Les courants politiques et religieux au Moyen-Orient

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Basé sur un cours de Yilmaz Özcan.[1][2]

Le Moyen-Orient, une région d'une complexité fascinante et d'une importance stratégique considérable, est le berceau de civilisations anciennes et le point de convergence de plusieurs des plus grandes religions mondiales. Cette zone géographique, souvent définie par ses frontières s'étendant de l'Égypte à l'Iran, et de la Turquie au Yémen, est un melting-pot de cultures, d'ethnies et de croyances qui se sont entrecroisées et ont évolué au fil des millénaires. Au cœur de cette diversité, les courants politiques et religieux jouent un rôle central, façonnant non seulement la vie quotidienne des populations, mais aussi les relations internationales et la géopolitique mondiale.

Ces courants sont profondément enracinés dans l'histoire, influencés par des événements tels que la montée et la chute d'empires, les conquêtes, les révolutions, et les mouvements de réforme. De l'essor de l'islam au VIIe siècle à la formation de l'État moderne, chaque période historique a laissé son empreinte sur la structure politique et religieuse de la région. Aujourd'hui, le Moyen-Orient est un tableau vivant de monarchies traditionnelles, de républiques, de démocraties naissantes et de régimes autoritaires, tous entrelacés avec des interprétations diverses de l'islam et d'autres croyances religieuses, y compris le judaïsme et le christianisme.


Le nationalisme arabe[modifier | modifier le wikicode]

Émergence et Fondements du Nationalisme Arabe[modifier | modifier le wikicode]

Le nationalisme arabe, une idéologie qui a façonné de manière significative l'histoire politique et culturelle du Moyen-Orient, est né au début du XXe siècle dans un contexte marqué par la domination impériale ottomane et européenne. Cette idéologie se fonde sur la conviction que les Arabes forment un peuple uni, partageant une histoire, une culture et une langue communes, et qu'ils devraient être politiquement unis en une seule entité ou dans des entités étroitement liées dont les frontières correspondent à leur identité culturelle et ethnique. La genèse du nationalisme arabe peut être retracée à la Nahda, la Renaissance arabe, une période de renouveau culturel et intellectuel qui a vu les intellectuels arabes s'engager dans une réflexion approfondie sur leur identité et leur avenir. Cette période a posé les bases pour une prise de conscience politique qui s'est intensifiée avec la décomposition de l'Empire ottoman et l'intervention des puissances européennes, notamment à la suite de la Première Guerre mondiale.

Des figures emblématiques telles que Gamal Abdel Nasser en Égypte ont joué un rôle crucial dans la promotion du nationalisme arabe. Nasser, en particulier, est devenu un symbole de cette idéologie à travers son discours anti-impérialiste et son plaidoyer pour l'unité arabe. Son rôle dans la nationalisation du canal de Suez en 1956 et la création éphémère de la République Arabe Unie (1958-1961), une union politique entre l'Égypte et la Syrie, sont des exemples concrets des tentatives de réalisation des idéaux nationalistes arabes. Le nationalisme arabe a été également influencé par d'autres courants idéologiques, notamment le socialisme et le laïcisme, comme en témoigne l'émergence du parti Baath en Syrie et en Irak. Ce parti, fondé par Michel Aflaq et Salah al-Din al-Bitar, prônait l'unité, la liberté et le socialisme au sein du monde arabe. Cependant, le rêve d'une unité arabe s'est heurté à de nombreux obstacles. Les divergences internes, les intérêts nationaux divergents et les échecs de projets unitaires, comme la République Arabe Unie, ont progressivement affaibli le nationalisme arabe. De plus, l'ascension de mouvements idéologiques concurrents, en particulier l'islamisme, a déplacé le centre de gravité politique dans la région.

En termes de théorie politique, le nationalisme arabe illustre l'importance de la construction identitaire et des aspirations à l'autodétermination dans les mouvements de libération nationale. Il met également en lumière les défis auxquels sont confrontées les idéologies pan-nationalistes dans des régions caractérisées par une grande diversité ethnique, religieuse et culturelle. Aujourd'hui, bien que le nationalisme arabe ne soit plus la force dominante qu'il était dans les années 1950 et 1960, son héritage continue d'influencer la politique et la culture au Moyen-Orient. Il reste un chapitre important de l'histoire moderne de la région et un élément clé pour comprendre les dynamiques politiques et culturelles actuelles.

La remise en question du nationalisme arabe s'est amorcée avec la chute de l'Empire ottoman au début du XXe siècle, un événement qui a profondément redéfini le paysage politique du Moyen-Orient. Cette période a vu émerger diverses idéologies et mouvements nationalistes, parmi lesquels le baasisme et le nassérisme se sont distingués comme deux interprétations notables du nationalisme arabe. Le baasisme, incarné par le parti Baath, a été fondé en Syrie par Michel Aflaq et Salah al-Din al-Bitar. Il représentait une approche populaire et grassroots du nationalisme arabe, insistant sur l'unité arabe, la liberté et le socialisme. Ce mouvement visait à mobiliser les masses à travers une idéologie panarabe, transcendant les frontières nationales traditionnelles. Le parti Baath a acquis une influence significative, non seulement en Syrie mais aussi en Irak, où il est arrivé au pouvoir sous la direction de personnalités telles que Saddam Hussein. D'autre part, le nassérisme, du nom de Gamal Abdel Nasser, président égyptien, représentait une forme de nationalisme arabe « par le haut », ciblant davantage l'élite politique et institutionnelle. Nasser, un charismatique leader militaire, a promu l'unité arabe, l'indépendance vis-à-vis de l'Occident et le développement économique et social. Son action la plus emblématique, la nationalisation du canal de Suez en 1956, a été perçue comme un acte de défi contre l'impérialisme occidental et a renforcé son statut de figure héroïque dans le monde arabe.

Ces deux mouvements, bien qu'ayant des approches différentes, partageaient des objectifs communs, notamment l'aspiration à l'unité arabe et la libération du colonialisme et de l'impérialisme. Toutefois, leurs trajectoires ont été marquées par des défis internes et externes. Le nassérisme, malgré son attrait initial, a souffert de l'échec de la République Arabe Unie et de la défaite lors de la guerre des Six Jours en 1967. Quant au baasisme, malgré son succès initial en Syrie et en Irak, il a finalement été confronté à des contradictions internes et à des conflits régionaux. Ces mouvements illustrent la diversité et la complexité du nationalisme arabe et soulignent les défis auxquels sont confrontées les idéologies pan-nationalistes. Leur évolution historique offre un aperçu précieux des dynamiques politiques du Moyen-Orient au XXe siècle, ainsi que des limites et des potentialités du nationalisme arabe en tant que force unificatrice et libératrice.

Contexte Historique et Transformation de l'Empire Ottoman[modifier | modifier le wikicode]

La genèse du nationalisme arabe ne peut être pleinement appréciée sans comprendre le contexte historique long et complexe qui l'a précédé et façonné. Les événements clés suivant jouent un rôle significatif dans cette histoire. La conquête de l'Égypte par l'Empire ottoman en 1517, marquant la prise du Caire, et la prise de Bagdad en 1533, ont consolidé le contrôle ottoman sur de vastes régions du monde arabe. Ces conquêtes ont non seulement étendu la domination ottomane mais ont également introduit de nouvelles structures administratives, militaires et sociales dans ces territoires. Pendant des siècles, bien que ces régions fassent partie de l'Empire ottoman, elles ont maintenu une certaine autonomie culturelle et linguistique, posant les bases d'une identité arabe distincte. L'expédition de Napoléon Bonaparte en Égypte en 1798 est un autre tournant. Cette intervention militaire française a eu un impact profond, non seulement en Égypte mais dans l'ensemble du monde arabe. Elle a exposé la faiblesse militaire et technologique de l'Empire ottoman face à l'Europe moderne et a déclenché un processus de réforme interne, connu sous le nom de Tanzimat, visant à moderniser l'empire. En outre, l'expédition a marqué le début de l'intérêt croissant des puissances européennes pour la région, ouvrant la voie à une ère d'influence et d'intervention étrangères.

Dans ce contexte, la révolte arabe de 1916 est souvent considérée comme un moment décisif dans l'émergence du nationalisme arabe. Encouragée par les Britanniques pour affaiblir l'Empire ottoman pendant la Première Guerre mondiale, la révolte, menée par des figures telles que Cherif Hussein de La Mecque et son fils Fayçal, était motivée par le désir d'indépendance et la promesse d'un état arabe indépendant. Bien que les résultats de la révolte n'aient pas pleinement satisfait ces aspirations - en grande partie en raison des accords Sykes-Picot de 1916, qui ont divisé la région en zones d'influence française et britannique - elle a néanmoins jeté les bases du nationalisme arabe moderne. Ces événements historiques ont façonné la conscience politique des Arabes, éveillant une aspiration à l'autonomie et à l'auto-détermination. Ils ont également mis en lumière les tensions entre les aspirations locales et l'ingérence étrangère, des thèmes qui restent pertinents dans les politiques du Moyen-Orient contemporain.

La révolution des Jeunes Turcs, survenue en 1908 et suivie par la prise de pouvoir autoritaire en 1909, constitue un élément crucial dans le processus d'émergence du nationalisme arabe. Ce mouvement, initialement orienté vers la modernisation et la réforme de l'Empire ottoman, a rapidement évolué vers une forme d'autoritarisme et un nationalisme turc exclusif, exacerbant les tensions entre les élites turques et les diverses nationalités au sein de l'empire, notamment les Arabes. Le virage autoritaire des Jeunes Turcs s'est manifesté de manière tragique avec le massacre de la population arménienne en 1915, événement qui a non seulement été un terrible drame humain mais a aussi servi de signal d'alarme pour d'autres groupes ethniques et nationaux au sein de l'Empire. La politique de turquification, qui visait à imposer la langue et la culture turques comme éléments centraux des institutions impériales, a été perçue comme une menace directe à l'identité et à l'autonomie des communautés arabes. Dans ce contexte, un certain nombre d'intellectuels arabes, influencés par les idées occidentales et conscients de la nécessité de défendre leur propre identité culturelle et politique, ont commencé à organiser une résistance. Le premier congrès général arabe, tenu à Paris en 1913, a été un moment important dans ce processus. Ce congrès a réuni des délégués de différentes régions arabes pour discuter de l'avenir des Arabes au sein de l'Empire ottoman et pour formuler des demandes d'autonomie accrue.

Il est intéressant de noter la position particulière de l'Égypte dans ce contexte. Le délégué égyptien au congrès de Paris s'est présenté en tant qu'observateur, reflétant une identité égyptienne distincte qui ne se considérait pas nécessairement comme « arabe » dans le contexte politique de l'époque. Cette distinction est en partie due à des raisons culturelles et historiques - l'Égypte ayant une longue histoire et une identité civilisationnelle distincte de celles des autres régions arabes - et en partie à la situation politique de l'Égypte, alors sous domination britannique. Cette période de l'histoire illustre la complexité du processus de formation du nationalisme arabe, mettant en lumière les diverses influences et les différentes trajectoires politiques et culturelles au sein du monde arabe. Elle montre également comment les dynamiques internes de l'Empire ottoman, ainsi que l'intervention et l'influence des puissances européennes, ont joué un rôle déterminant dans la configuration des identités et des mouvements politiques dans la région.

Impact de la Première Guerre Mondiale et des Accords Sykes-Picot[modifier | modifier le wikicode]

Durant la Première Guerre mondiale, les Arabes, bien que culturellement et historiquement liés, étaient géographiquement et politiquement divisés. Cette division était exacerbée par les accords Sykes-Picot de 1916, où les puissances européennes (principalement la France et le Royaume-Uni) se partageaient des zones d'influence dans le Moyen-Orient, redessinant les frontières sans tenir compte des réalités ethniques et culturelles. En outre, la déclaration Balfour de 1917, promettant l'établissement d'un "foyer national juif" en Palestine, a ajouté une autre couche de complexité et de tension dans la région. Le panarabisme, comme idéologie unificatrice, a gagné en popularité dans ce contexte de fragmentation. Il a été porté par le sentiment que les Arabes, en tant que peuple, devaient transcender les frontières coloniales et s'unir pour atteindre l'autonomie et la prospérité. Cette idée a été renforcée par la propagande nazie pendant la Seconde Guerre mondiale, qui cherchait à influencer la région contre les Alliés britanniques et français, et par l'exposition des intellectuels arabes aux idées nationalistes et anti-coloniales en Europe.

Cependant, le rêve du panarabisme s'est heurté à de nombreux défis. Les ambitions et les réalités politiques nationales, les différences culturelles et religieuses au sein du monde arabe, et les intérêts contradictoires des puissances régionales et internationales ont entravé l'unité arabe. Les échecs notables, comme la dissolution de la République Arabe Unie entre l'Égypte et la Syrie en 1961, ont marqué les limites de l'idéal panarabe. L'échec du panarabisme a laissé un vide idéologique dans la région, qui a été progressivement comblé par l'islamisme. Ce mouvement, qui cherche à organiser la société selon les principes islamiques, a gagné du terrain dans le contexte d'une désillusion croissante à l'égard des idéologies séculaires et nationalistes. Les décennies suivantes ont vu une montée en puissance de divers mouvements islamistes, qui ont capitalisé sur le sentiment de désenchantement et de recherche d'identité, en proposant une alternative basée sur la religion et la tradition.

Le panarabisme[modifier | modifier le wikicode]

Les Premières Promesses et Déceptions: L'Alliance du Chérif Hussein et le Mandat Britannique[modifier | modifier le wikicode]

Les notables, tels que le Chérif Hussein de La Mecque, jouaient un rôle crucial en tant que leaders locaux et intermédiaires entre les populations arabes et les puissances coloniales. Dans le cas de Hussein, sa position en tant que gardien des lieux saints islamiques lui conférait une autorité religieuse et politique significative. Durant la Première Guerre mondiale, il a cherché à établir une alliance avec les Britanniques, motivé par la promesse d'un soutien pour l'établissement d'un royaume arabe indépendant après la guerre, en échange de son aide contre l'Empire ottoman. Cette alliance est emblématique de la stratégie des notables traditionnels de la région, qui cherchaient à naviguer entre les intérêts locaux et les ambitions des puissances étrangères. Cependant, les promesses faites à Hussein par les Britanniques, connues sous le nom de correspondance Hussein-McMahon, étaient ambiguës et se sont finalement avérées en contradiction avec d'autres engagements pris par les Britanniques, notamment les accords Sykes-Picot et la Déclaration Balfour.

Le résultat de ces tractations diplomatiques s'est avéré être une grande déception pour les aspirations arabes. Après la guerre, au lieu de l'indépendance promise, la Société des Nations a établi plusieurs mandats dans la région, plaçant des territoires sous administration britannique et française. La vision de Hussein d'un royaume arabe unifié s'est effondrée, et la région a été divisée en plusieurs États, souvent avec des frontières artificielles qui ne reflétaient pas les réalités ethniques et culturelles. Cette période a été marquée par un sentiment croissant de trahison et de désillusionnement parmi les Arabes, qui ont vu leurs espoirs d'indépendance et d'unité s'évaporer. Cette déception a jeté les bases du mécontentement envers les puissances occidentales et a alimenté les mouvements nationalistes et anti-coloniaux dans les décennies suivantes. La figure de Hussein et sa tentative avortée de créer un royaume arabe indépendant demeurent un symbole puissant de la lutte arabe pour l'autodétermination et de la complexité des relations entre le Moyen-Orient et les puissances occidentales au début du XXe siècle.

Emergence des Théoriciens et Leaders du Nationalisme Arabe[modifier | modifier le wikicode]

À la fin de la Première Guerre mondiale, la figure de Fayçal, l'un des fils du Chérif Hussein de La Mecque, émerge comme un acteur clé dans la formation du nationalisme arabe. Fayçal, qui avait joué un rôle de premier plan dans la révolte arabe contre l'Empire ottoman, est devenu un symbole de l'aspiration arabe à l'autodétermination. Son accompagnateur et conseiller, Sati Al Husri, a eu une influence considérable dans la théorisation du nationalisme arabe. Sati Al Husri, qui deviendra plus tard ministre de l'Éducation, est souvent considéré comme le premier théoricien important du nationalisme arabe. Son approche était fortement influencée par la conception allemande de la nation, qui mettait l'accent sur les aspects linguistiques et culturels comme fondements de l'identité nationale. Pour Al Husri, la langue arabe était un élément central de l'identité arabe, un lien qui transcendait les différences religieuses, régionales ou tribales au sein du monde arabe.

Cette focalisation sur la langue et la culture comme éléments déterminants de l'identité nationale était en partie une réponse aux défis posés par la diversité du monde arabe. En insistant sur ces éléments communs, Al Husri cherchait à créer un sentiment d'unité et de solidarité parmi les Arabes, indépendamment de leurs différences individuelles. Son approche a contribué à façonner l'idéologie du nationalisme arabe dans les décennies suivantes, influençant les politiques éducatives et culturelles dans plusieurs pays arabes. La période de l'après-guerre, avec les efforts de figures comme Fayçal et les théories d'Al Husri, a donc été cruciale dans la cristallisation du nationalisme arabe. Bien que les aspirations à l'unité arabe aient été contrariées par les réalités politiques et les accords internationaux de l'après-guerre, l'idée d'une identité arabe commune, fondée sur la langue et la culture, a continué à exercer une influence profonde sur la politique et la société dans le Moyen-Orient.

Nationalisme Arabe dans l'Entre-Deux-Guerres: Trahison et Influence Extérieure[modifier | modifier le wikicode]

La période de l'entre-deux-guerres a été une époque cruciale pour le développement du nationalisme arabe, largement influencée par le non-respect des promesses faites aux Arabes durant la Première Guerre mondiale. Les accords Sykes-Picot de 1916, qui partageaient secrètement le Moyen-Orient entre la France et le Royaume-Uni, sont devenus le symbole de la trahison des aspirations arabes à l'indépendance et à l'autodétermination. Ces accords, révélés après la guerre, ont profondément miné la confiance des Arabes envers les puissances occidentales et ont alimenté un sentiment de méfiance et de ressentiment.

Dans ce contexte, d'autres facteurs ont accéléré le processus de montée du nationalisme arabe. La propagande fasciste et nazie a trouvé un écho dans certains segments de la société arabe, en particulier en raison de leur opposition commune au colonialisme britannique et français. Le régime nazi, cherchant à étendre son influence dans la région, a exploité le mécontentement arabe à l'égard des puissances coloniales. Cette dynamique a culminé avec le coup d'État pronazi de 1941 à Bagdad, connu sous le nom de Coup d'État de Rachid Ali al-Gillani, qui a brièvement établi un gouvernement pro-allemand en Irak avant d'être renversé par les forces britanniques. Parallèlement, le débat sur l'indépendance arabe a continué à gagner en intensité. Les intellectuels, les politiciens et les leaders d'opinion dans le monde arabe discutaient activement des moyens d'atteindre l'autonomie politique et de résister à l'influence étrangère. Cette période a vu l'émergence de plusieurs mouvements nationalistes et la formation de partis politiques qui allaient jouer un rôle majeur dans l'histoire postcoloniale de la région. L'entre-deux-guerres a été une période de transformation politique intense pour le Moyen-Orient. La combinaison du non-respect des promesses faites pendant la Première Guerre mondiale, de l'influence des idéologies fascistes et nazies, et du débat interne sur l'indépendance a contribué à façonner le paysage politique de la région et à poser les bases pour les événements et les mouvements qui allaient suivre dans les décennies ultérieures.

Le baasisme[modifier | modifier le wikicode]

Origines et Contexte du Baasisme: L'Annexion du Sandjak d'Alexandrette[modifier | modifier le wikicode]

L'annexion du Sandjak d'Alexandrette par la Turquie en 1939 est un événement souvent considéré comme un catalyseur significatif dans l'émergence du baasisme, un mouvement politique qui jouera un rôle majeur dans l'histoire contemporaine du Moyen-Orient.

Le Sandjak d'Alexandrette, une région située dans le nord-ouest de la Syrie moderne, a été annexé par la Turquie suite à un accord avec la France, alors puissance mandataire en Syrie. Cette annexion, qui a été perçue comme une perte territoriale humiliante pour les Arabes, a exacerbé les sentiments nationalistes dans la région. Elle a illustré pour beaucoup la vulnérabilité des nations arabes face aux intérêts des puissances étrangères et régionales. Dans ce contexte de frustration et de désir de résistance, le baasisme, ou la "résurrection arabe", a pris forme. Fondé par Michel Aflaq et Salah al-Din al-Bitar, deux intellectuels syriens, le parti Baath a promu une idéologie basée sur le nationalisme arabe, le socialisme et la laïcité. Le mouvement Baath visait à unifier le monde arabe, à promouvoir le développement économique et social, et à résister à l'impérialisme et au colonialisme.

L'annexion du Sandjak d'Alexandrette a donc servi d'impulsion pour le développement de cette idéologie, qui a cherché à répondre aux défis auxquels étaient confrontés les pays arabes. Elle a renforcé le sentiment qu'une action collective et une unité arabe étaient nécessaires pour contrer les influences et les interventions étrangères dans la région. Le baasisme, en tant que force politique et idéologique, a par la suite joué un rôle central dans la politique de plusieurs pays arabes, notamment en Syrie et en Irak. Bien que le mouvement ait évolué et ait été confronté à de nombreux défis au fil des ans, son émergence dans les années 1940 reste un moment clé dans l'histoire du nationalisme arabe et continue d'influencer la politique du Moyen-Orient.

Fondation et Philosophie du Parti Baath: Le Premier Congrès en 1947[modifier | modifier le wikicode]

Le premier congrès du parti Baath, tenu en 1947, a joué un rôle crucial dans la définition de l'idéologie et des objectifs du mouvement. Ce congrès a marqué une étape importante dans la cristallisation de la vision du Baath pour l'avenir du monde arabe, s'appuyant sur trois piliers fondamentaux : l'unité, l'indépendance et le socialisme arabe. L'accent mis sur l'unité reflétait l'aspiration à créer un état arabe unifié ou une fédération d'états arabes, transcendant les frontières coloniales et nationales établies. Cette idée d'unité territoriale était enracinée dans le nationalisme arabe et visait à contrer l'influence des puissances occidentales et régionales dans la région.

L'indépendance était un autre pilier central, soulignant la nécessité pour les pays arabes d'atteindre une autonomie politique et économique complète. Cela impliquait non seulement la libération du colonialisme, mais aussi le développement de structures et de systèmes politiques et économiques indépendants. Le socialisme arabe, tel que prôné par le parti Baath, cherchait à moderniser et à réformer la société arabe. Il ne s'agissait pas d'une copie du socialisme soviétique, mais plutôt d'une adaptation des principes socialistes aux réalités et aux besoins arabes, avec un accent sur la réforme agraire, l'industrialisation et la justice sociale.

En plus de ces trois piliers, le parti Baath se caractérisait par son approche laïque et non confessionnelle. Cette orientation séculaire était significative dans une région marquée par une grande diversité religieuse et sectaire. Le Baath promouvait l'idée que toutes les communautés religieuses et ethniques devaient s'assimiler dans l'identité nationale arabe, créant une société unifiée au-delà des divisions confessionnelles. Enfin, l'antisionisme était un élément prépondérant de l'idéologie du parti. Ce positionnement reflétait l'opposition au mouvement sioniste et à la création de l'État d'Israël, perçus comme une implantation coloniale et une menace pour les aspirations à l'unité et à l'autonomie du monde arabe. Le premier congrès du parti Baath, ainsi, a défini les contours d'un mouvement qui allait avoir une influence profonde sur la politique du Moyen-Orient dans les décennies suivantes. Son héritage, complexe et parfois controversé, continue d'influencer la politique et la société dans la région.

Michel Aflaq et la Formation de l'Idéologie Baathiste[modifier | modifier le wikicode]

Michel Aflaq, né en 1910 à Damas, était une figure centrale dans la fondation et le développement du parti Baath. Issu d'une famille grecque orthodoxe, Aflaq a joué un rôle déterminant dans la formation de la pensée nationaliste arabe et laïque qui a caractérisé le mouvement Baath. En 1943, Aflaq, en collaboration avec Salah al-Din al-Bitar et d'autres intellectuels, a fondé le parti Baath, dont le nom complet est "Parti de la Résurrection Arabe Socialiste". Le parti a été créé dans le contexte de l'éveil nationaliste dans le monde arabe et en réponse aux défis posés par le colonialisme et les divisions internes dans la région.

Aflaq a occupé le poste de secrétaire général du parti Baath, influençant fortement sa direction idéologique et politique. Sa vision du nationalisme arabe était inclusive, transcendant les divisions religieuses et sectaires, ce qui était reflété dans sa propre origine en tant que chrétien arabe. Il croyait fermement en la nécessité de l'unité arabe, du progrès social et de la laïcité comme moyens de moderniser la société arabe et de résister à l'influence étrangère. Sous sa direction, le parti Baath a cherché à établir des branches dans plusieurs pays arabes, y compris en Irak. La philosophie du Baath a gagné en influence, en particulier après la Seconde Guerre mondiale, dans le contexte de la montée du nationalisme dans la région et des luttes pour l'indépendance contre les puissances coloniales. Cependant, la vision d'Aflaq pour le parti Baath et son interprétation du nationalisme arabe ont été soumises à diverses interprétations et adaptations, notamment en Syrie et en Irak, où le parti a pris le pouvoir. En Irak, notamment sous Saddam Hussein, le parti Baath a pris une tournure nettement plus autoritaire, s'éloignant de certains des principes originaux promus par Aflaq. Michel Aflaq, qui a passé une grande partie de sa vie à travailler pour le mouvement Baath et à promouvoir l'unité arabe, est décédé en 1989. Sa contribution à la pensée politique arabe reste un sujet d'étude et de débat important dans le contexte historique et contemporain du Moyen-Orient.

L'évolution du baasisme dans le monde arabe et son association avec le pouvoir dans différents pays révèlent une histoire complexe de réformes, de progrès, mais aussi de conflits et de répression. Après sa fondation par Michel Aflaq et ses collègues, le parti Baath a cherché à établir des sections nationales dans divers pays arabes. L'idéologie du Baath, centrée sur l'unité arabe, le socialisme et la laïcité, a trouvé un écho dans plusieurs de ces pays, particulièrement dans les années 1950 et 1960, une période marquée par des luttes anticoloniales et un désir de modernisation et d'indépendance. En Syrie et en Irak, par exemple, le parti Baath est arrivé au pouvoir respectivement en 1963 et en 1968. Ces régimes baathistes ont initié de nombreuses réformes, notamment dans l'éducation, l'industrie et l'agriculture, visant à moderniser l'économie et à réduire les inégalités. Ils ont également promu la laïcité et tenté de diminuer l'influence de la religion dans les affaires de l'État, une démarche en rupture avec la tradition politique de nombreux pays de la région.

Cependant, l'ascension du Baath au pouvoir a également été accompagnée de formes de violence et de répression. En Irak, sous la direction de Saddam Hussein, le régime baathiste a été marqué par des politiques autoritaires, la répression des dissidents, et des conflits internes et externes, comme la guerre Iran-Irak (1980-1988) et l'invasion du Koweït en 1990. En Syrie, sous Hafez al-Assad et plus tard son fils Bashar al-Assad, le régime a également été caractérisé par une forte centralisation du pouvoir, une surveillance étroite de la société et une répression des oppositions. Cette histoire complexe du baasisme en tant qu'idéologie et en tant que pratique du pouvoir souligne la difficulté de mettre en œuvre des idéaux nationalistes et socialistes dans un contexte de diversité ethnique, religieuse et politique. Les régimes baathistes ont, d'un côté, apporté des changements significatifs et des réformes dans les pays où ils ont gouverné, mais d'un autre côté, ils ont souvent recouru à la violence et à la répression pour maintenir leur contrôle, entraînant des divisions et des conflits qui ont profondément marqué l'histoire récente du Moyen-Orient.

L'Échec de la République Arabe Unie et ses Répercussions[modifier | modifier le wikicode]

La fondation de la République Arabe Unie (RAU) en 1958 représente un moment significatif dans l'histoire du nationalisme arabe et en particulier du mouvement baathiste. Ce projet ambitieux visait à concrétiser l'idéal de l'unité arabe, un principe central de l'idéologie du Baath. La RAU était une union politique entre l'Égypte et la Syrie. Elle a été largement inspirée et promue par le président égyptien Gamal Abdel Nasser, une figure de proue du nationalisme arabe. Nasser, bien que n'étant pas membre du parti Baath, partageait plusieurs de ses objectifs, notamment en termes d'unité arabe, de socialisme et de résistance à l'impérialisme.

L'union était vue comme une première étape vers une plus grande unité arabe, un objectif longtemps rêvé par de nombreux nationalistes dans la région. Elle a suscité un grand enthousiasme et de l'espoir parmi ceux qui aspiraient à voir le monde arabe s'unir politiquement et économiquement pour former une force régionale et mondiale majeure. Cependant, la République Arabe Unie s'est avérée de courte durée. En 1961, soit seulement trois ans après sa création, l'union s'est effondrée en raison de plusieurs facteurs. Les différences politiques et économiques entre l'Égypte et la Syrie, la centralisation du pouvoir en Égypte, et le mécontentement croissant en Syrie face à ce qui était perçu comme une domination égyptienne ont contribué à la dissolution de l'union. L'échec de la RAU a été un coup dur pour le mouvement d'unité arabe et a illustré les défis inhérents à la réalisation d'une telle union dans une région aussi diversifiée. Malgré son échec, la RAU reste un chapitre important dans l'histoire du nationalisme arabe et continue d'être étudiée comme un exemple significatif des tentatives d'unité politique dans le monde arabe.

Le Baathisme au Pouvoir: Réformes et Répression en Syrie[modifier | modifier le wikicode]

L'arrivée au pouvoir du parti Baath en Syrie en mars 1963 marque un tournant significatif dans l'histoire politique du pays et du mouvement baathiste dans son ensemble. Cette prise de pouvoir s'est faite par un coup d'État militaire, reflétant la montée en puissance du Baath comme force politique régionale. Sous la direction du parti Baath, la Syrie a connu une série de réformes radicales, conformément aux idéaux du nationalisme arabe, du socialisme et de la laïcité. Ces réformes incluaient la nationalisation des industries, la réforme agraire, et la modernisation de l'éducation et de l'infrastructure. L'objectif était de transformer la Syrie en un État moderne, socialiste et uni, en rupture avec les structures politiques et économiques du passé. Cependant, le régime baathiste en Syrie a également été marqué par une centralisation accrue du pouvoir et une répression politique. Cette période a vu la consolidation du pouvoir entre les mains d'une élite restreinte, souvent dominée par des membres de la communauté alaouite, une branche du chiisme. Cette concentration du pouvoir au sein d'une minorité confessionnelle a conduit à des tensions sectaires et à une certaine confessionnalisation de la politique syrienne.

La confessionnalisation, ou l'augmentation de l'importance de l'identité religieuse et sectaire dans la politique, était en contradiction avec l'idéologie laïque du Baath. Pourtant, elle est devenue une caractéristique de la gouvernance en Syrie, contribuant aux divisions internes et à l'instabilité. Cette dynamique a été exacerbée par les politiques du parti Baath, qui, bien qu'officiellement laïques, ont parfois favorisé certains groupes confessionnels au détriment d'autres, entraînant des sentiments de marginalisation et de mécontentement parmi divers segments de la population syrienne. L'expérience du parti Baath au pouvoir en Syrie, avec ses succès initiaux en matière de réformes sociales et économiques et ses échecs ultérieurs, notamment en termes de gouvernance confessionnelle et de répression politique, a eu un impact profond sur le développement du pays et continue d'influencer la politique et la société syriennes.

Le Nassérisme[modifier | modifier le wikicode]

Fondements et Aspirations du Nassérisme[modifier | modifier le wikicode]

Le nassérisme, une idéologie politique arabe, tire son nom du président égyptien Gamal Abdel Nasser, dont le règne de 1956 à 1970 a marqué une période de transformations radicales dans le monde arabe. Cette idéologie se caractérise par sa quête d'une unité arabe, son aspiration à une indépendance complète des nations arabes, et son intérêt pour une forme de socialisme adaptée au contexte arabe.

Nasser, en tant que figure charismatique et leader influent, a incarné et propagé le nassérisme à travers ses politiques et ses discours. L'un des exemples les plus marquants de cette idéologie en action a été la nationalisation du canal de Suez en 1956, un acte qui a non seulement défié les intérêts occidentaux dans la région, mais a aussi symbolisé la revendication de la souveraineté et de l'autodétermination des pays arabes. Cette décision a entraîné une crise internationale et a finalement renforcé le statut de Nasser en tant que champion de l'indépendance arabe face à l'impérialisme occidental. Le nassérisme visait également à renforcer l'unité entre les pays arabes, partant du principe que malgré leurs différences, ces nations partageaient une histoire, une langue et des aspirations communes. Cette vision s'est concrétisée, bien que brièvement, avec la formation de la République Arabe Unie en 1958, une union politique entre l'Égypte et la Syrie. Bien que cette union ait échoué en 1961, elle reste un exemple historique des efforts de Nasser pour unifier le monde arabe sous une même bannière.

Impacts et Réformes du Nassérisme[modifier | modifier le wikicode]

Sur le plan économique et social, le nassérisme s'est traduit par une série de réformes socialistes. Nasser a initié des programmes de nationalisation et de réforme agraire, visant à redistribuer les richesses et à réduire les inégalités. Ces mesures, bien que différentes du socialisme soviétique, reflétaient une volonté d'adapter les principes socialistes à la réalité arabe, en mettant l'accent sur l'autonomie économique et la justice sociale. D'un point de vue théorique, le nassérisme peut être interprété à travers le prisme de la théorie de la dépendance et du nationalisme postcolonial. En tant que réponse à la domination coloniale et néocoloniale, le nassérisme cherchait à établir une voie indépendante de développement et d'émancipation pour les pays arabes. Cette approche reflète un désir de briser les chaînes de la dépendance économique et politique et de forger une identité nationale et régionale distincte.

Le nassérisme, contrairement au baasisme, est une idéologie qui s'est développée et cristallisée principalement après que Gamal Abdel Nasser ait accédé au pouvoir en Égypte. Cette particularité marque une différence fondamentale dans la trajectoire des deux idéologies au sein du paysage politique arabe. Le baasisme, initié par Michel Aflaq et Salah al-Din al-Bitar, était déjà bien établi en tant qu'idéologie politique avant la prise de pouvoir du parti Baath en Syrie et en Irak. Ce mouvement avait développé une base théorique solide et des objectifs clairs concernant l'unité arabe, le socialisme et la laïcité, bien avant de devenir un acteur politique dominant. En revanche, le nassérisme a émergé comme un ensemble d'idées et de pratiques liées directement à l'ascension et aux actions de Nasser en tant que leader de l'Égypte. Nasser n'était pas à l'origine un idéologue dans le sens traditionnel ; ses idées et ses politiques se sont formées et affinées au cours de son règne. Après le renversement de la monarchie égyptienne en 1952 par le Mouvement des Officiers Libres, dont Nasser était un membre clé, il a progressivement élaboré une vision pour l'Égypte et le monde arabe qui allait devenir connue sous le nom de nassérisme. Cette vision s'est concrétisée avec des actes tels que la nationalisation du canal de Suez et la promotion de l'unité arabe, qui ont été des moments décisifs dans la définition du nassérisme. De plus, les réformes socio-économiques entreprises par Nasser en Égypte, telles que la réforme agraire et la nationalisation des industries, ont reflété ses principes idéologiques.

Nassérisme, Baasisme et la République Arabe Unie[modifier | modifier le wikicode]

La fondation de la République Arabe Unie (RAU) en 1958 est l'une des manifestations les plus significatives de la pensée nassériste. Cette union, qui regroupait l'Égypte et la Syrie, était motivée par l'ambition de Gamal Abdel Nasser de réaliser l'unité arabe, un des piliers centraux de son idéologie. La vision de Nasser pour la RAU allait au-delà d'une simple alliance politique; elle visait à créer une entité politique et économique unifiée qui pourrait agir comme un moteur de développement et de puissance dans la région. Pour Nasser, la RAU était une étape vers la réalisation d'un rêve panarabe, où les nations arabes pouvaient transcender leurs frontières coloniales et historiques pour former une union plus grande et plus forte. Cependant, dans la pratique, la RAU a rencontré plusieurs défis. L'un des aspects les plus controversés était la perception, surtout en Syrie, que l'union menait à une sorte de domination égyptienne. En théorie, la RAU était censée être une union entre égaux, mais en pratique, elle a souvent été perçue comme une tentative par l'Égypte, et en particulier par Nasser, de contrôler ou d'influencer la politique syrienne. Cette perception a été exacerbée par la centralisation du pouvoir au Caire et la marginalisation des voix politiques syriennes.

La Syrie, dans le cadre de la RAU, était souvent vue comme une province égyptienne plutôt qu'un partenaire égal. Cette dynamique a contribué à la montée du mécontentement en Syrie, où de nombreux politiciens et citoyens se sont sentis marginalisés et dominés par l'Égypte. Cette situation a finalement conduit à la dissolution de la RAU en 1961, lorsque la Syrie s'est retirée de l'union. La RAU, malgré son existence éphémère, reste un chapitre important dans l'histoire du nationalisme arabe et de la pensée nassériste. Elle symbolise les aspirations à l'unité arabe et les défis associés à la mise en œuvre de cette idée dans une région caractérisée par une grande diversité politique, culturelle et sociale. L'expérience de la RAU a également souligné les limites de l'approche centralisée et dirigiste de Nasser en matière d'unification arabe.

Nassérisme dans le Contexte Régional et Mondial[modifier | modifier le wikicode]

Les accords de Camp David, signés en 1979 entre l'Égypte et Israël, représentent un tournant majeur dans l'histoire du Moyen-Orient et sont souvent cités comme marquant la fin de l'ère du panarabisme. Ces accords, qui ont conduit à un traité de paix entre l'Égypte et Israël, ont été perçus par de nombreux pays arabes comme une trahison des principes du panarabisme et de la solidarité arabe. Le panarabisme, en tant que mouvement politique et idéologique, avait longtemps promu l'idée d'une unité arabe contre les influences et les interventions étrangères, notamment contre l'État d'Israël, perçu comme un implant colonial en terre arabe. Les accords de Camp David, négociés et signés par le président égyptien Anouar el-Sadate, ont rompu avec cette ligne de pensée en établissant des relations diplomatiques officielles et une reconnaissance mutuelle entre l'Égypte et Israël.

La signature de ces accords a eu des répercussions considérables. L'Égypte, l'un des leaders historiques du monde arabe et un fervent défenseur du panarabisme sous Nasser, a été isolée dans le monde arabe. En réponse à la normalisation des relations avec Israël, la Ligue arabe a suspendu l'adhésion de l'Égypte et a déplacé son siège hors du Caire. Cette exclusion symbolisait le profond mécontentement et la désapprobation des autres pays arabes face à la décision unilatérale de l'Égypte.

La fin des années 1970 et le début des années 1980 marquent ainsi une période de transition dans la politique arabe, avec un déclin de l'influence du panarabisme comme force unificatrice et une augmentation des politiques nationales et des intérêts individuels des États. Les accords de Camp David ont non seulement redéfini les relations entre l'Égypte et Israël, mais ont également eu un impact durable sur la dynamique régionale et la perception de l'unité arabe. Cette évolution reflète la complexité de la politique du Moyen-Orient, où les aspirations idéologiques se heurtent souvent aux réalités politiques et géopolitiques. Le passage de l'ère du panarabisme à une ère de politiques nationales plus pragmatiques illustre la nature changeante des alliances et des priorités dans la région.

La ligue des États arabes (ligue arabe)[modifier | modifier le wikicode]

Les Prémices de la Coopération Arabe et les Concepts d'Union[modifier | modifier le wikicode]

En 1944, l'Égypte, sous le règne du roi Farouk, jouait un rôle de premier plan dans les discussions visant à établir une forme de coopération ou d'union entre les pays arabes. Cette période marque une étape importante dans les efforts de collaboration régionale, précédant la formation de la Ligue arabe en 1945. À cette époque, plusieurs idées et projets concernant l'unité ou la coopération arabe étaient en discussion. L'un des concepts clés était celui de la Grande Syrie, qui envisageait une union des territoires syriens, libanais, jordaniens et palestiniens. Cette idée, enracinée dans l'histoire et la culture commune de la région, était considérée par certains comme une façon naturelle de réunir ces peuples partageant des liens étroits.

Un autre concept était celui du "Croissant Fertile", qui comprenait la Syrie, l'Irak, le Liban, la Jordanie et la Palestine. Cette idée était fondée sur des considérations géographiques et économiques, le Croissant Fertile étant une région historiquement riche et fertile, considérée comme le berceau de plusieurs civilisations anciennes. En outre, l'idée de créer une ligue ou une fédération des pays arabes gagnait également du terrain. Cette proposition visait à établir une structure formelle pour la coopération politique, économique et culturelle entre les États arabes, permettant une coordination plus efficace de leurs politiques et intérêts communs.

La Formation et les Défis de la Ligue des États Arabes[modifier | modifier le wikicode]

Ces discussions ont abouti à la formation de la Ligue arabe en 1945, une organisation régionale destinée à favoriser la coopération entre les États membres et à promouvoir les intérêts et l'identité arabes. La création de la Ligue arabe a été un moment décisif dans l'histoire moderne du Moyen-Orient, symbolisant la reconnaissance de l'importance de la coopération régionale et de l'unité arabe. Ces différentes propositions reflètent la diversité des approches et des visions concernant l'unité arabe à cette époque. Elles montrent également comment, avant même l'essor du nassérisme et du baasisme, des efforts étaient déjà en cours pour établir des structures politiques et des alliances régionales parmi les pays arabes.

Le protocole d'Alexandrie, signé en 1944, a jeté les bases de ce qui allait devenir la Ligue des États arabes. Cette étape cruciale a marqué un effort concerté des nations arabes pour formaliser une structure de coopération régionale, une initiative qui reflétait les aspirations croissantes à l'unité et à la collaboration au sein du monde arabe. Le 22 mars 1945, la Ligue des États arabes a été officiellement formée. Ses membres fondateurs, l'Égypte, l'Arabie Saoudite, l'Irak, la Jordanie (alors Transjordanie), le Liban, la Syrie et le Yémen du Nord, représentaient un large éventail de la diversité politique, culturelle et économique du monde arabe. L'objectif de la Ligue était de promouvoir les intérêts politiques, économiques, culturels et sociaux des pays arabes, ainsi que de coordonner leurs efforts dans des domaines d'intérêt commun.

Cependant, le fonctionnement interne de la Ligue des États arabes s'est avéré complexe. Sa structure, nécessitant un consensus parmi ses membres pour les décisions majeures, a souvent rendu difficile la prise de décisions rapides et efficaces. Cette difficulté était exacerbée par la grande diversité des systèmes politiques, des orientations idéologiques et des intérêts nationaux des États membres. En outre, malgré leur identité culturelle et historique commune, les pays arabes présentaient peu d'intégration économique. Les échanges commerciaux entre les États membres étaient relativement limités, et leurs économies étaient souvent orientées vers des relations avec des partenaires non-arabes. Cette situation reflétait les défis posés par les frontières et les structures économiques héritées de l'époque coloniale, ainsi que par les disparités en termes de ressources naturelles et de développement industriel. La Ligue des États arabes, en dépit de ces défis, a représenté un pas important vers la reconnaissance et l'affirmation de l'identité arabe sur la scène internationale. Toutefois, la réalisation de ses objectifs d'unité et de coopération a souvent été entravée par les réalités politiques et économiques complexes du monde arabe.

Tentatives d'Unité Régionale: Union des Républiques Arabes et le Maghreb[modifier | modifier le wikicode]

La tentative de créer l'Union des Républiques arabes en 1971 est un autre exemple des efforts pour renforcer l'unité et la coopération dans le monde arabe, bien que, elle n'ait pas abouti à des résultats concrets. Cette initiative, qui visait à unir l'Égypte, la Libye et la Syrie dans une fédération, reflétait la poursuite de l'idéal d'unité arabe qui avait été au cœur de nombreuses politiques régionales depuis les années 1950. Cependant, en dépit de son annonce en grande pompe, l'Union des Républiques arabes a souffert de désaccords internes et d'un manque de coordination concrète entre les pays membres. Les différences idéologiques, les intérêts nationaux divergents et les personnalités fortes de leurs dirigeants ont entravé toute intégration politique ou économique significative. Cette expérience a mis en évidence les défis inhérents à la création d'une union politique dans une région aussi diversifiée.

Au Maghreb également, diverses tentatives de rassembler les États de la région n'ont pas abouti. Malgré des liens culturels et historiques communs, les pays du Maghreb (Maroc, Algérie, Tunisie, Libye et Mauritanie) ont connu des trajectoires politiques différentes, rendant difficile la mise en place d'une coopération régionale étroite. Les tentatives de création d'organisations ou d'unions ont souvent été entravées par des rivalités politiques, des différences d'orientation idéologique et des problèmes économiques.

Le Conseil de Coopération du Golfe Face aux Nouvelles Dynamiques Régionales[modifier | modifier le wikicode]

Après la révolution islamique en Iran en 1979, les pays du Golfe, confrontés à une nouvelle dynamique régionale, ont tenté de former un conseil de concertation. Cette initiative visait à coordonner les politiques et à renforcer la sécurité collective face à ce qui était perçu comme une menace croissante de l'Iran. Cependant, là encore, les résultats concrets ont été limités. Bien que le Conseil de coopération du Golfe (CCG) ait été formé en 1981, regroupant l'Arabie saoudite, le Koweït, les Émirats arabes unis, le Qatar, Bahreïn et Oman, il a été confronté à ses propres défis internes, notamment en termes de politique étrangère et de sécurité.

Ces différentes tentatives soulignent la complexité des efforts d'unification et de coopération dans une région marquée par des divisions politiques, économiques et idéologiques profondes. Elles reflètent également les limites des initiatives régionales dans le contexte d'un Moyen-Orient et d'un Maghreb en constante évolution.

Le panislamisme[modifier | modifier le wikicode]

Le wahhabisme[modifier | modifier le wikicode]

Le wahhabisme, une doctrine religieuse et une forme de mouvement islamique, a eu une influence significative dans certaines régions du monde arabe, mais son lien avec l'arabisme ou le nationalisme arabe est complexe et mérite d'être clarifié.

Le wahhabisme, fondé par Mohammed ibn Abd al-Wahhab au XVIIIe siècle dans la péninsule arabique, prône une interprétation stricte et puritaine de l'islam. Il se concentre sur un retour aux pratiques des "salaf" ou des premières générations de musulmans, considérées comme des modèles de piété et de pratique islamique. Cette approche insiste sur la stricte adhésion à la sharia (loi islamique) et rejette les innovations (bid'ah) dans la pratique religieuse. Cependant, le lien entre le wahhabisme et l'arabisme ou le nationalisme arabe est indirect. Le nationalisme arabe, en tant que mouvement politique et idéologique, met l'accent sur l'unité et l'indépendance des Arabes en tant que peuple, souvent en se concentrant sur des aspects culturels, linguistiques et historiques communs. Bien que le wahhabisme soit une force influente dans la péninsule arabique, en particulier en Arabie saoudite, il est principalement une réforme religieuse plutôt qu'un mouvement nationaliste.

Le wahhabisme a cependant joué un rôle dans la formation de l'identité politique et religieuse dans certaines parties du monde arabe, en particulier en Arabie saoudite. L'alliance entre Mohammed ibn Abd al-Wahhab et la maison des Saoud a été cruciale dans la formation de l'État saoudien moderne. Cette alliance a intégré des éléments du wahhabisme dans les structures politiques et sociales de l'Arabie saoudite, mais cela ne doit pas être confondu avec le nationalisme arabe en tant que tel. Il est également important de noter que le nationalisme arabe et le wahhabisme peuvent même être en tension. Le nationalisme arabe, avec ses tendances laïques et son accent sur l'unité politique et culturelle, peut entrer en conflit avec l'approche religieuse conservatrice et parfois sectaire du wahhabisme. En résumé, bien que le wahhabisme ait influencé l'histoire et la politique de certaines régions arabes, il représente une tendance distincte et parfois même contradictoire par rapport aux principes du nationalisme arabe.

La relation entre Mohammed Ben Abdelwahhab, le fondateur du wahhabisme, et Mohammed Ibn Saoud, le chef de la maison Saoud, est cruciale pour comprendre la genèse de l'Arabie saoudite moderne et l'influence du wahhabisme dans la région. Mohammed Ben Abdelwahhab, né en 1703, a prêché une forme de réforme islamique qui visait à purifier la pratique religieuse de ce qu'il considérait comme des innovations et des superstitions qui s'étaient introduites dans l'islam au fil du temps. Son enseignement se concentrait sur un retour strict aux enseignements du Coran et de la Sunna, en suivant l'exemple des premières générations de musulmans (salaf).

Sa rencontre et son alliance avec Mohammed Ibn Saoud au milieu du XVIIIe siècle ont marqué un tournant décisif. Ibn Saoud, le dirigeant de la région de Najd dans la péninsule arabique, a adopté les enseignements de Abdelwahhab et a intégré ses principes dans la gouvernance de son territoire. Cette alliance a combiné la réforme religieuse wahhabite avec l'ambition politique et militaire des Saoud, créant une force puissante dans la région. Ensemble, ils ont remis en question l'autorité du califat ottoman, dominant dans la région à l'époque, et ont cherché à étendre leur influence. Leur mouvement n'était pas seulement religieux, mais aussi politique, cherchant à établir un nouvel ordre basé sur les principes wahhabites. Cette combinaison de réforme religieuse et d'ambition politique a entraîné une politisation croissante de la religion dans la région. Le résultat de cette alliance a été la création du premier Émirat saoudien, avec sa capitale à Dariya. Cet émirat a été le prédécesseur de l'Arabie saoudite moderne et a posé les bases de l'influence wahhabite dans la gouvernance et la société saoudiennes. L'alliance entre les Saoud et Abdelwahhab a ainsi joué un rôle clé dans la formation de l'État saoudien et a eu une influence durable sur la politique et la pratique religieuse dans la région du Golfe.

L'accord entre Mohammed Ben Abdelwahhab et Mohammed Ibn Saoud est souvent décrit comme un pacte de partage de pouvoir et de soutien mutuel qui a jeté les bases de l'État saoudien moderne. Ce pacte, qui remonte au milieu du XVIIIe siècle, a établi une division des responsabilités entre les deux parties : Ben Abdelwahhab se concentrait sur les questions religieuses, prêchant et établissant les fondements wahhabites de l'islam, tandis qu'Ibn Saoud s'occupait des aspects politiques et militaires, étendant son pouvoir sur la région. Ce partenariat unique entre le pouvoir religieux et le pouvoir politique a été essentiel pour la fondation et l'expansion de l'Émirat saoudien, l'entité politique qui allait finalement devenir l'Arabie saoudite. Ben Abdelwahhab a fourni la légitimité religieuse, en insistant sur une interprétation puritaine et stricte de l'islam, tandis qu'Ibn Saoud a utilisé cette légitimité pour unifier et étendre son pouvoir sur les tribus et territoires de la péninsule arabique.

Le pacte entre les deux hommes a établi une relation symbiotique entre la maison des Saoud et les descendants religieux de Ben Abdelwahhab (souvent appelés les "Al ash-Sheikh"), qui a persisté pendant près de 300 ans. Cette relation a été caractérisée par un soutien mutuel, les Saoud protégeant et promouvant le wahhabisme, tandis que les chefs religieux wahhabites légitimaient le pouvoir politique des Saoud. Cette alliance a fourni l'impulsion idéologique et politique nécessaire à l'expansion saoudienne dans la péninsule arabique. Elle a également établi un modèle de gouvernance dans lequel la religion et l'État sont étroitement liés, avec le wahhabisme devenant une caractéristique définissant de l'identité nationale saoudienne. L'accord original entre Ben Abdelwahhab et Ibn Saoud a donc joué un rôle fondamental dans la formation de l'Arabie saoudite et continue d'influencer la structure politique et religieuse du pays. Cette relation unique entre le pouvoir religieux et le pouvoir politique reste un élément central de la société et de la politique saoudiennes.

Le modernisme arabe ou « nahda »[modifier | modifier le wikicode]

La Nahda, ou Renaissance arabe, est une période cruciale dans l'histoire intellectuelle et culturelle du monde arabe, et l'Égypte a joué un rôle central dans ce mouvement. Jamal al-Din al-Afghani (1839-1897) est souvent cité comme l'un des principaux théoriciens de cette époque. Son influence et ses idées ont été déterminantes dans le façonnement du modernisme arabe et du modernisme islamique.

Al-Afghani, un penseur et un activiste politique, s'est établi en Égypte dans la trentaine. Son séjour en Égypte a été marqué par une collaboration étroite avec Mohammed Abduh, qui allait devenir mufti d'Égypte. Ensemble, ils ont entrepris de réformer et de moderniser la pensée et les institutions islamiques, cherchant à répondre aux défis posés par l'expansion européenne et la domination coloniale. Leur approche, souvent qualifiée de modernisme islamique, visait à réconcilier les principes islamiques avec les idées modernes et les avancées scientifiques. Ils prônaient une interprétation du Coran et des traditions islamiques qui était à la fois fidèle aux sources et ouverte à de nouvelles interprétations et adaptations aux réalités contemporaines. Cette vision cherchait à dynamiser la société musulmane et à promouvoir l'éducation, la rationalité et le progrès scientifique comme moyens de résister à l'influence occidentale et de revitaliser la culture arabo-musulmane.

Le modernisme islamique d'Al-Afghani et d'Abduh a eu un impact significatif dans le monde arabe, influençant de nombreux intellectuels et réformateurs ultérieurs. Leur travail a contribué à la Nahda en encourageant un esprit de questionnement et de réforme dans les domaines de la religion, de la philosophie, de la littérature et de la politique. La Nahda, en tant que mouvement, a représenté un tournant décisif pour le monde arabe, marquant une période de renaissance intellectuelle, culturelle et politique. L'influence de penseurs comme Al-Afghani et Abduh a été cruciale pour façonner une vision du monde arabe qui était à la fois ancrée dans son héritage et tournée vers l'avenir, cherchant à trouver un équilibre entre tradition et modernité.

Le processus de la Nahda a entraîné un essor culturel remarquable dans le monde arabe, caractérisé par une redécouverte et une réévaluation du patrimoine historique et culturel arabe. Ce mouvement a marqué une période de réveil intellectuel et artistique, au cours de laquelle les intellectuels, écrivains, poètes, et artistes arabes ont exploré et célébré l'histoire et la culture arabes, tout en les intégrant dans un contexte moderne. L'arabisme culturel de cette période a été marqué par un regain d'intérêt pour la langue arabe, la littérature, l'histoire et les arts. Les intellectuels de la Nahda ont cherché à revivifier la langue arabe, la modernisant tout en préservant son héritage riche et complexe. Cette période a vu l'émergence de nouvelles formes littéraires, telles que le roman et la nouvelle, ainsi que le renouveau de formes classiques comme la poésie.

La redécouverte du patrimoine historique et glorieux du monde arabe a été une autre composante clé de l'arabisme culturel de la Nahda. Les historiens et les penseurs ont réexaminé les périodes de grandeur de la civilisation arabo-musulmane, comme l'âge d'or islamique, et ont cherché des moyens de renouer avec cet héritage dans le contexte des défis contemporains. Cette approche visait à renforcer le sentiment de fierté et d'identité arabe tout en fournissant un cadre pour la modernisation et le progrès. En outre, l'essor culturel de la Nahda a également été caractérisé par un dialogue accru avec les cultures et les idées occidentales. Les intellectuels de la Nahda ont souvent plaidé pour une approche équilibrée, embrassant les avancées scientifiques et intellectuelles de l'Occident tout en préservant les valeurs et les traditions arabes. La Nahda, dans son ensemble, a donc représenté un moment crucial dans l'histoire culturelle du monde arabe, marquant une période de renouvellement, de réflexion et d'innovation. L'impact de ce mouvement se fait encore sentir aujourd'hui, tant dans le domaine de la culture que dans celui de la pensée politique et sociale dans le monde arabe.

Le mouvement de la Nahda, caractérisé par son approche inclusive et son accent sur la langue arabe, a transcendé les distinctions confessionnelles, unifiant les Arabes de différentes croyances autour d'un patrimoine culturel et linguistique commun. Ce mouvement, en mettant l'accent sur l'arabe comme langue de la littérature, de l'éducation, et du discours public, a favorisé un sentiment d'identité panarabe qui allait au-delà des divisions religieuses ou sectaires. La Nahda a encouragé une renaissance dans tous les aspects de la vie intellectuelle et culturelle. Elle a vu la création de partis politiques, d'associations, de ligues et d'organisations qui promouvaient divers aspects de l'éducation, de la réforme sociale et de la modernisation. Ces groupes étaient souvent animés par l'idée que la renaissance culturelle et linguistique était essentielle pour le renouveau politique et social du monde arabe.

Les partis politiques formés pendant cette période cherchaient à canaliser les aspirations nationales et régionales en programmes politiques. Ces partis, bien que divers dans leurs orientations idéologiques, partageaient souvent un engagement envers le renforcement de l'identité arabe et la modernisation de la société. Les associations et ligues créées durant la Nahda jouaient un rôle clé dans la diffusion d'idées nouvelles, l'organisation d'activités culturelles, et la promotion de l'éducation et de la recherche. Elles étaient des espaces où les intellectuels et les artistes pouvaient se rencontrer, échanger des idées et collaborer sur des projets culturels et éducatifs. Cette période a également vu l'émergence de nouvelles formes de médias, comme les journaux et les magazines, qui ont joué un rôle crucial dans la diffusion des idées de la Nahda. Ces publications offraient une plateforme pour les débats sur la réforme, la politique, la littérature et la culture, et étaient essentielles pour atteindre un public plus large.

Le panislamisme promu par le sultan ottoman Abdülhamid II (règne de 1876 à 1909) représente une approche politique particulière qui a influencé le nationalisme arabe, bien qu'il soit distinct de ce dernier. Le panislamisme d'Abdülhamid II visait à consolider l'autorité ottomane et à unifier les divers peuples musulmans de l'empire autour de l'islam, en réponse aux pressions internes et externes auxquelles l'Empire ottoman était confronté à cette époque.

Abdülhamid II, confronté à des défis tels que la montée des nationalismes dans différentes parties de l'empire et les pressions des puissances européennes, a adopté une stratégie de centralisation politique et administrative. Il a cherché à renforcer le contrôle central de l'Empire sur ses territoires, y compris les régions arabes, en mettant en place des procédures de centralisation, d'investigation et de répression. L'accent mis par Abdülhamid sur l'islam comme élément unificateur visait à contrer les tendances séparatistes et à maintenir la cohésion de l'empire. Cependant, cette stratégie a souvent eu l'effet contraire dans les régions arabes, où la centralisation et la répression ont suscité du ressentiment et ont alimenté les sentiments nationalistes arabes.

De nombreux activistes et intellectuels arabes, en réponse aux politiques répressives d'Abdülhamid II, ont trouvé refuge en Égypte, qui était alors perçue comme un centre de pensée libérale et de relative autonomie par rapport à l'autorité ottomane. L'Égypte est devenue un foyer pour la pensée nationaliste arabe et la Nahda, où les exilés pouvaient s'exprimer plus librement et participer au débat intellectuel et politique. Bien que le panislamisme d'Abdülhamid ait été conçu comme un moyen de renforcer l'empire ottoman, il a eu des répercussions importantes sur le développement du nationalisme arabe. Les politiques du sultan ont contribué, paradoxalement, à l'éveil d'une conscience nationale parmi les Arabes, qui ont commencé à chercher des moyens de réaliser leur propre autonomie politique et culturelle.

Le conflit israélo-palestinien[modifier | modifier le wikicode]

Origines Historiques du Nom "Palestine"[modifier | modifier le wikicode]

La notion de "Palestine" remonte bien avant l'Empire ottoman, trouvant ses origines dans l'Antiquité. Le nom "Palestine" lui-même a des racines historiques qui remontent à plusieurs millénaires.

Le terme "Palestine" est dérivé de "Philistie" ou "Péleshet" en hébreu, qui faisait référence à une région habitée par les Philistins autour du 12ème siècle avant notre ère. Les Philistins étaient un peuple de la mer Égée qui s'est installé le long de la côte sud-est de la Méditerranée, dans la région qui comprend aujourd'hui la bande de Gaza et ses environs. Le terme "Palestina" a été utilisé pour la première fois de manière officielle par l'empereur romain Hadrien après la révolte juive de Bar Kokhba en 135 après J.-C. Dans un effort pour effacer le lien juif avec la terre d'Israël suite à la révolte, Hadrien a rebaptisé la province de Judée en "Syria Palaestina", nom qui est par la suite devenu courant dans la littérature et les documents historiques.

Au fil des siècles, la région a connu diverses dominations et influences, y compris par les Byzantins, les Arabes musulmans, les Croisés, les Mamelouks, et finalement les Ottomans, chacun laissant leur empreinte culturelle et historique. Toutefois, le terme "Palestine" a continué à être utilisé à travers ces périodes pour désigner cette région géographique. Il est important de noter que la conception moderne de la Palestine en tant qu'entité politique et nationale distincte a pris forme plus récemment dans l'histoire, en particulier avec le démantèlement de l'Empire ottoman après la Première Guerre mondiale et la mise en place du mandat britannique sur la Palestine. La notion contemporaine de la Palestine, en tant que territoire et identité nationale, est donc en partie le résultat des développements politiques du XXe siècle.

Durant les premiers siècles de l'expansion islamique, après la conquête arabe de la région au 7ème siècle, la "terre sainte" était souvent incluse dans des entités administratives plus larges sous le califat islamique. Cependant, le terme "Palestine" était utilisé dans divers contextes pour désigner la région, bien que ce ne fût pas une entité administrative officielle sous la domination islamique. Ce terme était employé à la fois par les populations locales et par les étrangers pour désigner la région géographique qui comprenait la Judée, la Samarie, la Galilée, et d'autres zones. Avec les conquêtes européennes, notamment lors des croisades, le terme "Palestine" a commencé à être utilisé plus fréquemment pour désigner cette région. Les croisés, qui cherchaient à contrôler les lieux saints du christianisme, ont utilisé ce terme dans leurs descriptions et leurs cartographies.

Au fil du temps, et particulièrement au XIXe et XXe siècles, avec l'accroissement de l'intérêt européen pour la région et le déclin de l'Empire ottoman, le terme "Palestine" a été de plus en plus utilisé pour décrire spécifiquement cette région. Ce changement a coïncidé avec l'émergence du nationalisme arabe et du sionisme, où les deux mouvements ont revendiqué des liens historiques et culturels avec la Palestine. Les habitants arabes de cette région ont commencé à adopter le terme "Palestine" pour désigner le territoire sur lequel ils envisageaient la création d'un futur État arabe. Cette utilisation a été renforcée par le mandat britannique sur la Palestine après la Première Guerre mondiale, où la Palestine a été reconnue officiellement comme une unité territoriale distincte.

Palestine sous l'Influence Ottomane et le Mandat Britannique[modifier | modifier le wikicode]

Au 19ème siècle, Jérusalem et d'autres parties de ce qui était alors connu sous le nom de Palestine étaient le théâtre de rivalités intenses et complexes, impliquant des Églises, des États et des puissances étrangères. Ces tensions ont été particulièrement aiguës à Jérusalem, un lieu de grande importance religieuse pour les chrétiens, les musulmans et les juifs. Les "Lieux saints" de Jérusalem et de ses environs étaient au centre de luttes d'influence entre différentes confessions chrétiennes (catholiques, orthodoxes, arméniennes, etc.) ainsi qu'entre les puissances européennes, chacune cherchant à étendre ou à protéger son influence dans la région. Cette compétition était souvent liée aux ambitions impérialistes des puissances européennes, notamment la France, la Russie et le Royaume-Uni, chacune utilisant la protection des communautés chrétiennes comme prétexte pour intervenir dans les affaires ottomanes.

Face à ces tensions et à l'ingérence étrangère croissante, l'Empire ottoman a pris des mesures pour renforcer son contrôle direct sur Jérusalem. Placer la ville sous l'autorité directe de Constantinople (aujourd'hui Istanbul) était un moyen pour le gouvernement ottoman de maintenir l'ordre et d'affirmer sa souveraineté sur ce territoire stratégiquement et symboliquement important. Cette décision reflétait également la nécessité de gérer les relations délicates entre les différentes communautés religieuses et de répondre aux pressions des puissances étrangères. Cette période a vu l'application du Statu quo, un ensemble de règles et de conventions établies pour réguler les droits et les privilèges des différentes communautés religieuses dans les Lieux saints. Le Statu quo était destiné à maintenir l'équilibre entre les différentes communautés et à prévenir les conflits, bien que les tensions aient persisté.

La période suivant la disparition de l'Empire ottoman après la Première Guerre mondiale a été une ère de profonds changements politiques et territoriaux au Moyen-Orient, y compris pour la région que nous connaissons aujourd'hui sous le nom de Palestine. Avec la fin de l'Empire ottoman, la Palestine est passée sous mandat britannique, conformément aux accords de la Société des Nations. Les Britanniques ont continué à utiliser le terme "Palestine" pour désigner ce territoire, bien que l'expression "Syrie du Sud" ait également été employée parfois pour faire référence à la région, reflétant sa proximité géographique et historique avec la Syrie.

Du côté sioniste, le terme "État arabe" était parfois utilisé pour désigner la partie du mandat britannique de Palestine envisagée pour la majorité arabe dans le cadre de la proposition de partition de l'ONU en 1947. Cette proposition envisageait la création de deux États distincts, l'un juif et l'autre arabe, avec Jérusalem sous un régime international spécial. Cependant, l'État arabe envisagé dans le plan de partage n'a jamais été établi, en partie à cause du rejet du plan par les dirigeants arabes et de la guerre israélo-arabe de 1948.

Émergence du Nationalisme Palestinien et Conflits du 20ème Siècle[modifier | modifier le wikicode]

Le processus de nationalisme arabe dans la région de la Palestine mandataire était complexe et influencé par divers facteurs. Les vagues de migrations, tant de Juifs fuyant les persécutions en Europe que d'Arabes venant d'autres régions du Moyen-Orient, ont modifié la composition démographique de la région. De plus, les enjeux politico-religieux, liés à la fois à l'essor du sionisme et au nationalisme arabe, ont joué un rôle clé dans la définition des identités et des revendications territoriales. Pour les nationalistes arabes dans la Palestine mandataire et ailleurs, la défense de la terre était souvent exprimée en termes d'arabisme, une idéologie qui mettait l'accent sur l'identité et l'unité arabe. Ce sentiment a été renforcé par la perception d'une menace à l'identité arabe et aux droits des populations arabes face à l'immigration juive et aux aspirations sionistes dans la région.

Pendant la période du mandat britannique en Palestine, les tensions entre les communautés juive et arabe ont conduit à une série de violences, dont des massacres, des assassinats et des attentats. La Grande Révolte arabe de 1936-1939 en Palestine est un moment clé de cette période. Elle a été déclenchée par des frustrations croissantes au sein de la population arabe en raison de l'immigration juive et des politiques du mandat britannique. Cette révolte a vu des attaques contre des cibles juives et britanniques et a été marquée par une répression sévère de la part des Britanniques. En réponse à cette révolte et aux tensions croissantes, le gouvernement britannique a fait appel à la Société des Nations, qui a mis en place la Commission Peel en 1937. La Commission Peel a proposé le premier plan de partage de la Palestine, envisageant la création de deux États distincts, l'un juif et l'autre arabe, avec Jérusalem sous contrôle international. Ce plan a été rejeté par la majorité des leaders arabes, qui s'opposaient à toute forme de division territoriale et à l'idée d'un État juif. Il a également été rejeté par les groupes révisionnistes juifs, qui revendiquaient un territoire plus vaste pour l'État juif.

Les tensions ont continué à monter jusqu'en 1947, moment où les Britanniques, épuisés par les difficultés de gouvernance et ne parvenant pas à maintenir la paix, ont décidé de remettre leur mandat sur la Palestine à l'Organisation des Nations Unies (ONU). L'ONU a alors proposé un second plan de partage en 1947, qui prévoyait également la création de deux États. Ce plan a été accepté par la majorité des représentants juifs, mais rejeté par les Arabes palestiniens et les États arabes voisins. La période qui a suivi a vu l'escalade des hostilités et a mené à la guerre israélo-arabe de 1948, suite à la déclaration d'indépendance de l'État d'Israël. Cette guerre et les événements qui l'ont entourée ont été déterminants dans la formation du conflit israélo-arabe moderne, avec des conséquences durables pour la région.

Nakba et Formation de la Diaspora Palestinienne[modifier | modifier le wikicode]

L'exode palestinien de 1948, communément appelé la Nakba (qui signifie "catastrophe" en arabe), est un événement central dans l'histoire palestinienne et du conflit israélo-arabe. Il fait référence à la fuite et à l'expulsion de centaines de milliers de Palestiniens arabes de leurs maisons et de leurs terres pendant la guerre de 1948 qui a suivi la création de l'État d'Israël. La Nakba a commencé en contexte de la guerre civile dans le mandat britannique de Palestine, exacerbée par le plan de partage de l'ONU en 1947, et s'est intensifiée avec la guerre arabo-israélienne de 1948. Durant cette période, de nombreux villages et villes arabes ont été vidés de leurs habitants en raison des combats, des expulsions, des peurs de massacres, et de la pression psychologique. Cette période a vu des déplacements massifs de population, aboutissant à une crise humanitaire et à la formation d'une importante population de réfugiés palestiniens.

La question des réfugiés palestiniens est devenue l'une des problématiques les plus complexes et les plus durables du conflit israélo-arabe. Beaucoup de ces réfugiés et leurs descendants vivent aujourd'hui dans des camps de réfugiés dans des pays voisins tels que le Liban, la Jordanie, et la Syrie, ainsi que dans la bande de Gaza et en Cisjordanie. Le droit au retour des réfugiés palestiniens est un sujet clé dans les négociations de paix, mais reste un point de discorde majeur. La Nakba a également été un facteur déterminant dans la formation de la diaspora palestinienne. Les Palestiniens qui ont été déplacés de leurs maisons et qui se sont établis dans d'autres pays ont continué à maintenir leur identité culturelle et nationale, contribuant à la cause palestinienne de différentes manières. La commémoration annuelle de la Nakba est un moment important pour la communauté palestinienne, tant dans les territoires palestiniens que dans la diaspora, symbolisant leur expérience partagée de la perte, de la résistance et de l'espoir de retour.

Le Mouvement Palestinien de Libération: De l'OLP au Hamas[modifier | modifier le wikicode]

Le mouvement nationaliste palestinien a connu une évolution significative vers la fin des années 1950 et au début des années 1960, marquée par un recentrage sur l'identité palestinienne spécifique, en partie en réaction à la perception que les intérêts palestiniens n'étaient pas suffisamment représentés ou défendus par les leaders arabes régionaux. Cette période a vu l'émergence de nouvelles organisations et mouvements politiques palestiniens, dont le plus notable est l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), fondée en 1964. Yasser Arafat, qui est devenu une figure de proue du mouvement palestinien, a joué un rôle crucial dans cette évolution. Arafat et ses collègues, au sein de la structure de l'OLP et notamment du mouvement Fatah, ont commencé à articuler une vision qui mettait l'accent sur la lutte pour un État palestinien indépendant, distinct des objectifs panarabes plus larges qui avaient dominé les discours antérieurs sur la Palestine.

Cette redéfinition du mouvement palestinien s'est accompagnée d'une stratégie de lutte armée, vue comme un moyen de libération et de revendication de droits sur la terre palestinienne. L'OLP et d'autres groupes palestiniens ont mené diverses opérations militaires et attaques contre des cibles israéliennes, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur d'Israël. Cette période a également été marquée par des tensions et des conflits avec les États arabes voisins, certains soutenant le mouvement palestinien tandis que d'autres s'opposaient à ses méthodes ou à ses objectifs politiques. Les années 1958-59 ont marqué un tournant dans le mouvement nationaliste palestinien, avec un passage d'une orientation panarabe à une concentration sur l'identité et les aspirations nationales palestiniennes. Sous la direction de figures comme Yasser Arafat, le mouvement a commencé à revendiquer de manière plus explicite la création d'un État palestinien, utilisant la lutte armée comme un moyen de parvenir à ses objectifs.

Dès 1963, des opérations militaires menées par des groupes palestiniens, notamment le Fatah dirigé par Yasser Arafat, ont commencé à opérer depuis la Jordanie contre des cibles israéliennes. Ces actions ont contribué à établir Arafat comme une figure centrale du mouvement palestinien, gagnant le soutien populaire parmi les Arabes grâce à ces initiatives militaires. Cependant, les ripostes israéliennes à ces attaques ont mis la Jordanie dans une position délicate. En 1970, après une série de tensions croissantes et de conflits, connus sous le nom de Septembre Noir, le roi Hussein de Jordanie a ordonné une action militaire qui a conduit à l'expulsion des combattants palestiniens du pays. Ces combattants se sont alors largement réinstallés au Liban. Au Liban, la présence des groupes armés palestiniens a eu des répercussions considérables. Ils se sont retrouvés impliqués dans la guerre civile libanaise, compliquant davantage la situation. En 1982, après une tentative d'assassinat contre l'ambassadeur israélien à Londres, Israël a lancé l'opération "Paix en Galilée", une invasion majeure du Liban. L'objectif déclaré était de détruire les bases des combattants palestiniens et de repousser l'armée syrienne. Cette invasion a eu des conséquences dramatiques, tant pour le Liban que pour les Palestiniens.

Durant cette période, la perception des Palestiniens au Liban a souffert, et le quartier général de l'OLP s'est finalement déplacé en Afrique du Nord. Yasser Arafat et l'OLP ont commencé à revoir leurs objectifs, envisageant même l'acceptation d'une solution à deux États. L'intifada, qui a commencé en 1987 dans les territoires palestiniens, a redynamisé le mouvement nationaliste palestinien. Ce soulèvement populaire a attiré l'attention internationale sur la cause palestinienne et a contribué à changer la dynamique du conflit. Cette période de tumulte et de réalignements a finalement conduit aux accords d'Oslo dans les années 1990, où l'OLP, sous la direction d'Arafat, a reconnu officiellement l'État d'Israël et a accepté le principe d'une autonomie palestinienne en échange de la paix. Ces accords ont marqué un moment significatif dans l'histoire du conflit israélo-palestinien, ouvrant la voie à une nouvelle ère de négociations et de dialogue, bien que le processus de paix reste complexe et inachevé.

Conflit Continu et Division Politique Actuelle[modifier | modifier le wikicode]

Les négociations entre l'OLP sous la direction de Yasser Arafat et Israël, bien que marquant un tournant historique avec les accords d'Oslo, ont connu des échecs, particulièrement sur des questions sensibles telles que les colonies israéliennes dans les territoires palestiniens et le droit au retour des réfugiés palestiniens. Ces questions sont restées des points de discorde majeurs, entravant le progrès vers une solution durable au conflit. En parallèle, Yasser Arafat et l'Autorité palestinienne ont fait face à des critiques internes, notamment de la part de groupes nationalistes et islamistes comme le Hamas. Arafat a été accusé d'incompétence, de corruption et de népotisme, ce qui a contribué à une perte de confiance et de légitimité auprès de certaines parties de la population palestinienne.

Le Hamas, un mouvement islamiste palestinien, a gagné en influence politique au cours de cette période. Fondé en 1987, le Hamas a défendu une approche plus islamique du mouvement palestinien, se distinguant de l'OLP par sa position idéologique et ses tactiques. Le Hamas a rejeté les accords d'Oslo et a maintenu une position de résistance armée contre Israël, considérant la lutte armée comme un moyen essentiel pour atteindre les objectifs palestiniens. L'ascension du Hamas et d'autres groupes islamistes a marqué une troisième phase dans le mouvement palestinien, où les lignes de fracture entre différentes factions palestiniennes se sont approfondies. Cette phase a été caractérisée par une diversification des approches et des stratégies au sein du mouvement palestinien, reflétant une palette plus large d'opinions et de tactiques concernant la réalisation des objectifs palestiniens. Cette période a également vu des tensions croissantes entre l'Autorité palestinienne, dominée par le Fatah, et le Hamas, notamment après que ce dernier a remporté les élections législatives palestiniennes de 2006. Ces tensions ont conduit à des conflits internes et à une division politique entre la bande de Gaza, contrôlée par le Hamas, et la Cisjordanie, sous l'autorité de l'Autorité palestinienne.

La reprise de la lutte armée et des actions de type intifada par le Hamas dans les territoires palestiniens est marquée par une rhétorique de djihad contre Israël. Le Hamas, fondé en 1987, se compose d'une branche politique et d'une branche armée, et a joué un rôle important dans le conflit israélo-palestinien. En 2006, le Hamas a remporté une victoire significative lors des élections législatives palestiniennes. Cependant, le Hamas est considéré comme une organisation terroriste par plusieurs pays, dont les États-Unis et des membres de l'Union européenne. Cette désignation est due à l'utilisation par le Hamas de tactiques de lutte armée, y compris des attentats-suicides et des tirs de roquettes contre des cibles civiles israéliennes.

La victoire électorale du Hamas a conduit à une division politique majeure au sein des territoires palestiniens. Deux gouvernements distincts ont émergé : l'un contrôlé par le Fatah en Cisjordanie et l'autre par le Hamas dans la bande de Gaza. Cette division a exacerbé les difficultés politiques et économiques dans les territoires palestiniens. Le territoire palestinien reste morcelé, et les défis tels que le chômage, la pauvreté et la corruption ont rendu la situation politique et économique encore plus précaire. L'autorité palestinienne en Cisjordanie, ainsi que le gouvernement de Hamas à Gaza, sont confrontés à des défis internes et externes importants dans leur gestion des affaires palestiniennes.

Le cas kurde[modifier | modifier le wikicode]

Contexte Historique du Mouvement Kurde[modifier | modifier le wikicode]

Le mouvement kurde, avec ses aspirations à l'autodétermination, est ancré dans l'histoire complexe et tumultueuse du Moyen-Orient, en particulier dans le contexte de la dissolution de l'Empire ottoman après la Première Guerre mondiale. Le peuple kurde, dispersé principalement entre la Turquie, l'Iran, l'Irak et la Syrie, a constamment cherché à affirmer son identité et à revendiquer ses droits politiques et culturels dans une région marquée par des frontières souvent tracées sans tenir compte des réalités ethniques et culturelles.

Après la Première Guerre mondiale, le traité de Sèvres de 1920 avait envisagé la création d'un État kurde. Cependant, ce traité a été remplacé par le traité de Lausanne en 1923, qui a redéfini les frontières de la Turquie moderne sans accorder d'État indépendant aux Kurdes. Ce revirement a été un moment déterminant, laissant les Kurdes sans un État-nation, malgré leur distincte identité ethnique et culturelle. En Irak, le mouvement kurde a traversé plusieurs phases de rébellion et de négociations avec le gouvernement central. La région du Kurdistan irakien, après des décennies de conflit, a acquis une autonomie substantielle à la suite de la guerre du Golfe en 1991, et sa position a été renforcée après l'invasion de l'Irak en 2003. Le gouvernement régional du Kurdistan, dirigé par des figures telles que Massoud Barzani, a établi une entité semi-autonome, dotée de sa propre administration et forces de sécurité. En Turquie, le conflit kurde a été largement dominé par la lutte du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), dirigé par Abdullah Öcalan. Fondé dans les années 1970, le PKK a mené une guerre de guérilla pour les droits et l'autonomie des Kurdes, un conflit qui a entraîné des dizaines de milliers de morts. Malgré plusieurs tentatives de paix, la situation en Turquie reste tendue, avec des périodes de conflit et de réconciliation.

La guerre civile en Syrie a créé une nouvelle dynamique pour les Kurdes dans cette région. Les forces kurdes, notamment les Unités de protection du peuple (YPG), ont pris le contrôle de larges portions du nord-est de la Syrie, établissant une administration autonome de facto dans ces zones. Cette situation a ajouté une nouvelle couche de complexité à la géopolitique régionale, notamment avec l'implication des Kurdes dans la lutte contre l'État islamique (EI). Le mouvement kurde, dans sa quête pour la reconnaissance et les droits, continue de façonner la politique du Moyen-Orient. Leur situation, souvent qualifiée de "problème kurde", reste l'un des défis les plus épineux de la région, impliquant une mosaïque d'intérêts locaux, régionaux et internationaux. Les Kurdes, tout en cherchant à préserver leur identité unique, se battent pour une place dans un Moyen-Orient en constante évolution, où les questions d'autonomie et d'indépendance sont au cœur des débats politiques et sociaux.

Histoire et Signification du Terme 'Kurdistan'[modifier | modifier le wikicode]

Le terme "Kurdistan", littéralement signifiant "le pays des Kurdes", est utilisé depuis plusieurs siècles, avec des références remontant au moins au 12ème siècle. Ce terme géographique historique fait référence à la région habitée principalement par les Kurdes, un groupe ethnique autochtone de la région montagneuse à cheval entre la Turquie moderne, l'Iran, l'Irak et la Syrie. Dans les textes historiques, le terme "Kurdistan" a été utilisé pour décrire les régions habitées par les Kurdes, mais il est important de noter que la délimitation précise et l'étendue de cette région ont varié au fil du temps, en fonction de la dynamique politique, des changements de frontières et des mouvements de population. Au cours de l'histoire, cette région a été intégrée dans divers empires et États, y compris les empires perses, arabes, turcs et ottomans. Les Kurdes, tout en conservant leur identité culturelle et linguistique distincte, ont souvent été soumis à des règles extérieures et ont rarement joui d'une autonomie ou d'un État-nation indépendant.

La notion de Kurdistan en tant qu'entité politique distincte a gagné en importance au début du 20ème siècle, particulièrement après la Première Guerre mondiale et la chute de l'Empire ottoman, lorsque les Kurdes ont commencé à aspirer à une plus grande autonomie ou indépendance. Toutefois, les aspirations à un Kurdistan indépendant ou autonome se sont heurtées aux réalités politiques des États-nations modernes de la région. Aujourd'hui, bien que le Kurdistan en tant qu'État souverain n'existe pas, le terme est largement utilisé pour désigner les régions à majorité kurde, en particulier le Kurdistan irakien, qui jouit d'un degré significatif d'autonomie au sein de l'Irak.

Impacts de la Guerre Ottomano-Séfévide sur les Kurdes[modifier | modifier le wikicode]

La guerre entre les Séfévides iraniens et les Ottomans en 1514, marquée par la bataille emblématique de Chaldoran, est un moment déterminant dans l'histoire du Moyen-Orient et a une importance particulière pour le peuple kurde. Cette confrontation entre deux grandes puissances de l'époque, l'Empire ottoman sunnite sous le règne de Selim I et l'Empire séfévide chiite dirigé par Shah Ismail I, s'est soldée par une victoire ottomane qui a redéfini l'équilibre géopolitique de la région. La région kurde, située à cheval entre ces deux empires, a été profondément affectée par ce conflit. La bataille de Chaldoran n'a pas seulement été une lutte pour le pouvoir territorial mais aussi un affrontement idéologique entre le chiisme et le sunnisme, ce qui a eu un impact direct sur la population kurde. Les territoires kurdes ont été divisés, certains passant sous le contrôle ottoman et d'autres sous l'influence séfévide.

Dans ce contexte, les chefs kurdes ont été confrontés à des choix difficiles. Certains ont choisi de s'allier avec les Ottomans, espérant une autonomie ou des avantages politiques, tandis que d'autres ont vu dans l'alliance avec les Séfévides une opportunité similaire. Ces décisions étaient souvent influencées par des considérations locales, notamment des rivalités tribales et des intérêts politiques et économiques. Les conséquences de la bataille de Chaldoran et des guerres ottomano-séfévides subséquentes sur les Kurdes ont été significatives. Elles ont entraîné une fragmentation politique et territoriale qui a perduré pendant des siècles. Les Kurdes, répartis entre différents empires et, plus tard, États-nations, ont lutté pour maintenir leur identité culturelle et linguistique unique et pour préserver leur autonomie.

Cette période a posé les bases des défis politiques et des aspirations autonomistes kurdes dans les siècles suivants. Leur position géographique à la croisée des empires a fait des Kurdes des acteurs clés dans la dynamique régionale, tout en les plaçant souvent dans une position de vulnérabilité face aux ambitions des puissances environnantes. Ainsi, la bataille de Chaldoran et ses répercussions sont cruciales pour comprendre la complexité de l'histoire kurde et les défis auxquels ce peuple a été confronté dans sa quête d'autonomie et de reconnaissance dans une région en constante évolution.

Traité de Qasr-e Shirin et Ses Conséquences pour les Kurdes[modifier | modifier le wikicode]

Le traité de Qasr-e Shirin, également connu sous le nom de Traité de Zuhab, signé en 1639 entre l'Empire ottoman et la dynastie séfévide de Perse, a établi les frontières entre ces deux empires, affectant de facto les territoires kurdes. Ce traité a marqué la fin d'une série de guerres ottomano-persanes et a fixé des frontières qui, dans une large mesure, sont restées stables pendant plusieurs siècles et ont préfiguré les frontières modernes de la région. Cependant, il est important de noter que bien que le traité de 1639 ait établi des frontières entre les empires ottoman et séfévide, ces frontières n'étaient pas toujours clairement définies ou administrées, surtout dans les régions montagneuses habitées par les Kurdes. Les Kurdes eux-mêmes ne disposaient pas d'un État-nation propre et étaient répartis de part et d'autre de cette frontière, vivant sous la souveraineté ottomane ou persane (plus tard iranienne) selon la région.

Ce n'est qu'au cours du 20ème siècle, en particulier après la Première Guerre mondiale et la chute de l'Empire ottoman, que les frontières des États modernes du Moyen-Orient ont commencé à être formées et administrées de manière plus rigide. Les accords Sykes-Picot de 1916, suivis par le traité de Sèvres de 1920 et le traité de Lausanne de 1923, ont redéfini les frontières dans la région, entraînant la division des territoires kurdes entre plusieurs nouveaux États-nations, notamment la Turquie, l'Irak, la Syrie et l'Iran. Ces développements dans les années 1940 ont formalisé les frontières existantes et ont eu un impact profond sur la question kurde. La division des territoires kurdes entre différents États a posé des défis uniques pour le peuple kurde en matière de droits culturels, politiques et linguistiques, et a façonné leur lutte pour l'autonomie et la reconnaissance tout au long du 20ème siècle et jusqu'à aujourd'hui.

Conséquences Post-Première Guerre Mondiale pour les Kurdes[modifier | modifier le wikicode]

Dans la période qui a suivi la Première Guerre mondiale, le Moyen-Orient a été témoin de transformations politiques et territoriales considérables, influençant de manière significative la situation des Kurdes. La chute de l'Empire ottoman et la montée du panislamisme, ainsi que la création de nouveaux États-nations, ont marqué le début d'une nouvelle ère pour les populations kurdes. Après la guerre, les aspirations à l'autonomie des Kurdes ont été largement mises de côté dans le contexte de la formation des nouveaux États-nations. En Turquie, par exemple, sous la direction de Mustafa Kemal Atatürk, une politique de turquification a été mise en place, visant à créer une identité nationale unifiée centrée sur l'identité turque. Cette politique a eu des répercussions négatives sur les droits linguistiques et culturels des Kurdes, exacerbant les tensions et alimentant des aspirations autonomistes. En Irak et en Syrie, sous les mandats britannique et français respectivement, la situation des Kurdes a été complexe et fluctuante. Malgré certaines mesures visant à reconnaître les droits des Kurdes, notamment en termes de prestations sociales, ces efforts étaient souvent insuffisants pour répondre pleinement à leurs aspirations politiques et culturelles. Ces politiques ont souvent été marquées par des périodes de répression et de marginalisation.

Durant cette période, les relations entre les Kurdes et d'autres groupes ethniques de la région, comme les Arméniens, ont été tendues. Les conflits dans l'est de l'Anatolie et les régions frontalières entre la Turquie et l'Arménie ont été exacerbés par les politiques étatiques et les bouleversements sociaux. Le génocide arménien, par exemple, a entraîné d'importants déplacements de population et des tensions intercommunautaires. Le contexte géopolitique post-ottoman a ainsi profondément affecté la vie des Kurdes. Coincés entre les ambitions nationalistes des nouveaux États et les dynamiques régionales, les Kurdes se sont retrouvés dans une position difficile, cherchant à préserver leur identité et leurs droits dans un environnement politique instable et souvent hostile. Cette époque a jeté les bases des luttes contemporaines pour l'autodétermination kurde, soulignant les défis persistants auxquels ce peuple est confronté pour obtenir reconnaissance et autonomie.

Création de la Première Organisation Politique Kurde[modifier | modifier le wikicode]

L'année 1919 marque un tournant dans l'histoire du peuple kurde, avec la création de la première organisation politique kurde, signifiant l'émergence d'un mouvement nationaliste kurde structuré. Cette période, au lendemain de la Première Guerre mondiale et de la dissolution de l'Empire ottoman, a ouvert des opportunités et des défis inédits pour les aspirations kurdes.

L'organisation politique kurde créée en 1919 a été une expression concrète du désir croissant parmi les Kurdes de prendre en main leur destin politique. Elle visait à unifier les différentes tribus et communautés kurdes sous une bannière commune et à articuler des revendications pour l'autonomie, voire l'indépendance. Le traité de Sèvres, signé en 1920, a semblé ouvrir la voie à la réalisation de ces aspirations. Ce traité, qui a redessiné les frontières de la région après la chute de l'Empire ottoman, incluait des dispositions pour l'autonomie du territoire kurde, et la possibilité d'une indépendance future si les communautés kurdes le désiraient. Cette reconnaissance formelle de l'autonomie kurde dans le traité de Sèvres a été perçue comme une victoire significative pour le mouvement nationaliste kurde. Cependant, l'espoir suscité par le traité de Sèvres s'est rapidement évanoui. Le traité n'a jamais été ratifié par la nouvelle République turque, dirigée par Mustafa Kemal Atatürk, et a été remplacé en 1923 par le traité de Lausanne. Le traité de Lausanne n'a pas fait mention d'un Kurdistan autonome, laissant ainsi les aspirations kurdes sans soutien international. La période suivant la Première Guerre mondiale a donc été à la fois une époque de possibilités et de frustrations pour les Kurdes. Malgré l'émergence d'un nationalisme kurde organisé et la reconnaissance initiale de leurs droits dans le traité de Sèvres, les espoirs d'autonomie et d'indépendance se sont heurtés à la réalité des nouveaux équilibres politiques et des intérêts nationaux dans la région reconfigurée du Moyen-Orient.

Défis de l'Établissement d'un État Kurde[modifier | modifier le wikicode]

Dans la période suivant la Première Guerre mondiale, le Moyen-Orient a été redessiné par les puissances victorieuses, affectant profondément les aspirations des peuples de la région, y compris celles des Kurdes. Le traité de Sèvres en 1920, qui a promis un certain degré d'autonomie pour les Kurdes, a suscité l'espoir d'un État kurde indépendant. Cependant, cet espoir a été de courte durée en raison de plusieurs facteurs clés. La répartition géographique des populations kurdes, éparpillées entre les sphères d'influence de la France, de la Grande-Bretagne, et de la Russie, a entravé la formation d'un État kurde unifié. Cette division territoriale a compliqué toute tentative de créer une entité politique kurde cohérente, chaque zone étant soumise à des politiques et des influences différentes. De plus, les puissances alliées, principalement la Grande-Bretagne et la France, qui avaient redessiné la carte du Moyen-Orient, étaient réticentes à modifier leurs plans pour accueillir un État kurde. Ces puissances, préoccupées par leurs propres intérêts stratégiques dans la région, n'étaient pas disposées à soutenir la cause kurde au détriment de leurs objectifs géopolitiques.

La question de l'autonomie arménienne a également joué un rôle dans l'échec de l'établissement d'un État kurde. Les territoires envisagés pour l'autonomie arménienne recouvraient des zones peuplées par les Kurdes, créant ainsi des conflits de revendications territoriales. Ces tensions ont exacerbé la complexité de la situation, rendant encore plus difficile la réalisation d'un consensus sur la question kurde. Un autre facteur important était la faiblesse relative du nationalisme kurde à cette époque. Contrairement à d'autres mouvements nationaux dans la région, le nationalisme kurde n'avait pas encore développé une base forte et unifiée capable de mobiliser efficacement les masses. Les divisions internes, les différences tribales et régionales, ainsi que les divergences d'opinions sur la stratégie à adopter, ont limité la capacité des Kurdes à présenter un front uni. En outre, il y avait un débat au sein de la communauté kurde sur la question de l'acceptation ou du rejet du traité de Sèvres. Certains Kurdes envisageaient de s'aligner avec le nationalisme turc dans l'espoir de préserver une certaine forme d'autonomie au sein d'un territoire turc unifié.

Finalement, ces défis et obstacles ont conduit à l'abandon de l'idée d'un État kurde indépendant dans les années qui ont suivi la Première Guerre mondiale. La réalité politique du Moyen-Orient, façonnée par les intérêts des puissances coloniales et les dynamiques internes complexes, a rendu la réalisation de l'autonomie kurde extrêmement difficile, posant les bases des luttes kurdes pour la reconnaissance et l'autonomie dans les décennies suivantes.

Kurdistan turc[modifier | modifier le wikicode]

Politique d'Assimilation en Turquie et Négation de l'Identité Kurde[modifier | modifier le wikicode]

Le début des années 1920 en Turquie, sous la direction de Mustafa Kemal Atatürk, a été marqué par des changements radicaux dans le cadre de la construction de l'État-nation turc. L'un des aspects de cette transformation a été la politique d'assimilation et d'acculturation vis-à-vis des minorités ethniques, en particulier les Kurdes. En 1924, dans le cadre de ces efforts, l'usage des termes "kurde" et "Kurdistan" a été officiellement interdit en Turquie, ce qui symbolisait une négation explicite de l'identité kurde.

Cette politique faisait partie d'une stratégie plus large d'homogénéisation culturelle et linguistique visant à forger une identité turque unifiée. Les autorités turques ont mis en œuvre des politiques visant à assimiler de force les populations kurdes, incluant le déplacement de populations et la suppression des expressions culturelles et linguistiques kurdes. Les Kurdes étaient souvent décrits par les autorités turques comme des "Turcs montagnards", dans une tentative de réinterpréter et de nier leur identité distincte. Cette théorisation visait à justifier les politiques d'assimilation en affirmant que les différences linguistiques et culturelles étaient simplement des variations régionales au sein de la population turque.

Ces politiques ont conduit à un contexte de révolte permanente au sein de la population kurde. Les Kurdes, confrontés à la négation de leur identité et à la répression de leurs droits culturels et linguistiques, ont résisté à ces efforts d'assimilation. Cette résistance a pris diverses formes, allant de la révolte armée à la préservation clandestine de la culture et de la langue kurdes. Les révoltes kurdes en Turquie, notamment celles dirigées par des figures comme Sheikh Said en 1925, ont été des moments de confrontation directe avec l'État turc. Ces rébellions, bien que réprimées, ont mis en évidence les tensions profondes et les désaccords entre le gouvernement turc et sa population kurde.

Renaissance Culturelle Kurde et Tensions Politiques Post-Seconde Guerre Mondiale[modifier | modifier le wikicode]

À la fin de la Seconde Guerre mondiale, la Turquie a connu une période de transformation et de crise identitaire qui a indirectement contribué au renouveau de l'intérêt pour la langue, la culture et l'histoire kurdes. Cette période a marqué une renaissance du nationalisme kurde, bien que les circonstances aient été complexes et souvent contradictoires. La période d'après-guerre en Turquie a été caractérisée par une ouverture relative et un questionnement sur l'identité nationale turque. Cette ouverture a permis une certaine redécouverte de la culture kurde, auparavant réprimée sous les politiques d'assimilation kémalistes. Des intellectuels kurdes et turcs ont commencé à explorer l'histoire et la culture kurdes, contribuant à une prise de conscience croissante de l'identité kurde distincte. Ce renouveau culturel a servi de catalyseur au développement du nationalisme kurde, avec une nouvelle génération de Kurdes revendiquant plus ouvertement leurs droits culturels et politiques.

Cependant, cette période a également été marquée par une instabilité politique en Turquie, avec plusieurs coups d'État militaires et une répression accrue. Les régimes militaires qui ont pris le pouvoir en Turquie pendant les années 1960 et 1980, bien que parfois ouverts à certaines réformes, ont maintenu une ligne dure en matière de politique ethnique, en particulier en ce qui concerne la question kurde. Les politiques nationalistes de ces régimes ont souvent conduit à une répression renouvelée des expressions culturelles et politiques kurdes. La tension entre la renaissance culturelle kurde et la répression étatique a conduit à une période de conflit accru. Le mouvement kurde, de plus en plus organisé et politisé, a été confronté à des défis majeurs, tant de la part de l'État turc que de ses propres dynamiques internes. La question kurde est devenue un enjeu central dans la politique turque, symbolisant les limites du modèle d'État-nation en Turquie et les défis posés par la diversité ethnique et culturelle du pays.

Lutte Armée du PKK et Impact sur la Question Kurde en Turquie[modifier | modifier le wikicode]

La lutte armée du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), initiée en 1984, représente un tournant décisif dans l'histoire du mouvement kurde en Turquie. Fondé par Abdullah Öcalan en 1978, le PKK a émergé comme un mouvement marxiste-léniniste, orienté vers la lutte des classes et l'indépendance kurde. La décision du PKK de lancer une campagne de guérilla contre l'État turc a marqué le début d'une période prolongée de conflit armé qui a profondément marqué le sud-est de la Turquie et la communauté kurde.

Le contexte dans lequel le PKK a commencé sa lutte armée était complexe. La période des années 1980 en Turquie était marquée par des tensions politiques et une répression accrue contre les groupes dissidents, y compris les mouvements kurdes. En réponse à ce qu'ils percevaient comme une oppression systématique et la négation de leurs droits culturels et linguistiques, le PKK a opté pour la lutte armée comme moyen de revendiquer l'autonomie kurde. Dans ses premières années, le PKK a bénéficié d'un certain degré de soutien de pays alignés sur le bloc soviétique. Ce soutien a pris la forme d'entraînement, de fourniture d'armes et d'appui logistique, bien que l'étendue et la nature exactes de ce soutien aient été sujettes à débat. Ce soutien était en partie dû aux dynamiques de la Guerre froide, où le PKK était perçu comme un allié potentiel par les ennemis de la Turquie, membre de l'OTAN. La réponse du gouvernement turc à l'insurrection du PKK a été caractérisée par une répression militaire intense. Des opérations de sécurité massives ont été lancées dans les régions kurdes, entraînant de graves conséquences humanitaires, y compris des pertes civiles et militaires, ainsi que le déplacement de populations kurdes.

Au fil du temps, le PKK a évolué dans sa philosophie et ses objectifs. Alors que ses racines étaient profondément ancrées dans l'idéologie marxiste-léniniste, le mouvement a progressivement adapté ses revendications, passant de l'exigence d'un État kurde indépendant à des appels pour une plus grande autonomie et la reconnaissance des droits culturels et linguistiques kurdes. La lutte armée du PKK a mis la question kurde au centre de l'attention nationale et internationale, soulignant la complexité et les défis de la question kurde en Turquie. Elle a également polarisé les opinions, à la fois au sein de la Turquie et de la communauté kurde, sur les stratégies et les objectifs appropriés dans la quête de l'autonomie et des droits kurdes. Le conflit entre le PKK et l'État turc reste une question épineuse, symbolisant la tension entre les aspirations kurdes à l'autonomie et les impératifs de sécurité et d'unité nationale de la Turquie.

Contexte International et Intérêt Soviétique pour les Régions Kurdes[modifier | modifier le wikicode]

Depuis 1946, l'Union soviétique a manifesté un intérêt accru pour le Moyen-Orient, notamment pour les régions à forte concentration kurde et azérie. Cette implication soviétique s'inscrit dans le cadre plus large de la Guerre froide et de la stratégie de l'URSS pour étendre son influence dans des régions stratégiquement importantes. L'un des exemples les plus significatifs de cette politique a été le soutien soviétique à la République autonome d'Azerbaïdjan iranien. En 1945, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, l'Union soviétique, qui avait occupé le nord de l'Iran pendant la guerre, a encouragé et soutenu la création de la République autonome d'Azerbaïdjan, ainsi que celle de la République du Kurdistan, en Iran. Ces entités autonomes ont été établies avec le soutien des communistes locaux et des Soviétiques, et elles ont représenté un défi direct à l'autorité du gouvernement central iranien, alors dirigé par Reza Shah Pahlavi. La création de ces républiques autonomes était perçue par l'URSS comme une opportunité d'étendre son influence dans la région et de contrer la présence britannique et américaine.

Cependant, le conflit irano-soviétique qui s'ensuivit a conduit à une pression internationale sur l'Union soviétique pour qu'elle retire ses troupes d'Iran. En 1946, sous la pression de la communauté internationale et en particulier des États-Unis, l'URSS a retiré son soutien aux républiques autonomes, qui ont été rapidement reprises par les forces iraniennes. Cette période a été significative pour les relations internationales dans la région, montrant comment la dynamique de la Guerre froide influençait les politiques régionales. Le soutien soviétique aux mouvements autonomistes en Iran reflétait non seulement les intérêts géopolitiques de l'URSS, mais a également mis en lumière les aspirations des minorités ethniques dans la région, y compris les Kurdes et les Azéris, pour plus d'autonomie et de reconnaissance.

Tensions Religieuses et Politiques des Kurdes en Iran[modifier | modifier le wikicode]

Depuis le début des années 2000, la situation des Kurdes en Iran a été caractérisée par une tension croissante en raison de divergences religieuses et politiques. L'Iran, un État majoritairement chiite, a vu ses relations avec sa population kurde, principalement sunnite, se tendre en raison de facteurs religieux, culturels et politiques. La différence sectaire entre la majorité chiite de l'Iran et la minorité kurde sunnite est un aspect clé de cette tension. Alors que l'Iran a consolidé son identité chiite depuis la révolution islamique de 1979, les Kurdes iraniens ont souvent ressenti une marginalisation en raison de leur appartenance religieuse sunnite. Cette situation est exacerbée par des questions de droits culturels et linguistiques, les Kurdes revendiquant une plus grande reconnaissance de leur identité ethnique et culturelle.

Les tensions politiques entre les Kurdes iraniens et le gouvernement central se sont intensifiées en raison de perceptions de marginalisation et de négligence économique. Les Kurdes en Iran ont longtemps lutté pour une plus grande autonomie régionale et pour la reconnaissance de leurs droits linguistiques et culturels, notamment le droit à l'éducation et aux médias dans leur langue maternelle. La réponse du gouvernement iranien à ces revendications a souvent été la répression. Les mouvements politiques kurdes en Iran ont été étroitement surveillés et parfois réprimés. Des affrontements armés ont éclaté à plusieurs reprises entre les forces de sécurité iraniennes et des groupes armés kurdes, ces derniers cherchant à défendre les droits et l'autonomie des Kurdes.

La situation des Kurdes en Iran est également influencée par les dynamiques régionales. Les développements concernant les Kurdes en Irak, notamment la création d'une région autonome du Kurdistan irakien, ont eu un impact sur les aspirations des Kurdes en Iran. Parallèlement, la politique étrangère de l'Iran, en particulier son implication dans des conflits régionaux comme en Syrie et en Irak, a des répercussions sur sa politique intérieure envers sa propre population kurde. En conclusion, les tensions entre les Kurdes et le gouvernement iranien depuis les années 2000 sont le résultat d'un mélange complexe de facteurs religieux, culturels et politiques. Ces tensions reflètent les défis de la gouvernance dans une société multiethnique et multiconfessionnelle et soulignent les difficultés persistantes des minorités dans la région à obtenir une reconnaissance et une autonomie accrues.

Kurdistan irakien[modifier | modifier le wikicode]

Les Origines du Kurdistan Irakien et le Vilayet de Mossoul[modifier | modifier le wikicode]

L'histoire du Kurdistan irakien et sa relation avec le vilayet de Mossoul pendant la période du mandat britannique est cruciale pour comprendre les dynamiques politiques et ethniques de la région. Après la Première Guerre mondiale et la dissolution de l'Empire ottoman, la province ottomane du vilayet de Mossoul est devenue un enjeu central dans le redessinement des frontières du Moyen-Orient.

Le vilayet de Mossoul, riche en diversité ethnique, incluait une population significative de Kurdes, ainsi que d'autres groupes comme des Arabes, des Assyriens et des Turkmènes. Lors de l'établissement du mandat britannique sur la Mésopotamie, qui allait devenir l'Irak, l'avenir de cette province a été largement débattu. Les Britanniques, désireux de contrôler les ressources pétrolières de la région, ont plaidé pour son inclusion dans l'Irak, malgré les revendications territoriales de la Turquie. En 1925, après un long processus de négociations et de délibérations, la Société des Nations a tranché en faveur de l'annexion du vilayet de Mossoul à l'Irak. Cette décision a été cruciale dans la définition des frontières nord de l'Irak et a eu un impact significatif sur la population kurde de la région. La décision de la SDN a placé un grand nombre de Kurdes sous administration irakienne, modifiant ainsi le paysage politique et ethnique du nouvel État.

La Lutte pour l'Autonomie Kurde au 20e Siècle[modifier | modifier le wikicode]

L'intégration du vilayet de Mossoul dans l'Irak a influencé le mouvement kurde dans le pays. Les Kurdes, cherchant à préserver leur identité culturelle et linguistique et à obtenir une plus grande autonomie politique, ont été confrontés à divers défis sous les gouvernements successifs de Bagdad. La lutte pour l'autonomie kurde s'est intensifiée tout au long du 20e siècle, culminant dans la création d'une région autonome du Kurdistan dans les années 1990, après des décennies de conflit et de négociations. Le développement du Kurdistan irakien en tant que région autonome a été renforcé après l'invasion de l'Irak en 2003, établissant la région comme un acteur clé dans la politique irakienne. L'histoire du vilayet de Mossoul et son intégration dans l'Irak moderne sont donc essentielles pour comprendre les dynamiques actuelles du Kurdistan irakien, soulignant les complexités historiques et politiques de la formation des États-nations dans la région et les enjeux persistants liés à la diversité ethnique et culturelle.

La décision de la Société des Nations en 1925 d'annexer le vilayet de Mossoul au mandat britannique de l'Irak a été une étape cruciale dans la formation de l'État irakien moderne et a eu des implications profondes pour le mouvement nationaliste kurde dans la région. Cette décision a intégré un territoire avec une population kurde importante à l'Irak, établissant ainsi les bases d'une lutte kurde continue pour la reconnaissance et l'autonomie. Le mouvement nationaliste kurde en Irak s'est caractérisé par une résilience et une continuité remarquables, malgré les défis politiques et les obstacles. La lutte des Kurdes en Irak pour l'autonomie et la reconnaissance de leurs droits a été ponctuée de rébellions, de négociations et parfois de violentes répressions. Cette persévérance reflète la spécificité du nationalisme kurde en Irak, où les aspirations à l'autonomie régionale et à la préservation de l'identité culturelle kurde ont été des thèmes constants.

Les tentatives de négociations et d'accords entre les dirigeants kurdes et le gouvernement irakien ont souvent été infructueuses, marquées par des promesses non tenues et des accords violés. L'un des facteurs contribuant à ces échecs a été le manque de soutien international constant pour la cause kurde. En particulier, le retrait du soutien de l'Iran au nationalisme kurde a été un revers significatif. L'Iran, qui a ses propres populations kurdes et ses préoccupations concernant l'autonomie kurde à l'intérieur de ses frontières, a souvent oscillé dans son soutien aux Kurdes en Irak, en fonction de ses propres intérêts géopolitiques et de sécurité. La situation des Kurdes en Irak a continué d'évoluer au cours du 20e siècle, avec des périodes de répression sévère sous des régimes comme celui de Saddam Hussein, ainsi que des avancées significatives, comme l'établissement d'une région autonome du Kurdistan dans les années 1990. Ces développements ont été influencés par une variété de facteurs régionaux et internationaux, reflétant la complexité de la question kurde dans la région.

L'Émergence de l'Autonomie Kurde dans les Années 1990[modifier | modifier le wikicode]

L'année 1991 a été un moment déterminant pour le mouvement kurde en Irak, notamment à la suite de la guerre du Golfe et de l'affaiblissement du régime de Saddam Hussein. La fin de cette guerre a créé une opportunité sans précédent pour les Kurdes irakiens de mettre en place une forme d'autonomie de facto dans leurs régions.

Après la défaite de l'Irak dans la guerre du Golfe, un soulèvement populaire a éclaté dans le nord du pays, principalement parmi les Kurdes. Ce soulèvement a été brutalement réprimé par le régime de Saddam Hussein, entraînant une grave crise humanitaire et des déplacements massifs de populations. En réponse, les États-Unis, le Royaume-Uni et la France ont mis en place une zone d'exclusion aérienne au nord du 36e parallèle, permettant ainsi aux Kurdes de gagner un degré significatif d'autonomie. Cette autonomie de facto a permis aux Kurdes de développer leurs propres institutions politiques et administratives, une avancée majeure pour le nationalisme kurde en Irak. Le gouvernement régional du Kurdistan (GRK) a été formé, avec ses propres structures administratives, législatives et de sécurité. Bien que cette autonomie n'ait pas été reconnue officiellement par le gouvernement irakien à l'époque, elle a représenté un tournant dans l'histoire kurde en Irak.

Le Kurdistan Irakien dans le Nouveau Contexte Politique Post-2003[modifier | modifier le wikicode]

La situation a évolué de manière significative après la chute du régime de Saddam Hussein en 2003. La nouvelle constitution irakienne, adoptée en 2005, a reconnu officiellement le Kurdistan irakien comme une entité fédérale au sein de l'Irak. Cette reconnaissance constitutionnelle a légalisé l'autonomie kurde et a été une étape majeure dans la réalisation des aspirations politiques kurdes. L'inclusion de l'autonomie du Kurdistan dans la constitution irakienne a également symbolisé une évolution importante dans la politique irakienne, marquant une rupture avec les politiques centralisées et répressives des régimes précédents. Elle a également reflété les changements dans la dynamique politique du Moyen-Orient post-Saddam, où les questions d'identité ethnique et régionale sont devenues de plus en plus prégnantes.

Le retrait des troupes américaines d'Irak en 2009 et les événements subséquents ont eu un impact significatif sur la situation des Kurdes en Irak, exacerbant les tensions entre le gouvernement régional du Kurdistan (GRK) et le gouvernement central de Bagdad. Après le retrait américain, les relations entre Erbil, la capitale du Kurdistan irakien, et Bagdad se sont détériorées. Les Kurdes ont souvent exprimé des préoccupations concernant une marginalisation croissante de la part du gouvernement central irakien. Ces tensions portaient sur diverses questions, notamment le partage des revenus pétroliers, le statut des zones disputées (comme Kirkouk, riche en pétrole), et l'autonomie politique et administrative du Kurdistan irakien.

Le référendum sur l'indépendance du Kurdistan irakien, tenu en septembre 2017, a marqué un point culminant de ces tensions. Ce référendum, qui a vu une majorité écrasante de votes en faveur de l'indépendance, a été organisé par le GRK malgré une forte opposition de Bagdad ainsi que des avertissements internationaux. Le gouvernement irakien, ainsi que plusieurs pays voisins et la communauté internationale, ont considéré le référendum comme illégal et une menace pour l'intégrité territoriale de l'Irak. En réponse au référendum, le gouvernement central irakien a pris des mesures sévères, y compris la reprise militaire du contrôle de certaines zones disputées, comme Kirkouk, et l'imposition de restrictions économiques et de transport sur le Kurdistan irakien. Ces actions ont souligné la fragilité de l'autonomie kurde en Irak et ont mis en évidence les défis politiques et sécuritaires auxquels la région est confrontée. Le référendum et ses conséquences ont également révélé les divisions internes au sein du mouvement kurde irakien, ainsi que les complexités de la politique régionale. Alors que certains leaders kurdes ont vu le référendum comme un pas vers une indépendance tant attendue, d'autres ont exprimé des inquiétudes quant à son timing et à ses implications potentielles.

Kurdistan syrien[modifier | modifier le wikicode]

La Création de la 'Ceinture Arabe' et Ses Répercussions[modifier | modifier le wikicode]

Dans les années 1960, la situation des Kurdes en Syrie a été profondément affectée par les politiques du gouvernement nationaliste syrien. Durant cette période, la Syrie, sous l'influence du parti Baas, a adopté une approche de nationalisme arabe qui a exacerbé les divisions ethniques, en particulier parmi la communauté kurde. Une des politiques les plus notables et controversées de cette époque a été la création de la "Ceinture Arabe". Cette initiative visait à changer la composition démographique des régions à forte concentration kurde le long de la frontière avec la Turquie. Le gouvernement a encouragé les Arabes à s'installer dans ces régions, souvent en déplaçant de force les populations kurdes. Cette politique était en partie justifiée par des projets de développement, comme la construction d'une ligne de chemin de fer, mais avait des motivations clairement politiques visant à diluer la présence kurde.

Ces actions ont entraîné des déplacements forcés et une marginalisation économique et sociale accrue des Kurdes en Syrie. La "Ceinture Arabe" a non seulement provoqué des bouleversements démographiques, mais a également alimenté un sentiment d'injustice et d'exclusion parmi les Kurdes syriens. Ces politiques ont renforcé les tensions ethniques dans la région et ont contribué à un sentiment croissant de méfiance envers le gouvernement central. Les conséquences de ces politiques ont été durables. Les Kurdes en Syrie ont continué à lutter pour la reconnaissance de leurs droits culturels et politiques, ainsi que pour leur autonomie. Ces tensions ont été exacerbées lors de la guerre civile syrienne qui a éclaté en 2011, où les Kurdes ont joué un rôle significatif, cherchant à établir une forme d'autonomie dans le nord-est de la Syrie.

Les Kurdes en Syrie et la Lutte pour l'Autonomie[modifier | modifier le wikicode]

Dans les années 2000, et plus particulièrement avec le début de la guerre civile syrienne en 2011, les Kurdes de Syrie ont commencé à manifester de manière plus visible pour l'autonomie. Cette période a marqué un tournant dans la lutte des Kurdes syriens pour la reconnaissance et l'autodétermination.

Avant la guerre civile, les Kurdes en Syrie étaient souvent marginalisés et privés de droits fondamentaux. Le régime de Bashar al-Assad, tout comme celui de son père Hafez al-Assad, a maintenu une politique de répression à l'égard de la culture kurde et des aspirations politiques kurdes. Cependant, avec l'éclatement de la guerre civile, le pouvoir central à Damas s'est affaibli, offrant ainsi aux Kurdes une opportunité sans précédent de revendiquer leur autonomie. Profitant du vide de pouvoir créé par le conflit, les groupes kurdes, principalement les Unités de protection du peuple (YPG) et le Parti de l'union démocratique (PYD), ont pris le contrôle de vastes régions dans le nord de la Syrie. Ces groupes ont établi une forme de gouvernance autonome dans ces régions, comprenant des aspects tels que l'administration civile, la défense et l'éducation.

Cette autonomie de facto a été renforcée par le rôle crucial joué par les forces kurdes dans la lutte contre l'État islamique (EI), attirant le soutien et la reconnaissance de la communauté internationale, en particulier des États-Unis. Les Kurdes ont réussi à établir des zones d'autonomie relativement stables, connues sous le nom de l'administration autonome du nord et de l'est de la Syrie, malgré les défis persistants, y compris les tensions avec le gouvernement syrien et les menaces de la Turquie voisine. Cependant, la situation reste précaire. La reconnaissance officielle de l'autonomie kurde en Syrie par le gouvernement de Damas reste incertaine, et les tensions régionales continuent de menacer la stabilité des régions kurdes. La quête des Kurdes syriens pour l'autonomie est donc un processus en cours, profondément lié à l'évolution politique et sécuritaire complexe de la Syrie et de la région en général.

La Remise en Question des États-Nations au Moyen-Orient[modifier | modifier le wikicode]

Depuis l'intervention anglo-américaine en Irak en 2003, suivie par la guerre civile irakienne et la crise syrienne à partir de 2011, le concept des États-nations stables au Moyen-Orient a été profondément remis en question. L'invasion de l'Irak, visant à renverser Saddam Hussein, a déclenché un ensemble de conséquences imprévues, entraînant le pays dans une spirale de violence sectaire et d'instabilité politique. La situation s'est compliquée avec l'émergence de l'État islamique, qui a exploité le chaos en Irak et en Syrie pour établir un califat transfrontalier, remettant ainsi en cause la légitimité des frontières et des gouvernements nationaux.

La guerre civile syrienne, débutant avec le soulèvement populaire contre le régime de Bashar al-Assad en 2011, a encore aggravé l'instabilité régionale. Le conflit a attiré une multitude d'acteurs régionaux et internationaux, chacun poursuivant ses propres objectifs stratégiques. Les répercussions de ces conflits ont dépassé les frontières nationales, exacerbant les tensions sectaires et ethniques et provoquant d'importants flux de réfugiés. Ces événements ont mis en évidence les failles des États-nations du Moyen-Orient, dont les frontières avaient été tracées par les puissances coloniales après la Première Guerre mondiale. Ces frontières, souvent établies sans égard pour les réalités ethniques, culturelles et religieuses sur le terrain, ont engendré des tensions et des conflits persistants.

Malgré ces défis, les frontières établies au Moyen-Orient ont montré une résilience remarquable. Elles restent des éléments déterminants de l'ordre politique régional, bien qu'elles soient le théâtre de conflits incessants. Les États de la région, bien que fragilisés, continuent de lutter pour maintenir leur souveraineté et leur intégrité territoriale face aux mouvements sécessionnistes et aux ingérences étrangères. L'avenir des États-nations au Moyen-Orient reste incertain. Les conflits en Irak et en Syrie ont révélé des divisions profondes et ont posé des questions fondamentales sur la légitimité et la viabilité des structures étatiques existantes. Dans ce contexte, de nouvelles configurations politiques et territoriales pourraient émerger, redéfinissant le paysage politique du Moyen-Orient dans les années à venir.

Perspectives Controversées sur les Frontières du Moyen-Orient et la Guerre Civile Syrienne[modifier | modifier le wikicode]

Ralph Peters, un ancien officier de l'armée américaine et commentateur sur les questions géopolitiques, a présenté une perspective controversée sur les frontières du Moyen-Orient. Dans ses écrits, il soutient que les frontières actuelles de la région, largement héritées de l'époque coloniale et post-Première Guerre mondiale, ne reflètent pas la réalité politique, culturelle et religieuse sur le terrain. Peters argue que ces frontières artificielles ont contribué à de nombreux conflits en ne correspondant pas aux identités nationales, ethniques et religieuses des sociétés locales. Sa vision, parfois illustrée par des cartes redessinées du Moyen-Orient, propose une reconfiguration des frontières pour mieux correspondre à ces réalités. Par exemple, il suggère la création d'un État kurde indépendant qui engloberait des parties de l'Irak, de la Syrie, de l'Iran et de la Turquie, où vivent des populations kurdes importantes. De même, il envisage des ajustements territoriaux pour d'autres groupes ethniques et religieux, dans le but de créer des États plus homogènes.

Cette proposition a suscité un vif débat et de nombreuses critiques, y compris au sein de l'OTAN et d'autres cercles internationaux. Les critiques soulignent que le redécoupage des frontières selon des critères ethniques et religieux est extrêmement complexe et risqué. Ils mettent en avant les dangers d'aggraver les tensions existantes et de créer de nouveaux conflits. De plus, la redéfinition des frontières nationales soulève des questions sur la souveraineté, l'autodétermination et l'intervention internationale. Les idées de Peters reflètent un défi plus large auquel est confronté le Moyen-Orient : comment gérer la diversité ethnique et religieuse dans des États-nations formés selon des lignes tracées par des puissances étrangères. Alors que ses propositions peuvent paraître logiques d'un point de vue géopolitique simplifié, elles ne tiennent pas compte de la complexité des identités nationales, des relations historiques entre les groupes, et des réalités politiques sur le terrain.

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La guerre civile syrienne, qui a éclaté en 2011, a entraîné des changements fondamentaux dans la structure et la composition de la nation syrienne, remettant en question la viabilité du modèle de l'État-nation dans le contexte du Moyen-Orient. Alors que le régime de Bachar Al-Assad semble gagner du terrain, la réalité sur le terrain a profondément altéré la nature même de la nation syrienne. Le conflit en Syrie a mis en évidence les failles profondes d'un État construit sur des bases hétérogènes, où les diverses communautés ethniques et religieuses, notamment les Kurdes, les Alaouites, les Sunnites, les Chrétiens et d'autres, ont été intégrées de manière précaire. La guerre a exacerbé ces divisions, détruisant le tissu social et provoquant une crise humanitaire de grande ampleur. Les villes historiques comme Alep et Homs ont été dévastées, tandis que des millions de Syriens ont été déplacés à l'intérieur du pays ou ont fui à l'étranger, formant d'importantes communautés en diaspora.

La Syrie, après la guerre, sera confrontée à d'énormes défis pour reconstruire non seulement ses infrastructures, mais aussi sa société. La gouvernance centralisée et souvent autoritaire d'Assad devra s'adapter à une réalité où différentes communautés aspirent à une reconnaissance et une représentation accrues. Ces communautés, bien que géographiquement délimitées par les frontières nationales de la Syrie, sont intrinsèquement liées par des liens confessionnels, culturels et historiques qui transcendent ces frontières. Le concept de diaspora est devenu particulièrement pertinent pour la Syrie. Les Syriens à l'étranger maintiennent des liens étroits avec leur patrie, jouant un rôle clé dans la préservation de l'identité culturelle et dans la reconstruction potentielle du pays. La diaspora syrienne représente une diversité d'opinions et d'expériences, reflétant la complexité de la société syrienne dans son ensemble.

Le Golfe persique[modifier | modifier le wikicode]

Le Golfe Persique : Histoire, Importance et Débats sur la Terminologie[modifier | modifier le wikicode]

La région connue sous le nom de "Golfe Persique" est souvent au centre de débats concernant son appellation. En effet, certains États, notamment ceux du monde arabe, préfèrent utiliser l'appellation "Golfe arabe". Ce débat sur la terminologie reflète les tensions et les dynamiques politiques dans la région, où l'histoire, la culture et l'identité nationale jouent un rôle clé dans la manière dont les lieux sont nommés. Le Golfe, qu'il soit appelé "Golfe Persique" ou "Golfe arabe", est une région de grande importance stratégique, économique et culturelle. Il est bordé par plusieurs pays clés, dont le Koweït, le Qatar, le Bahreïn, les Émirats arabes unis et Oman, ainsi que par l'Iran et l'Arabie Saoudite. Cette région est connue pour ses vastes réserves de pétrole et de gaz naturel, ce qui en fait une des zones les plus riches et les plus stratégiquement importantes du monde.

Au cours des dernières décennies, le Golfe est devenu synonyme de prospérité et de luxe, en particulier dans les États du Conseil de coopération du Golfe (CCG), qui comprend le Koweït, le Qatar, le Bahreïn, les Émirats arabes unis, l'Oman et l'Arabie Saoudite. Ces pays ont utilisé leurs richesses pétrolières pour développer des économies modernes et diversifiées, investissant massivement dans l'urbanisme, le tourisme, l'éducation et les infrastructures. Les villes comme Dubaï aux Émirats arabes unis et Doha au Qatar sont devenues des symboles de cette prospérité, attirant des investissements internationaux et des touristes du monde entier. Ces États ont également cherché à jouer un rôle plus important sur la scène internationale, que ce soit par la diplomatie, les investissements économiques ou l'organisation d'événements d'envergure mondiale.

Prospérité et Transformation dans les États du Golfe Persique[modifier | modifier le wikicode]

L'histoire politique et économique du Golfe Persique est étroitement liée à l'influence britannique dans la région, qui a commencé à se manifester de manière significative au 19e siècle. À cette époque, l'empire britannique, cherchant à sécuriser les routes maritimes vers l'Inde, son joyau colonial, a commencé à établir une présence dans le Golfe Persique. Cette influence s'est traduite par des accords de protectorat avec les émirats locaux, offrant à la Grande-Bretagne un contrôle significatif sur les affaires politiques et économiques de la région. L'intérêt britannique pour le Golfe s'est accentué avec la découverte de pétrole au début du 20e siècle. Les Britanniques ont joué un rôle crucial dans le développement de l'industrie pétrolière, notamment en établissant des compagnies comme l'Anglo-Persian Oil Company (qui deviendra plus tard British Petroleum, ou BP). Cette période a vu une transformation de la région, passant d'une importance stratégique principalement maritime à un centre de l'économie pétrolière mondiale.

Le retrait britannique de la région dans les années 1960 et 1970 a marqué une nouvelle ère pour les États du Golfe. Cette période de décolonisation a coïncidé avec une hausse significative de la demande mondiale de pétrole, propulsant ces États nouvellement indépendants vers une prospérité économique sans précédent. L'indépendance a également donné lieu à la formation de structures politiques propres à chaque État, souvent sous la forme de monarchies, qui continuent de caractériser la gouvernance dans la région. Cependant, l'héritage britannique dans le Golfe Persique a laissé des traces durables. Les frontières tracées pendant la période coloniale, ainsi que les alliances politiques et économiques établies, ont continué à influencer les relations internationales et la politique intérieure des États du Golfe. Les relations étroites entre ces États et les puissances occidentales, notamment les États-Unis après le retrait britannique, ont joué un rôle crucial dans la politique de sécurité et économique de la région.

Le Golfe Persique, au cours de son histoire, a été étroitement lié à la Mésopotamie, en partie grâce à son riche commerce de perles, une activité économique prédominante bien avant l'avènement de l'ère pétrolière. Des centres importants de ce commerce étaient établis au Bahreïn et à Oman, où la pêche aux perles constituait une source de revenus essentielle pour les populations locales. Dès l'Antiquité, les eaux du Golfe Persique étaient renommées pour leurs riches gisements de perles. La région de Bahreïn, en particulier, était connue comme un centre majeur de la perliculture, attirant commerçants et marchands de diverses parties du monde antique. À Oman, la longue façade maritime favorisait également le développement d'un commerce maritime actif, y compris le commerce des perles. Ces activités étaient cruciales pour les économies locales, surtout dans des régions autrement limitées en ressources naturelles.

L'essor économique et culturel sous les Abbassides, à partir du 8e siècle, a contribué à l'expansion du commerce dans le Golfe Persique. Cette période a vu un développement florissant des échanges commerciaux, avec les ports du Golfe servant de hubs importants pour le commerce régional et international. Le commerce des perles, ainsi que d'autres marchandises, a prospéré sous l'administration abbasside, qui a intégré efficacement la région dans un empire étendu. Cependant, le déclin du califat abbasside au 13e siècle a marqué le début d'une période plus difficile pour la région. Les invasions, les troubles politiques et la fragmentation de l'empire ont perturbé le commerce et affaibli l'économie régionale. Malgré ces défis, le commerce des perles a continué à jouer un rôle économique significatif jusqu'au 20e siècle.

À partir du 15ème siècle, une nouvelle ère commence pour le Golfe Persique avec l'arrivée des puissances européennes, motivées par le commerce des épices et la maîtrise des routes maritimes. Les Portugais, menés par des navigateurs tels que Vasco de Gama, ont été les premiers à établir une présence dans la région au début du 16ème siècle, cherchant à contrôler les voies commerciales vers l'Inde et à accéder directement aux sources lucratives d'épices. Le commerce maritime est devenu le principal moyen d'influence européenne dans le Golfe. Les Portugais ont établi plusieurs bases, comme celle d'Ormuz, qui leur permettaient de contrôler les routes commerciales et d'influencer les politiques locales. Cette présence a ouvert la voie à d'autres puissances européennes, notamment les Britanniques et les Hollandais, qui ont également cherché à établir leur influence dans la région.

L'impact de l'arrivée européenne dans le Golfe a été profond. Elle a non seulement modifié les structures de pouvoir existantes, mais a également introduit de nouvelles technologies maritimes et militaires. Les États locaux ont dû naviguer dans ce nouvel environnement géopolitique, souvent en formant des alliances avec ou contre ces puissances étrangères. L'implication européenne a considérablement changé la dynamique régionale du Golfe. La rivalité entre les puissances européennes pour le contrôle des routes commerciales et des points stratégiques a eu des répercussions importantes sur l'histoire de la région. Par exemple, la compétition entre les Portugais et les Britanniques a finalement conduit à une domination britannique plus établie dans le Golfe au 19ème siècle. Cette période marque ainsi un tournant dans l'histoire du Golfe Persique, où la région est passée d'un centre commercial et culturel relativement autonome à un théâtre de rivalités internationales et de domination étrangère. Ces événements ont posé les bases des relations futures entre le Golfe et l'Occident, et ont influencé le développement politique, économique et social de la région jusqu'à l'époque moderne.

Influence Britannique dans le Golfe Persique[modifier | modifier le wikicode]

L'implication britannique dans le Golfe Persique a connu une évolution significative à partir du 18ème siècle, marquée par un renforcement des échanges commerciaux et l'émergence de défis sécuritaires. La présence britannique dans la région était principalement motivée par la protection des routes commerciales maritimes vers l'Inde, un joyau de l'empire colonial britannique. Le commerce avec l'Inde a été intensifié sous l'influence britannique, transformant le Golfe en un carrefour commercial vital. Cependant, cette période a également été marquée par des défis en termes de sécurité. La région était perturbée par la piraterie et les conflits entre divers chefs locaux, ce qui menaçait la libre circulation des marchandises et la sécurité des routes maritimes. Les Britanniques se sont donc retrouvés confrontés à la nécessité de stabiliser la région pour maintenir et sécuriser leurs intérêts commerciaux.

Avec l'expansion française dans la région, notamment à la suite de la campagne d'Égypte de Napoléon Bonaparte à la fin du 18ème siècle, les Britanniques ont ressenti une menace accrue à leurs intérêts. En réponse, ils ont établi des pactes avec les acteurs locaux, comme le traité conclu avec Oman, visant à contenir l'expansionnisme français. Ces accords étaient essentiels pour établir des relations amicales et garantir une certaine stabilité dans la région. En plus des menaces extérieures, les Britanniques ont dû traiter avec les activités de piraterie dans le Golfe. Ils ont adopté une approche de négociation avec les pirates, cherchant à mettre fin à leurs raids sur le commerce maritime. Ces accords ont joué un rôle clé dans la sécurisation des voies maritimes et ont permis un commerce plus fluide dans la région.

Au 19ème siècle, ces traités conclus par la Grande-Bretagne ont déterminé sa politique économique et stratégique dans le Golfe. Ils ont non seulement permis de sécuriser la région, mais ont également posé les bases des relations futures entre la Grande-Bretagne et les États du Golfe. Bien que la région ait été marquée par l'instabilité, l'engagement croissant des chefs locaux à ne plus se livrer à la guerre a contribué à une stabilisation relative, permettant aux Britanniques de maintenir une influence considérable. Ces développements historiques ont été cruciaux pour façonner la politique et l'économie du Golfe Persique, préfigurant les dynamiques modernes de la région. La période de l'influence britannique a jeté les bases des structures politiques et des alliances qui caractérisent encore aujourd'hui les États du Golfe.

Le Golfe Persique Durant la Première Guerre Mondiale[modifier | modifier le wikicode]

Lorsque la Première Guerre mondiale a éclaté, elle a créé une nouvelle dynamique géopolitique dans le Golfe Persique, une région déjà marquée par l'influence croissante des puissances européennes. Le Koweït, situé stratégiquement à l'entrée du Golfe, a joué un rôle crucial dans cette nouvelle configuration. Dirigé à l'époque par le cheikh Mubarak Al-Sabah, le Koweït a cherché à renforcer sa position en s'alignant de plus près avec la Grande-Bretagne. Déjà sous un accord de protectorat signé en 1899, où le cheikh Mubarak Al-Sabah s'était engagé à ne pas céder, louer ou vendre de territoire sans l'accord britannique en échange de la protection britannique, le Koweït a vu dans la guerre une opportunité de consolider cette relation. La montée de l'Empire ottoman comme menace pendant la guerre a accentué le besoin de sécurité et de soutien pour le Koweït. En réponse à ces circonstances, le Koweït et la Grande-Bretagne ont renforcé leur accord de protectorat. Cet accord renouvelé assurait une protection plus ferme du Koweït contre les ambitions ottomanes et renforçait les liens politiques et économiques avec la Grande-Bretagne. Pour la Grande-Bretagne, sécuriser le Koweït était essentiel pour protéger ses routes maritimes vers l'Inde et pour maintenir son influence dans la région du Golfe, riche en pétrole.

La Première Guerre mondiale a ainsi eu un impact significatif sur le Golfe Persique, redéfinissant les relations entre les États locaux et les puissances européennes. Les accords conclus pendant cette période entre des États comme le Koweït et la Grande-Bretagne ont façonné l'avenir géopolitique de la région, jetant les bases de la structure politique et économique qui prévaudrait pendant des décennies. Cette période historique a également souligné l'importance stratégique du Golfe Persique, non seulement pour les puissances régionales, mais aussi pour les acteurs mondiaux. Les décisions prises et les alliances formées pendant la Première Guerre mondiale ont eu des répercussions durables, influençant les politiques, les économies et les sociétés de cette région clé.

Retrait Britannique et Emergence des États Modernes du Golfe[modifier | modifier le wikicode]

L'époque des années 1960 a été une période charnière pour le Golfe Persique, caractérisée par un changement fondamental dans les relations internationales de la région. Ce changement a été principalement induit par la décision du Royaume-Uni de se retirer de ses positions stratégiques à l'est de Suez, y compris du Golfe Persique. Cette décision, annoncée en 1968, est intervenue dans un contexte où la Grande-Bretagne, affectée par des contraintes économiques et un changement de paradigme politique, réévaluait son rôle impérial à travers le monde. Le retrait britannique du Golfe, qui a été progressivement mis en œuvre, a coïncidé avec une période de réalignement géopolitique. L'indépendance de l'Inde et du Pakistan en 1947 avait déjà marqué le début de la fin de l'empire britannique, et la perte de ces colonies clés a influencé la décision de réduire la présence militaire britannique dans d'autres régions. Dans le Golfe, ce retrait a laissé un vide de pouvoir qui a eu des implications majeures pour les États de la région.

Les États du Golfe, qui avaient longtemps été sous l'influence ou la protection britannique, se sont retrouvés dans une position où ils devaient naviguer de manière autonome dans un environnement international complexe. Cette situation a accéléré le processus de formation d'États-nations modernes dans la région et a donné lieu à la création de nouvelles structures politiques et alliances, comme le Conseil de coopération du Golfe (CCG) fondé en 1981. Le retrait britannique a également ouvert la porte à d'autres influences internationales, en particulier celle des États-Unis. Dans le contexte de la Guerre froide et de la montée en importance stratégique du pétrole, les États-Unis ont renforcé leur présence dans le Golfe, établissant des relations étroites avec des pays comme l'Arabie saoudite, le Koweït et les Émirats arabes unis. Cette nouvelle configuration a redéfini l'équilibre des pouvoirs dans la région et a eu un impact significatif sur les politiques régionales et internationales.

Découverte de Pétrole et Deuxième Vague d'Indépendance[modifier | modifier le wikicode]

À la suite du retrait britannique du Golfe Persique dans les années 1960, les princes et dirigeants locaux, qui avaient auparavant établi des alliances avec le Royaume-Uni, se sont retrouvés face à des décisions cruciales concernant l'avenir de leurs territoires. Cette période a été caractérisée par un profond changement politique, marquant la formation des États-nations modernes dans la région du Golfe. Le retrait britannique a laissé un vide de pouvoir et a ouvert la voie à la souveraineté complète des États du Golfe. Des exemples notables incluent l'indépendance du Bahreïn et du Qatar en 1971, suivie peu après par la formation des Émirats arabes unis, une fédération de sept émirats. Ces événements ont été des étapes cruciales dans la définition des frontières politiques et des structures gouvernementales de ces nations.

Les dirigeants de ces nouveaux États ont dû naviguer dans un paysage complexe, équilibrant la nécessité de développer des institutions gouvernementales stables et de gérer les relations internationales, tout en exploitant les ressources naturelles abondantes, notamment le pétrole et le gaz. L'ère post-britannique a également été marquée par des efforts pour moderniser et développer ces pays, comme en témoigne le règne du sultan Qaboos bin Said à Oman, qui a initié une série de réformes pour transformer son pays. Cette période de transition a également vu une augmentation de l'influence des États-Unis dans la région. Les États du Golfe, riches en ressources pétrolières, sont devenus des alliés stratégiques importants pour les États-Unis, notamment dans le contexte de la Guerre froide et des intérêts énergétiques. Le retrait britannique a marqué une ère de transformation significative pour les États du Golfe. Les décisions prises par les dirigeants locaux pendant cette période ont non seulement façonné les structures politiques et économiques de leurs pays, mais ont également eu un impact profond sur les dynamiques régionales et internationales. L'histoire de cette période illustre comment les changements géopolitiques peuvent influencer la formation et le développement des États-nations, ainsi que la complexité des relations internationales dans une région riche en ressources.

La découverte de pétrole dans le Golfe Persique a radicalement transformé la région, attirant un regain d'intérêt significatif de la part des puissances occidentales. Cette richesse en hydrocarbures a coïncidé avec une période de transition politique majeure, menant à une deuxième vague d'indépendance pour plusieurs États de la région dans les années 1970. Le pétrole, découvert pour la première fois dans le Golfe au début du 20ème siècle, a commencé à jouer un rôle crucial dans l'économie mondiale, en particulier après la Seconde Guerre mondiale. Les pays du Golfe, dotés de certaines des plus grandes réserves de pétrole au monde, sont rapidement devenus des acteurs clés dans le marché énergétique global. Cette richesse a attiré l'attention des puissances occidentales, désireuses de sécuriser l'accès à ces ressources vitales.

Dans les années 1970, avec la fin de l'ère du protectorat britannique et le retrait britannique de la région, les États du Golfe ont entrepris un processus d'affirmation de leur souveraineté et d'indépendance politique. Cette période a vu l'émergence de nations indépendantes et souveraines telles que les Émirats arabes unis en 1971, qui ont uni les émirats de la Trêve sous une seule fédération. Le Bahreïn et le Qatar ont également obtenu leur indépendance durant cette période. L'essor économique dû au pétrole a permis à ces jeunes nations d'investir massivement dans le développement et la modernisation. Les revenus pétroliers ont transformé des sociétés autrefois principalement axées sur la pêche et le commerce des perles en États modernes avec des infrastructures avancées, des services sociaux et des économies diversifiées. Cependant, l'intérêt accru des Occidentaux pour la région n'était pas sans implications géopolitiques. Les relations entre les pays producteurs de pétrole du Golfe et les puissances occidentales, en particulier les États-Unis, sont devenues un aspect central de la politique internationale. Ces relations ont été marquées par des dynamiques complexes de coopération, de dépendance économique et de tensions politiques.

L’islam politique[modifier | modifier le wikicode]

Emergence et Fondements de l'Islam Politique[modifier | modifier le wikicode]

L'islam politique est une idéologie qui a pris de l'ampleur au cours du 20ème siècle, influençant de manière significative la politique et la société dans les pays à majorité musulmane. Cette idéologie vise à structurer la société et l'État selon les principes et les lois de l'islam, basés sur une interprétation spécifique des textes religieux comme le Coran et la Sunna. L'émergence de l'islam politique peut être vue comme une réponse aux défis posés par le colonialisme, la modernisation, et les transformations sociales. Des figures comme Hassan al-Banna, fondateur des Frères musulmans en Égypte en 1928, et Sayyid Qutb, un théoricien influent du même mouvement, ont été des pionniers dans la formulation et la promotion de l'idéologie de l'islam politique. Leurs enseignements et écrits ont jeté les bases pour une vision de la société où les principes islamiques sont intégrés à tous les aspects de la vie, y compris la gouvernance.

L'islam politique se manifeste sous différentes formes, allant des mouvements réformistes modérés aux groupes plus radicaux. Certains groupes, comme les Frères musulmans, ont cherché à atteindre leurs objectifs par des moyens politiques et sociaux, tandis que d'autres, comme Al-Qaïda ou l'État islamique, ont adopté des méthodes extrémistes et violentes. Un exemple marquant de l'impact de l'islam politique est la Révolution iranienne de 1979, menée par l'Ayatollah Khomeini. Cette révolution a conduit à l'établissement d'une république islamique en Iran, où les lois et la gouvernance sont basées sur des interprétations spécifiques de l'islam chiite.

L'islam politique a également joué un rôle significatif dans les événements des Printemps arabes de 2011, où plusieurs mouvements islamistes ont émergé comme des acteurs politiques clés dans des pays comme l'Égypte, la Tunisie et la Libye. Toutefois, l'islam politique est un sujet de controverse et de débat. Ses critiques soulignent les risques de restriction des libertés individuelles, notamment en matière de droits des femmes et des minorités. D'autre part, ses partisans le considèrent comme un moyen de préserver les valeurs culturelles et de résister à l'influence occidentale. L'ascension de l'islam politique dans le monde arabe peut être largement attribuée à l'échec du panarabisme, un mouvement politique qui prônait l'unité et la coopération entre les pays arabes tout en s'opposant à la domination occidentale. Cette idéologie, qui a connu son apogée dans les années 1950 et 1960 sous des leaders comme Gamal Abdel Nasser en Égypte, a commencé à décliner dans les années 1970, laissant un vide idéologique que l'islam politique a commencé à remplir.

L'année 1979 est souvent considérée comme un tournant dans l'histoire de l'islam politique, marquée par deux événements majeurs. D'abord, la Révolution iranienne a vu la chute du Shah d'Iran et l'émergence d'une république islamique sous l'Ayatollah Khomeini, un développement qui a eu un impact profond dans toute la région. Ensuite, la signature du traité de paix entre l'Égypte et Israël, connu sous le nom d'Accords de Camp David, a été perçue par de nombreux Arabes comme une trahison de la cause arabe et une capitulation face à Israël. La normalisation des relations entre l'Égypte et Israël a été un choc pour de nombreux Arabes, renforçant les sentiments d'antagonisme envers Israël, perçu comme un symbole de l'influence et de l'intervention occidentale dans la région. Cette perception a alimenté l'imaginaire de l'islam politique, où la lutte contre Israël et l'opposition à l'ingérence occidentale sont devenues des thèmes centraux.

Dans ce contexte, les mouvements islamistes ont gagné en popularité en se présentant comme des alternatives crédibles au panarabisme défaillant et en promettant de restaurer la dignité et l'autonomie des sociétés musulmanes à travers la mise en œuvre des principes islamiques. Ces mouvements ont varié dans leurs approches, certains prônant une réforme politique et sociale progressive, tandis que d'autres ont adopté des positions plus radicales. L'échec du panarabisme et les événements de 1979 ont créé un terrain propice à l'essor de l'islam politique, une idéologie qui a depuis lors joué un rôle majeur dans la politique du Moyen-Orient. La montée de cette idéologie a été une réponse aux désillusions politiques, aux défis socio-économiques et aux aspirations de nombreuses sociétés musulmanes, redéfinissant le paysage politique de la région.

L'Islam Politique Face à l'Échec du Panarabisme[modifier | modifier le wikicode]

Le fondamentalisme, un courant significatif au sein de l'islam politique, a pris racine dans le monde musulman dès le 8ème siècle, mais c'est avec l'apparition du wahhabisme au 18ème siècle que cette tendance a acquis une influence notable. Mohammed ibn Abd al-Wahhab, le fondateur du wahhabisme, a prôné un retour aux pratiques et croyances des premières générations de musulmans, une interprétation rigoureuse de l'islam qui est devenue la base idéologique de l'Arabie saoudite moderne. Le fondamentalisme en tant que tel se caractérise par une volonté de transcender l'histoire pour revenir aux sources premières de la religion. Cette approche se manifeste par une lecture littérale et intransigeante des textes sacrés, rejetant souvent les interprétations contemporaines ou contextuelles. Le fondamentalisme s'oppose fréquemment aux influences culturelles et politiques occidentales, perçues comme des menaces à l'authenticité et à la pureté de la foi islamique.

La période coloniale a eu un impact profond sur l'imaginaire politique du monde arabe. La domination et l'intervention européenne dans les affaires du Moyen-Orient ont été perçues comme une agression directe contre les sociétés musulmanes. Cette perception a alimenté un sentiment de résistance qui s'est souvent exprimé par un recours aux valeurs et principes islamiques. Le mouvement de libération nationale, qui a émergé en réaction à la pénétration occidentale, a été fortement imprégné de la tradition islamique. Les luttes pour l'indépendance, tout en cherchant à se libérer du joug colonial, ont également visé à réaffirmer l'identité islamique comme fondement de la souveraineté nationale. Dans ce contexte, le fondamentalisme islamique a évolué pour devenir une réponse non seulement aux défis internes des sociétés musulmanes, mais aussi à l'ingérence étrangère. Les mouvements islamistes qui en ont découlé ont varié dans leurs approches et objectifs, allant de la réforme sociale et politique à des formes plus radicales de résistance. Cette dynamique complexe entre tradition, modernité, et influences externes continue de façonner le paysage politique et social dans de nombreux pays à majorité musulmane.

Le mouvement des Frères Musulmans, fondé en Égypte en 1928 par Hassan Al-Banna, représente un jalon important dans l'histoire de l'islam politique au 20ème siècle. Cette organisation a émergé comme une réponse aux défis sociaux, politiques et culturels auxquels était confrontée la société égyptienne à cette époque. Hassan Al-Banna a créé les Frères Musulmans avec l'objectif initial d'islamiser la société égyptienne, en réaction à la modernisation rapide et à l'influence occidentale croissante dans le pays. La vision d'Al-Banna était de réformer la société en s'appuyant sur les principes islamiques, considérant le Coran comme la constitution ultime et infaillible pour la vie sociale et politique. L'une des particularités des Frères Musulmans était leur structure organisationnelle, qui comprenait une branche paramilitaire. Cette caractéristique reflétait non seulement la tradition militaire de la société égyptienne, mais était également une réponse à la présence britannique en Égypte. La capacité des Frères Musulmans à mobiliser à la fois politiquement et militairement a contribué à leur influence croissante.

Les Frères Musulmans ont rapidement gagné en popularité et en influence, devenant l'une des premières et des plus importantes organisations islamistes du 20ème siècle. Leur approche combinant activisme social, politique et parfois militant a servi de modèle pour d'autres mouvements islamistes à travers le monde musulman. Toutefois, le mouvement a également été sujet à controverse et à répression. Les gouvernements égyptiens successifs ont alterné entre tolérance, coopération et répression sévère à l'égard de l'organisation. Les Frères Musulmans ont été impliqués dans diverses luttes politiques en Égypte, notamment lors du renversement du président Mohamed Morsi en 2013, qui était issu de leurs rangs.

Depuis sa création en 1928 par Hassan al-Banna, le mouvement des Frères Musulmans a traversé des périodes fluctuantes, oscillant entre influence politique significative et répression sévère. Bien que l'organisation n'ait pas originellement adopté l'action armée comme tactique principale, elle s'est trouvée impliquée dans des conflits majeurs qui ont marqué l'histoire de la région. Lors de la guerre arabo-israélienne de 1948, un conflit crucial pour l'avenir de la Palestine, les Frères Musulmans ont participé aux combats. Cette implication reflétait leur engagement envers la cause palestinienne, considérée comme une lutte à la fois nationale et religieuse. Leur engagement dans cette guerre illustre la flexibilité de l'organisation quant à l'utilisation de la force armée pour des causes qu'elle jugeait justes et alignées sur ses objectifs islamiques. En 1952, les Frères Musulmans ont joué un rôle dans la révolution égyptienne qui a renversé la monarchie et mené à la fondation de la République égyptienne. Initialement, ils ont soutenu les officiers libres, espérant que le nouveau régime serait favorable à leurs aspirations islamiques. Cependant, les relations entre les Frères Musulmans et le leader révolutionnaire Gamal Abdel Nasser se sont rapidement détériorées, entraînant une période de répression intense contre l'organisation.

Le parcours des Frères Musulmans en Égypte est caractérisé par des hauts et des bas, illustrant la complexité de leur positionnement politique. Sous différents régimes, ils ont alterné entre une présence politique influente et des périodes où ils étaient réprimés et marginalisés. Cette dynamique témoigne des tensions persistantes entre les mouvements islamistes et les gouvernements laïcs ou séculiers dans la région. L'histoire des Frères Musulmans est donc celle d'une organisation influente mais souvent controversée, dont le rôle dans les événements clés comme la guerre de 1948 et la révolution de 1952 témoigne de son importance dans la politique du Moyen-Orient. Cependant, leur parcours a aussi été jalonné de confrontations et de conflits avec les pouvoirs en place, reflétant la nature complexe et parfois conflictuelle de l'islam politique.

Sayyid Qutb, né en 1906 et décédé en 1966, est une figure emblématique de l'islam politique. Sa pensée et son œuvre ont eu un impact considérable sur la vision de l'État islamique et sur le mouvement islamiste en général. Théoricien éminent, Qutb a élaboré une critique radicale des sociétés musulmanes de son époque, qu'il jugeait égarées de la vraie voie de l'Islam. Qutb a été un critique virulent de l'occidentalisation et du nationalisme panarabe, dominant en Égypte et dans d'autres pays arabes au milieu du 20ème siècle. Selon sa perspective, ces sociétés s'étaient éloignées des principes fondamentaux de l'Islam, tombant dans un état de « Jahiliya », un terme islamique traditionnellement utilisé pour décrire l'ignorance religieuse prévalant avant la révélation du Coran au prophète Mahomet. Pour Qutb, la Jahiliya moderne n'était pas seulement une ignorance religieuse, mais aussi un éloignement des lois et valeurs islamiques dans la gouvernance et la vie sociale.

Son expérience personnelle de la répression a également influencé sa pensée. Arrêté et torturé par le régime de Nasser en Égypte en raison de ses opinions dissidentes et de son appartenance aux Frères Musulmans, Qutb est devenu convaincu que les régimes en place dans le monde arabe étaient corrompus et illégitimes. Dans ses écrits, il a développé l'idée que la résistance, y compris le recours à la violence, était légitime contre ces gouvernements «jahili». Condamné à mort pour complot contre l'État égyptien, Qutb a refusé de faire appel de sa condamnation, choisissant de devenir un martyr pour sa cause. Sa mort en 1966 a renforcé son statut de figure emblématique dans l'islamisme radical, et ses écrits continuent d'influencer des mouvements islamistes dans le monde entier. Qutb a donc joué un rôle central dans le développement de l'islam politique, notamment en justifiant l'opposition violente à des régimes jugés non islamiques. Sa vision de l'Islam comme un système complet de vie, englobant à la fois la gouvernance et la société, a profondément marqué les mouvements islamistes contemporains et le débat sur la nature et l'avenir de l'État islamique.

La pensée de Sayyid Qutb, bien que marginale au début, a gagné en influence et en pertinence à la fin des années 1970, une période marquée par plusieurs événements cruciaux qui ont redéfini le paysage politique et idéologique du monde musulman. En 1979, plusieurs événements majeurs ont bouleversé le contexte idéologique du Moyen-Orient et au-delà. Tout d'abord, l'échec du panarabisme, symbolisé par la signature des accords de paix entre l'Égypte et Israël, a laissé un vide idéologique dans le monde arabe. La décision de l'Égypte, un acteur majeur du nationalisme arabe, de normaliser les relations avec Israël a été perçue comme une trahison par de nombreux Arabes et a affaibli la crédibilité du panarabisme comme mouvement unificateur. Dans le même temps, la Révolution iranienne de 1979 a vu l'émergence de la République islamique d'Iran, établissant un gouvernement basé sur des principes islamiques chiites. Cette révolution a eu un impact considérable dans toute la région, montrant la viabilité de l'islam politique comme alternative aux régimes séculiers ou pro-occidentaux. Par ailleurs, l'invasion soviétique de l'Afghanistan en 1979 a déclenché une guerre de dix ans, où les moudjahidines afghans, soutenus par divers pays, y compris les États-Unis, l'Arabie saoudite et le Pakistan, ont combattu contre les forces soviétiques. Cette guerre a attiré des combattants islamistes de tout le monde musulman, galvanisés par l'appel à défendre une terre musulmane contre une puissance étrangère non musulmane. Ces événements ont contribué à un renouveau et à une radicalisation de l'islam politique. Les idées de Qutb, en particulier sa critique de la Jahiliya moderne et sa légitimation de la lutte armée contre les régimes jugés non islamiques, ont trouvé un écho auprès de ceux qui étaient déçus par les échecs du panarabisme et inquiets de l'influence étrangère dans le monde musulman. En conséquence, l'islam politique, sous ses diverses formes, est devenu un acteur majeur dans la politique régionale et mondiale, influençant les dynamiques de pouvoir et les conflits dans les décennies suivantes.

La Notion de Martyr dans l'Islam Politique[modifier | modifier le wikicode]

La notion de martyr dans l'islam politique a gagné une signification et une importance accrues vers la fin du 20ème siècle, notamment dans les conflits opposant les forces islamistes à diverses puissances étrangères. Cette conceptualisation du martyr, au-delà de son sens religieux traditionnel, est devenue un élément clé de la mobilisation et de la rhétorique des mouvements islamistes. Dans le contexte des conflits comme la guerre soviéto-afghane de 1979-1989, la figure du martyr a acquis une dimension centrale. Les combattants moudjahidines, luttant contre l'occupation soviétique en Afghanistan, étaient souvent célébrés comme des martyrs, des héros qui sacrifiaient leur vie pour la défense de l'islam. Cette glorification du martyr a servi à motiver les combattants, attirer le soutien international et justifier la résistance armée contre une superpuissance perçue comme oppressante. La promotion de la mort en martyr dans ces contextes est devenue un puissant outil de recrutement pour les mouvements islamistes, attirant des combattants de diverses régions du monde musulman. La promesse du martyr, souvent interprétée comme une voie vers le paradis et l'honneur, a été un élément clé dans la mobilisation des individus prêts à participer à des luttes armées contre des ennemis jugés injustes ou anti-islamiques.

Cependant, la notion de martyr dans l'islam politique a suscité de vives controverses et critiques. Beaucoup considèrent que l'encouragement à la mort en martyr, en particulier dans le cadre d'actions violentes, constitue une distorsion des enseignements islamiques et une source de conflits. Cette conception du martyr a été remise en question tant au sein de la communauté musulmane que par les observateurs externes. La figure du martyr dans l'islam politique symbolise la manière dont des concepts religieux peuvent être réinterprétés et utilisés dans des cadres politiques et conflictuels. Elle reflète la complexité des mouvements islamistes et la façon dont ils intègrent des éléments religieux dans leur stratégie et leur idéologie. Cette approche a non seulement façonné les dynamiques des mouvements islamistes, mais a également eu des implications profondes sur le plan international, influençant les politiques et les perceptions de l'islam politique dans le monde.

Changements Politiques et Géopolitiques[modifier | modifier le wikicode]

Dans le paysage politique complexe et parfois instable du monde musulman, certains États ont réagi à la montée de l'islam politique en intégrant des politiques islamistes, visant à renforcer leur autorité et à stabiliser leur gouvernement. Cette stratégie a été adoptée dans divers contextes, en réponse aux défis internes et externes auxquels ces pays étaient confrontés. L'adoption de politiques islamistes par certains régimes a souvent été motivée par le désir de légitimer leur pouvoir auprès de populations majoritairement musulmanes. En s'alignant sur les valeurs et les principes islamiques, ces gouvernements cherchaient à se présenter comme des protecteurs et des défenseurs de l'islam, gagnant ainsi le soutien populaire et contrant les mouvements d'opposition qui pourraient menacer leur stabilité.

Cette approche a été particulièrement visible dans des contextes où les gouvernements cherchaient à contrer l'influence de groupes islamistes radicaux ou à répondre à des crises politiques et sociales. Par exemple, l'Iran, suite à la Révolution islamique de 1979, a mis en place un système de gouvernance islamique, avec l'Ayatollah Khomeini comme figure emblématique, établissant une république islamique basée sur des principes chiites. Dans des pays comme l'Arabie saoudite, le Pakistan et certains États du Golfe, des éléments islamistes ont été incorporés dans la législation et les politiques publiques, reflétant et renforçant les valeurs religieuses dominantes. Toutefois, cette stratégie n'est pas sans risques ni critiques. L'utilisation de l'islam politique comme outil de gouvernance peut conduire à des tensions et à des contradictions internes, surtout lorsque les aspirations de la population diffèrent des politiques gouvernementales. De plus, le recours à l'islamisme pour consolider le pouvoir peut entraîner des restrictions des libertés civiles et des droits de l'homme, suscitant des préoccupations tant au niveau national qu'international.

Transformation de l'Islam Politique dans les Années 1990[modifier | modifier le wikicode]

Au cours des années 1990, certains spécialistes et observateurs ont conclu à l'échec de l'islam politique, en partie parce que les mouvements islamistes n'avaient pas réussi à s'emparer du pouvoir dans de nombreux pays. Cependant, cette analyse s'est avérée prématurée face à l'évolution ultérieure des événements et à la résurgence de l'islamisme sous différentes formes. Après la fin de la guerre en Afghanistan et le retrait des forces soviétiques en 1989, les combattants islamistes, ou moudjahidines, qui avaient mené le jihad contre l'URSS, ont commencé à rediriger leur lutte vers de nouveaux ennemis. L'un des changements les plus significatifs a été la montée du jihad contre les États-Unis, perçus comme une nouvelle force impérialiste dans la région, et leurs alliés, y compris Israël. Cette réorientation du jihad était en partie une réponse à la présence américaine dans le Golfe Persique, notamment après la Guerre du Golfe de 1991, et à l'alignement perçu des États-Unis avec Israël et contre les intérêts des populations musulmanes.

Cette période a également vu l'émergence ou la consolidation de groupes islamistes radicaux comme Al-Qaïda, dirigé par Oussama ben Laden, qui avait auparavant combattu en Afghanistan. Ben Laden et d'autres leaders islamistes ont commencé à cibler les États-Unis et leurs alliés, les considérant comme des ennemis principaux dans leur lutte pour établir un ordre islamique. La perspective que l'islam politique avait échoué a donc été contredite par ces développements ultérieurs. Les mouvements islamistes n'avaient peut-être pas pris le pouvoir de manière conventionnelle, mais ils avaient réussi à s'imposer comme des forces significatives dans la politique régionale et mondiale. Leur capacité à mobiliser, à influencer et à mener des actions violentes a démontré que l'islam politique restait une force dynamique et influente, capable de s'adapter à de nouveaux contextes et défis.

À partir des années 1990, une évolution marquante s'est opérée dans l'islam politique, avec une transformation significative des approches et des tactiques employées par certains mouvements islamistes. Cette période a vu l'émergence d'une forme de violence que l'on pourrait qualifier de sacrificielle, un changement radical par rapport aux pratiques antérieures. Cette nouvelle phase de violence dans l'islam politique a été caractérisée par l'utilisation d'attentats-suicides et d'autres formes de terrorisme. Ces actes n'étaient plus seulement vus comme des moyens de combattre un ennemi, mais aussi comme des actes de sacrifice ultime. Les auteurs de ces attentats étaient souvent célébrés comme des martyrs, une évolution de la notion traditionnelle de martyr dans l'islam, où la mort volontaire dans un acte de violence devenait un idéal glorifié. Un exemple frappant de cette évolution est les attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis, orchestrés par Al-Qaïda sous la direction d'Oussama ben Laden. Ces attaques, menées par des kamikazes, ont non seulement causé des destructions massives et des pertes en vies humaines, mais ont également changé la façon dont l'islam politique était perçu et combattu à l'échelle mondiale.

Cette période a également vu la montée en puissance de groupes tels que les talibans en Afghanistan, qui ont utilisé des tactiques similaires dans leur lutte contre les forces occidentales et le gouvernement afghan. Ces groupes ont justifié l'utilisation de la violence sacrificielle par une interprétation radicale de l'islam qui légitimait le jihad contre ce qu'ils percevaient comme des forces oppressives et anti-islamiques. La montée de cette nouvelle forme de violence dans l'islam politique a eu des conséquences profondes. Elle a entraîné une réaction internationale, avec des interventions militaires en Afghanistan et en Irak, et a suscité un débat mondial sur la nature de l'islam politique et la réponse appropriée à ses manifestations les plus extrêmes. Ces développements ont non seulement eu un impact sur la scène internationale, mais ont également provoqué des débats et des divisions au sein des communautés musulmanes, entre ceux qui soutenaient ces tactiques et ceux qui les condamnaient. La transformation de l'islam politique dans les années 1990 et au début des années 2000 a été marquée par une montée de la violence sacrificielle et du terrorisme. Cette évolution a redéfini les tactiques et les objectifs de certains mouvements islamistes, entraînant des conséquences durables pour la politique mondiale et les sociétés musulmanes.

L'Islam Politique en Irak Post-Saddam Hussein et émergence de l'État Islamique en 2014[modifier | modifier le wikicode]

Au début du 21ème siècle, les acteurs de l'islam politique ont connu des évolutions significatives, en particulier avec l'émergence d'Al-Qaïda comme un acteur majeur dans le panorama du terrorisme international. Cette période a également été marquée par une relocalisation géographique de ces acteurs, notamment en Irak, suite à l'intervention américaine et la chute du régime de Saddam Hussein. Après la chute de Saddam Hussein en 2003, l'Irak est entré dans une période de chaos politique et social. Le parti Baas, qui avait longtemps dominé la politique irakienne sous Saddam Hussein, a été interdit, et une nouvelle structure de pouvoir a émergé, dans laquelle la majorité chiite a pris une position de leadership. Cette transformation a créé des tensions sectaires et un sentiment de marginalisation parmi la population sunnite, qui avait été dominante sous le régime de Saddam Hussein.

Al-Qaïda, sous la direction de figures comme Abu Musab al-Zarqawi, a profité de ce climat d'instabilité pour établir une présence en Irak. Zarqawi, un jordanien, a fondé l'organisation "Al-Tawhid wal-Jihad", qui a ensuite fusionné avec Al-Qaïda, devenant une des branches les plus actives et les plus violentes du réseau terroriste. Sous sa direction, Al-Qaïda en Irak a ciblé non seulement les forces américaines et leurs alliés, mais aussi la population chiite, qu'ils considéraient comme des apostats et des collaborateurs des forces d'occupation. Les tactiques d'Al-Qaïda en Irak, notamment les attentats-suicides et les massacres de masse, ont exacerbé les tensions sectaires et plongé le pays dans une spirale de violence. La stratégie de Zarqawi, focalisée sur la provocation d'un conflit sectaire, a transformé l'Irak en un champ de bataille pour des luttes de pouvoir régionales et idéologiques, avec des répercussions profondes pour la région et le monde. L'évolution de l'islam politique en Irak pendant cette période reflète la complexité et la fluidité de ces mouvements. Al-Qaïda en Irak, bien qu'ayant des liens avec le réseau global d'Al-Qaïda, a développé ses propres objectifs et stratégies, enracinés dans le contexte politique et social irakien. Cette période a également souligné le rôle des dynamiques sectaires et de la marginalisation politique dans l'alimentation de l'extrémisme et du conflit.

En 2014, le groupe connu sous le nom d'Al-Qaïda en Irak a subi une transformation significative, marquant un tournant dans l'histoire de l'islam politique. Ce groupe, qui avait évolué et gagné en influence dans le contexte post-invasion de l'Irak, a annoncé la formation de l'État Islamique (EI), également connu sous le nom de Daech (acronyme arabe pour al-Dawla al-Islamiya al-Iraq al-Sham). L'annonce de la création de l'État Islamique a été faite par son leader, Abu Bakr al-Baghdadi. Cette déclaration signifiait non seulement un changement de nom, mais aussi une ambition territoriale et idéologique étendue. L'EI visait à établir un califat, une entité politique régie par la charia (loi islamique), englobant non seulement l'Irak mais aussi la Syrie et potentiellement d'autres régions. Sous la bannière de l'État Islamique, le groupe a rapidement étendu son contrôle sur de vastes régions en Irak et en Syrie, exploitant le vide de pouvoir créé par la guerre civile syrienne et la faiblesse du gouvernement irakien. L'EI a gagné en notoriété pour sa brutalité, y compris des exécutions massives, des actes de nettoyage ethnique, des destructions de sites historiques et des attentats terroristes dans le monde entier. La proclamation de l'État Islamique a représenté un défi majeur pour la stabilité régionale et la sécurité internationale. Elle a entraîné une intervention militaire internationale pour contenir et finalement réduire le territoire contrôlé par l'EI. La montée et la chute de l'État Islamique ont également suscité d'importants débats sur les causes et les réponses appropriées à l'extrémisme islamiste violent, ainsi que sur les moyens de traiter les conséquences humanitaires et sécuritaires de son expansion.

Annexes[modifier | modifier le wikicode]

Références[modifier | modifier le wikicode]