L'impulsion humanitaire à l'époque de la realpolitik : la Croix-Rouge (1863 – 1914)

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L'impulsion humanitaire à l'époque de la realpolitik : la Croix-Rouge (1863 – 1914)
Faculté Faculté des Lettres
Département Département d’histoire générale
Professeur(s) Matthias Schulz
Cours Sociétés et acteurs non-gouvernementaux en relations internationales

Lectures


Nous allons parler de l’impulsion humanitaire à l’époque de la realpolitik. Nous allons essayer de renouer un mouvement transnational et la politique internationale et c’est donc de la Croix que nous allons de 1863, année de sa fondation jusqu’à la Première Guerre mondiale. Dans une première partie nous allons nous interroger sur le rôle que joue la charité dans cette époque et ensuite quel rôle joue précisément cette tendance politique, cette tendance à penser en politique étrangère à cette époque-là.

Le deuxième point est la motivation des États à joindre la convention de Genève de 1866. C’est la convention qui crée le droit humanitaire international. C’est la première convention multilatérale sur le droit humanitaire international. Ensuite, nous allons parler de l’action humanitaire dans un système international en mutation avec notamment l’essor de l’impérialisme européen et le problème de la mise de la mise en œuvre de la convention de Genève qu’on appelle en anglais le compliance-enforcement. Finalement, une occasion manquée, l’action humanitaire en temps de paix ; pourquoi la Croix Rouge ne s’est pas engagée de plus et à partir de très tôt pour la solidarité, la charité internationale en temps de paix, pourquoi pas lors des catastrophes naturelles.

Charité et realpolitik

D’abord, comme on peut le constater déjà à partir de l’intitulé, l’internationalisme humanitaire de la Croix Rouge résulte des deux courants opposés et parallèles qui se mettent en place au cours des années 1850 et 1860. C’est d’abord l’internationalisme culturel dont l’internationalisme humanitaire est une variation. C’est un terme formulé par Akira Iriye, professeur à Harvard d’origine japonaise. Il entend par l’internationalisme culturel tous les efforts et pratiques qui favorisent la coopération pacifique et interculturelle entre sociétés, l’établissement des réseaux de communication transfrontalière et l’amélioration de la compréhension mutuelle et des échanges. C’est l’internationalisme culturel et l’internationalisme humanitaire de la Croix Rouge en fait partie, mais il est distinct quand même dans cette catégorie plus large.

Le deuxième courant est donc la realpolitik. La realpolitik est un terme introduit en 1853 par Ludwig A. von Rochau, un publiciste allemand dans son ouvrage Grundsätze der Realpolitik. C’est une analyse très affinée de la transformation de la politique étrangère dans l’époque qu’il vit donc suite aux révolutions et à la répression des révolutions de 1848 et 1849. En fait, ce qu’il constate est un retour d’une politique étrangère ambitieuse des monarchies européennes où les monarchies prennent des risques calculés et font appel au nationalisme. Auparavant, les monarchies étaient souvent contre le nationalisme et bien entendu surtout les monarchies multinationales ou les empires multinationales comme l’Empire autrichien.

Bersagliers sardes durant la bataille de la Tchernaïa le 17 août 1855.

Dans cette realpolitik, la violence devient de nouveau une option. C’est-à-dire qu’après le Congrès de Vienne, il n’y a pas eu de guerre majeure européenne. La Première Guerre est en 1853 avec la guerre de Crimée qui est le résultat d’une surenchère des tensions par la Russie, par la France et par l’Empire ottoman. C’est la Russie qui porte le plus de responsabilités pour l’éclatement de la guerre de Crimée. Par la suite, il y a eu la guerre d’unification italienne, les guerres d’unification allemande, la guerre de sécession aux États-Unis et le soulèvement polonais réprimé par le Tsar de la Russie. On peut constater qu’à cette époque-là le risque de guerre augmente et par conséquent, les sociétés réfléchissent sur les conséquences et pensent à des initiatives.

Donc, c’est la société civile et les décideurs politiques qui lancent conjointement le mouvement de la Croix Rouge internationale.

En quoi est-ce que le mouvement de la Croix Rouge est distinct ou similaire avec le pacifisme ou d’autres mouvements ?

On peut dire que le mouvement de la Croix Rouge tel que fondé suite à la conférence de Genève en 1863 émane de la société civile et mobilise celle-ci. Elle favorise la coopération internationale, elle favorise la formation d’un réseau qui dépasse les frontières, et comme le pacifisme, elle est motivée ou mobilisée en partie par la souffrance causée par une pratique culturelle archaïque qu’est la guerre. Comme les pacifistes, le mouvement de la Croix Rouge s’est fait des soucis sur les conséquences de la guerre.

Mais il y a aussi des caractéristiques distinctes de ce mouvement. D’abord, il organise l’implication à grande échelle des femmes dans la société civile internationale. La Croix Rouge sans les femmes, ce n’est pas possible, ce n’est pas pensable. Le mouvement de la Croix Rouge favorise également la coopération internationale en faveur des victimes de la guerre, mais en temps de guerre contrairement au pacifisme qui favorise la paix ou la coopération en temps de paix.

La Croix Rouge présente la guerre comme un élément incontournable de la vie humaine émanant d’une certaine manière de la nature humaine elle-même tandis que les pacifistes présentent la guerre comme incompatible avec l’humanité ou au moins les pacifistes radicaux, les non résistants parmi les quakers. Les quakers sont non résistants, ils s’opposent à toute forme de violence, même défensive.

Le pacifisme veut réguler le «  jus ad bellum », le droit de faire la guerre. Il veut trouver des alternatives pour la guerre. La Croix Rouge, au contraire, veut réguler le « jus in bello », c’est-à-dire le droit qui régit la manière de faire la guerre. Il veut réguler le comportement des États pendant la guerre. En d’autres termes, d’un point de vue juridique, il veut humaniser la guerre ; c’est ce que veut la Croix Rouge. Le résultat de ces efforts était sur la table très rapidement.

Le mouvement a été fondé en 1863 et en 1864, un an plus tard, la convention de Genève était née. C’est un succès fulminant. Donc, on fonde un mouvement et une année plus tard on a une convention multilatérale sur table, c’est incroyable.

Le pacifisme, en revanche, prend beaucoup de temps pour faire adopter une règle contre la guerre. En 1899 a lieu la première conférence de La Haye qui est une convention multilatérale qui voit le jour qui définit quelques méthodes de résolution des différends aux préliminaires de la guerre. C’est l’arbitrage, la médiation, et la commission d’enquête qui sont trois méthodes. Ces méthodes sont peaufinées, mais pas beaucoup, surtout la Cour d’arbitrage mise en place. La deuxième conférence de La Haye a lieu en 1907. La guerre est supprimée ou abolie en droit international en 1928 avec le pacte Kellogs-Briand. En 1928 la guerre cesse d’être un instrument de droit d’une certaine manière. En réalité, c’est sous certaines conditions.

En tout cas, les pacifistes existaient déjà à la fin du XIXème siècle, mais pour arriver à un texte quelconque qui vise à prévenir la pratique de la guerre, il fallait attendre plus qu’un siècle. Donc, il y a une distinction très claire entre le mouvement pacifiste et son succès et le mouvement de la Croix Rouge et son succès. C’est étonnant et cela souligne d’une certaine manière que le mouvement de la Croix Rouge est plus proche peut-être aux États que le mouvement pacifiste au XIXème siècle.

Pour comprendre le mouvement de la Croix Rouge, il ne faut pas l’isoler dans une histoire de la philanthropie, mais il faut bien l’intégrer dans une histoire des relations internationales. Si on met l’accent seulement sur les personnes qui ont animé le mouvement de la Croix Rouge au départ comme Henri Dunant, on ne comprend tout à fait l’histoire de ce mouvement. Donc, on peut formuler quelques questions comme pourquoi est-ce que les États soutiennent la convention de Genève et comment les principes et valeurs du mouvement de la Croix Rouge ont été transférés dans les sociétés réceptrices, à ce que la solidarité ou la charité en temps de guerre s’est une bonne idée, mais on sait qu’il y avait du nationalisme et de l’impérialisme à l’époque ; est-ce que les acteurs étatiques ont internalisé les valeurs de la charité et de la solidarité en temps de guerre et comment est-ce qu’on peut les mettre en pratique, et comment était abordé le problème de la mise en application, donc ce problème de la « compliance » et de l’“enforcement’' de la convention de Genève et du mouvement de la Croix Rouge. Quel était le rôle du mouvement, quel était les stratégies du CICR, du comité international de la Croix Rouge qui a son siège à Genève qui émane du Comité original qui avait fondé ce mouvement, le comité international pour le secours aux militaires blessés et malades qui était le nom original de ce CICR de nos jours.

D’abord, sur cette notion de transfère, transfère d’une norme ou d’un principe dans une autre société, les idées du mouvement de la Croix Rouge étaient nées à Genève, on va voir, il émane de la société philanthropique genevoise, mais ils étaient transféré d’une certaine manière parce que tout le monde en fait a signé la convention de Genève lorsque la Première Guerre mondiale était éclatée n’est-ce pas, le mouvement de la Croix Rouge était universel quasiment. Tous les États avaient un mouvement de la Croix Rouge et tous les États avaient presque adhéré à la convention de Genève. Donc, il y a eu donc lieu a un transfert interculturel des valeurs, des normes, des principes de Genève comme lors du mouvement abolitionniste où là aussi il y a eu un transfert des valeurs, des principes, des normes.

Donc qu’est-ce que c’est maintenant un transfert interculturel ? C’est un processus au cours duquel une ou plusieurs idées, coutumes ou pratiques sont transmises d’un espace culturel à l’autre. Donc, des idées, des coutumes ou des pratiques. Des idées, ce sont des normes, principes, valeurs aussi. Et pendant que les idées soient reçues par une société réceptrice, elles sont soit acceptées, soit modifiées, soit déformées soit régenté par l’espace culturel dite récepteur, c’est-à-dire on peut utiliser le terme de transfert interculturel pour un processus complexe de transmission des valeurs à une autre société.

Une société réceptrice modifie quasiment nécessairement les valeurs, normes, principes ou idées d’une autre société parce qu’il y a déjà le transfert linguistique. Donc, les concepts, les mots doivent varier. Puis, les connotations varient nécessairement. Puis, il peut y avoir l’influence de l’idéologie par exemple qui est l’idéologie nationale ou une idéologie politique. Donc, le processus de transfert interculturel n’est pas linéaire.

Il peut avoir aussi un transfert culturel, un transfert interculturel puis rejeté dans la société réceptrice. La société réceptrice peut dire en fin qu’elle reçoit les valeurs, mais elle ne les partage pas, donc c’est un processus ouvert.

Il y a aussi l’impérialisme qui pèse sur les sociétés européennes à l’époque, c’est l’idéologie dominante. Donc, comment est-ce que les valeurs de la Croix Rouge et l’impérialisme, comment est-ce qu’ils se conjuguent. Il y a eu évidemment des tensions donc il faut en parler.

Henri Dunant fut le fondateur du mouvement de la Croix Rouge. Henri Dunant a écrit l’ouvrage « Un souvenir de Solferino » publié en 1862 parce qu’il a eu une expérience dans sa vie qui l’a bouleversé. Il a vu le champ de bataille de Solferino, donc la bataille entre le Piémont-Sardaigne et la France d’une part, et l’Autriche d’une autre part qui mena finalement à l’unification italienne. Le champ de bataille de Solferino était plein de corps et de blessés, 40000 victimes à la suite d’une bataille qui a duré un seul jour.

Bataille de Solférino, 24 juin 1859 : Napoléon III ordonne au futur maréchal Regnaud d’engager le combat avec la garde impériale.

Dunant est arrivé le soir de la bataille, il n’a pas vu la bataille elle-même, mais il est arrivé le soir lorsque les puissances victorieuses sont donc restées sur place et la puissance vaincue, l’Autriche a l’époque s’était déjà retiré et retiré sans amener ses blessés. Les blessés étaient encore sur le champ de bataille, le terrain était aux français et aux Piémontais. À l’époque, il n’y avait pas d’accord sur le soin des blessés. Donc, le soin des blessés était laissé à la fois au corps sanitaire des armées piémontaise et française et aux volontaires. Donc, les volontaires de Solferino et les volontaires de Castiglione près du champ de bataille aidaient à rassembler les blessés et les stocker dans les Églises, sur les rues, dans les ménages privés, un peu partout parce que pour un village de 500 habitants, 40000 blessés sur un champ de bataille est beaucoup.

Dunant participe à cette aide. Il se trouve à Castiglione par hasard parce qu’il veut voir Napoléon III, l’empereur français, pour une affaire en Algérie om il est colonisateur bien que Dunant vient de Genève. Il organise des secours en écrivant à des connaissances à Genève qui eux, s’engagent à envoyer des médicaments, des pansements entre autres à Castiglione. Ramasser toutes les victimes a pris une semaine et beaucoup sont morts parce qu’ils ne pouvaient pas obtenir de l’aide médical rapidement.

Donc, cette expérience, Dunant ne peut pas s’en distancer, elle bouleverse sa vie et il écrit « Un souvenir de Solferino » en 1862 parce qu’il ressent qu’il ne peut pas transmettre le message lorsqu’il s’entretient simplement avec une personne. Personne ne lui comprend d’une certaine manière. Dans cet ouvrage, il critique l’absence d’accord pour le soin des blessés, il décrit la pratique des volontaires d’aider les soldats blessés, les malades selon le principe « tutti fratelli », c’est-à-dire peu importe la nationalité ou l’appartenance à telle ou telle armée, tous les soldats sont traités de manière égale par les volontaires. Il manque évidemment des docteurs de médecine autrichiens pour le soin des Autrichiens. Il propose dans cet ouvrage l’adoption d’un code international pour le soin des blessés, et en temps de paix déjà, la formation des corps de volontaires pour être prêt à la guerre. Idéalement, ces corps de volontaire de toutes les nations pouvaient aider lorsqu’une guerre éclate quelque part. Donc, il pouvait mettre en œuvre d’une certaine manière une solidarité internationale lorsqu’éclatait une guerre.

Dunant publie son livre, il le finance lui-même, il le fait circuler auprès des monarques européens, auprès de la haute société surtout pour avoir le plus d’échos auprès des personnes de pouvoir et il réussit. Il réussit parce que lors de la guerre de Crimée entre 1853 et 1856, il y avait déjà une sensibilisation pour les effets de la guerre moderne. La guerre de Crimée avait causé 100000 morts qui opposaient la Grande-Bretagne, la France et le Piémont ainsi que l’Empire ottoman d’une part et la Russie d’autre part. Beaucoup de morts était du à a choléra ; en fait plus de soldats sont morts dus au choléra que dus aux batailles lors de la guerre de Crimée.

Florence Nightingale three quarter length.jpg

Une personne en particulier avait connu une certaine célébrité lors de la guerre de Crimée qui était Florence Nightingale, une infirmière britannique qui voyageait en Crimée avec un corps d’infirmières volontaires, elle était la chef du groupe. À la suite, elle devenait une personnalité éminente dans la réforme du système médical britannique. Donc, elle a connu une ascension sociale très importante et sa famille était contre l’acceptation de la profession d’infirmière parce qu’elle venait d’une « bonne famille ».

Alors que le public était déjà sensibilité pour les conséquences de la guerre moderne, à Genève, la société philanthropique de la ville de Genève invitait Dunant à présenter son livre et suite aux discussions autour de son livre, se formait un comité des cinq mandaté d’explorer les possibilités de mettre en œuvrer les idées de Dunant. C’est ce comité des cinq qui décide de façon autonome de se transformer et de se renommer en Comité international de secours aux militaires blessés et malades en 1863 donc juste après sa fondation. C’est le noyau du Comité international de la Croix Rouge.

Il y avait des membres qui avaient des liens avec le milieu philanthropique. Donc, en fait, ils faisaient tous partie de la société philanthropique genevoise et en particulier Gustave Moynier était une célébrité dans ce milieu et chacun de ces membres avait une certaine fonction quasiment idéale dans ce comité. Mounier était juriste et philanthrope. En fait il ne pratiquait plus le droit, il était simplement philanthrope bien qu’il était très jeune, mais fortuné. Louis Appia était un chirurgien et militaire. Théodore Maunoir était chirurgien civil et il avait un réseau de médecins. Henri Dunant, philanthrope et auteur de l’ouvrage et donc motivé par son expérience personnelle. Finalement, le Général Guillaume-Henri Dufour qui était un ancien général de l’armée suisse, qui avait en fait mené l’armée suisse lors de la guerre civile de 1847. Lors de la Guerre du Sonderbund, Dufour a décidé d’instruire les soldats suisses de l’armée fédérale, de traiter de manière bienveillante les adversaires, donc les soldats appartenant au Sonderbund parce qu’il ne voulait pas que la Suisse se divise, mais qu’elle puisse se réunir suite à la guerre. Donc, la clémence et la logique d’une clémence face à l’adversaire était logique pour quelqu’un comme Dufour.

Chacun des membres du comité avait donc une certaine fonction et jouait un rôle pour la mise en place de la convention de Genève. Donc, Moynier dû à ses connaissances de juristes et à son rôle dans le milieu philanthropique et suisse, le général Dufour faisait le lien avec le gouvernement suisse pour qu’il invite les spécialistes, les experts de la chirurgie médicale et du soin du service sanitaire médical des armés puis les délégués des États et Dunant, lui, il mobilisait les experts lors d’un congrès statistique à Berlin, à l’époque, il voyageait là-bas pour mobiliser les experts notamment de la médecine. Il rencontrait par le hasard, plusieurs chirurgiens militaires notamment un allemand et un autre chirurgien militaire des Pays-Bas.

À la suite, il voyageai dans différente États allemands, à Berlin, à Karlsruhe, à Vienne, à Dresde pour convaincre le milieu autour de la cour et si possible le monarque lui-même ou son épouse que c’était un mouvement auquel il fallait se rallier. Donc, le comité des cinq avait fait beaucoup pour réussir la convention de Genève et pour fonder ce mouvement de la Croix Rouge. Moynier était le rédacteur en chef d’une première ébauche de la convention de Genève.

Grâce au soutien du gouvernement suisse, une première conférence d’experts, dite conférence préparatoire a été réunie à Genève en octobre 1863 et elle retenait quelques éléments principaux comme suit : à savoir la fondation d’idées de la fondation d’associations nationales de secours aux blessés de guerre, cependant ce point n’était pas retenu dans la convention de 1864 ; la neutralisation par le droit international des blessés de guerre, des services sanitaires et des hôpitaux y compris les hôpitaux mobiles typiques pour les armes. La neutralisation des blessés veut dire que les blessés sont traités de manière égale sans différentiation de leur nationalité, sans différenciation entre ami et ennemi ou adversaire, c’est le principe clef de la convention de Genève. Étonnamment, le comité des cinq n’était a priori pas d’accord avec Dunant lorsqu’il envoyait une dépêche de Berlin en disant qu’il faut introduire le principe de la neutralisation des blessés dans cette convention. Moynier était contre, il disait que les États ne l’acceptent pas, Dunant a insisté grâce au soutien qu’il éprouve dans le gouvernement prusse.

L’identification des infirmières et hôpitaux par une croix rouge pour que les soldats ne leur tirent pas dessus ou sur les infirmières. Et comme pratique était adopté la réunion en conférence des experts puis comme proposition qu’on réunisse les délégués des gouvernements parce que pour mettre en œuvre une telle collaboration de charité en temps de guerre, il fallait une convention multilatérale et l’accord des États. Les États devaient se lier. Donc, sans l’État, le mouvement ne pouvait pas vraiment agir. Donc, il fallait réunir une deuxième conférence des diplomates munis des pleins pouvoirs. Le résultat de cette deuxième conférence était donc la convention de Genève adopté le 22 août 1864.

C’était un tournant dans l’histoire de la codification du droit international parce qu’auparavant, c’était les grandes puissances essentiellement qui déterminaient ce qui est le droit international. Là, c’était deux grandes puissances seulement, la France et la Prusse et huit petits États. Donc, c’est le début d’un multilatéralisme plus ouvert et pas restreint aux grandes puissances. Cependant, aucun rôle a été attribué dans la convention du comité de Genève ni le comité de Genève ni la formation des associations national était même mentionné dans la convention due à la position notamment française. Les États veulent en fait contrôler ce mouvement. La convention s’applique uniquement à la guerre terrestre parmi les États membres, pas aux guerres civiles ni de mentions des guerres coloniales non plus.

Les motivations des États et le problème du transfert interculturel

Quelles étaient les motivations pour soutenir la convention de Genève et comment se traduisait le transfert interculturel de ces normes ?

Il y a d’abord la thèse « utilitariste » qui argumente que les États voulaient simplement envoyer leur soldat au champ de bataille le plus vite possible. Cependant, cette argumentation doit être écartée. En effet, la gravité des fractures de l’époque causait typiquement des amputations. Un blessé par une balle en 1863 ne pouvait pas être renvoyé au champ de bataille. La méthode de stérilisation qui réduisait de manière notable le nombre des amputations était inventée qu’au début des années 1880 par Louis Pasteur en France.

L’autre argument est la « réciprocité et lebénéfice » pour chaque État s’il y avait réciprocité. Mais, la règle de la réciprocité n’est pas inscrite dans la convention. On peut dire que les États non membres ne sont pas liés, donc c’est la réciprocité implicite. Mais, il y a eu aussi des applications unilatérales de la convention de Genève. Déjà lors de la première guerre des preuves en 1866 qui opposait les États allemands dans la guerre dite allemande ; il y a eu des États comme la Prusse qui avait adhéré à la convention et des États comme l’Autriche qui n’avait pas adhéré. Cependant, la Prusse avait pendant toute la guerre appliquée de manière stricte la convention de Genève. Donc, on peut se poser la question pourquoi ?

La thèse « “humanitariste” » ou que c’est l’humanitarisme qui a prévalu, qui était la motivation principale, c’est la thèse de Martha Finnemore. Dans cet article, il n’y a aucune analyse des motivations des États. Martha Finnemore n’a pas analysé, elle n’a jamais vu le discours confidentiel des gouvernements. Il faut aussi dire que le discours du comité des cinq tient bien compte des intérêts des gouvernements. Comme Dunant par exemple, il parle dans les PV du comité international de la Croix Rouge de la charité, de l’obédience et de la gratuité, l’obédience envers les États, gratuité pour les États. Donc, il manque une analyse des contextes de relations internationales.

Il faut regarder la délégation américaine lors de la préconférence de Genève de 1863 pare que les États-Unis étaient en pleine guerre et aux États-Unis s’était formés le US Sanitary Commission. C’était une organisation volontaire de secours justement. Dans cette organisation volontaire de secours qui œuvrait dans la guerre civile américaine, 3200 femmes étaient déjà engagées. De plus, en avril 1863, le président décrété le code Lieber qui était un code de comportement pour les soldats américains donc de l’Union, y compris un code de comportement par rapport aux blessés de l’adversaire. Donc, c’est-à-dire, il y a eu un précurseur du code de Genève qui était cependant une loi unilatéralement adaptée par les États de l’Union.

Le CICR et le mouvement de la Croix Rouge commencent avec un succès fulminant, à savoir l’adoption par une douzaine d’États d’une convention internationale. Donc, ce qui le distingue clairement des autres associations internationales privées à l’époque ou des autres ONG de nos jours. Souvent, les ONG doivent lutter pendant des décennies pour arriver à l’adoption d’une convention internationale qui adopte les règles qu’ils avaient promues. Par exemple le mouvement abolitionniste, a dû attendre près cent ans la conférence de Bruxelles qui supprima sur le plan international la pratique de l’esclavage et surtout la pratique de la traite.

Il y a ce jeu des personnes engagées dans la philanthropie, dans la charité et des experts dans la médecin d’une partie, dans la chirurgie miliaire d’autre part et des gouvernements et diplomates d’autre part. De façon surprenante, on n’a attribué aucun rôle au comité de Genève fondateur quand même de ce mouvement dans la convention de Genève. On ne mentionne pas l’idée de former des associations nationales, des volontaires de secours et il y a aussi une certaine délégitimation, c’est-à-dire que la convention ne s’applique uniquement qu’aux guerres terrestres en Europe, mais pas aux guerres maritimes ou aux guerres dans les colonies ni dans les guerres civiles. Les États ne voulaient pas en parler et le Comité des cinq était aussi assez réticent de soulever ces questions-là pare qu’on ne voulait pas demander aux États ou aux gouvernements ce qu’ils n’accepteraient en tout cas pas.

Cependant, on peut constater que la convention de Genève était un tournant dans le droit international d’abord parce que c’est la première convention internationale humanitaire et deuxièmement parce que c’était la première convention internationale qui n’était pas poussée ou mise en avant et négocier par les grandes puissances exclusivement, mais c’était une convention pour laquelle avait invité le gouvernement suisse. Donc, le gouvernement suisse avait invité pour les négociations.

Pour ce qui concerne les motivations des gouvernements, il y a eu la thèse utilitariste qui a été écartée pour deux raisons. D’abord, renvoyer les soldats au champ de bataille après leur traitement médical cela n’était guère possible dans les guerres du XIXème siècle. Tout d’abord les guerres étaient toutes relativement courtes, et les blessures dues à des balles ou à l’artillerie utilisées pendant le XIXème siècle étaient beaucoup plus graves. Normalement, ceux qui étaient frappés par une balle ou par l’artillerie étaient soit morts soit handicapés et les amputations étaient encore la règle à cette époque-là suite à de graves blessures. La méthode de stérilisation n’a été inventée qu’au cours des années 1880 par Louis Pasteur.

La réciprocité était un autre argument invoqué pour la thèse utilitariste, mais elle n’est pas inscrite dans la convention, elle est implicite. C’est le dernier argument contre cette thèse-là que la réciprocité jouait un rôle. En fait, il y a eu des applications unilatérales de la convention de Genève, donc, il faut chercher ailleurs pour comprendre. Le problème avec la thèse de Finnemore est qu’elle n’analyse pas vraiment les motivations des gouvernements, elle n’analyse pas les discours confidentiels, elle n’analyse pas la correspondance interne des gouvernements. De plus, on sait que lors des négociations, le comité des cinq a parfois su très habilement tenir compte des intérêts des États. Donc, il doit y avoir des intérêts des États. Le bon mot de Dunant, charité, obédience, gratuité est assez parlant à cet égard là. La charité sont les activités qui viennent du bon cœur, obédience veut dire qu’en fait les volontaires se soumettent aux armées, gratuite veut dire que cela ne coûte rien à l’État donc l’État ne peut en tirer que des bénéfices. Donc, il faut analyser un peu plus concrètement le contexte domestique et le contexte en relations internationales pour comprendre comment est liée donc l’initiative humanitaire d’une part et le rôle des gouvernements d’autre part.

Les motivations sont beaucoup plus complexes que le veulent les thèses utilitaristes et humanitaristes. D’abord, il y a eu des tensions majeures dans le système des États à l’époque et une certaine instabilité et surtout, une récurrence à la violence interétatique. La la guerre de Sécession aux États-Unis, les guerres d’unifications italiennes avec d’abord la guerre de 1859 et de 1860, mais aussi la marche des milles de Garibaldi et la conquête de l’Italie du Sud. La guerre d’unification italienne de 1860 donnait un exemple à d’autres mouvements nationalistes qui n’étaient pas satisfaits à l’époque comme le mouvement nationaliste polonais, le mouvement nationaliste allemand, le mouvement nationaliste roumain, le mouvement nationaliste danois par exemple. Et il y avait par exemple un soulèvement des Polonais contre la Russie en 1863 lorsqu’était assemblée la première conférence de Genève, et un conflit national entre le Danemark et les États allemands était en cours de se développer. Donc, il y a eu un véritable risque de guerre durant ces années en Europe.

Donc, on peut constater déjà en regardant seulement le système des États qu’il y a eu du soutien pour la convention parce qu’ils ont comme mesure de précaution, les gouvernants ont été prêts de s’engager dans la voie humanitaire parce qu’ils savaient que si une guerre éclate, alors comme nous lavons vu avec la guerre d’unification italienne, la guerre peut avoir des conséquences assez horrifiantes sur le plan humain.

Le deuxième argument est l’expérience des sociétés parce que la charité en temps de guerre n’était pas vraiment nouvelle. Il y a eu ajouté à cela des motivations domestiques spécifiques. Il est possible de l’analyser pour les deux grandes puissances impliquées à l’époque dans la rédaction des conventions de Genève et qui l’avait adopté tout de suite, à savoir la France et la Prusse.

Donc, si on regarde la préconférence de 1863, on trouve surtout qu’il y a des délégués américains, allemands et danois. Donc, les délégués allemands et danois étaient très nombreux et la plupart des États qui signaient la convention de Genève étaient des États allemands, le Danemark et la France. C’est déjà la très grande majorité des États.

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Ordre de Saint-Jean de Jérusalem

Pour ce qui concerne les délégués allemands, il faut constater que lors des guerres dites de libération ou guerres napoléoniennes, il y a eu déjà une association religieuse qui avait offert des services volontaires de secours aux militaires blessés qui était l’Ordre de Saint-Jean. Ceci était un élément très présent dans la mémoire allemande et aussi et surtout dans la mémoire des militaires. Par conséquent, il y a eu une expérience, un précédent auquel les militaires pouvaient faire référence. Donc, pour eux ce n’était pas complètement à écarter d’organiser des associations volontaires de secours aux militaires blessés. De plus, l’Ordre de Saint-Jean avait utilisé la Croix Rouge sur fond blanc. C’est une ancienne tradition chrétienne, lors des croisades aussi, il y avait des croix rouges sur fond blanc. Cela vient de quelque part, cet emblème existait déjà. C’est un élément.

Le fait qu’il y avait beaucoup de gouvernements qui avaient envoyé des délégués à Genève en 1863 était dû au risque de guerre avec le Danemark. Et c’est pourquoi aussi il y avait des délégués danois. Le rôle des délégués américains doit aussi être souligné parce que les États-Unis se trouvaient en pleine guerre civile ou guerre de sécession entre le Nord et le Sud. Une délégation des États-Unis qui participait lors de la préconférence relatait ses expériences avec la US Sanitary Commission. Là aussi l’expérience joue un rôle important puisque les Américains avaient fondé au Nord lors de la guerre de Sécession une commission composée de volontaire et il y avait 3200 femmes qui servaient gratuitement dans cette commission. Donc, la US Sanitary Commission était bien entendu le comité directeur et les femmes étaient sur le terrain. Il y a aussi une dimension genrée. Ceux qui étaient proches à l’armée ou qui était des officiers, dirigeaient les femmes qui allaient sur le champ de bataille pour soigner.

Aussi aux États-Unis était adopté par le Nord, par Abraham Lincoln le code Lieber appelé selon Franz Lieber, réfugié aux États-Unis suite à la révolution de 1848 en Allemagne. C’était un juriste qui avait proposé au président américain d’adopter un code de conduite et de comportement pour les soldats du Nord afin d’empêcher des brutalités pendant la guerre de Sécession. Donc, c’est ce que le président américain Abraham Lincoln avait fait. Il y avait quand même des actes et des violences atroces, des villes brulées et contre les civils, mais il y avait un code de comportement qui comprenait aussi une dimension concernant les soins de militaires blessés. Donc, l’expérience clairement jouait un rôle très important dans l’adoption de la convention de Genève.


Roon, center, with Otto von Bismarck (left) and Helmuth Graf von Moltke (right). The three leaders of Prussia in the 1860s.

Au niveau de la Prusse, Albrecht Graf von Roon qui était le ministre de la guerre à l’époque et qui est devenu maréchal après l’unification allemande savait bien qu’il y avait une expérience de charité volontaire pendant les guerres napoléoniennes. Ajouté à cela, il y avait des motivations domestiques spécifiques en Prusse qui poussait la Prusse à soutenir comme première puissance, grande puissance la convention de Genève. D’abord, il y a eu un conflit budgétaire entre le roi et le Parlement Prusse à l’époque concernant la réforme de l’armée. Le roi voulait réformer et élargir l’armée, le parlement ne voulait pas payer. Donc, il y a eu un conflit budgétaire. Ce conflit se développait en conflit constitutionnel puisque lorsque de Bismarck était nommé comme premier ministre en Prusse, il décidait d’ignorer l’opposition du parlement et d’adopter quand même les réformes, de dépenser de l’argent ; sans que le budget ait été voté et approuvé par le parlement, il le mettait en œuvre. Par conséquent, il y a eu un conflit constitutionnel qui agaçait les relations entre roi et parlement en Prusse entre 1862 et 1866 jusqu’à la guerre avec l’Autriche.

Donc, il y a eu des raisons budgétaires, parce que si en plus de la réforme militaire envisagée, il fallait encore élargir les services sanitaires de manière substantielle ce qui aurait aggravé le conflit budgétaire entre le roi et le Parlement. Tandis que le mouvement de la Croix Rouge proposait par Dunant et le comité des cinq offrait la possibilité bienvenue au ministre de la guerre Prusse de résoudre au moins le problème des services sanitaires en mobilisant simplement la société civile à un coût gratuite. Donc, gratuité de ces services volontaires était vraiment élément clef.

On voit ici clairement que cette organisation volontaire paraissait utile à von Roon. Il évoquait aussi dans se correspondance avec Bismarck la crainte d’une guerre imminente avec le Danemark, donc c’était le bon moment d’organiser des services sanitaires au préalable. Il soulignait même dans sa correspondance avec Bismarck la possibilité pour la monarchie d’en bénéficier en soignant son image. Ce sont des documents qui parlent vraiment de l’intérêt étatique qui régissait et dominait à l’époque. C’est très intéressant parce que la Prusse n’était pas le seul État à ce moment-là où il y a une vague de libéralisation, mais quand même un monarque plutôt conservateur donc des tensions qui se développaient dans la société, une libéralisation dans la presse, mais un gouvernement qui reste conservateur. La monarchie devait inventer de bonnes causes afin de soigner son image. C’est un élément assez important.

Si on regarde vers la France, c’est très semblable. Napoléon représentait un gouvernement à cette époque là encore très conservateur. Certains le considèrent comme un dictateur, après, il y avait des phases de libéralisation dans la France des années 1860, mais surtout vers la fin des années 1860. Ce qui était encore plus pénible pour Napoléon était dans l’ouvrage de Henri Dunant, c’était précisément les services sanitaires français qui étaient critiqués. Parce que nous avons constaté qu’après la bataille de Solferino, les autrichiens de toute manière battu, se sont retiré, donc, c’était la France qui était attaquée parce que les Français n’étaient pas préparés, les services sanitaires étaient complètement insuffisant pour soigner les Français et d’autant plus qu’il y avait aussi des autrichiens à soigner. L’armée étant donc contre la Croix Rouge et contre le mouvement de Dunant, mais Napoléon avait une autre logique. Il pensait à son image dans la monarchie et il avait déjà auparavant saisi l’occasion de se présenter comme un monarque bienveillant et plein d’humanité. La cause la plus parlante est peut-être le soulèvement des Polonais contre la Russie. Napoléon avait mobilisé des communications adressées à la Russie pour protester contre la répression violente des Polonais. Pour lui, ce n’était pas compatible avec la bonne cause de l’humanité. De plus, il s’engageait dans une intervention au Mexique sous prétexte humanitaire à ce moment-là. L’humanitaire était déjà découverte par les États et les gouvernements comme un moyen de se faire une bonne image, pour soigner son image. De plus, en se ralliant à ce mouvement, il y a eu des communications et des entrevues entre Dunant et Napoléon pour effacer la critique qui était inscrite dans l’ouvrage de Dunant, il se mettait ne avant comme le premier monarque qui soutenait publiquement l’initiative venant de Genève. Il savait déjà que la Prusse allait le soutenir, mais ce n’était pas encore public, il le savait directement de Dunant. Donc, lui il allait directement dans la presse en déclarant qu’il soutenait donc ce mouvement-là.

Pour lui aussi, il était aussi la cible de la presse libérale qui était extrêmement critique à ce moment-là envers Napoléon. Pour obtenir un peu plus de soutien, il faisait le sien le projet émanant de Genève. De plus et tout ce qui concerne les négociations diplomatiques, la délégation française était extrêmement rigide. Donc, la France ne voulait pas que les associations nationales créé soient mentionnées dans la convention parce qu’au fond, il y avait de fortes résistances et notamment des militaires contre la fondation des associations nationales et contre des voltaires qui aident le service sanitaire. Les militaires pensaient que ça ne marche pas, que les volontaires vont déranger et que cela ne peut pas fonctionner. Donc, le mouvement, c’était l’autre souci français, doit être mis sous contrôle des gouvernements. Donc, on voit très bien qu’il y a une position réaliste derrière le soutien pour une initiative humanitaire.

Maintenant, si on veut élargir le panorama pour comprendre les attitudes des États, des gouvernements, il y a surtout la peur de la guerre et l’idée d’une mesure de précaution, mais aussi la disposition à la guerre clairement du côté Prusse et du côté danois. Les raisons humanitaires, certainement dans la Cour française par exemple, il y avait aussi des milieux clairement engagés comme, par exemple, l’impératrice Auguste en Prusse ou l’impératrice Eugénie donc des figures vraiment engagées pour des causes humanitaires sans doute, des raisons fiscales notamment du côté Prusse, mais aussi et cela surtout du côté de la France, l’idée de mettre en scène une monarchie prévoyante, bienveillante, humanitaire qui se souci par rapport aux soldats et donc à ses citoyens. Ce sont les éléments très clairs qui sont derrière l’adoption par les États de la convention de Genève.

Donc, on voit qu’il y a déjà des problèmes et une certaines ambiguïté lors de l’adoption, mais il y avait aussi des ambiguïtés derrière le transfert des normes parce que la convention de Genève proposait des normes à adopter et donc on peut se poser la question de comment ces normes-là sont traduites dans les sociétés nationales. Donc, l’idée générale est qu’il fallait soigner aussi l’ennemi. C’est l’idée humanitaire derrière la convention de Genève.

En réalité, comment ça s’est traduit ? En Prusse, si on regarde les premiers appels à joindre le comité Prusse pour le secours aux militaires blessés qui étaient le nom initial, alors on voit que dans les premiers appels, c’est l’idée de neutralisation des services sanitaires des hôpitaux et des militaires blessés qui est mise en avant. C’est l’idée que pour le bien de l’humanité, il fallait aussi soigner les blessés de l’adversaire. Comme ça, si ses propres compatriotes ou soldats tombent dans la main de l’ennemi, ils seraient soignés grâce à cette convention. Donc, il y a cette idée qu’il fallait faire du bien qu’en fait pour la bonne civilisation que représente l’Europe à cette époque là, il faut que les adversaires ennemis blessés soient également soignés. Plus tard, lors des appels, cela arrive très rapidement quelques semaines après la fondation, le ton change. Il ne faut pas s’associer à ce mouvement pour soigner l’ennemi, mais il faut parce que c’est un devoir patriotique. Donc, le contexte ou la mise en contexte de ces appels change. C’était comme cela dans toutes les sociétés nationales. Le processus du transfert des normes n’était pas linéaire parce que dans chaque société, ce qui était mis en avant était le devoir patriotique de soigner les soldats blessés du propre camp surtout. Accessoirement, on avait accepté de soigner les adversaires, mais ce qui est essentiel est l’engagement pour l’armé de son propre pays.

En France, on voit ajouter à cela le problème que les associations nationales volontaires ne sont pas mises en place. Il faut attendre jusqu’à la guerre de 1870, la guerre entre la France et la Prusse puis les États allemands pour que soit vraiment formé un mouvement de masse des volontaires. Lorsque la guerre éclate, les soldats ne connaissent pas du tout les normes de la convention de Genève, ils n’ont aucune idée et par conséquent, il y avait beaucoup de violation au début du conflit. En revanche, en Prusse, il y a eu cette organisation des volontaires, à cause des expériences historiques, à cause du précédent historique lors des guerres napoléoniennes, mais l’accent avait clairement changé, c’était un devoir patriotique pour les femmes de soutenir ces associations volontaires. De plus, en fait on peut parler d’une militarisation de la société allemande dans un contexte d’essor du nationalisme. Donc, il y a eu des effets ambigus, pas exactement les mêmes effets, mais des effets aussi ambigus en France qu’en Allemagne parce que les normes de la convention de Genève étaient largement diffusées et aussi respectées par les armés plus ou moins, évidemment il y a eu des violations dans toutes les guerres au XIXème siècle. Cependant, le contexte était clairement le patriotisme et le nationalisme allemand. Le nationalisme allemand était connecté à cette époque là encore avec l’idée de civilisation ou une idée de culture parce qu’en allemand le terme de « civilisation » n’était pas aussi fréquemment invoqué. Pour remplir les standards de civilisation, il y a eu aussi des applications unilatérales.

L’action humanitaire dans un système international en mutation

Ce qu’il se passe entre la fondation du mouvement humanitaire et la Première Guerre mondiale est l’essor du nationalisme et de l’impérialisme. Avec cela, l’idée de la civilisation est mise en avant pour être conforme aux standards de civilisation imaginés par les Européens, il fallait accepter certaines règles dans le droit de la guerre. C’est-à-dire qu’il fallait se comporter de manière civiliser en guerre. On peut argumenter que c’était une illusion dès le départ parce qu’en même temps, il y a eu le progrès technologique des armes qui rendait chaque guerre plus sanglante que la dernière. Donc, c’est une tension qui est derrière l’essor de ce mouvement de la Croix Rouge. Donc, on prétend qu’en respectant le droit international humanitaire, on reste civilisé, mais en même temps, la guerre devient de plus en pire. Avec cela aussi, les problèmes concernant la mise en application de la convention de Genève se posent.

Il faut retenir les effets un peu ambigus de la Convention de Genève et de la fondation des associations nationales de secours lors des conflits. D’abord, on peut dire que les associations nationales qui portaient vraiment le mouvement de la Croix Rouge jouaient un rôle de plus en plus crucial pour le soin aux militaires blessés et il porte secours aux militaires blessés dans chaque guerre européenne depuis 1864 donc, depuis la guerre entre les États allemands et le Danemark. Le soin des militaires blessés s’est clairement amélioré, des vies ont été sauvées.

Un réseau transnational a vu le jour grâce au mouvement de la Croix Rouge. Donc, les associations nationales ont été connectées et se réunissaient régulièrement en conférence. Il y a eu certainement aussi une sensibilisation de l’opinion publique. On peut dire qu’il y avait une universalisation ou une mondialisation des normes de Genève parce que lorsqu’il y avait douze États originaux qui ratifiaient la convention, à la fin de la période, c’est-à-dire juste avant la Première Guerre mondiale, tous les États du monde avaient quasiment signé la convention de Genève.

En revanche, ces associations nationales de la Croix Rouge étaient fortement contrôlées par les États et par les gouvernements. Par exemple, dans les Pays-Bas, le général Van Mulken était à la fois ministre de la guerre et directeur de la Croix Rouge néerlandaise. Donc il y a un contrôle parfait par l’État. Il y a eu aussi une instrumentalisation du mouvement de la Croix Rouge par les monarchies pour créer une image bienveillante. Donc ce n’est pas uniquement en Prusse et en France, cela s’est produit quasiment partout. Typiquement, la reine ou le monarque, le roi, ont pris le patronage du mouvement de la Croix Rouge ou de l’association nationale de la Croix Rouge. C’était comme ça aux Pays-Bas, c’était comme cela en Prusse, en Allemagne, en Italie, en France jusqu’à la fin de la monarchie. Par la suite, c’était la femme du président par exemple de la troisième république qui s’engageait pour la Croix Rouge. Donc, il y a eu une affiliation très étroite entre États, représentant de l’État et le mouvement de la Croix Rouge.

Également, un effet secondaire ou accessoire du mouvement de la Croix Rouge était la mobilisation de la société civile en temps de paix pour l’éventualité de la guerre, c’est-à-dire une militarisation rampante des sociétés européennes et pas seulement des sociétés européennes, mais en particulier des sociétés européennes puisqu’il y a eu la course aux armements avant la Première Guerre mondiale. Ce sont les tendances majeures, les effets majeurs.

La sensibilisation de l’opinion publique des effets de la guerre et de l’utilité de l’action humanitaire ; on voit par exemple que lors de la guerre franco-allemande, dans la presse britannique, dans le Times de Londres, il y avait une centaine d’articles qui parlaient de la convention de Genève et du mouvement de la Croix Rouge. Donc, il y avait des lecteurs et des lectrices qui s’y intéressaient. C’était vraiment quelque chose qui passionnait les lecteurs.

Les associations nationales jouaient clairement un rôle décisif lors de la transformation de la Croix Rouge en mouvement de masse et lorsqu’il s’agissait de porter secours. Par exemple, en Allemagne, la Croix Rouge allemande était fondée avant la fondation de l’Allemagne en 1869 soit deux ans avant la fondation de l’Allemagne. Il y avait un million de membres avant la Première Guerre mondiale. C’était avec la Croix Rouge américaine, probablement la plus grande organisation de la Croix Rouge dans le monde. Il y avait aussi un mélange un peu étranger entre les associations patriotiques à l’époque et les associations de la Croix Rouge. Souvent, ceux qui étaient dans l’association patriotique ou qui étaient le chef étaient aussi dans l’association de la Croix Rouge nationale.

Le rôle des femmes était crucial parce qu’avec les débuts commençait aussi l’intérêt des femmes pour cette organisation et les militaires mettaient au service de l’armée les possibilités d’action des femmes à cette époque là. Donc, il y a eu des écoles de formation des infirmières qui ont été fondées que ce soit en Grande-Bretagne, en France ou encore en Allemagne, et des femmes étaient mobilisées par exemple lors des guerres britanniques en Afrique du Sud, au Soudan et en Égypte. Aux États-Unis, les femmes rendaient service par exemple lors de la guerre d’Espagne.

Les reines et les rois se mettaient en avant, servaient de patron ou patronnesse des mouvements de la Croix Rouge. Cela ne veut pas toujours dire qu’il y a eu ce même esprit de realpolitik chez les femmes qui étaient les patronnes ou les patronnesses de la Croix Rouge. Par exemple, sur le plan domestique en Allemagne, la reine Auguste était considérée comme une libérale, elle était l’adversaire dans la politique domestique de Bismarck. Donc, il y eut donc une certaine tension aussi entre ceux qui promouvaient et soutenaient le mouvement et ceux qui en bénéficiaient d’une certaine manière, qui les considéraient comme utiles simplement. On peut constater que la reine Auguste avait régulièrement visitait les hôpitaux lors de la guerre franco-allemande par exemple et elle avait exhorté les docteurs de traiter aussi bien les Français que les Allemands. Donc, elle a, d’une certaine manière mis en avant les idées de base de la convention de Genève. Dans la presse, on n’a pas du tout aimé cette attitude de la reine n’est-ce pas. Donc, là aussi il y a une tension parfois entre les vrais protagonistes ou ceux qui soutenaient vraiment l’idée de la Croix Rouge pour des raisons idéalistes, qui dépassaient l’État Nation et ceux qui soutenaient tout simplement pour des raisons patriotiques ou nationalistes.

Une autre femme qui a joué un rôle majeur lors de la fondation des associations nationales était Clara Barton, infirmière américaine éduquée à Strasbourg qui avait passé à plusieurs reprises à Genève, il y a aussi la via Barton maintenant dans le parc Monyer. De l’autre côté du lac, la villa Barton a été nommée après Clara Barton et son mari engagé pour le mouvement de la Croix Rouge aux États-Unis. Donc, cela fait partie du patrimoine genevois, mais aussi international. On voit ici les liens de ce réseau transnational.

Le progrès technique dans les services sanitaires est aussi à souligner. Au cours de quelques années, on voit une ambulance italienne, puis quatre ans plus tard, il y avait déjà des trains-hôpitaux n’est-ce pas, donc des trains sanitaires qui étaient mis en place pour assurer un transport très rapide et sécurité des victimes et des soldats blessés.

Concernant le fund raising, lors de la guerre allemande où il y a eu une application unilatérale de la convention de Genève par la Prusse et quelques autres États allemands tandis que l’Autriche ne l’avait pas appliqué parce qu’elle n’avait pas adhéré à la convention jusqu’à là. Il y a eu, pour donner une idée de la dimension de l’essor du mouvement de la Croix Rouge, donc auprès du CICR, le CICR avait récolté quatre millions francs pendant la guerre allemande, les associations volontaires autrichiennes avaient récolté deux millions de francs et la Croix Rouge Prussienne, quinze millions de francs. Donc, c’était devenu déjà là, deux ans après la fondation de l’association Prusse pour le secours aux militaires blessés, c’était devenu très rapidement une très importante organisation. Lors de la guerre franco-allemande, là le CICR entrait vraiment en jeu. Il avait récolté trois millions de francs pour par exemple envoyer des petits colis aux prisonniers de guerre. C’était déjà une autre activité dans laquelle il s’est lancé dans la guerre franco-allemande qui revient surtout dans la Première Guerre mondiale et qui devient en fait son activité majeure pendant la Première Guerre mondiale. La Croix Rouge allemande avait en revanche déjà récolté soixante-dix millions de francs suisses selon Gustave Moynier à cette époque-là qui est le premier président du CICR. Donc, c’était devenu une organisation vaste. On peut parler de la Croix Rouge comme faisant partie d’une machine de guerre qui mobilise la société et les ressources de manière massive pour l’effort de guerre.

Il y avait aussi déjà lors de cette guerre franco-allemande déjà quelques problèmes : que faire avec les associations des États neutres ? Alors, dans l’idée originale, on avait pensé que les associations neutres pouvaient aider les militaires blessés des deux camps adversaires. Mais, dans la pratique, lors de la guerre franco-allemande, les ressortissants des autres pays étaient considérés comme des expédients potentiels donc on ne voulait pas qu’ils s’impliquent directement au front. Finalement, un compromis a été trouvé ; on les admettait en tant qu’observateur dans les hôpitaux plus en arrière n’est-ce pas. Donc, il y a eu des problèmes entre l’esprit militaire et l’esprit humanitaire.

Il y avait l’essor du nationalisme et aussi l’essor des violations et des lacunes dans la convention reconnue lors de la guerre franco-allemande. La question commençait à être posée, à savoir est-ce que le mouvement de la Croix Rouge prolonge la guerre parce que le mieux on soigne les blessés, le mieux on garde l’esprit patriotique du pays et on maintien l’engagement. Donc, c’est un argument qui est mis en avant par un autre mouvement de l’époque, à savoir le mouvement pacifiste dont certains devenaient de plus en plus critiques face à la Croix Rouge. En revanche, Gustave Moyner maintenait encore que la charité s’oppose à la guerre. Donc, il y a les deux interprétations qui sont débattues à l’époque.

CICR et le problème de la mise en application (compliance-enforcement)

Les rôles du CICR jusqu’à la Première Guerre mondiale restent relativement restreints donc, il y a d’abord un petit comité avec neuf membres et un seul secrétaire jusqu’à 1913, il répand l’idée de la Croix Rouge moyennant des expositions, il participe aux expositions universelles par exemple moyennant la publication du bulletin et il accepte de nouvelles associations nationales dans les réseaux de la Croix Rouge. Il sert aussi de lien entre les associations nationalisées. Il publie le bulletin international de la Croix Rouge pour transmettre des informations, il promet l’échange entre chirurgiens militaires et donc le progrès médical et défend et surveille son mandat officiel bien entendu l’application de la conventionne de Genève lors des guerres. Il prend aussi des initiatives pour développer le droit humanitaire. Par exemple, il propose déjà en 1867 une convention analogue pour la guerre maritime, mais la convention ne va pas jouer. Cependant, le CICR devient une sorte d’autorité morale du droit humanitaire international sous l’autorité du président Gustave Moynier et puis son successeur Gustave Ader, les deux de Genève.

Il y a une tension entre charité et bus militaires et il y avait des violations lors de la guerre franco-allemande des deux camps. Par conséquent, Gustave Monyer avait proposé en 1872 et 1873 la formation d’une sorte de Cour pénale ou d’un autre mécanisme juridique pour poursuivre en fait les violations de la convention de Genève. Mais, il a été d’abord impossible de se mettre d’accord sur la liste des violations possibles. Deuxièmement, il a été impossible de se mettre d’accord sur la responsabilité pour les violations et pour qui peut les juger. Donc, jusqu’à quel point dans la hiérarchie militaire, est-ce qu’on considère comme responsable les officiers pour les actes commis par les sous-officiers par exemple ou par les soldats ? C’était là la question. Et l’autre, qui va juger ; est-ce que c’est la puissance occupante dans un territoire, ou est-ce que c’est toujours la puissance dont le national est accusé d’avoir commis un crime ? Donc évidemment, les États étaient plutôt enclins à dire que ça fait du ressort de l’armée de juger qui a violé la convention de Genève parmi ces nationaux. Donc, c’était impossible à l’époque à élaborer un compromis.

En revanche, un réseau de juristes se mettait en place pour favoriser le développement du droit international, à savoir l’institut du droit international avec son siège à Genk. Et il y avait par exemple un essai de compétition qui était lancé par la reine Auguste en 1874 suite à la guerre franco-allemande pour améliorer la convention de Genève. Donc, il y a eu des propositions du CICR par rapport à la répartition des emblèmes de la Croix Rouge par exemple, il avait proposé aussi des régulations pour les hôpitaux en zone occupée, et pour la protection des civils en zone occupée et pour l’échange des grands blessés parce que les grands blessés ils coûtaient beaucoup d’attention au service sanitaire des armés, mais la convention elle-même n’a été à ce point-là pas encore changé.

Il y a eu plusieurs guerres où le CICR jouait un rôle qu’on ne peut pas tous les touchers, mais disons que la guerre d’Orient était d’une certaine manière l’antithèse de la convention de Genève parce que s’opposait la Russie et l’Empire ottoman, les deux munis d’une mission civilisatrice, ils se considéraient comme étant supérieur à l’autre, il y a eu le conflit christianisme et islam derrière aussi, l’emblème de la Croix Rouge alors c’était évidemment une cible pour les ottomans, ils n’acceptaient pas du tout cet emblème et mettaient au contraire en avant le Croissant Rouge comme emblème, la Russie ne l’avait pas reconnu au départ, mais finalement le tsar l’avait reconnu. C’était une guerre de civilisation et de culture, une guerre religieuse aussi et des violations de part et de l’autre constamment pendant ce conflit.

Il y a eu de nouveau des initiatives de la part du CICR, des appels d’abord confidentiels puis des appels publics. L’appel public est devenu un instrument du CICR très important pour la suite de ce mouvement. Comme conséquence de la guerre d’Orient, Gustave Moynier et ses amis dans l’institution du droit international avaient rédigé entre autres le manuel Oxford qui est un manuel du droit humanitaire de la guerre et du droit de la guerre qui servait de base pour les conventions de La Haye de 1899. Donc, quinze ans plus tard en fin de compte, des conventions du droit de la guerre ont été adoptées à La Haye par des États européens puis d’autres États et les États-Unis aussi. Le droit de la guerre, le jus in bello était donc de plus en plus codifiés. Mais, il y avait aussi des violations ou des attitudes et des comportements qui allaient à l’encontre de la convention de Genève. Par exemple, la Grande-Bretagne ne voulait pas vraiment appliquer la convention de Genève ou voir des associations volontaires de l’Europe venir en aide pendant la guerre des Boers en 1899.

Le dernier évènement majeur qui réoriente le travail du CICR et qui ouvre de nouvelles pistes était la conférence de Washington de 1912 qui propose que le CICR s’en charge des prisonniers de guerre qui ont été protégés sous les conventions de La Haye adoptées en 1899. Donc, élargissement, nouvelle piste, un nouveau type de victime qui et le prisonnier de guerre en tant que victime qui mérite d’être protégée en temps de guerre et c’est le CICR qui va s’en charger pendant la Première Guerre mondiale et c’est à partir de ce moment-là que le CICR basé à Genève devient une organisation humanitaire moderne et vaste.

Une occasion manquée ? L’action humanitaire en temps de paix Conclusion

L’occasion manquée est peut-être que le CICR a peut-être manqué de soutenir, d’organiser de grandes activités de secours lors des catastrophes naturelles. Donc, ceci est une grande lacune, un manquement de la part surtout selon le professeur Schultz de Gustave Moynier qui pourrait être jugé de manière ambiguë ou de manière variée.

Moynier avait bien compris d’une part qu’une association privée doit bien se focaliser sur un but précis pour réussir à s’imposer et cela se voit lorsqu’on regarde toutes les ONG ou associations internationales privées. S’il y a un but précis mis en avant, l’ONG a plus de chance de réussir à s’imposer sur le plan international. En revanche, ce qu’il n’avait pas reconnu, c’est qu’en organisant des actions de secours en temps de paix, il aurait pu renforcer la solidarité entre différentes sociétés nationales en temps de paix et par cela rendre un service peut être encore plus grand à l’humanité, à savoir de renforcer la solidarité en temps de paix pour assurer la paix. Et ce uniquement après une défaite majeure que Gustave Moynier change d’avis, à savoir lorsque Henri Dunant et non pas le CICR obtiennent le premier prix Nobel en 1901. Là, on noue avec le mouvement pacifiste puisque Henri Dunant, à partir des années 1880 et 1890 s’est rapproché, il était déjà hors du mouvement de la Croix Rouge depuis 1867 qui est depuis la guerre franco-allemande puisqu’il était engagé dans la fondation de la Croix Rouge Française pendant la guerre franco-allemande puis il s’est retiré complètement du mouvement vivant une vie privée essentiellement ; mais à partir des années 1880 et 1890, il s’est rapproché de plus en plus du mouvement pacifiste. Il se posait aussi des questions sur l’évolution concrète du mouvement de la Croix Rouge. Il a été choisi avec Frédéric Passy comme le premier prix Nobel de la paix. C’était une défaite importante pour Gustave Moynier et pour le CICR et par la suite, il y a eu légèrement un changement d’attitude et Gustave Moynier reconnaissait que l’activité de secours en temps de paix pouvait être un service à la paix et à l’humanité importante.

La ligue internationale de la Croix Rouge et du Croissant Rouge née après la Première Guerre mondiale seulement complétant l’organigramme du mouvement de la Croix Rouge. Jusqu’à là, il y a eu les sociétés nationales, les conférences des associations nationales, la conférence des États membres de la Convention et le CICR.

Annexes

Références