mais sur le territoire d‘un autre État ou des espaces communs ; il y a des compétences territoriales reconnues, un Suisse reste toujours soumis au droit suisse où qu’il soit dans le monde, cela s’appelle la compétence personnelle. C’est dans le cas de ressortissants à l’étranger qu’on perçoit la compétence personnelle. À cet égard, il faut distinguer selon deux modalités de la « compétence » :

  • compétence normative : compétence d’édicter des règles.
  • compétence exécutive : compétence de faire exécuter des règles.

En anglais, on a des termes consacrés pour cela « juridiction to prescrive » et « juridiction to enforce ».

On doit faire la distinction parce que lorsque les ressortissants sont à l’étranger ils sont soumis à la compétence normative de l‘État de l’État hôte, toutefois la Suisse peut édicter des règles pour ses ressortissants même s’ils sont à l’étranger.

Lorsque le ressortissant est à l‘étranger s’il se trouve sur le territoire d’un autre État, la compétence de l’État d’origine de faire exécuter la règle qu’il impose à son ressortissant et mise entre parenthèses, on ne peut prendre la personne afin de la ramener dans son pays d’origine, car cela serait une violation de l’exclusivité de la compétence territoriale de l’autre État.

On peut demander l’extradition pour des délits et des crimes sous certaines conditions, on peut aussi faire appliquer les lois donc les exécuter si le ressortissant se trouve sur un navire battant pavillon national, en haute-mer ou en antarctique.

Dans les espaces communs, on peut faire appliquer la loi, la compétence exécutive persiste sur les espaces communs.

Quid des ressortissants, car la compétence n’est que sur les personnes ayant la nationalité ?

Le droit international ne connaît pas de règles sur l’attribution de la nationalité, il laisse cette question au droit interne, il faut déterminer en vertu du droit international; mais le droit international connaît quand même des limites pour ce qui est des nationalités qu’il est prêt à reconnaitre.

Le droit international limite, mais n’a pas en premier lieu des règles.

Les règles les plus fréquentes qui encourent dans les différents États est une pratique internationale et reconnue par l’ensemble des États sont :

Acquisition de la nationalité à la naissance, on distingue deux systèmes

  • droit du sang
  • droit du sol

Ces termes dénotent l’acquisition de la nationalité par la filiation dans le cas du droit du sang, l’enfant reçoit la nationalité de ses parents, et le droit du sol signifie qu’un enfant qui née sur le territoire de parents domiciliés y acquiert la nationalité de cet État.

Motifs d‘acquisition ou de perte par la suite

Il y a là aussi des choses récurrentes comme la naturalisation lorsqu’on remplit certaines conditions de rattachement d’un État, ou si on a fait certaines choses ou avoir prêté un service à un État sont des motifs de naturalisation qui relèvent du droit interne.

Parfois il y a aussi des motifs qui sont beaucoup plus particuliers, certains États à un moment donné de leur histoire ont oublié l’acquisition de la nationalité ; dans les années 1920 au Mexique si on achetait un bien-fonds on obtenait de facto la nationalité mexicaine, Porfirio Diaz dit « pauvre Mexique, si loin de dieu si prêt des États-Unis"[8][9]. Cette caractéristique fut finalement abandonnée.

Il faut imaginer au-delà, parfois dans le monde il y a des choses qu’on ne peut penser.

Concernant les limites que le droit international propose à la nationalité et ce que signifie les limites à la nationalité

Il y a des cas d’attribution d’une nationalité d’après le droit interne peuvent paraitres abusives ou pas reconnus internationalement comme si par exemple la Russie estime que l’ensemble de la population mondiale était ses ressortissants en envoyant des feuilles d’impositions à tout le monde.

Il y a des disputes réelles sur des nationalités abordées de manière « bizarre » ; l’un des cas célèbres était un cas qui concernait presque la Suisse à savoir le Liechtenstein : l’affaire Nottebohm, cette affaire fut jugée par la Cour Internationale de Justice en 1950[10][11][12].

Un ressortissant allemand a élu domicile depuis un certain temps et établie son commerce au Guatemala ; lorsque la Seconde guerre mondiale a débuté, le Guatemala a un moment donné est entré en guerre.

Nottebohm prévoyait que le Guatemala allé entrer en guerre contre son pays d’origine ; si le Guatemala entre en guerre contre l’Allemagne alors il devient un ressortissant ennemi causant un préjudice pour son commerce sachant qu’on pouvait à ce moment confisquer les biens de ressortissants de nationalité ennemie.

Il devait se débarrasser au plus vite de la nationalité allemande ; il avait des relations au Liechtenstein ; Nottebohm a obtenu contre le paiement d’une somme une nationalité de manière extraordinaire en quelques semaines en dehors des procédures ordinaires et simplement à travers quelques relations avec le paiement d’une somme.

Le Guatemala est entré en guerre contre l‘Allemagne ; à ce moment-là, le Guatemala a considéré que Nottebohm était un ressortissant ennemi et a confisqué ses avoirs.

Le Liechtenstein a défendu son ressortissant en demandant des comptes au Guatemala par une violation du droit international à travers une violation de l’un de ses ressortissants.

L’affaire arrive devant la Cour Internationale de Justice avec le juge Guggenheim ; la Cour juge que la limite qui s’applique en droit international pour l’acquisition de la nationalité et qu’il faille un lien effectif de rattachement, une nationalité donnée par simple complaisance n’est pas une nationalité qui repose sur un lien effectif de rattachement.

Un lien effectif de rattachement et le fait qu’un ressortissant est lié davantage à un territoire déterminé qu’à n’importe qu’elle autre État dans le monde ; s’il y a un tel lien effectif de rattachement, à ce moment-là la nationalité devient opposable.

La Cour n’a pas dit que Nottebohm est allemand ou liechtensteinois, la nationalité peut être différente selon les États ; pour le Lichtenstein, Nottebohm est un Liechtensteinois parce qu’il a acquis la nationalité du Liechtenstein et a le droit de le traiter comme un ressortissant liechtensteinois, la loi allemande peut le considérer comme un ressortissant allemand.

Le Guatemala pouvait se justifier parce qu’il n’y avait pas un lien effectif de rattachement alors Nottebohm était considéré comme un ressortissant allemand parce qu’il n’avait pas de liens effectifs de rattachement au Liechtenstein, ce n’est pas opposable.

Il y a une distinction entre la nationalité acquise par des modalités reconnues par le droit international et la nationalité acquise par des modalités qui ne sont pas reconnus par le droit international.

Dans les cas où la nationalité est acquise selon des modalités reconnues alors la nationalité est opposable, lorsque la nationalité est acquise en dehors de ces modalités, elle n’est pas opposable, un État tiers n’est pas obligé de la reconnaitre ; dans le cas du Liechtenstein et de Nottebohm, le Guatemala n’était pas obligé de le reconnaître en tant que Liechtensteinois.

Le lien effectif de rattachement cause des problèmes, on comprend pourquoi, d’ailleurs, aujourd’hui cela pose un problème dans un monde globalisé. Il y a aussi d’autres motifs, le juge Guggenheim avait une opposition dissidente.

On voit la limite de la Cour Internationale dite dans l’affaire Nottebohm, il faut se référer à cette affaire-là pour noter qu’une nationalité acquise n’est pas opposable à un État tiers.

En droit pénal on utilise des mots qui ont à faire avec la compétence personnelle d’un État en matière pénale.

Nous avons pour la compétence pénale d’un État

Principe de territorialité

Correspond à la compétence territoriale, un État peut poursuivre tous les crimes commis sur son territoire, peu importe la nationalité des personnes.

Principe de personnalité

Compétence personnelle, il y a la distinction entre le principe de personnalité active et le principe de personnalité passive :

  • personnalité active : signifie qu’un État peut poursuive tous les crimes commis par l’un de ses ressortissants partout dans le monde à la seule condition qu’il constitue un crime sur le lieu commis. Si on fait quelque chose de licite en Australie, on ne peut être puni en Suisse. Pour les crimes de sang, un crime commis en Australie permet à la Suisse d’avoir une compétence légale.
  • personnalité passive : un État acquiert la compétence pénale sur tout un chacun qui a commis un crime à l’égard de l’un de ses ressortissants partout dans le monde ; c’est un principe contesté, cela signifie que si on va en Australie et qu’on s’y fait tuer par un ressortissant de la nationalité X, la Suisse acquiert à son égard une compétence pénale, il peut le poursuivre par une compétence pénale et la Suisse peut demander une extradition.

Principe de sureté de l’État

C’est une série de crimes où l’État acquiert la compétence à savoir les crimes liés à l’espionnage ou de la contrefaçon de monnaie suisse.

Principe d’universalité

Cela est important pour le droit international, ce principe veut qu’un État puisse poursuivre certains crimes où qu’il soit commis dans le monde même s’il ne possède aucun lien avec ce pays.

Pour qu’un État détienne la compétence pénale afin de poursuivre un crime déterminé il doit avoir un lien de rattachement avec ce crime, ce sont les services publics.

Il y a des situations où on estime qu’un crime a été commis affectant les intérêts de tous les États et que par conséquent on accorde à tous les États une compétence punitive ; c’est la cas soit parce que le crime a été commis sur un espace commun et qu’il n’y a pas de compétence territoriale comme la piraterie qui est un acte de violence fait pour des raisons privées constituées par un navire sur un autre navire privé en la haute-mer, c’est la raison pour laquelle il y a cette infraction avec une compétence universelle : chaque État qui capture des pirates a une compétence étant donné que le crime a été commis sur un espace commun.

Il y a des crimes qui affectent l’humanité entière et on ne veut que les criminels ne se repose, ce sont les crimes de guerre, contre l’humanité et les génocides.

Il existe des cas exceptionnels où les États sont obligés de poursuivre selon la compétence universelle en fonction de certaines conventions antiterroristes et d’infractions graves comme dans le cas d’infractions relevant de la Convention de Genève sur le droit humanitaire.

Dans la majorité des cas, la compétence universelle n’est qu’un simple factuel sur la manière dont il peut et ne peut pas l’exercer.

La manière dont il peut exercer est liée au droit interne, s’il n’y a pas de lien territorial avec le crime, l’État peut exercer une compétence universelle et non pas par contumace. Cette compétence universelle permet de poursuivre pour certains crimes soit commis sur des espaces communs soit pour des crimes d’une grande importance pour la communauté. On se souvient que Balthazar Garzon en Espagne avait procédé sur cette base relativement à monsieur Pinochet.

Compétences relatives aux engins

Il s’agit d’un côté des navires d’État, ensuite des aéronefs et d’engins spatiaux. Du point de vue du droit international, on ne considère plus, comme anciennement par fiction, qu’un navire est du territoire flottant d’un État et un avion du territoire mobile ; on considère maintenant que l’État d’immatriculation d’un engin est l’État qui est responsable pour le bon fonctionnement de ses engins et est l’État qui exerce sa compétence pour ce qui est du compte à bord de ses navires, aéronefs et des engins spatiaux.

Cela vaut pour les engins étatiques eux-mêmes comme pour les navires de guerre, mais ici la question est plus large. L’État a aussi des devoirs par rapport à des embarcations civiles comme l’obligation de contrôle de la sécurité de ces embarcations ou des conditions de travail, l’État encourt sa propre responsabilité, même pour les navires commerciaux l’État exerce sa compétence.

Le territoire de l’État et sa délimitation

Le territoire de l’État et sa délimitation soulève deux séries de problèmes:

Tout d’abord, le territoire de l’État évoque le problème de l’acquisition et de la perte de l’État : comment un État peut acquérir et perdre du territoire ?

Deuxièmement, cela soulève le problème de l’appartenance du territoire à l’un ou à l’autre ainsi que les différends sur la délimitation du territoire.

D’un côté, on s’interroge sur comment acquérir le territoire, de l’autre sur la détermination du territoire.

Si on applique ce problème à des iles il y a un problème d’attribution, en revanche si on songe à du territoire continental on a automatiquement des problèmes de délimitation.

Nous discutons de toute cette matière en utilisant très souvent le terme « titre » juridique. Un titre est un fait que l’ordre juridique reconnait comme le fondement de droit sur un territoire, c’est donc un fait reconnu par l’ordre juridique faisant naitre un droit sur un territoire.

Pour qu’un territoire nous appartienne, il faut produire un titre, le titre est donc toujours un fait auquel l’ordre juridique affecte une conséquence.

Quels sont les faits reconnus par l’ordre juridique pour acquérir et concomitamment pour le perdre ?

Il y en a quelques-uns :

Titre d’occupation du territoire sans maitre

Un territoire sans maitre peut être acquis par le premier occupant, aujourd’hui le temps où on se ruait sur des territoires pour les occuper est révolu, mais l’occupation reste un titre valable et important pour deux raisons :

  • à cause du droit intertemporel si quelqu’un conteste certains territoires, quelqu’un peut faire valoir qu’il l’a occupé il y a cinq siècles quand il était sans maitre, ce titre continu à déployer des effets jusqu’à aujourd’hui.
  • si une ile émerge en haute-mer, elle peut être soumise à occupation.

Le terme « occupation » est le même que celui de « l’occupation de guerre », mais il est différent ; l’occupation de guerre n’est pas un titre d’acquisition de territoire, mais un titre d’administration de territoire pendant un conflit armé, il y a interdiction d’annexer, l’occupation est celle d’un territoire sans maitre, occupation de la tera nullius.

On peut aussi dans les mêmes eaux faire valoir un titre de conquête, aujourd’hui il est interdit de conquérir et d’annexer du territoire par la force selon le paragraphe 2 de l’article 4 de la Charte des Nations Unies.

Une fois de plus c’est une question de droit intertemporel, si on peut faire valoir un titre comme quoi on a conquis un territoire au XIIIème siècle alors on peut faire valoir encore aujourd’hui ce titre.

Traité – Accord(s)

On peut acquérir du territoire par des transferts de territoires organisé par traité.

Les transferts de territoire se faisaient très souvent dans le passé. Aujourd’hui cela se fait beaucoup moins parce que l’autodétermination des peuples est passée par là. Dans les années 1950 on a transféré du territoire français vers la Suisse afin d’élargir l’aéroport international de Genève, mais cette portion a été rétrocédée ailleurs[13].

En revanche, on peut avoir la formation d’États nouveaux organisée à travers un traité ; l’Allemagne actuelle est née du traité des 2+4[14][15]. Le traité est un vecteur d’acquisition du territoire de grande importance et c’est aussi le vecteur principal utilisé pour la délimitation du territoire.

Prescription acquisitive

Possibilité d’acquérir un territoire par le fait d’y exercer de manière prolongée, pacifique et continue des prérogatives de puissance publique sans qu’un autre État ne proteste contre cette pratique. Il y a un État sur une portion de territoire qui fait acte de puissance publique de façon prolongée avec acquiescement des autres États qui vaut titre.

À cause de l’autodétermination des peuples aujourd’hui il ne s’agit que de zones marginales.

La protestation est capitale pour préserver ses droits, si on ne proteste pas contre la puissance publique alors on perd ce territoire, si on proteste, l’acquisition par prescription ne peut jamais avoir lieu. Des auteurs n’aiment pas le terme « prescription acquisitive », car cela relève du droit privé, mais le mécanisme est similaire.

Il y a certaines modalités ou faits naturels qui font que du territoire soit acquis par d’autres États comme l’alluvion ; si un État a une côte maritime et que les côtes se déplacent parce que les sables font de la sédimentions, alors le territoire est acquis par alluvions, son territoire a bougé, mais automatiquement il l’acquiert.

La même chose est pour les fleuves, il y a des cas où la frontière est au milieu des fleuves. C’est une ligne dans le fleuve, il arrive qu’il y ait des fleuves très dynamiques qui bougent faisant bouger la frontière ; cela veut dire qu’un État s’accroit, mais l’autre diminue. Ce genre phénomène a une importance mineure, mais un fait naturel et non pas volontaire et sujet à l’acquisition du territoire.

La perte du territoire est concomitante, un État pourrait abandonner une portion de territoire s’il ne le veut plus, mais cela ne fait pas pertinence.

Quant à la délimitation quels sont les faits juridiques lorsqu’on délimite du territoire ? Autrement dit sur quoi se fonde-t-on juridiquement pour opérer une délimitation entre territoires ?

Nous avons plusieurs principes importants :

Accord(s) – Traité

La délimitation est presque toujours opérée par accord, parfois une séquence d’accord sur une frontière porte sur des secteurs, des accords qui ont modifiés ou rectifiés des frontières sont souvent des bouquets d’accords.

Lorsque la Cour de Justice traite de différends entre États africains ou États latino-américains, chaque fois il aura à connaitre des traités du XIXème siècle voire du XIIIème siècle. C’est toujours le titre au moment où la délimitation a été faite qui continue à valoir. Il faut donc interpréter le traité de l‘époque et savoir ce que les parties pouvaient vouloir dire.

La Cour Internationale de Justice nous a appris sur une affaire entre la Libye et le Tchad[16][17] concernant un différend frontalier qu’un traité peut fixer la frontière, mais que la frontière acquiert une valeur indépendante du traité instauré, autrement dit, le traité instaure la frontière, mais à ce moment la frontière devient un fait juridiquement détachable.

Cela signifie que si le traité arrive à échéance, s’il n’est pas renouvelé ou dénoncé, la frontière reste, c’est le principe de stabilité des frontières.

La frontière ou le titre que crée le traité a plus de permanence que le traité lui-même, le traité peut disparaitre, mais la frontière demeure. Le traité doit de l’avis de la Cour donner lieu à une frontière permanente, « une fois convenue, la frontière demeure, car toute autre approche priverait d’effet le principe fondamental de la stabilité des frontières, dont la Cour a souligné à maintes reprises l’importance »[18].

La délimitation ne peut être qu’une preuve conjointe entre les États concernés, la même chose peut être dite des frontières terrestres ; délimiter une frontière juridiquement contraignante ou juridiquement reconnue ne peut être que l’œuvre des États concernés conjointement, si on le fait seul, l’autre État n’est pas lié par la frontière qui est tentée d’être imposée.

Si chaque État délimite unilatéralement on aurait des frontières non agréées. Comme le principe est qu’une frontière ne peut être juridiquement délimitée que par accords alors les traités sont le fondement de la délimitation.

On trouve le tracé des frontières dans des accords le plus souvent bilatéraux parce qu’une frontière est normalement bilatérale, elle sépare l’État A de l’état B.

Dans le cas des frontières suisses, dans l’ouvrage de François Schröter, toutes les frontières de la Suisse ont été délimitées par des accords dont certains conclus avec les rois de France.

C’est dans les traités qu’on trouve le titre pour savoir où passe une certaine frontière.

Dans un litige entre la Libye et la Tunisie, la Cour a dit que la frontière se détache du traité et à son existence propre, le fait que le traité disparaisse à un certain moment n’est pas pertinent pour l’extinction d’une frontière.

Il peut être incertain où la frontière passe exactement, les traités décrivent les frontières, mais parfois ils le font mal et avec imprécision, ou ce sont d’anciens traités avec de problèmes de topographie. Dans ce cas, c’est une question d’interprétation du traité et aussi une question de comblement de lacune contenue dans le traité, on cherche à éliminer l’incertitude en précisant où passe la frontière soit en faisant appel à un juge qui pourra déterminer ou passe la frontière.

Uti Possidetis juris

C’est la possession en fonction du droit et non pas en fonction du fait.

Que veut dire « uti possidetis » ?

C’est un principe applicable en matière de décolonisation originellement ; à un moment donné de l’histoire, beaucoup d’États nouveaux ont été créés issus de la décolonisation.

Ces États n’avaient pas de frontières préconstituées parce qu’ils étaient une partie d’un ancien empire colonial, seules les frontières administratives intérieures existaient relativement à la puissance coloniale ; dans l’empire colonial français, il y avait des circonscriptions soumettant les différentes portions des territoires à des gouverneurs séparés.

Lorsque la décolonisation eut lieu, déjà d’ailleurs en Amérique latine au XIXème et ensuite en Afrique au XXème siècle, les États concernés ont décidé de maintenir les anciennes frontières administratives coloniales qui anciennement étaient des frontières internes en faisant en sorte qu’après la décolonisation ces frontières deviennent des frontières internationales ; en d’autres termes de transformer des frontières administratives internes en des frontières internationales, comme cela était déjà selon les frontières administratives cela doit rester.

Ce principe a été choisi parce qu’il était le seul qui pouvait dans ces espaces assurer immédiatement une frontière claire et sûre, à défaut d’uti possidetis nous n’aurions pas eu de frontières du tout, il aurait fallu conclure des traités de frontières qui auraient facilement, en Afrique notamment avec ses instabilités structurelles et ses États composites, amener, comme les États africains l’ont reconnu eux-mêmes, à des luttes fratricides ; si la guerre de décolonisation dure, on aurait risqué d’avoir des luttes de frontières par la suite ajoutant à l’effort des guerres de décolonisations à la déroute des guerres de frontières.

L’Organisation de l’Unité Africaine par une résolution de 1964 a considéré qu’on devait maintenir les anciennes frontières administratives en les reconnaissant comme les frontières internationales[19][20][21].

Tout d’abord l’uti possidetis est l’Amérique latine avec des dates critiques de 1810 et 1823 soit la décolonisation de l’Empire espagnol ; les frontières avec le Brésil étaient d’ailleurs déjà des frontières internationales. Les États européens ont appliqué ce principe dans le cadre de la décomposition d’États fédéraux pour l’ancienne URSS et en Yougoslavie.

Juridiquement la seule chose certaine est que le principe s’applique en cas de décolonisation, pour les États fédéraux on a appliqué ce principe parce qu’il est assez pratique, mais il n’est pas certain que le droit le requiert ; à l’époque où ces États fédéraux se sont décomposés, il n’en était pas encore ainsi.

L’arrêt clef qui pose le principe de l’uti possidetis comme outil général de la décolonisation est l’arrêt de la chambre de la Cour sur l’affaire du différend territorial entre le Burkina Faso et le Mali en 1986[22].

Au moment de la décolonisation, une frontière est automatiquement établie, c’est l’ancienne limitation administrative coloniale ; lorsque le juge est appelé à dire ou passe exactement la frontière, la ligne uti possidetis n’est pas toujours évidente dans des territoires difficiles d’accès, la Cour et l’arbitre doivent toujours se retourner vers des dates critiques et regarder où étaient les frontières administratives.

L’uti possidetis signifia qu’on a automatiquement une frontière et qu’elle ne peut pas être unilatéralement changée ; cela ne veut pas dire qu’on gel des frontières et qu’on ne peut modifier les frontières ; on peut la modifier soit par accord, les États concernés peuvent conclure des accords et modifier les frontières.

En Afrique plus encore qu’ailleurs, les frontières tracées par le colonisateur étaient parfaitement arbitraires. Il y aurait donc souvent bien des raisons de rectifier ces anciennes frontières, cela doit être fait par accord ; toucher aux frontières signifie se diriger très rapidement vers des conflits armés.

En même temps il ne faut pas toujours un accord formel ; si un État administre une portion d’un État au-delà de l’uti possidetis et que l’autre État ne fait rien et est silencieux face aux prétentions, cette situation suffit à modifier la règle de l’uti possidetis ; on parle ici d’acquiescement aux prétentions adverses et notamment de l’affaire du différend territorial maritime et insulaire du Salvador et du Honduras[23].

La Cour nous apprend à la page 412 de l’arrêt, « il est évidemment loisible à ces États de modifier par un accord les frontières les séparant, et certaines formes d’activités ou d’inactivités pourrait valoir acquiescement à une limite différente de celle de 1821. »

Certaines formes d’activités ou d’inactivités sont une forme d’acquiescement à la prétention adverse prolongée.

On peut modifier le principe d’uti possidetis, mais cela ne doit pas venir d’attitudes unilatérales non-agrées parce que cela pose des conflits.

Principe général de la stabilité des frontières

L’uti possidetis en est un aspect ; dans le droit international moderne, il y a un principe de stabilité des frontières.

Il a été exprimé dans des formes diverses comme le fut la Cour de la Haye dans l’affaire du temple de Treah Vihar en 1962, « D’une manière générale lorsque deux pays définissent entre eux une frontière, un de leurs principaux objectifs est d’arrêter une solution stable et définitive. Cela est impossible si le tracé ainsi établi peut être remis en question à tout moment sur la base d’une procédure constamment ouverte, et si la rectification peut être demandée chaque fois que l’on découvre une inexactitude par rapport à une disposition du traité de base »[24].

Le principe de stabilité des frontières vise à éviter des conflits et notamment des conflits armés et il se comprend parce que la frontière est une question très sensible, la frontière définit le chez-soi, il est lié à un sentiment de sécurité, mais aussi de bien-être des populations ; la population et les États à l’époque moderne de plus avec leur manière de concevoir les choses basées sur l‘idée de la nation incrémente encore le sentiment de périmètre et de sécurité qui nous distingue de l’autre.

L’insécurité quant à la frontière génère très facilement des troubles parce qu’elle est psychologiquement traumatisante.

Dans la pratique des États, il y a le développement du principe de la stabilité des frontières qui reçoit tout une série d’implications concrètes.

Dans l’affaire Libye contre Tchad, la Cour dit qu’une frontière ne peut se détacher du traité, mais la frontière demeure si le traité s’éteint ; dans la succession d’États au traité c’est-à-dire lorsqu‘un territoire passe de l’un à l’autre, il y a des principes dans la Convention de Vienne sur la succession d’états au traité. Dans les articles 11 et 12 il y a la règle que les traités fixent les frontières et qu’ils contiennent des statuts territoriaux.

La Convention de Vienne statut disant qu’il n’est pas possible de faire valoir le changement de circonstances vis-à-vis d’une frontière même si les circonstances ont fondamentalement changées ; c’est une application du principe de la stabilité des frontières.

Dans le cadre d’une interprétation restrictive du droit relatif aux États, il ne faut pas toucher unilatéralement aux fournières ; lorsque c’est de concert tout est possible ou presque dans les limites de l’autodétermination des peuples ; lorsque c’est unilatéral, il faut faire attention.

Les effectivités

Dans le droit de la délimitation il y a d’un côté le titre soit le traité soit l’uti possidetis ; mais il arrive dans la vie que les effectivités ne soient pas conforment au titre, ce sont les choses qui se passent sur le terrain et en particulier qui administre.

Si on a une ligne fixée par un traité qui laisse une partie du territoire à l‘État A, en fait depuis 80 ans l’État B administre cette petite partie du territoire et cela n’est pas conforme au traité, mais il y a une effectivité, une réalité qui s’est implantée. Dans le domaine colonial, on parle d’effectivité coloniale.

La question est de savoir qu’elle est la relation entre le titre et l’effectivité ?

En règle générale, il ne peut faire de doute de quel est la réponse, le titre l’emporte parce que le traité est le droit et l’effectivité et le fait, le fait ne peut prévaloir contre le droit.

Cette règle n’est pas sans exception ; tout d’abord s’il y a acquiescement, soit la prescription acquisitive, l’effectivité se voit reconnue et de même induite, mais ce n’est plus une simple effectivité, car il y a une administration effective de l’État qui n’a pas droit, mais l’autre État a acquiescé devenant quelque chose de bilatéral, il y a un exercice de pouvoir ; l’État titre est resté silencieux créant une confiance qu’il se désintéresse du territoire.

À un certain moment, des tribunaux considèrent que l’effectivité est devenue du droit par l’acceptation tacite de l’autre partie.

La Cour Internationale de Justice a considéré ce genre de problèmes, titre d’un côté, effectivité de l’autre et lui a donné un éclairage extrêmement nuancé comme ce fut par exemple le cas dans l’affaire du différend frontalier entre le Burkina Faso et le Mali au §63.

La Cour évoque quatre rapports possibles entre l’effectivité d’un côté et le droit de l’autre :

L’effectivité correspond au droit c’est-à-dire au titre

L’effectivité est alignée sur le droit, la frontière doit passer là et les deux états administrent ce que le traité a affecté aux pays.

L’effectivité n’intervient que comme confirmation du titre. La chambre de la Cour a pu appliquer ce principe dans l’affaire du différend frontalier terrestre et insulaire El Salvador contre Honduras en 1992.

Le Salvador présentait avec succès toute une série d’effectivités, les présentant comme confirmation de ses titres espagnols d‘uti possidetis. La chambre de la Cour a confirmé la lecture du Salvador ou elle présente ses arguments à la page 397 §59.

L’effectivité ne correspond pas au titre

Il y a un divorce entre les deux et une opposition entre l’effectivité et le titre. La règle générale en la matière est qu’il y a lieu de préférer le titulaire du titre.

Une situation dans laquelle la Cour a eu l’occasion d‘appliquer cette règle est celle du différend entre la frontière terrestre et maritime entre le Cameroun et le Nigeria en 2002.

La Cour conclut que dans ce cas il y avait conflit entre les titres conventionnels du Cameroun et le Nigeria qui possédait les effectivités, selon le titre certaines zones revenaient au Cameroun et le Nigeria avait pénétré ces territoires et les administrait ; selon la Cour le titulaire du titre doit prévaloir et donc ce territoire revient au Cameroun.

L’effectivité ne coexiste avec aucun titre

Nous avons une effectivité, mais pas de titre ; dans ce cas selon la Cour, l’effectivité doit être prise en considération est sera très souvent décisive.

L’affaire de la souveraineté sur Pulau Ligitan et Pulau Sipadan, est une affaire de 2002 entre l’Indonésie et la Malaisie; il s’agit de deux petites iles relativement loin de la zone centrale des États concernés, la Cour écarte des titres conventionnels que les parties lui ont présentés, car selon l’interprétation que la Cour donne à ces traités ils ne s’étendent pas si loin dans la mer.

S’il en est ainsi, il n’y a pas de titre et en même temps les États successeurs ne pouvaient acquérir le titre.

Que faire si on est dépourvu de titre ?

La Cour se tourne vers les effectivités, elle constata que la Malaisie possède de meilleures effectivités ; la Cour constate que l’Indonésie n’en a aucune n’ayant fait aucun acte de souveraineté.

En revanche quant à la Malaisie, elle peut deux activités : l’activité règlementaire exécutive relative à la pèche à savoir capturer des tortus et des oiseaux et à la construction et l’entretien de phares à l’aide de navigation ; ces deux effectivités suffisent pour donner le titre à la Malaisie.

L’effectivité coexiste avec un titre, mais le titre n’est pas clair

C’est une situation assez fréquente, mais on ne sait plus exactement où la ligne passe.

Le traité peut être peu clair, la ligne uti possidetis ou la description est peu concluante ; dans ce cas notamment dans le cas des effectivités à l’époque où le titre était conclu parce que les effectivités immédiatement après le moment de la décolonisation tendent à montrer ce que les parties considéraient être le titre.

La présomption est que les parties administraient le territoire assigné à l’époque, si on ne sait plus où passe la ligne uti possidetis alors il faut se référer aux effectivités au moment de la colonisation, les parties se comportaient en fonction sur quoi elles s’étaient accordées ou ce que le droit leur concédait.

Dans le différend El Salvador contre Honduras, il y avait un problème avec certaines iles dans le golfe de Fonseca ; les titres anciens dans cette zone marginale n’étaient pas clairs donc la chambre de la Cour a considéré qu’il était approprié de prendre en compte le comportement effectif des États intéressés pendant la période qui a immédiatement suivi l’indépendance déterminant ainsi l’appartenance respective de ces iles dans le golfe de Fonseca traçant la frontière dans cette zone.

Rôle de l’équité

C’est un rôle qui n’est pas fondamental, mais parfois il n’est pas négligeable ; il existe certains compromis soit un accord par lequel on soumet un litige à un arbitre ou à un juge, parfois l’arbitre peut statuer en équité, il ne doit pas s’en tenir seulement au titre, mais aussi à des considérations équitables reprenant des effectivités qui ont créé des liens de rattachement.

L’arbitre peut pour des motifs équitables modifier la frontière ou en tracer une en fonction de ce qu’il estime être équitable uniquement lorsque les parties s’accordent, l’équité joue aussi un rôle dans l’interprétation du titre ou dans le comblement de lacunes contenues dans le titre.

La première situation est que l’arbitre est libre par rapport au droit, il peut en fonction de ce qu’il considère équitable tracer certaines lignes, si les États s’accordent à lui donner cette mission alors l’arbitre va tracer la frontière.

Dans les autres cas, l’arbitre n’a pas cette mission il ne peut modifier le droit en fonction de ce qu’il estime être l’équité. Dans ce dernier cas, l’arbitre est lié par le droit et néanmoins l’équité peut jouer un certain rôle.

L’arbitre applique le droit et le traité ; il a y deux rôles que l’équité peut jouer :

L ‘équité peut servir à l’arbitre dans l’interprétation du titre, il y arrive que le titre ne soit pas très clair, que la description de la ligne frontière soit confuse, que les aspects géomorphologiques aient changés depuis le temps, si donc il y a une incertitude dans une certaine aire et que la frontière pourrait passer soit par ici ou soit par-là, on pourrait à ce moment-là, puisqu’on est couvert par le titre, on pourrait faire fond sur l’équité.

Si on trace la ligne en fonction de la ligne A possible selon le titre, mais si on prend la ligne 1 on est dans une région désertique ou il y a des points d’eau qui sont fondamentaux pour la population, si on prend la ligne A les points d’eau sont tous du côté de A. Si la ligne B, également possible selon le titre, partage les points d’eau soit 2 entre 2 soit 1 contre 3, il y aurait un motif de préférer la ligne B parce qu’elle partage plus équitablement des points d’eau capitaux pour les populations dans la région.

Si l’abrite n’a pas la notion de modifier le droit par l’équité, si la ligne A est celle qui est prévue par le titre et qu’on peut dire avec certitude ce qui est prévu alors c’est la ligne A ; l’hypothèse est que le titre n’est pas clair permettant soit la ligne A ou B parce que compatible avec la description du titre ; l’équité peut intervenir à l’intérieur du droit afin de recommander l’interprétation B plutôt que l’interprétation A.

Pour combler des lacunes que laisse le titre, il peut être défaillant dans certaines zones. Le cas le plus radical est une ligne uti posidetis, si dans les archives il manque les documents relatifs à ce secteur de la frontière, on n’a rien. Dans ce cas le juge ou l’arbitre applique l’équité praeter legem, en marge du droit et en renforcement du droit, comblement de lacune donc, et il fixera à ce moment-là une frontière en supposant que les parties veulent qu’il fixe la frontière.

Il serait contreproductif et non-conforme si l’arbitre disait qu’il ne peut délimiter, il faut utiliser l’équité au bord et en appui du droit.

Dans l’affaire du différend territorial et maritime insulaire El Salvador contre Honduras devant la chambre de la Cour Internationale de Justice il y avait six secteurs de frontières sur un nombre considérable de kilomètres qui étaient à délimiter, dans l‘un de ces secteurs la frontière uti possidetis ne pouvait plus être déterminée à savoir le secteur entre la source du fleuve Negro-Quiagara et le pilier frontière de Malpaso de Similaton, entre ces deux points les titres n’étaient pas loquaces ; la chambre de la Cour a dès lors fait fond sur un traité de 1869 concernant aussi la zone en cause et a dit qu’elle reprenait la frontière contenue dans ce traité parce qu’elle lui paraissait équitable, le traité n’était pas applicable parce qu’il n’avait pas été ratifié par les deux États ; un traité pas contraignant a été émis pour un petit secteur de la frontière qui a été insérée dans l’arrêt sur la base de l’équité praeter legem, page 514 – 515 du recueil de 1982.

Rôle des cartes géographiques

Quelle est la valeur de cartes géographiques dans la délimitation ?

La réponse doit être recherchée dans une distinction fondamentale que la jurisprudence fait. Dans l’arrêt sur le différend frontalier entre le Burkina Faso et le Mali page 582 et 583 des recueils, la distinction est entre les cartes d’un tout qui font partie intégrante d’un traité ayant force obligatoire et toutes les autres cartes ne faisant partie intégrante à un traité et ne faisant force contraignante. La carte faisait partie du traité est censée être juridiquement contraignante, la carte est une norme juridique ayant un poids considérable pouvant être décisive. Un cas de ce genre est évoqué dans un différend frontalier entre la Somalie et l’Érythrée.

Dans tous les autres cas, les cartes ne sont que des sources d’informations de poids variable en fonction de leur qualité de leur fiabilité technique, ainsi que de la neutralité des organes qui les ont produites.

La jurisprudence a montré parfois de l’agacement parce que les arbitres et les juges en sont inondés. Les parties produisent des centaines de cartes dont certaines ont une valeur relative, soit elles ne sont pas précises soit elles se contredisent ; elles ont une utilité relativement limitée ; la jurisprudence repousse un tout petit peu, cela dépend des circonstances.

Une telle carte qui n’est pas partie d’un traité peut également devenir plus importante si elle fait l’objet d’un acquiescement.

Si la partie adverse admet la pertinence de cette carte, la sentence arbitrale est intéressent entre l’Éthiopie et Érythrée dans le recueil des sentences arbitrales. La jurisprudence à la page 115 nous apprend qu’une carte peut mettre en doute une ligne et elle n’a pas nécessairement besoin d’avoir la même force probante.

Lorsqu’une carte est produite uniquement pour confirmer ou mettre en doute une ligne, mais non pas pour fonder un acquis, la jurisprudence nous apprend que la force probante de ce genre d’argument n’a pas besoin d’être soumise à la même force de conviction.

Dans le cas de délimitations maritimes, il arrive que des États soient limitrophes comme la Libye et la Tunisie et il faut voir où la limite se prolonge afin de séparer leur plateau continental et leur mer territoriale. Il y a le cas où il y a plusieurs États avec des États qui se font face alors il faut délimiter, car cela indique qu’il y a un chevauchement.

Toute cette branche du droit est compliquée parce que le fait d’être appliqué, les configurations sont à chaque fois différentes, tout cela influe sur le tracé des lignes, d’où une jurisprudence riche, mais détaillée sur les principes applicables en la matière.

Les principes fondamentaux des relations entre États

Il ne s’agit pas d’aller dans le détail, mais de nous sensibiliser à son existence, car cet article 2 contient presque toutes les règles du droit international moderne.

Les résolutions 25 – 26 sont une interprétation authentique de l’article 2 ; l’article 2 statut sur des formules claires, mais néanmoins lacunaires posant des problèmes d’interprétation.

L’Assemblée générale a pris la peine d’adopter une résolution de grande importance puisqu’elle se propose de donner à tous une interprétation sur les dispositions de l‘article 2 rajoutant le principe de la coopération entre États et l’autodétermination des peuples.

Paragraphe premier

« L'Organisation est fondée sur le principe de l'égalité souveraine de tous ses Membres. »

C’est une formulation bizarre, causasse voire inattendue parce qu’elle fait la fusion entre deux éléments hétéroclites entre « égalité » et « souveraineté » en précisant que l’un est indissociable de l’autre. Un État ne peut imposer sa souveraineté à l’autre parce que cela enfreindrait l’égalité entre les souverains.

La souveraineté en 1945 avait mauvaise presse, c’était un des motifs pour lequel la Société des Nations avait sombré, pour des puissances agressives avaient émané le monde d’une guerre longue et dure, une tendance à faire tout ce que l’on souhaite ; on a voulu inférer cette souveraineté dans le rappel de l’égalité obligeant à tenir compte de l‘autre, car la souveraineté n’est pas une prérogative qu’on a seule.

Sur « l’égalité souveraine », il est, semble-t-il, important de comprendre ce qu’elle dit et ne dit pas, sur le principe d’égalité, ce que dit l’égalité c’est l’égalité juridique en tout premier lieu c’est-à-dire le fait qu’aucun État ne peut être considéré comme étant diminué, il n’y a pas d’État de seconde catégorie que de la première catégorie sur un pied d’égalité.

Cela nous parait peu, mais en 1945 cela ne l’était pas, on sortait de l‘époque des mandats, des protectorats, des colonies qui continuaient à perdurer.

En d’autres termes, ce que veut faire admettre l’article 2 §1 au-delà de l’égale dignité des États, c’est aussi la faculté que reconnaît le droit international à chaque État d’avoir des droits et des obligations et d’être soumis aux mêmes droits et obligations du droit international général, chaque État a la même faculté d’avoir des droits et des obligations et est soumis au même droit et obligations du droit international général.

Il y a aussi le volet de ce que l’égalité ne veut pas dire, tout d’abord il serait faux de dire que chaque État a les mêmes droits et obligations en vertu du droit international; c’est complètement faux. Il y a uniquement la même capacité d’avoir des droits et des obligations ainsi que la capacité égale du droit international général ne s’appliquant pas au droit particulier.

L’État qui aura contracté se verra imposer plus de droits et d’obligations en fonction du traité, l’État qui n’a pas contrat n’aura pas ces droits et obligations en vertu du traité. Si on prend le droit particulier tous les États diffèrent, le plus on est parti à des situations de droit particulier le plus on aura des droits et des obligations.

Deuxièmement, l’égalité ne veut pas dire non plus que les États sont égaux de fait, les États sont égaux de droit jusqu'à un certain point pour le droit général, ils ne sont pas égaux du point de vue du fait.

L’État grand et puissant n’est pas de fait égal à l’État petit et faible n’empêchant pas de lutter pour plus d’égalité entre les États.

Par la suite, le principe de l’égalité n’est pas une norme de ius cogens, on peut y renoncer, c’est le cas dans tous les systèmes de vote pondérés ou certains États admettent qu’ils n’auront pas le même poids dans le vote. Il faut accepter ce statut d’inégalité par du droit particulier qui primera sur la règle générale d’égalité en vertu de la règle lex specials qui prévaut à la règle générale auquel le traité déroge.

Enfin, dans la résolution 25 – 26, on doit traiter les États malgré leurs différences donc il n’y a pas de discrimination entre États en fonction de leurs régimes politiques ou autrement l’égalité juridique ne peut pas être modulée en fonction des orientations politiques, économiques et sociales d’un État.

Paragraphe 2

« Les Membres de l'Organisation, afin d'assurer à tous la jouissance des droits et avantages résultant de leur qualité de Membre, doivent remplir de bonne foi les obligations qu'ils ont assumées aux termes de la présente Charte. »

Au paragraphe 2 c’est la question de la bonne foi. Cette disposition a été insérée en 1945 en réaction à la « doctrine du chiffon de papier » que certains États avaient appliquée depuis la Première guerre mondiale ; qu’est-ce qu’un traité contre la dignité et la survie du peuple allemand : c’est un chiffon de papier.

On ne peut avoir un ordre international fondé sur un minimum de sécurité, on oblige les États à remplir cette charte de bonne foi.

En terme très bref, ce paragraphe rappelle pacta sund servanda, les traités doivent être respectés, appliqués et interprétés de bonne foi mettant en jeu l’esprit de manière à ce que la lettre ne vise pas à éviter l’esprit.

Paragraphe 3

« Les Membres de l'Organisation règlent leurs différends internationaux par des moyens pacifiques, de telle manière que la paix et la sécurité internationales ainsi que la justice ne soient pas mises en danger. »

C’est une règle importante du droit international moderne donnant lieu à toute une branche du droit international ; on dit parfois à juste titre que rien ne peut être plus fort que le maillon le plus faible.

Paragraphe

« Les Membres de l'Organisation s'abstiennent, dans leurs relations internationales, de recourir à la menace ou à l'emploi de la force, soit contre l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique de tout État, soit de toute autre manière incompatible avec les buts des Nations Unies. »

Il s’agit d’un principe tout à fait fondateur pour le droit international moderne, s’agissant d’un principe de grande importance le résumer en quelque mot est impossible.

Paragraphe

« Les Membres de l'Organisation donnent à celle-ci pleine assistance dans toute action entreprise par elle conformément aux dispositions de la présente Charte et s'abstiennent de prêter assistance à un État contre lequel l'Organisation entreprend une action préventive ou coercitive. »

C’est l’assistance que les membres doivent à l’organisation lorsqu’elle prend des mesures en vertu du chapitre 7 soit du Conseil de sécurité qui pend des mesures pour maintenir la paix qui sont donc contraignantes. Tous les États ont l’obligation d’assister les Nations Unies dans la mise en œuvre des sanctions.

Paragraphe 6

« L'Organisation fait en sorte que les États qui ne sont pas Membres des Nations Unies agissent conformément à ces principes dans la mesure nécessaire au maintien de la paix et de la sécurité internationales. »

Ce paragraphe a trait aux États non membres s’inscrivant dans le sillage du paragraphe 5 ; dans le 5 les membres doivent tous collectivement mettre en œuvre les sanctions et collaborer si nécessaire.

Le problème avec les États non membres et qu’ils ne sont pas obligé à la discipline collective, les sanctions peuvent s’avérer inefficaces, c’est pourquoi le paragraphe 6 demande aux Nations Unies d’approcher les États tiers afin qu’ils appliquent les mesures des Nations Unies ou au moins ne les contrecarrent pas.

Paragraphe 7

« Aucune disposition de la présente Charte n'autorise les Nations Unies à intervenir dans des affaires qui relèvent essentiellement de la compétence nationale d'un État ni n'oblige les Membres à soumettre des affaires de ce genre à une procédure de règlement aux termes de la présente Charte; toutefois, ce principe ne porte en rien atteinte à l'application des mesures de coercition prévues au Chapitre VII. »

Aucune disposition de la présente Charte n’autorise pas les Nations Unies à intervenir dans les affaires intérieures des États.

Cette disposition ne fait juridiquement pas beaucoup de sens, elle fut insérée parce que certains États puissants y tenaient beaucoup.

Les États-Unis pour faire passer la charte au Congrès et l’URSS parce qu’elle avait une conception morbide des affaires intérieures, a fait qu’on a inséré une clause de non-intervention.

Le 7 ne concerne que l’intervention des Nations Unies dans les affaires intérieures, mais l’intervention d’un État dans les affaires intérieures d’un autre État est un autre principe.

Ou bien les Nations Unies ont une compétence reconnue dans la Charte et elles peuvent toujours l’exercer ou une organisation ne possède pas une compétence parce que pas reconnue dans la Charte. À ce moment-là, elle ne peut pas l’exercer si bien qu’il ne reste rien pour le principe de non-intervention ; il reste quelque chose seulement de politique, mais rien de beaucoup plus tangible.

On ne peut même interpréter restrictivement les compétences des Nations Unies ; tombe dans la compétence des Nations Unies toute question ayant une répercussion internationale, la contrepartie est que l’Assemblée ne peut seulement que recommander protégeant la souveraineté des États, elle ne fait que discuter.

Le paragraphe 7 ne s’applique pas au Conseil de sécurité en vertu de l’article 7 et du chapitre 14, on a fait une concession politique parce que les États aiment leurs affaires internes, mais cette règle ne fait pas beaucoup de sens, ou bien on possède une compétence et on peut l’exercer soit on n’a pas la compétence et on ne peut de toute manière l’exercer.

Le principe du non-recours à la force

Annexes

  • Conforti, B. (1986) Territorial Claims in Antarctica: A Modern Way to Deal with an Old Problem. Cornell International Law Journal. 19 (2), 249–258.
  • “Uti Possidetis.” Encyclopædia Britannica, Encyclopædia Britannica, Inc., www.britannica.com/topic/uti-possidetis.
  • Uti Possidetis Iuris - International Law - Oxford Bibliographies, 19 Sept. 2018, www.oxfordbibliographies.com/view/document/obo-9780199796953/obo-9780199796953-0065.xml.

Références

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  2. Sahara occidental, avis consultatif; C.I.J. Recueil 1975, p. 12. (COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE RECUEIL DES ARRÊTS, AVIS CONSULTATIFS ET ORDONNANCES SAHARA OCCIDENTAL AVIS CONSULTATIF DU 16 OCTOBRE 1975)"Dans la présente affaire, les renseignements dont la Cour dispose montrent qu'au moment de la colonisation espagnole il existait de nombreux liens d'ordre racial, linguistique, religieux, culturel et économique entre des tribus et émirats dont les populations habitaient la région saharienne qui fait aujourd'hui partie du territoire du Sahara occidental et de la République islamique de Mauritanie. Cependant ces renseignements révèlent aussi l'indépendance des émirats et de nombre de ces tribus les uns à l'égard des autres et, malgré certaines formes d'activité commune, l'absence d'institutions ou d'organes, même réduits au minimum, qui leur auraient été commun. La Cour ne peut donc conclure que les éléments en sa possession permettent de considérer que les émirats et tribus existant dans la région constituaient, suivant une autre expression utilisée par la Cour dans l'affaire de la Réparation des dommages subis au service des Nations Unies, « une entité capable d'être bénéficiaire d'obligations incombant à ses membres » (ibid., p. 178). Que l'on définisse l'ensemble mauritanien comme le Bilad Chinguitti, ou comme la nation chinguittienne ainsi que la Mauritanie le suggère, ou encore comme une forme de ligue ou d'association, la difficulté demeure qu'il n'avait pas le caractère d'une personne ou d'une entité juridique distincte des divers émirats et tribus qui le constituaient. On ne peut donc accepter la thèse suivant laquelle le il ad Chinguiti aurait été une « entité » ou un « ensemble » mauritanien jouissant d'une certaine forme de souveraineté au Sahara occidental"
  3. PUBLICATIONS DE LA COUR PERMANENTE DE JUSTICE INTERNATIONALE SÉRIE A - N10; Le 7 septembre 1927 - RECUEIL DES ARRETS AFFAIRE DU « LOTUS »)
  4. AFFAIRE DU DÉTROIT DE CORFOU (FOND) - arrêt du 9 avril 1949; Résumés des arrêts, avis consultatifs et ordonnances de la Cour internationale de Justice - Document non officiel
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  8. "¡Pobre México! ¡Tan lejos de Dios y tan cerca de los Estados Unidos!"
  9. "Pobre México tan lejos de Dios y tan cerca de Estados Unidos. En realidad fue escrita por Nemesio García Naranjo, intelectual regiomontano" - Malos Vecinos, Ángeles González Gamio; La Jornada
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  11. COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE RECUEIL DES ARRETS, AVIS CONSULTATIFS ET ORDONNANCES - AFFAIRE NOTTEBOHM (LIECHTENSTEIN c. GUATEMALA) - ARRÊT DU 18 NOVEMBRE 1953
  12. COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE RECUEIL DES ARRETS, AVIS CONSULTATIFS ET ORDONNANCES - AFFAIRE NOTTEBOHM (LIECHTENSTEIN c. GUATEMALA), DEUXIÈME PHASE - ARRÊT DU 6 AVRIL 1955
  13. 0.748.131.934.91 - Texte original Convention entre la Suisse et la France concernant l'aménagement de l'aéroport de Genève-Cointrin et la création de bureaux à contrôles nationaux juxtaposés à Ferney-Voltaire et à Genève-Cointrin Conclue le 25 avril 1956 Approuvée par l'Assemblée fédérale le 5 oct. 1956 Entré en vigueur le 6 mars 1958
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