Introduction à la politique suisse

De Baripedia

Les élections fédérales ont eu lieu le 19 octobre 2015 avec l’élection du Conseil fédéral et du Conseil des États. Ces élections se sont prolongées dans certains cantons avec un deuxième tour pour le Conseil des États comme à Genève ou dans le canton de Vaud. Aujourd'hui (novembre 2015), elles se poursuivent encore dans quelques cantons alémaniques pour le Conseil des États et se termineront fin décembre 2015 pour l’élection du Conseil fédéral.

Nous allons utiliser cet évènement concret pour voir ce que la science politique peut nous dire sur ce cas. D’une part, en partant de la perspective de la politique suisse, en quoi est-ce que le contexte des élections a une influence sur les élections? En d’autres termes, en quoi est-ce que le contexte institutionnel, le contexte politique influence le comportement des électeurs et électrices, les stratégies des parties politiques et peut-être aussi l’issue des élections ?

Le contexte institutionnel permet de donner un aperçu très introductif des principales institutions du système politique suisse. Nous allons aborder le système de gouvernement, de la démocratie directe, du fédéralisme et du système électoral et essayer de montrer en quoi ces institutions fondamentales de la Suisse influencent les élections fédérales. C’est dans ce contexte que les partis politiques agissent et que les électeurs et électrices se comportent, votent et forment leurs opinions. Nous allons voir en quoi ce contexte prédétermine en quelque sorte le choix des électeurs et électrices. Nous parlerons aussi du contexte politique des élections, à savoir la structure des clivages et le système de partis au niveau national et dans les cantons ainsi que les différences existantes d’un canton à l’autre.

Évaluation des forces en présence

Force des partis au Conseil national (% des suffrages).

Le graphique montre l’évolution de la force électorale des principaux partis politiques suisses de 1947 à 2015. Les données montrent le pourcentage de vote obtenu pour chacun des partis lors de l’élection au Conseil national.

Le Conseil national en Suisse est l'une des deux chambres de l'Assemblée fédérale, l'autre étant le Conseil des États. Avec 200 sièges, le Conseil national est la plus grande chambre et est généralement considéré comme la plus représentative des forces politiques du pays. Les élections pour le Conseil national sont basées sur un système de représentation proportionnelle, ce qui signifie que le nombre de sièges qu'un parti obtient est proportionnel au nombre de votes qu'il reçoit.

Monté en puissance de l'UDC

L'Union Démocratique du Centre (UDC), connue également sous le nom de Schweizerische Volkspartei (SVP) en allemand, est un parti politique de droite, connu pour ses positions conservatrices, notamment sur des questions telles que l'immigration, l'intégration européenne et la fiscalité. Au cours des deux dernières décennies, l'UDC a connu une montée spectaculaire en Suisse, devenant le parti avec le plus grand nombre de sièges au Conseil national. Cette montée peut être attribuée à plusieurs facteurs.

L'UDC est largement connue pour ses positions sur des questions telles que l'immigration et la souveraineté nationale. Elle a souvent plaidé pour des restrictions plus strictes sur l'immigration et s'est opposée à une plus grande intégration de la Suisse dans des organisations internationales comme l'Union européenne. Le parti met également l'accent sur la défense de ce qu'il perçoit comme des valeurs suisses traditionnelles. Le nom allemand du parti, "Schweizerische Volkspartei", qui se traduit par "Parti du peuple suisse", reflète en effet son positionnement en tant que parti qui prétend représenter les intérêts du "peuple" suisse.

L'histoire de l'Union Démocratique du Centre (UDC), un parti politique suisse, est un cas d'étude fascinant de transformation politique. Dans les décennies qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale, l'UDC était un parti mineur, recueillant seulement entre 10 et 12% des voix. Cependant, à partir de 1995, le parti a commencé une ascension fulgurante, atteignant un sommet en 2005. Cette transformation est le résultat de plusieurs facteurs clés. Premièrement, l'UDC a subi des changements significatifs en termes de leadership et de stratégie au cours des années 1990. Des figures comme Christoph Blocher ont remodelé le message du parti autour de valeurs conservatrices et nationalistes, avec une stratégie de communication agressive qui a donné une nouvelle vigueur à l'UDC. Deuxièmement, l'UDC a capitalisé sur les problématiques d'immigration et d'intégration européenne, suscitant un soutien considérable au sein d'une population de plus en plus préoccupée par la globalisation et la souveraineté nationale. Enfin, l'ascension de l'UDC peut être envisagée dans le cadre d'une polarisation politique croissante en Suisse et au-delà, illustrant comment les dynamiques politiques peuvent se transformer radicalement en réponse aux changements de leadership, aux enjeux politiques et aux tensions sociales.

L'Union Démocratique du Centre (UDC) a réalisé un exploit significatif lors des élections de 2015 en Suisse, frôlant la barre des 30% des voix. C'est une réalisation considérable dans le contexte politique suisse, d'autant plus que depuis l'introduction du système de suffrage proportionnel en 1919, aucun parti n'avait réussi à dépasser ce seuil. L'usage du terme "mythique" pour décrire cette barre des 30% met en évidence sa signification : c'est une marque de dominance politique rarement atteinte dans le paysage politique diversifié et multipartite de la Suisse. Le fait que l'UDC se soit approchée de cette barre montre son influence considérable et le soutien important qu'elle a réussi à obtenir parmi l'électorat suisse. La proximité de l'UDC avec ce seuil lors des élections de 2015 indique l'efficacité de sa stratégie politique, axée sur des questions d'immigration, de souveraineté et de conservatisme. Cela illustre également l'impact potentiel de la polarisation politique et des préoccupations socio-économiques sur les résultats électoraux.

Stabilité jusqu'en 1990

La politique suisse est connue pour sa stabilité, caractérisée par un système de partis plutôt constant jusqu'aux années 1990. Bien que certaines variations pouvaient être observées d'une élection à l'autre, la répartition des voix entre les principaux partis restait généralement assez stable. Le Parti socialiste suisse (en rose), le Parti libéral-radical (en bleu) et le Parti démocrate-chrétien (en orange) étaient des acteurs politiques majeurs et leurs positions dans l'échiquier politique étaient bien établies. Ce paysage politique relativement immuable est une caractéristique de la Suisse, un pays connu pour sa stabilité politique et économique. Cependant, l'émergence de l'Union Démocratique du Centre (UDC) dans les années 1990 et sa croissance rapide ont modifié cette image de stabilité. La montée de l'UDC a entraîné une certaine perturbation dans le système de partis traditionnel, reflétant l'évolution des préoccupations et des valeurs des électeurs suisses. La transformation du paysage politique suisse au cours de cette période offre un exemple intéressant des dynamiques changeantes de la politique multipartite et de l'influence des partis politiques sur la formation des politiques et des gouvernements.

La montée en puissance de l'Union Démocratique du Centre (UDC) dans les années 1990 et 2000 a profondément bouleversé le paysage politique suisse. Auparavant caractérisé par une grande stabilité entre les principaux partis - le Parti socialiste, le Parti libéral-radical et le Parti démocrate-chrétien - le système de partis suisse est devenu plus dynamique et moins prévisible avec l'émergence de l'UDC en tant que force politique dominante. Cette transition vers un système de partis plus instable reflète une période de changement significatif dans la politique suisse. L'UDC, avec son discours axé sur des thèmes conservateurs et nationalistes, a réussi à mobiliser un large soutien, remettant en question l'équilibre des forces existant. Cette période de changement a également vu une plus grande volatilité dans les préférences des électeurs, avec une redistribution des voix entre les différents partis. Cela illustre comment les changements sociaux, économiques et politiques peuvent remodeler le paysage politique d'un pays, même dans un système aussi stable que celui de la Suisse.

L'ascension fulgurante de l'Union Démocratique du Centre (UDC) dans les années 1990 et 2000 n'a pas été sans conséquences pour les autres partis politiques suisses. En particulier, le Parti démocrate-chrétien et le Parti libéral-radical ont tous deux subi une érosion significative de leur base électorale pendant cette période. Le Parti démocrate-chrétien, symbolisé en orange dans les graphiques de répartition des votes, a suivi une tendance descendante presque linéaire depuis la fin des années 1970 et 1980. Ceci peut être attribué à divers facteurs, y compris le changement des préférences des électeurs et l'émergence de l'UDC en tant que force politique influente. De même, le Parti libéral-radical a également subi une forte diminution de son soutien électoral au fil du temps. Cependant, en 2015, il semble qu'il y ait eu un léger redressement, bien que la cause précise de ce regain de soutien pourrait être due à plusieurs facteurs, y compris des changements stratégiques, des préoccupations politiques spécifiques ou un repositionnement par rapport aux autres partis. Cette dynamique démontre comment l'émergence d'un nouveau parti politique puissant peut perturber l'équilibre existant et conduire à une redistribution des voix entre les partis. Il met également en évidence comment les changements dans le paysage politique peuvent être le reflet de transformations sociales et culturelles plus larges.

Nouveaux partis

Les Verts suisses, formés en 1979, représentent un autre aspect intéressant du paysage politique du pays. Ils ont été parmi les premiers partis écologistes à avoir un impact significatif sur la politique européenne, avec l'élection de Daniel Brélaz au Parlement européen. Cette victoire marquait la première fois qu'un membre du parti Vert était élu à une telle position. Après cette percée initiale, les Verts ont connu une croissance notable de leur soutien jusqu'en 2007, démontrant l'importance croissante des questions environnementales dans l'opinion publique. Cependant, après 2007, le parti a subi un déclin, peut-être en raison d'un changement dans les priorités des électeurs ou d'un contexte politique plus large.

Malgré ce déclin, Daniel Brélaz a réussi à faire un retour remarqué en 2015 en étant réélu au Conseil national suisse. Sa réélection souligne la persistance de l'engagement envers les questions environnementales parmi une partie significative de l'électorat suisse, ainsi que le rôle continu des Verts dans la politique suisse. La trajectoire des Verts suisses illustre la manière dont les partis politiques peuvent évoluer et s'adapter en réponse à des questions spécifiques et à des changements dans l'opinion publique. Leur expérience démontre également comment un parti peut maintenir son influence, même face à des défis et des changements dans le paysage politique plus large.

L'apparition de nouveaux partis politiques, tels que le Parti vert libéral et le Parti bourgeois démocratique, est une autre caractéristique intéressante de l'évolution récente de la politique suisse. Ces deux partis ont réussi à faire une entrée impressionnante sur la scène politique lors des élections de 2011, montrant qu'il existe toujours de la place pour de nouveaux acteurs dans le système multipartite de la Suisse. Le Parti vert libéral a tenté de combiner les préoccupations environnementales des Verts traditionnels avec une orientation plus centriste ou libérale sur d'autres questions politiques. Cette combinaison a réussi à attirer un nombre significatif d'électeurs lors des élections de 2011. De même, le Parti bourgeois démocratique a réussi à se faire une place sur la scène politique en 2011. Ce parti a été formé par des membres de l'UDC qui étaient en désaccord avec l'orientation de plus en plus nationaliste de ce parti. En se positionnant comme une alternative plus modérée à l'UDC, le Parti bourgeois démocratique a réussi à gagner un soutien considérable lors des élections de 2011. Cependant, en 2015, ces deux nouveaux partis ont eu plus de difficultés. Cela pourrait être dû à plusieurs facteurs, y compris la volatilité naturelle des préférences électorales, l'évolution du contexte politique ou les défis spécifiques auxquels ces partis ont été confrontés. Quoi qu'il en soit, l'émergence de ces nouveaux partis démontre la dynamique et l'évolution continues du paysage politique suisse.

Des années de transformation

Le graphique illustre clairement les changements significatifs qui ont marqué la politique suisse au cours des trente dernières années. Alors que le paysage politique suisse était autrefois caractérisé par une grande stabilité entre les principaux partis, la montée en puissance de l'Union Démocratique du Centre (UDC) a profondément transformé ce système.

L'UDC, avec son discours de droite conservatrice et nationaliste, a réussi à mobiliser un large soutien parmi l'électorat suisse, perturbant l'équilibre existant entre les partis politiques. Cela a entraîné une redistribution significative des voix et a provoqué une érosion de la base électorale de partis traditionnels comme le Parti démocrate-chrétien et le Parti libéral-radical.

En même temps, nous avons assisté à l'émergence de nouveaux partis, comme les Verts, le Parti vert libéral et le Parti bourgeois démocratique, reflétant l'évolution des préoccupations et des valeurs des électeurs suisses.

Cette dynamique démontre que même dans un système politique aussi stable que celui de la Suisse, il peut y avoir des changements significatifs et rapides. Elle illustre aussi comment les partis politiques doivent constamment s'adapter et évoluer pour répondre aux changements dans l'opinion publique et au contexte politique plus large.

Le contexte institutionnel des élections

Quelles sont les institutions qui de près ou de loin influencent le comportement électoral des votants, les stratégies des partis, la couverture médiatique et in fine l’issue des élections ?

Les institutions qui influencent le comportement électoral, les stratégies des partis, la couverture médiatique et finalement l'issue des élections sont diverses et nombreuses. Chacune d'elles joue un rôle distinct, mais crucial, dans la façon dont les élections se déroulent et sont perçues par le public.

Le système électoral en Suisse est un acteur clé. Basé sur la représentation proportionnelle, il attribue les sièges en fonction du pourcentage de voix obtenu par chaque parti. Cela influence la stratégie des partis, qui se concentrent sur l'obtention d'un soutien large plutôt que sur des circonscriptions spécifiques. Les électeurs peuvent également se sentir plus enclins à voter pour des partis plus petits, car ils savent que leur voix compte dans ce système. Les médias sont une autre institution influente. Ils ont le pouvoir de façonner l'opinion publique en mettant en lumière certaines questions, en donnant plus de visibilité à certains candidats ou partis, et en fournissant des analyses qui orientent la perception du public. La couverture médiatique peut ainsi jouer un rôle considérable dans l'orientation des décisions de vote. En ce qui concerne le système politique suisse, le modèle de "Concordance" encourage la coopération entre les partis et la représentation proportionnelle au sein du gouvernement. Cela peut influencer la façon dont les partis font campagne et gèrent leurs relations entre eux, en favorisant un climat de collaboration plutôt que de confrontation. Les institutions de sondage représentent également une influence importante. En fournissant des informations sur les intentions de vote des électeurs, elles peuvent influencer la stratégie des partis, orienter la couverture médiatique et même influencer le comportement des électeurs, notamment en ce qui concerne le "vote stratégique". Par ailleurs, les organisations non gouvernementales (ONG) et autres groupes de la société civile peuvent peser sur les élections en mettant en avant certains problèmes, en organisant des campagnes de sensibilisation ou en soutenant certains candidats ou partis. Enfin, les institutions éducatives jouent un rôle indirect, mais important, dans les élections. En façonnant les attitudes et les opinions des citoyens à long terme, elles peuvent avoir un impact sur le comportement électoral. Ainsi, une multitude d'institutions sont impliquées dans le processus électoral, soit directement par leur implication dans le processus, soit indirectement par leur influence sur l'opinion publique et les comportements des électeurs.

Système de gouvernement

Qu’entend-on par « système de gouvernement » ?

Le terme "système de gouvernement" englobe plusieurs concepts clés liés à la façon dont un gouvernement est formé et à la manière dont il interagit avec d'autres branches du pouvoir. Le premier aspect concerne le mode d'élection du gouvernement, ou plus précisément, comment l'exécutif est élu. Cela peut être directement par le peuple, comme dans certains systèmes présidentiels, ou par le parlement, comme c'est souvent le cas dans les systèmes parlementaires.

Le second aspect du système de gouvernement concerne le type de relation entre le gouvernement (pouvoir exécutif) et le parlement (pouvoir législatif). Dans certains systèmes, ces deux branches du pouvoir sont largement indépendantes l'une de l'autre, chacune ayant ses propres responsabilités et domaines de compétence. Dans d'autres systèmes, elles sont plus interdépendantes, avec le pouvoir exécutif pouvant contrôler ou même sanctionner le pouvoir législatif, ou vice versa.

Cette interdépendance, ou son absence, conduit à un degré variable de fusion entre les pouvoirs exécutif et législatif. Dans les systèmes où ces pouvoirs sont fortement fusionnés, on peut avoir une situation où le gouvernement est en réalité une extension du parlement, ou où le parlement est dominé par le gouvernement. À l'inverse, dans les systèmes où ces pouvoirs sont clairement séparés, le gouvernement et le parlement peuvent opérer comme des entités distinctes, chacune jouissant de son propre mandat et de sa propre autorité.

En politique comparée, dans la littérature, on distingue deux grands types de systèmes de gouvernement dit aussi types de régimes politiques.

Deux grands types de régimes

Dans le domaine de la politique comparée, la littérature académique distingue généralement deux grands types de systèmes de gouvernement ou de régimes politiques : le système parlementaire et le système présidentiel.

Le système parlementaire se caractérise par la séparation souple des pouvoirs et la dépendance du pouvoir exécutif vis-à-vis du pouvoir législatif. Dans un tel système, le gouvernement (pouvoir exécutif) est élu par le parlement et dépend de sa confiance pour rester en fonction. Il peut être renversé par un vote de défiance. Par ailleurs, le chef de l'État (un monarque ou un président) a généralement un rôle plus symbolique ou cérémoniel, tandis que le pouvoir réel est détenu par le chef du gouvernement (souvent appelé Premier ministre). Des exemples de systèmes parlementaires peuvent être trouvés au Royaume-Uni, en Allemagne, au Canada et en Inde.

Le système présidentiel, quant à lui, est caractérisé par une séparation stricte des pouvoirs. Le président est à la fois le chef de l'État et le chef du gouvernement, et est généralement élu directement par le peuple. Le président possède le pouvoir exécutif et ne dépend pas de la confiance du pouvoir législatif pour rester en poste. Le pouvoir législatif (parlement ou congrès) ne peut généralement pas renverser le président par un vote de défiance, à moins qu'il ne soit mis en accusation (impeachment) pour des actes graves. Des exemples de systèmes présidentiels peuvent être trouvés aux États-Unis, au Brésil et en France (qui est en réalité un système semi-présidentiel avec un mélange des caractéristiques présidentielles et parlementaires).

Il est à noter que ces catégories sont des idéaux-types et que de nombreux pays ont des systèmes hybrides qui combinent des éléments de ces deux types, ou qui diffèrent de ces modèles de diverses manières.

Le système parlementaire

Il y a d’abord le système parlementaire. dans un système parlementaire, le gouvernement est élu de manière indirecte. C'est le parlement qui élit le gouvernement, plutôt que les citoyens directement. Typiquement, le leader du parti qui a le plus de sièges dans le parlement, ou parfois le leader d'une coalition de partis, devient le chef du gouvernement. Ce système est conçu pour assurer que le gouvernement reflète la composition du parlement, qui est lui-même élu par le peuple. La manière dont ce système fonctionne peut varier d'un pays à l'autre. Par exemple, dans certains pays, le chef de l'État (comme un monarque ou un président) a le pouvoir de nommer le chef du gouvernement, mais doit généralement choisir le leader du parti majoritaire dans le parlement. Dans d'autres pays, le parlement lui-même élit le chef du gouvernement. Un des avantages de ce système est qu'il permet de garantir une certaine cohérence entre la volonté du peuple (telle qu'elle est exprimée dans l'élection du parlement) et la composition du gouvernement. Cependant, il peut aussi mener à une instabilité gouvernementale si aucune coalition stable ne peut être formée au sein du parlement.

Dans un système parlementaire, le pouvoir exécutif est généralement exercé collectivement par un conseil des ministres, mené par un Premier ministre ou une figure équivalente. Ce "capitaine" du gouvernement est souvent le leader du parti majoritaire au parlement, ou parfois d'une coalition de partis. La terminologie varie d'un pays à l'autre. Par exemple, en Italie, le chef du gouvernement est appelé "Président du Conseil", en Allemagne, on parle de la "Chancelière" ou du "Chancelier", et en Angleterre, du "Premier ministre". Cependant, bien que les titres varient, le rôle de ces dirigeants reste assez similaire : ils dirigent le gouvernement, définissent les grandes orientations politiques et veillent à l'exécution des lois. Il convient de noter que dans certains systèmes parlementaires, le chef de l'État (comme un roi, une reine ou un président) joue également un rôle, bien que souvent largement cérémoniel. En même temps, ils peuvent avoir certaines responsabilités importantes, comme la nomination du Premier ministre ou la dissolution du parlement.

Pour définir un système politique, deux critères essentiels sont souvent pris en compte : le mode d'élection du gouvernement et la nature des relations entre le gouvernement et le parlement. D'une part, le mode d'élection du gouvernement permet de comprendre comment le pouvoir exécutif est constitué. Dans un système parlementaire, par exemple, le gouvernement est élu de manière indirecte. Les citoyens votent pour élire les membres du parlement et c'est ce parlement qui, par la suite, forme le gouvernement. Cette procédure diffère dans un système présidentiel où les électeurs choisissent directement le chef de l'exécutif, souvent appelé le président. D'autre part, la nature de la relation entre le gouvernement et le parlement est également cruciale pour comprendre le fonctionnement d'un système politique. Elle décrit comment ces deux branches du pouvoir, exécutif et législatif, interagissent entre elles. Dans un système parlementaire, par exemple, il existe une dépendance mutuelle entre le gouvernement et le parlement : le gouvernement est tenu de rendre des comptes au parlement, qui a le pouvoir de le renverser par une motion de censure. Cependant, dans un système présidentiel, le président et le parlement fonctionnent généralement de manière plus indépendante. En somme, ces deux critères jouent un rôle fondamental dans l'analyse des structures de gouvernance d'une démocratie et permettent d'appréhender les interactions et la répartition des pouvoirs entre les différentes institutions politiques.

Dans un système parlementaire, le gouvernement et le parlement entretiennent une relation de contrôle mutuel, qui est essentielle à l'équilibre du pouvoir politique. D'un côté, le gouvernement a la capacité de contrôler le parlement. Par exemple, dans certains systèmes parlementaires, le gouvernement peut avoir le pouvoir de dissoudre le parlement et de déclencher des élections anticipées. Ce pouvoir peut être utilisé pour contrôler l'agenda politique et assurer la stabilité du gouvernement. De l'autre côté, le parlement détient des moyens significatifs pour contrôler le gouvernement. Par exemple, le parlement peut voter une motion de censure pour renverser le gouvernement. De plus, les parlementaires ont la responsabilité de questionner et d'examiner les actions du gouvernement, souvent par l'intermédiaire de comités parlementaires. Ils ont aussi le pouvoir de voter le budget, ce qui leur donne une grande influence sur la politique gouvernementale. Cet équilibre de contrôle mutuel, aussi connu sous le nom de checks and balances, assure que le pouvoir n'est pas concentré de manière disproportionnée entre les mains de l'exécutif ou du législatif. Au lieu de cela, ces deux branches du gouvernement sont en mesure de se surveiller et de se contrôler mutuellement. Cela est essentiel pour maintenir une démocratie saine et fonctionnelle.

Dans un système parlementaire, la motion de censure et la question de confiance sont des mécanismes institutionnels clés qui régulent la relation entre le parlement et le gouvernement, garantissant ainsi un contrôle mutuel. La motion de censure est un instrument parlementaire qui permet au parlement de destituer le gouvernement. Pour qu'une motion de censure soit adoptée, elle doit généralement recevoir le soutien de la majorité des membres du parlement. Si la motion de censure est adoptée, le gouvernement est obligé de démissionner et un nouveau gouvernement doit être formé. C'est un moyen puissant pour le parlement d'exercer un contrôle sur le gouvernement. La question de confiance est un mécanisme par lequel le gouvernement sollicite l'approbation du parlement sur une question politique importante. Si le parlement vote contre la question de confiance, le gouvernement est généralement tenu de démissionner ou de demander au chef de l'État de dissoudre le parlement et de convoquer de nouvelles élections. C'est un moyen pour le gouvernement de vérifier qu'il dispose toujours du soutien nécessaire pour gouverner. Ces mécanismes de contrôle mutuel jouent un rôle crucial dans le maintien de l'équilibre des pouvoirs dans un système parlementaire. Ils assurent que le gouvernement est tenu responsable devant le parlement et aident à prévenir l'abus de pouvoir.

Dans un tel système, le gouvernement est responsable devant le parlement. Cela signifie qu'il doit rendre compte de ses actions et politiques au parlement. Si le gouvernement adopte des politiques qui ne sont pas soutenues par la majorité parlementaire, le parlement peut utiliser des mécanismes tels que la motion de censure pour le destituer. De plus, le gouvernement peut également être amené à démissionner si une question de confiance est rejetée par le parlement. D'autre part, le gouvernement a aussi le pouvoir de dissoudre le parlement et de convoquer des élections anticipées. Cela peut être une tactique stratégique pour le gouvernement si, par exemple, il estime que le climat politique actuel lui est favorable et qu'il a une chance de renforcer sa majorité parlementaire. C'est également un moyen de réinitialiser les relations entre le gouvernement et le parlement si ces dernières deviennent tendues ou conflictuelles. Ces mécanismes garantissent un contrôle mutuel entre le gouvernement et le parlement et sont essentiels pour maintenir l'équilibre des pouvoirs dans un système parlementaire.

Dans un système parlementaire, le gouvernement a aussi une certaine emprise sur le parlement. Bien que le gouvernement doive rendre des comptes au parlement et être soutenu par une majorité parlementaire pour rester au pouvoir, il a aussi la capacité de dissoudre le parlement et de convoquer des élections anticipées. C'est un moyen important pour le gouvernement de contrôler le parlement. Par exemple, si le gouvernement estime qu'il ne peut plus travailler efficacement avec le parlement actuel ou si le parlement est trop divisé pour former une majorité stable, le gouvernement peut choisir de dissoudre le parlement. En convoquant des élections anticipées, le gouvernement a l'occasion de solliciter un nouveau mandat de la part de l'électorat et potentiellement de travailler avec un nouveau parlement plus en accord avec sa politique. Il s'agit donc d'une dynamique de pouvoir bidirectionnelle : le parlement a le pouvoir de destituer le gouvernement, mais le gouvernement a également le pouvoir de dissoudre le parlement. Cela assure une forme d'équilibre et encourage la coopération entre ces deux institutions essentielles.

Les mécanismes de contrôle mutuel imposent une certaine forme de collaboration entre le gouvernement et le parlement. Si le gouvernement prend des décisions qui ne sont pas en accord avec la majorité parlementaire, il risque de faire face à une motion de censure qui pourrait le renverser. De la même manière, si le parlement refuse constamment de soutenir les propositions législatives du gouvernement, ce dernier pourrait dissoudre le parlement et provoquer de nouvelles élections. Ces mécanismes garantissent un équilibre des pouvoirs et encouragent les deux parties à travailler ensemble pour atteindre un consensus sur les questions politiques importantes. Toutefois, il est important de noter que ces mécanismes peuvent varier en fonction du contexte politique spécifique de chaque pays. Par exemple, dans certains systèmes parlementaires, le gouvernement ne peut pas dissoudre le parlement à sa propre discrétion, mais a besoin de l'approbation du chef de l'État ou d'une majorité parlementaire.

Ces systèmes sont marqués par une interaction constante et une collaboration étroite entre le gouvernement et le parlement. Le besoin de soutien mutuel et de cohésion entre les partis au pouvoir engendre une fusion significative des pouvoirs exécutifs et législatifs. Cela signifie que les partis qui forment le gouvernement doivent maintenir une certaine unité et consensus pour éviter une motion de censure. Cette dynamique favorise une coopération intensive entre les partis au pouvoir, en amenant souvent à une superposition des rôles législatifs et exécutifs. Dans certains cas, cela peut rendre la distinction entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif moins nette. Par exemple, les membres du gouvernement peuvent aussi siéger au parlement, contribuant ainsi aux deux aspects de la gouvernance. Cette interdépendance est une caractéristique clé des systèmes parlementaires, et c'est précisément ce qui les différencie des systèmes présidentiels où les pouvoirs exécutifs et législatifs sont plus clairement séparés.

Le système parlementaire britannique est un exemple classique de fusion des pouvoirs exécutifs et législatifs. Il est courant pour les ministres d'être également membres du Parlement - c'est-à-dire qu'ils sont à la fois députés (membres de la Chambre des communes) ou lords (membres de la Chambre des lords) et ministres de l'exécutif. Cette dualité de rôles renforce le mélange des pouvoirs entre l'exécutif et le législatif. En étant à la fois membre de l'exécutif et du législatif, un ministre peut participer directement à la création des lois et à leur mise en œuvre. Cette fusion des pouvoirs permet un alignement étroit entre ces deux branches du gouvernement, facilitant une coopération et une coordination efficaces. C'est une caractéristique distinctive des systèmes parlementaires, qui diffère nettement de la séparation stricte des pouvoirs présente dans les systèmes présidentiels.

Le système présidentiel

Le deuxième système de gouvernement est le système présidentiel. Le système présidentiel est distinctif à plusieurs égards. Premièrement, l'élection du président est effectuée directement par le peuple. Cela signifie que lors des élections, c'est la population qui décide qui sera le prochain président. Cette élection directe renforce la légitimité du président auprès des citoyens, car il ou elle est choisi directement par eux. Deuxièmement, dans un système présidentiel, le président possède un pouvoir exécutif considérable. Le président nomme ses ministres et secrétaires d'État, dirige la diplomatie du pays et commande ses forces armées. En bref, le président centralise en sa personne un large éventail de pouvoirs exécutifs, garantissant ainsi une forte direction et une prise de décision efficace. Troisièmement, et c'est là que le système présidentiel se différencie le plus du système parlementaire, le président et son gouvernement d'une part, et le parlement d'autre part, sont indépendants l'un de l'autre. Le président ne peut pas dissoudre le parlement et le parlement ne peut pas destituer le président. Une fois élus, ils restent en poste pour toute la durée de la législature. Ils ne peuvent être renversés ni l'un ni l'autre. Cela garantit une certaine stabilité du gouvernement et de l'administration, mais limite également la capacité d'adaptation en cas de changements politiques ou sociaux importants.

Le système présidentiel américain comporte une exception à cette règle d'indépendance totale entre le président et le parlement, grâce à la procédure d'"impeachment". Cette procédure, qui correspond à la mise en accusation du président, est prévue pour des situations de crise extrême, lorsque l'on suspecte le président d'avoir commis des "crimes et délits majeurs". Bien que rare, cette procédure a été initiée à plusieurs reprises dans l'histoire des États-Unis. Cependant, le processus d'"impeachment" est complexe et nécessite l'approbation des deux chambres du Congrès : la Chambre des représentants doit d'abord voter les articles d'accusation, puis le Sénat doit tenir un procès et, finalement, une majorité des deux tiers est nécessaire pour destituer le président. Même si cette procédure d'"impeachment" existe, elle reste une exception à la règle générale de l'indépendance entre le président et le parlement dans le système présidentiel. En règle générale, le président reste en place pendant toute la durée de son mandat, tout comme le parlement.

Dans un système présidentiel, une séparation claire des pouvoirs exécutif et législatif est effectivement maintenue, en opposition à la fusion des pouvoirs qui caractérise les systèmes parlementaires. Ce principe de séparation des pouvoirs constitue l'un des fondements du modèle présidentiel. Des mécanismes de "check and balance", ou de contrôle et d'équilibre, sont mis en place afin de maintenir cet équilibre de pouvoir entre les différentes branches du gouvernement. Ces mécanismes garantissent qu'aucune branche du gouvernement - que ce soit l'exécutif, le législatif ou le judiciaire - ne devienne trop puissante et ne puisse abuser de son pouvoir. Par exemple, le président a le pouvoir de veto sur les lois adoptées par le parlement, mais le parlement peut, à son tour, outrepasser ce veto par une majorité qualifiée. De même, bien que le président nomme les juges de la Cour suprême, ces nominations doivent être approuvées par le Sénat. Cette séparation des pouvoirs et ces mécanismes de contrôle et d'équilibre visent à assurer un fonctionnement démocratique sain et à prévenir les abus de pouvoir dans un système présidentiel.

L'exemple le plus marquant d'un système parlementaire est le Royaume-Uni. En effet, le "système de Westminster" est bien souvent présenté comme le prototype du système parlementaire. Cependant de nombreux autres pays, notamment en Europe, appliquent aussi un système parlementaire, parmi lesquels l'Allemagne, l'Italie, l'Autriche et les pays scandinaves. Dans ces systèmes, le gouvernement est souvent formé à partir de la majorité parlementaire. Cependant, compte tenu de la diversité des partis politiques et du fractionnement du paysage politique, il n'est pas rare que le gouvernement soit minoritaire. C'est-à-dire que même lorsque plusieurs partis forment une coalition pour gouverner, ils peuvent ne pas détenir la majorité au Parlement. C'est un scénario fréquemment observé au Danemark, où le paysage politique fragmenté conduit souvent à la formation de gouvernements minoritaires. Dans de tels cas, le gouvernement dépend du soutien d'autres petits partis pour obtenir la majorité parlementaire nécessaire pour gouverner efficacement. Cela peut entraîner des négociations politiques complexes et nécessiter une coopération et un consensus importants entre les partis.

En tout cas, dans la plupart des pays autour de la Suisse où il y a un système parlementaire dont l’archétype est le système britannique tandis que l’archétype du système présidentiel vient des États-Unis. Le système parlementaire britannique se caractérise par une étroite collaboration entre le pouvoir législatif (le parlement) et le pouvoir exécutif (le gouvernement). Dans ce système, le Premier ministre, qui est le chef du gouvernement, est généralement le leader du parti qui a la majorité des sièges au parlement. D'autre part, le système présidentiel américain se distingue par une séparation stricte des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire. Dans ce système, le président, élu directement par le peuple, détient l'essentiel du pouvoir exécutif. Le Congrès (composé de la Chambre des représentants et du Sénat) détient le pouvoir législatif et ne peut pas être dissous par le président. Cette séparation des pouvoirs permet un système de vérification et d'équilibre entre les différentes branches du gouvernement. La plupart des pays adoptent une forme hybride de ces deux systèmes, où certaines caractéristiques sont adaptées pour correspondre à leur contexte politique et constitutionnel particulier.

Le système politique français est souvent qualifié de "semi-présidentiel" ou "semi-parlementaire", car il combine des éléments des deux systèmes que vous avez décrits. Dans le système français, le président est élu au suffrage universel direct, ce qui lui confère une forte légitimité démocratique. En tant que chef de l'État, le président a de larges pouvoirs, notamment en matière de politique étrangère et de défense. Il peut également dissoudre l'Assemblée nationale et convoquer de nouvelles élections législatives. D'un autre côté, le gouvernement français, dirigé par le Premier ministre, est responsable devant le parlement. C'est le président qui nomme le Premier ministre, mais ce dernier doit avoir le soutien de la majorité de l'Assemblée nationale pour pouvoir gouverner efficacement. Le gouvernement peut être renversé par une motion de censure votée par l'Assemblée nationale. Ce système a été conçu pour créer un équilibre entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif. Cependant, il peut également conduire à des situations de "cohabitation", lorsque le président et la majorité parlementaire sont issus de partis politiques différents.

Le système de gouvernement en Suisse

Faire une incursion par la politique comparée permet de mieux situer quelles sont les caractéristiques du système de gouvernement suisse, comment ce système de gouvernement peut être classé à la lumière de ces distinctions entre système parlementaire et système présidentiel.

La Suisse se distingue par son système de gouvernement unique, souvent qualifié de "consensus". Ce système est une variante du système parlementaire et présente des caractéristiques particulières, influencées par le contexte historique, culturel et géographique du pays. La Suisse est une fédération composée de 26 cantons, qui disposent chacun d'une grande autonomie. Le pouvoir exécutif est exercé collectivement par le Conseil fédéral, composé de sept membres. Ces membres sont élus par l'Assemblée fédérale (le parlement suisse) pour un mandat de quatre ans. Ce mode d'élection indirecte est caractéristique du système parlementaire.

Cependant, ce qui distingue particulièrement le système suisse, c'est le principe de la "formule magique". Depuis 1959, les sièges du Conseil fédéral sont répartis entre les quatre principaux partis politiques, de manière à refléter la diversité politique du pays. Cette répartition a évolué au fil des années, mais l'objectif est de garantir un gouvernement de coalition et de consensus, plutôt que de confrontation. En outre, chaque membre du Conseil fédéral est à la tête d'un département de l'administration fédérale, mais il n'y a pas de Premier ministre. Le président de la Confédération est un membre du Conseil fédéral, élu pour un an, mais son rôle est essentiellement représentatif et ne confère pas de pouvoirs supplémentaires. Enfin, il est important de souligner que le système politique suisse est aussi caractérisé par le fédéralisme, la démocratie directe et le multilinguisme. Ces éléments influencent fortement le comportement électoral des citoyens, les stratégies des partis politiques et l'issue des élections.

Un système de gouvernement hybride

Le système politique suisse n’est pas un cas facile du point de vue de cette distinction système parlementaire – système présidentiel, ce n’est pas le cas le plus aisé à classer. le système politique suisse est unique et ne rentre pas facilement dans la distinction classique entre système parlementaire et système présidentiel.

La Suisse est parfois considérée comme ayant un "système de gouvernement de consensus", qui diffère de la forme de gouvernement parlementaire traditionnelle où un parti ou une coalition de partis détenant la majorité parlementaire forme le gouvernement. Au lieu de cela, la Suisse a une "formule magique" pour la composition de son exécutif, le Conseil fédéral. Selon cette formule, les sièges du Conseil fédéral sont répartis entre les principaux partis du pays, assurant ainsi une représentation proportionnelle au gouvernement. De plus, le système suisse est unique en ce que le Conseil fédéral est collectivement responsable de la gouvernance du pays, et il n'y a pas de premier ministre ou de président avec des pouvoirs exécutifs supérieurs. Le rôle de président de la Confédération est essentiellement cérémonial et tourne entre les membres du Conseil fédéral chaque année. En outre, la Suisse est une démocratie semi-directe, ce qui signifie que le peuple suisse a un rôle direct dans la prise de décisions politiques grâce à des initiatives populaires et des référendums, ce qui n'est pas typique des systèmes parlementaires ou présidentiels. En somme, le système politique suisse possède des traits uniques qui le rendent difficile à classer uniquement comme un système parlementaire ou présidentiel. Sa nature consensuelle et semi-directe le distingue de nombreux autres systèmes politiques dans le monde.

Le système politique suisse présente des aspects hybrides qui le rapprochent du système parlementaire. Notamment, le Conseil fédéral, qui constitue le gouvernement suisse, est élu par l'Assemblée fédérale, et non directement par le peuple. Cette élection indirecte est une caractéristique des systèmes parlementaires. Dans ce modèle, les membres du Conseil fédéral sont élus par les deux chambres du Parlement suisse lors d'une session commune. Cette procédure d'élection reflète le fonctionnement d'un système parlementaire, dans lequel le gouvernement est généralement formé par les partis qui ont le plus de sièges au Parlement. Néanmoins, il est important de noter que le gouvernement suisse fonctionne comme un collège, où tous les conseillers fédéraux prennent des décisions en commun. Il n'y a pas de "premier" parmi eux, ce qui diffère du fonctionnement habituel d'un système parlementaire, où le Premier ministre ou le Chancelier a généralement un rôle de leadership.

Mais, le système de gouvernement en Suisse, s’approche du système présidentiel pour ce qui est du rapport entre gouvernement et parlement. Dans le système suisse, comme dans tout système présidentiel, il y a dépendance mutuelle entre gouvernement et parlement. Une fois élus, les membres du Conseil fédéral et du Parlement ont un mandat fixe de quatre ans. Il n'existe pas de mécanisme par lequel le Conseil fédéral pourrait être dissous avant la fin de son mandat, ni de moyen par lequel le Parlement pourrait être dissous. Cette stabilité des institutions, caractéristique du système présidentiel, diffère du système parlementaire où le gouvernement peut être renversé par une motion de censure, ou le parlement dissous par le gouvernement. Ainsi, bien que le Conseil fédéral soit élu par le Parlement, une fois en place, il opère indépendamment du Parlement, tout comme dans un système présidentiel. De plus, le gouvernement suisse, agissant comme un collège, fonctionne de manière collégiale et non hiérarchique, ce qui renforce cette indépendance vis-à-vis du Parlement. Cependant, le système suisse se distingue également des systèmes présidentiels traditionnels. Par exemple, bien que le président de la Confédération suisse soit formellement le chef de l'État, ses pouvoirs et responsabilités sont très limités comparés à ceux d'un président dans un système présidentiel.

Une fois élu, le Conseil fédéral suisse reste en poste pour un mandat de quatre ans et il ne peut pas être renversé par le parlement, contrairement à ce qui est possible dans un système parlementaire traditionnel. Cette indépendance du gouvernement vis-à-vis du parlement est l'une des caractéristiques distinctives du système politique suisse. Cela ne signifie cependant pas que le gouvernement suisse n'est pas tenu de rendre des comptes. Bien que le parlement ne puisse pas renverser le gouvernement, le gouvernement a l'obligation constitutionnelle de rendre compte de ses actions au parlement. Le parlement a le droit de surveiller le gouvernement, d'interroger les membres du gouvernement et de les tenir responsables de leurs actions. Dans le contexte de la politique suisse, lorsque l'on dit que le Conseil fédéral est "irresponsable", cela signifie qu'il n'est pas directement redevable devant le parlement, en termes de mécanismes de motion de censure ou de destitution, comme cela pourrait être le cas dans un système parlementaire traditionnel. Cependant, ce terme ne signifie pas que le Conseil fédéral est exempt de responsabilités ou d'obligations envers le parlement ou les citoyens suisses. En effet, le gouvernement suisse a l'obligation de rendre compte de ses actions, de prendre en compte les préoccupations du parlement et de répondre à ses questions. En outre, il est également tenu de respecter les lois suisses et la constitution, et il est soumis à la surveillance judiciaire. La "non-responsabilité" du Conseil fédéral ne doit donc pas être interprétée comme une absence de contrôle ou de surveillance, mais plutôt comme l'absence d'un mécanisme spécifique qui permettrait au parlement de destituer le gouvernement en place.

Le système politique suisse est en effet unique à bien des égards. Sa nature hybride, tenant à la fois du système parlementaire et du système présidentiel, le distingue déjà des modèles plus traditionnels. Cependant, il y a d'autres caractéristiques qui le rendent encore plus distinctif.

Le système de concordance, qui est une spécificité de la politique suisse, assure une représentation proportionnelle des principaux partis politiques au sein du gouvernement. Il faut noter que ce n'est pas une obligation légale ou constitutionnelle, mais une tradition politique non écrite qui a évolué au fil du temps. Dans la plupart des démocraties parlementaires ou présidentielles, le gouvernement est formé par le parti ou la coalition de partis qui a remporté le plus de sièges au parlement lors des élections. Dans ces systèmes, le gouvernement est généralement composé de membres d'un même bord politique, soit de gauche, soit de droite. En revanche, en Suisse, la composition du Conseil fédéral, qui est le gouvernement suisse, reflète la diversité du paysage politique. Cela signifie que les partis de gauche, de droite et du centre sont généralement tous représentés au sein du gouvernement, quelle que soit la composition du parlement. Ce système de concordance favorise la prise de décisions par consensus et la coopération entre les partis, plutôt que l'opposition frontale. Cela a aussi pour effet de donner une certaine stabilité politique à la Suisse, car les changements de gouvernement sont moins fréquents et moins radicaux qu'ailleurs.

Le système de concordance en Suisse diffère des grandes coalitions que l'on peut observer dans d'autres pays tels que l'Allemagne ou l'Autriche. Dans ces pays, les grandes coalitions sont généralement le résultat d'élections qui ne permettent pas à un seul parti d'obtenir une majorité. Elles sont donc souvent temporaires et peuvent être sujettes à des tensions politiques. En Suisse, en revanche, le système de concordance garantit un partage du pouvoir entre les principaux partis politiques de manière plus permanente. Cela signifie que le gouvernement est généralement composé de membres de différents partis, reflétant ainsi la diversité du paysage politique suisse. Ce partage du pouvoir vise à assurer une certaine stabilité politique et à favoriser la prise de décisions par consensus. Ainsi, contrairement à d'autres systèmes où le pouvoir peut basculer d'un camp politique à l'autre en fonction des résultats des élections, en Suisse, le pouvoir est partagé de manière plus équilibrée et constante entre les principaux partis politiques. C'est une particularité qui distingue le système politique suisse de nombreux autres systèmes dans le monde.

La concordance en Suisse n'est pas codifiée dans la loi. Il s'agit plutôt d'une tradition politique non écrite qui s'est développée au fil du temps. La concordance, également appelée "formule magique", vise à assurer une représentation proportionnelle des principaux partis politiques suisses au sein du gouvernement. Les partis politiques en Suisse ont adopté cette approche par consensus, la considérant comme une manière de maintenir la stabilité et de favoriser la coopération entre différentes forces politiques. Cependant, comme vous l'avez mentionné, il n'y a pas de règle institutionnelle ou légale qui oblige les partis à suivre cette tradition. En pratique, le système de concordance signifie que les partis politiques travaillent ensemble pour gouverner, plutôt que d'être divisés en une majorité gouvernante et une opposition. Cela peut aider à réduire la polarisation et à favoriser le compromis et le consensus dans la prise de décision. Cependant, il convient de noter que cette tradition de concordance a également été critiquée pour son potentiel à diluer la responsabilité politique et à affaiblir le rôle de l'opposition.

Partage du pouvoir

Dans la plupart des autres pays, le pouvoir exécutif est détenu par un seul individu (le président ou le premier ministre), éventuellement assisté par des ministres individuels. En Suisse, le pouvoir exécutif est exercé collectivement par le Conseil fédéral, composé de sept membres. Chaque membre du Conseil fédéral est à la tête d'un département de l'administration fédérale, un peu à la manière d'un ministre. Cependant, les décisions sont prises collectivement, ce qui signifie que chaque conseiller fédéral a autant de pouvoir que les autres.

L'idée derrière cette structure est de promouvoir la collaboration et le consensus. Au lieu d'avoir une personne qui prend les décisions de manière unilatérale, le système suisse favorise le dialogue et le compromis. C'est une autre caractéristique qui distingue le système suisse des systèmes présidentiels et parlementaires plus traditionnels. En même temps, le fait que le pouvoir soit partagé entre sept personnes peut aussi rendre le processus décisionnel plus complexe et plus lent. Il est également plus difficile d'attribuer la responsabilité des décisions à une seule personne ou à un seul parti. Aussi, le fait que le Conseil fédéral soit composé de membres de différents partis, conformément à la tradition de la concordance, signifie que les membres du gouvernement peuvent avoir des points de vue très différents sur certaines questions. Cela peut parfois compliquer la prise de décisions et nécessiter des compromis substantiels.

Le système politique suisse se caractérise par son système collégial au sein du Conseil fédéral. Les sept membres du Conseil fédéral sont égaux en termes de statut et de pouvoir, et aucun d'entre eux ne peut imposer sa volonté aux autres. Les décisions sont prises à la majorité, et chaque membre du Conseil a le droit de participer à ces décisions, quelle que soit la nature de la question, qu'elle relève ou non de son département. Ce système collégial se distingue nettement des systèmes présidentiels, où le pouvoir est concentré entre les mains du président, et des systèmes parlementaires, où le premier ministre a généralement plus de pouvoir que les autres membres du gouvernement.

En Suisse, le président de la Confédération est élu parmi les membres du Conseil fédéral pour une durée d'un an, mais ce poste est largement symbolique et ne confère pas de pouvoir supplémentaire à son titulaire. Le président de la Confédération n'est pas le chef de l'Etat au sens où on l'entend dans d'autres systèmes politiques, mais plutôt un "primus inter pares", c'est-à-dire le premier parmi des égaux. Ce système de non-hiérarchisation a pour but de favoriser le consensus et la collaboration entre les différents partis politiques représentés au sein du gouvernement. Il reflète également les valeurs de démocratie directe et de participation qui sont au cœur du système politique suisse.

La présidence de la Confédération en Suisse est une fonction largement symbolique. Le Président ou la Présidente de la Confédération n'a pas plus de pouvoirs que ses collègues au sein du Conseil fédéral. Le rôle du Président est principalement de présider les séances du Conseil fédéral et de représenter le pays lors de cérémonies officielles, à la fois au niveau national et international. La présidence est tournante, c'est-à-dire que chaque année, un nouveau membre du Conseil fédéral est élu à cette position par ses pairs. La sélection se fait généralement en fonction de l'ancienneté, chaque conseiller fédéral ayant le droit d'accéder à la présidence après avoir siégé pendant un certain nombre d'années au sein du Conseil. Ce système garantit que le pouvoir reste équilibré entre tous les membres du gouvernement, en évitant la concentration du pouvoir entre les mains d'un seul individu. Cela reflète l'approche collégiale de la gouvernance qui est au cœur du système politique suisse, favorisant le consensus et la collaboration entre les différents partis politiques.

Le principe de collégialité est une caractéristique essentielle du système politique suisse. Il s'agit d'une règle non écrite selon laquelle une fois qu'une décision a été prise au sein du Conseil fédéral, tous les membres du gouvernement sont tenus de la soutenir publiquement, qu'ils aient voté pour ou contre lors de la prise de la décision initiale. Cela signifie que même si un conseiller fédéral était en désaccord avec une décision lorsqu'elle a été prise, il est censé défendre cette décision devant le parlement, les médias et le public une fois qu'elle a été officiellement adoptée par le Conseil. Cette règle sert à maintenir l'unité au sein du gouvernement et à renforcer la légitimité des décisions prises par le Conseil fédéral. Cependant, en pratique, il peut y avoir des divergences quant à l'application stricte de ce principe de collégialité, notamment lorsque les questions politiques sont particulièrement controversées ou polarisantes. Certains membres du Conseil peuvent parfois exprimer publiquement leur désaccord avec les décisions prises, bien que cela soit généralement considéré comme un écart par rapport à la norme.

Le terme "système directorial" est souvent utilisé pour décrire le gouvernement suisse, principalement en raison de sa structure collégiale et de la manière dont le pouvoir est réparti de manière égale entre les membres du Conseil fédéral. L'inspiration initiale de ce système provient en effet du Directoire de la Révolution française de 1791, où le pouvoir exécutif était partagé entre cinq directeurs. Cependant, alors que le Directoire français a été court et finalement instable, le système directorial en Suisse a prouvé sa durabilité et sa stabilité depuis son établissement en 1848, avec plus de 170 ans de fonctionnement à ce jour. Ce système a permis de maintenir l'équilibre du pouvoir et de garantir que aucune voix individuelle n'est plus puissante que les autres au sein du gouvernement, ce qui a aidé à soutenir le système politique consensuel et stable de la Suisse.

Conséquences pour les élections fédérales du système de gouvernement suisse

Dans un système parlementaire classique, les élections législatives ont souvent un impact direct sur la composition du gouvernement, car le parti ou la coalition qui obtient la majorité au parlement est généralement invité à former le gouvernement. Les électeurs ont donc une influence directe sur la formation du gouvernement lorsqu'ils votent lors des élections législatives. Cependant, dans le système suisse, cette connexion directe n'existe pas. Le Conseil fédéral est élu par l'Assemblée fédérale et non directement par le peuple, et la coutume de la concordance signifie que les principaux partis politiques sont généralement représentés dans le gouvernement, quelle que soit l'issue des élections. Cela ne signifie pas que les élections législatives sont sans importance en Suisse - elles déterminent la composition du Parlement, qui a de nombreuses responsabilités importantes, y compris l'élection du Conseil fédéral. Cependant, le lien direct entre le vote des électeurs et la composition du gouvernement n'est pas aussi fort que dans d'autres systèmes parlementaires.

Le système de cooptation entre les partis politiques en Suisse a créé une certaine stabilité dans la composition du gouvernement. La "formule magique" (Zauberformel), établie en 1959, a été utilisée pour répartir les sept sièges du Conseil fédéral entre les quatre principaux partis politiques du pays. Cette formule a été ajustée une fois en 2003, mais elle a essentiellement maintenu une composition stable du gouvernement pendant de nombreuses années, indépendamment des changements dans le rapport de forces politiques après les élections parlementaires. Cela donne à la Suisse un caractère unique en matière de gouvernance et de prise de décision politique. Le consensus et la collaboration entre les partis politiques sont privilégiés plutôt que la compétition électorale pour la majorité. De cette manière, toutes les principales forces politiques du pays sont représentées au gouvernement et ont une voix dans les décisions politiques, ce qui contribue à une stabilité politique remarquable.

Dans le système politique suisse, les élections parlementaires n'ont pas d'impact direct sur la composition du gouvernement, contrairement à de nombreux autres systèmes politiques où le parti ou la coalition de partis avec la majorité au parlement forme généralement le gouvernement. En Suisse, le gouvernement, le Conseil fédéral, est formé selon un système de concordance, avec des sièges attribués aux principaux partis politiques, et cette composition reste relativement stable indépendamment des résultats des élections parlementaires. Cela pourrait effectivement contribuer à expliquer pourquoi le taux de participation aux élections en Suisse est relativement bas par rapport à d'autres pays. Les électeurs peuvent percevoir que leur vote a un impact limité sur la composition du gouvernement et donc, potentiellement, sur la politique nationale. Cependant, il est important de noter que les électeurs suisses ont aussi de nombreuses autres opportunités de s'exprimer sur des questions spécifiques grâce au système de démocratie directe du pays, qui permet la tenue de référendums sur de nombreuses questions.

Ce graphique présente la composition du Conseil fédéral depuis 1959.

Composition du Conseil fédéral (sièges).

La "formule magique" ("Zauberformel" en allemand) est en effet le terme utilisé pour décrire la composition traditionnelle du Conseil fédéral suisse de 1959 à 2003. Cette formule garantissait un équilibre de pouvoir entre les principaux partis politiques du pays. Elle était comme suit :

  • Parti démocrate-chrétien (PDC) : 2 sièges
  • Parti radical-démocratique (PRD), maintenant le Parti libéral-radical (PLR) : 2 sièges
  • Parti socialiste suisse (PSS) : 2 sièges
  • Union démocratique du centre (UDC) : 1 siège

Cette distribution reflétait une représentation proportionnelle des quatre principaux partis suisses au Conseil fédéral. Bien que le gouvernement suisse soit un collège sans hiérarchie, il y avait une certaine prévisibilité grâce à la "formule magique". Cependant, cette formule a été perturbée en 2003 lorsque l'UDC, qui était devenu le parti avec le plus grand nombre de voix, a obtenu un deuxième siège au détriment du PDC.

La "formule magique" a reflété la stabilité relative des forces politiques en Suisse pendant cette période. Bien qu'il y ait eu des variations dans les pourcentages de votes que chaque parti a reçus lors des élections parlementaires, ces variations n'étaient généralement pas suffisamment importantes pour justifier un changement dans la composition du Conseil fédéral. Cela dit, l'application de la "formule magique" n'était pas simplement une question de proportionnalité des voix. Elle était aussi le reflet d'une volonté politique de maintenir une certaine stabilité et une représentation équilibrée des différentes forces politiques au sein du gouvernement. C'est cette stabilité qui a permis à la Suisse de maintenir un système politique relativement consensuel et stable pendant une grande partie de la seconde moitié du 20e siècle. Cependant, comme mentionné précédemment, la "formule magique" a été modifiée en 2003, ce qui a marqué une évolution notable dans la politique suisse.

Avec l'augmentation significative de sa représentation parlementaire, l'Union démocratique du centre (UDC) a gagné une importance croissante dans le paysage politique suisse, devenant le parti le plus important de Suisse en termes de voix. Cette situation a conduit à la réévaluation de la "formule magique" traditionnelle, qui répartissait les sièges du Conseil fédéral entre les principaux partis politiques. Dans cette perspective, il semblait logique d'accorder un deuxième siège à l'UDC pour refléter sa nouvelle position de force.

En effet, en 2003, Christoph Blocher, dirigeant du parti de l'Union démocratique du centre (UDC), est entré au gouvernement. Cette nomination a été un moment significatif de l'histoire politique suisse, non seulement parce qu'elle représentait la montée en puissance de l'UDC, mais aussi parce qu'elle a entraîné un changement de la "formule magique" qui avait prévalu pendant plusieurs décennies. Christoph Blocher était connu pour son style politique controversé et son agenda de droite populiste, ce qui a amené certains observateurs à s'interroger sur l'impact de son entrée au gouvernement sur la tradition de consensus en Suisse. L'éviction de la conseillère fédérale Ruth Metzler-Arnold du PDC, qui n'a pas été réélue, a été un autre moment marquant, puisqu'il s'agissait de la première fois depuis 1872 qu'un membre sortant du gouvernement n'était pas réélu. Depuis lors, la composition du Conseil fédéral a continué d'évoluer, reflétant les changements dans la paysage politique suisse.

Les membres du Conseil fédéral en Suisse sont élus pour des mandats de quatre ans par l'Assemblée fédérale, qui est composée du Conseil national et du Conseil des États. Une fois qu'ils sont en poste, ils ne peuvent pas être destitués pendant la durée de leur mandat. Cependant, au terme de ces quatre années, l'Assemblée fédérale a le pouvoir de ne pas réélire un membre du Conseil fédéral pour un nouveau mandat. Ce phénomène est très rare dans l'histoire politique suisse, étant donné le principe de stabilité et de consensus qui prévaut dans le système politique du pays. Le dernier cas notable de non-réélection a eu lieu en 2007, lorsque le conseiller fédéral Christoph Blocher de l'UDC n'a pas été réélu par l'Assemblée fédérale, et a été remplacé par Eveline Widmer-Schlumpf.

Le non-renouvellement du mandat d'un conseiller fédéral en Suisse est un événement rare qui va à l'encontre de la tradition de stabilité et de consensus du système politique suisse. En 2003, l'élection de Christoph Blocher en remplacement de Ruth Metzler-Arnold a marqué un tournant dans l'histoire politique suisse. C'était la première fois depuis 1897 qu'un conseiller fédéral en fonction n'était pas réélu. Cette tradition non écrite de réélection quasi-automatique des membres du Conseil fédéral reflète l'importance de la stabilité et de la continuité dans le système politique suisse. Mais ce cas montre également que le parlement suisse peut décider de ne pas réélire un conseiller fédéral s'il estime que c'est dans l'intérêt du pays.

En décembre 2007, l'Assemblée fédérale a décidé de ne pas réélire Christoph Blocher au Conseil fédéral. À la surprise générale, elle a plutôt élu un autre membre de l'UDC, Eveline Widmer-Schlumpf, qui était beaucoup moins controversée que Blocher. Cette décision a provoqué une crise au sein de l'UDC. Le parti a décidé d'exclure Widmer-Schlumpf et son parti cantonal des Grisons de l'UDC. En réponse, Widmer-Schlumpf et plusieurs autres membres de l'UDC ont fondé un nouveau parti, le Parti bourgeois-démocratique (PBD). Il est également intéressant de noter que, même si le parlement suisse a la possibilité de ne pas réélire un membre du Conseil fédéral, c'est un événement assez rare. Les deux cas de non-réélection de Christoph Blocher en 2007 et de Ruth Metzler-Arnold en 2003 sont les seuls cas depuis 1943. Ce respect de la tradition de réélection reflète le désir de stabilité et de consensus du système politique suisse.

En 2007, le Parlement suisse a décidé de ne pas réélire Christoph Blocher, une figure controversée, mais a choisi de conserver deux sièges pour l'UDC, le parti le plus important du pays en termes de soutien électoral. Cependant, au lieu de Blocher, le Parlement a choisi d'élire Eveline Widmer-Schlumpf, une figure plus modérée de l'UDC. Cette décision a provoqué une crise au sein de l'UDC. Blocher et ses partisans ont considéré cette décision comme une trahison et ont exclu Widmer-Schlumpf et son parti cantonal de l'UDC. En réponse, Widmer-Schlumpf et plusieurs autres membres modérés de l'UDC ont fondé un nouveau parti, le Parti bourgeois démocratique (PBD). Samuel Schmid a également rejoint ce nouveau parti. Par conséquent, bien que le Parlement ait voulu conserver deux sièges pour l'UDC, en pratique, ces sièges ont été occupés par des membres d'un nouveau parti. Cet épisode illustre bien à la fois la stabilité et l'évolution du système politique suisse. D'une part, le Parlement a maintenu la tradition de représenter les principaux partis dans le Conseil fédéral. D'autre part, il a également montré qu'il pouvait agir pour éviter les figures controversées et maintenir le consensus politique suisse.

Le choix du Parlement d'élire Eveline Widmer-Schlumpf au lieu de Christoph Blocher a été vu par la direction de l'UDC comme une trahison. L'UDC a donc décidé d'exclure Widmer-Schlumpf et Samuel Schmid, l'autre membre de l'UDC au Conseil fédéral, du parti. Cela a eu pour conséquence que, bien qu'il y ait officiellement eu deux membres de l'UDC au Conseil fédéral, ceux-ci n'étaient plus reconnus comme tels par leur propre parti. Cette situation a mis en évidence les tensions existantes au sein de l'UDC entre une aile plus radicale, dirigée par Blocher, et une aile plus modérée, représentée par des personnalités comme Widmer-Schlumpf et Schmid. Suite à leur exclusion de l'UDC, ces derniers ont choisi de fonder un nouveau parti, le Parti bourgeois-démocratique (PBD), qui est devenu une nouvelle force politique en Suisse. Cette situation a également souligné l'importance du consensus dans le système politique suisse. Bien que le Parlement ait voulu maintenir une représentation proportionnelle des principaux partis au Conseil fédéral, il a également cherché à éviter les personnalités controversées qui pourraient perturber le consensus politique.

La décision de l'Assemblée fédérale de ne pas réélire Christoph Blocher a été perçue par l'UDC comme une tentative de marginaliser le courant politique dominant du parti, qui était fortement influencé par les positions de Blocher. L'UDC s'est distinguée par son discours fortement nationaliste, anti-immigration et eurosceptique, qui contraste avec la tendance plus modérée et centriste de la plupart des autres partis politiques suisses. L'exclusion de Widmer-Schlumpf et Schmid, considérés comme plus modérés, était donc perçue comme un affront à la volonté démocratique du parti et de ses électeurs. Cette situation a finalement conduit à la création du Parti Bourgeois-Démocratique (PBD), une formation politique plus modérée, qui a été créée par Widmer-Schlumpf et d'autres membres de l'UDC qui avaient été exclus ou qui ne se retrouvaient plus dans la ligne dure du parti. Le PBD a donc représenté une nouvelle dynamique dans le paysage politique suisse, ajoutant un nouvel élément au système déjà complexe de gouvernance consensuelle en Suisse.

L'UDC a déclaré qu'elle ne se considérait plus comme faisant partie du gouvernement et s'est positionnée comme un parti d'opposition pendant un certain temps. Cependant, après le départ de Samuel Schmid en 2009 et son remplacement par Ueli Maurer, un membre du courant majoritaire de l'UDC, le parti a officiellement réintégré le gouvernement. La création du Parti Bourgeois-Démocratique (PBD) en 2008 est une conséquence directe de ces événements. Le PBD est né d'une scission au sein de l'UDC, suite à l'exclusion des sections cantonales de Grisons et Berne par l'UDC. Ces sections cantonales étaient les sections d'origine d'Éveline Widmer-Schlumpf et Samuel Schmid, qui étaient considérés comme trop modérés pour l'UDC. Le PBD est donc une nouvelle formation politique qui se positionne plus au centre que l'UDC, incarnant un courant plus modéré et plus pro-européen.

L'UDC a déclaré qu'elle ne se considérait plus comme faisant partie du gouvernement et s'est positionnée comme un parti d'opposition pendant un certain temps. Cependant, après le départ de Samuel Schmid en 2009 et son remplacement par Ueli Maurer, un membre du courant majoritaire de l'UDC, le parti a officiellement réintégré le gouvernement. La création du Parti Bourgeois-Démocratique (PBD) en 2008 est une conséquence directe de ces événements. Le PBD est né d'une scission au sein de l'UDC, suite à l'exclusion des sections cantonales de Grisons et Berne par l'UDC. Ces sections cantonales étaient les sections d'origine d'Éveline Widmer-Schlumpf et Samuel Schmid, qui étaient considérés comme trop modérés pour l'UDC. Le PBD est donc une nouvelle formation politique qui se positionne plus au centre que l'UDC, incarnant un courant plus modéré et plus pro-européen.

La composition du Conseil fédéral en Suisse est généralement assez stable et les changements se font de manière graduelle, avec seulement un ou deux sièges généralement en jeu à chaque renouvellement. Cela est dû à la structure unique du système politique suisse, qui est basé sur un gouvernement de coalition plutôt que sur un système bipartite plus traditionnel. Dans ce contexte, le principe de "concurrence consensuelle" régit le paysage politique, ce qui signifie que les principaux partis politiques s'efforcent de travailler ensemble pour gouverner plutôt que de se concurrencer pour le pouvoir. De plus, le Conseil fédéral est élu par le Parlement, et non directement par le peuple. Ainsi, bien que les élections parlementaires soient importantes, leur influence sur la composition du Conseil fédéral est indirecte et souvent limitée. Cela peut expliquer pourquoi le taux de participation aux élections parlementaires en Suisse est relativement faible par rapport à d'autres pays. Les citoyens suisses peuvent avoir le sentiment que leur vote a moins d'impact sur le paysage politique global, étant donné que le gouvernement reste largement stable quel que soit le résultat de l'élection.

En Suisse, la continuité et la stabilité sont des caractéristiques clés de la gouvernance politique, en raison de la nature de son système gouvernemental. Le gouvernement suisse, en particulier le Conseil fédéral, est basé sur une coalition d'une variété de partis. Cette situation vise à assurer que différentes perspectives soient représentées au sein du gouvernement, évitant ainsi de grands changements radicaux à la suite des élections. Par opposition, dans des systèmes politiques plus polarisés, comme au Royaume-Uni ou aux États-Unis, il y a souvent une alternance de gouvernance entre les partis de gauche et de droite. Cela peut entraîner des changements politiques plus radicaux et dramatiques lorsqu'un parti prend le pouvoir à la suite d'une élection. Ce système de coalition en Suisse favorise donc la modération, la stabilité et le consensus plutôt que la polarisation. Cela peut cependant aussi contribuer à une moindre mobilisation lors des élections parlementaires, les électeurs percevant que leur vote a moins d'impact immédiat sur la politique du pays.

En Suisse, le système de concordance arithmétique vise à représenter équitablement les forces politiques au sein du gouvernement en fonction de leur représentation au parlement. En d'autres termes, le nombre de sièges qu'un parti détient au Conseil fédéral est généralement proportionnel à sa force dans le parlement. En raison de ce système, l'UDC, en tant que parti ayant le plus grand nombre de sièges au parlement, a revendiqué avec succès un deuxième siège au Conseil fédéral. C'est un bon exemple de la façon dont ce système fonctionne pour assurer une représentation proportionnelle au sein du gouvernement suisse.

En Suisse, la concordance va bien au-delà d'une simple répartition proportionnelle des sièges au sein du gouvernement. C'est également un principe de conduite politique. Un parti qui intègre le Conseil fédéral est en effet considéré comme un "parti gouvernemental" et s'engage à agir en conséquence. Cela implique de prendre une part active et constructive dans la conduite des affaires gouvernementales, de soutenir les décisions prises collectivement, même lorsqu'elles ne correspondent pas entièrement à leur programme partisan. C'est l'une des particularités du système politique suisse : la concordance favorise une culture politique de consensus et de coopération entre les partis au gouvernement, plutôt que de confrontation et d'opposition comme cela peut être le cas dans d'autres systèmes politiques. Cela vise à assurer une stabilité politique et une prise de décision plus harmonieuse.

Le système de concordance en Suisse a été mis à l'épreuve ces dernières années, avec l'émergence de positions politiques plus polarisées et moins conciliantes. L'UDC et le PS sont deux exemples de partis qui ont souvent pris des positions opposées à celles du gouvernement, malgré leur participation à celui-ci. Cela pose des défis pour le système suisse de concordance qui est basé sur l'idée d'un consensus gouvernemental. La polarisation accrue des positions politiques, associée à la persistance d'une concordance arithmétique, rend de plus en plus difficile le maintien de cette tradition de consensus et de coopération gouvernementale. Cependant, ilmême dans ce contexte, la politique suisse continue de se caractériser par un degré relativement élevé de stabilité et de prévisibilité, notamment en comparaison avec d'autres systèmes politiques. L'avenir dira si ce système pourra s'adapter et évoluer face à ces nouveaux défis.

La démocratie directe

La démocratie directe est l’une des institutions phares du système politique suisse et aussi un trait distinctif du système politique suisse. Les outils de la démocratie directe en Suisse, tels que l'initiative populaire et le référendum, donnent un rôle important aux citoyens dans le processus législatif. Ils ont la possibilité d'initier des lois, de proposer des modifications constitutionnelles, et d'exprimer leur opinion sur diverses questions politiques importantes. Ce système de démocratie directe donne aux citoyens un certain pouvoir sur la politique nationale, bien au-delà de ce qui est courant dans la plupart des autres démocraties. Les décisions sont ainsi souvent prises à la suite de votes populaires, ce qui favorise une participation citoyenne active et une implication directe dans la politique.

Des chercheurs ont fait l’inventaire de toutes les votations populaires qui ont eu dans le monde au niveau national pendant tout le XXème siècle et la moitié de ces votations ont eu lieu en Suisse. Autrement dit, le peuple suisse a voté en démocratie directe au niveau national, autant de fois que tous les autres pays réunis. En Suisse, la démocratie directe est une composante fondamentale du système politique, donnant au peuple un contrôle significatif sur la législation et les modifications constitutionnelles. L'outil principal de la démocratie directe en Suisse est le référendum, qui peut être soit obligatoire (pour certaines questions constitutionnelles), soit facultatif (lorsqu'un certain nombre de citoyens signent une pétition pour contester une loi adoptée par le Parlement). De plus, l'initiative populaire permet aux citoyens de proposer des modifications de la Constitution, qui sont ensuite soumises à un vote national.

Ainsi, il est courant en Suisse d'avoir plusieurs votations chaque année sur un large éventail de sujets, de la politique fiscale aux questions sociales, en passant par les modifications constitutionnelles. Cela contraste avec de nombreux autres pays où la démocratie directe est beaucoup moins présente et où la plupart des décisions politiques sont prises par des représentants élus plutôt que directement par le peuple. La grande quantité de votations en Suisse reflète donc son système unique de démocratie directe, qui donne aux citoyens un rôle plus actif dans le processus politique que dans la plupart des autres pays. Cela donne une idée de l’importance du développement de la démocratie directe en Suisse.

La démocratie directe est également présente dans certaines régions des États-Unis, notamment en Californie. Ce système politique permet aux citoyens de proposer des lois (par le biais d'initiatives) ou de demander un vote sur une loi existante (par le biais de référendums). La Californie est particulièrement connue pour son utilisation fréquente de ces outils de démocratie directe, qui ont eu un impact significatif sur la politique de l'État. Cependant, il est important de noter que même si certains États américains utilisent des formes de démocratie directe, ils ne le font pas au même degré que la Suisse au niveau national. La Suisse se distingue par le fait que la démocratie directe est intégrée à tous les niveaux de son système politique - du niveau communal au niveau national. De plus, en Suisse, ces outils de démocratie directe sont utilisés pour un large éventail de questions, allant des modifications constitutionnelles à des questions de politique plus générales. C'est une caractéristique unique du système politique suisse qui lui donne un rôle de leader dans l'utilisation de la démocratie directe.

La démocratie directe en Suisse permet aux citoyens de participer activement au processus législatif et à la formulation des politiques publiques. Cela se fait principalement par le biais de deux mécanismes : les initiatives populaires et les référendums. Une initiative populaire permet aux citoyens de proposer une modification de la constitution. Si l'initiative recueille le nombre requis de signatures (100 000 signatures en l'espace de 18 mois), elle est soumise au vote du peuple et des cantons. Un référendum, quant à lui, peut être facultatif ou obligatoire. Un référendum facultatif peut être déclenché par la collecte de 50 000 signatures dans un délai de 100 jours à partir de la publication d'un acte législatif. Un référendum obligatoire concerne certaines décisions importantes, comme les modifications de la constitution ou l'adhésion à des organisations de sécurité collective ou à des communautés supranationales. Cette participation active des citoyens a plusieurs conséquences. D'une part, elle permet une plus grande implication des citoyens dans la prise de décision politique. D'autre part, elle oblige les politiciens à prendre en compte l'opinion des citoyens lors de l'élaboration des politiques. En outre, elle peut contribuer à une plus grande transparence et responsabilité du gouvernement.

L'initiative populaire, le référendum obligatoire et le référendum facultatif sont les trois principaux instruments de démocratie directe au niveau fédéral en Suisse :

  • L'initiative populaire : Comme vous l'avez dit, ce mécanisme permet à un groupe de citoyens de proposer une modification de la Constitution. Si l'initiative recueille 100 000 signatures dans un délai de 18 mois, elle est soumise à un vote populaire et doit être approuvée par la majorité du peuple et des cantons.
  • En Suisse, le référendum obligatoire est une forme de vote qui est déclenchée lorsqu'il y a des changements proposés à la Constitution. Ces modifications peuvent être initiées par le gouvernement ou le parlement. Une fois qu'une proposition de modification de la Constitution a été faite, elle doit être soumise à un vote populaire. Pour être adoptée, la proposition doit obtenir l'approbation de la double majorité, c'est-à-dire une majorité du peuple (plus de 50% des voix exprimées lors du vote) et une majorité des cantons (plus de la moitié des cantons suisses doivent voter en faveur de la proposition). Cela signifie que les citoyens suisses ont un rôle direct et actif dans l'élaboration de la Constitution de leur pays, ce qui est assez unique par rapport à de nombreux autres pays où la Constitution ne peut être modifiée que par les législateurs élus ou par des processus spéciaux impliquant à la fois le gouvernement et le parlement.
  • le referendum facultatif s’applique pour toute loi votée par le parlement. Ce type de référendum est un instrument de la démocratie directe qui permet aux citoyens de contester les lois votées par le Parlement. Si un groupe de citoyens n'est pas d'accord avec une loi adoptée par le Parlement, ils peuvent former un comité référendaire et s'ils parviennent à collecter 50 000 signatures en faveur du référendum dans un délai de 100 jours, la loi est alors mise au vote du peuple. Contrairement au référendum obligatoire qui nécessite une double majorité (du peuple et des cantons) pour être adopté, dans le cas d'un référendum facultatif, une majorité simple des votants est suffisante pour que la loi soit rejetée. Ce processus donne un pouvoir important aux citoyens suisses, qui peuvent ainsi exercer un contrôle direct sur l'action du Parlement. C'est un élément clé du système de démocratie directe en Suisse.

La Suisse se distingue sur le plan mondial par son système de démocratie directe très développé. Contrairement à de nombreux autres pays où les citoyens ne participent qu'indirectement à la prise de décision par l'élection de représentants, en Suisse, le peuple a la possibilité de participer directement à la prise de décisions sur des questions spécifiques. Cela se fait par le biais des initiatives populaires et des référendums, qui permettent aux citoyens de proposer des modifications de la constitution (initiatives populaires) ou de contester des lois adoptées par le Parlement (référendums). Cette capacité de codécision confère aux citoyens suisses un rôle plus actif et direct dans le processus législatif que dans la plupart des autres démocraties.

La Suisse offre à ses citoyens un niveau d'engagement démocratique qui va bien au-delà de l'élection de représentants politiques lors d'élections générales. En plus d'élire leurs représentants au gouvernement, les citoyens suisses ont également la possibilité de voter sur un certain nombre de questions spécifiques grâce à la démocratie directe. Cette combinaison de démocratie représentative et de démocratie directe est unique en son genre. Dans la plupart des autres pays, les élections nationales sont le principal moyen par lequel les citoyens peuvent influencer la direction de la politique gouvernementale. Ces élections ont généralement lieu tous les quatre à cinq ans et permettent aux citoyens de choisir leurs représentants politiques. Cependant, une fois ces représentants élus, ils ont généralement une grande latitude pour prendre des décisions politiques jusqu'à la prochaine élection. En Suisse, cependant, les citoyens ont un contrôle beaucoup plus direct sur les politiques spécifiques grâce à la démocratie directe. Par le biais d'initiatives populaires et de référendums, les citoyens peuvent proposer ou contester des lois spécifiques, ce qui leur donne une influence directe sur la législation. Cela signifie qu'en plus de choisir leurs représentants politiques, les citoyens suisses ont également un rôle direct et actif dans l'élaboration des politiques.

Quelles sont les conséquences ?

La première conséquence est que la démocratie directe concurrence les élections. Dans un système de démocratie directe comme en Suisse, les élections ne sont pas le seul moyen pour les citoyens de s'exprimer sur des questions politiques spécifiques. Au lieu de cela, les citoyens ont de nombreuses occasions de faire entendre leur voix par le biais d'initiatives et de référendums. Cela signifie que les élections, bien qu'importantes, ne sont qu'un des nombreux mécanismes par lesquels les citoyens peuvent influencer la politique. Cette pluralité d'outils démocratiques offre aux citoyens une voix plus forte et plus directe dans le gouvernement. Cela peut également avoir pour effet de réduire l'importance des élections en tant que seul indicateur de l'opinion publique. Dans de nombreux autres pays, les élections sont souvent considérées comme un référendum sur la performance du gouvernement. Cependant, en Suisse, la performance du gouvernement peut également être évaluée à travers une variété d'initiatives et de référendums. Par conséquent, la démocratie directe en Suisse offre un système beaucoup plus nuancé et flexible pour évaluer et répondre à l'opinion publique que dans les pays qui s'appuient principalement sur des élections pour mesurer le sentiment public.

Deuxièmement et plus concrètement, la démocratie directe a pour conséquence de multiplier les scrutins populaires. La multitude d'opportunités de vote en Suisse, y compris les élections et les diverses formes de référendums, peut réduire la participation aux élections parlementaires et autres. Les citoyens peuvent se sentir dépassés par la fréquence des scrutins ou peuvent estimer que leur vote est plus efficace ou pertinent lorsqu'un enjeu spécifique qui les concerne directement est en jeu. Il convient également de noter que la participation électorale en Suisse est généralement inférieure à celle de nombreux autres pays démocratiques. Cela pourrait en partie être dû au fait que les citoyens suisses ont de nombreuses occasions de s'exprimer politiquement, ce qui peut rendre les élections individuelles moins cruciales. Cependant, même si la participation électorale peut être relativement faible, cela ne signifie pas nécessairement que les citoyens suisses sont moins engagés politiquement. Ils peuvent simplement choisir de s'engager de manière plus sélective, en participant aux scrutins qui traitent de questions qu'ils jugent particulièrement importantes.

La démocratie directe suisse offre aux citoyens un contrôle important sur les décisions politiques et législatives. À travers les référendums et les initiatives populaires, les citoyens ont le pouvoir de rejeter ou de proposer des lois et des modifications constitutionnelles. Ce mécanisme peut être vu comme une forme de "correction" des décisions prises par le Parlement et les autres autorités élues. Cela signifie que les élections ne sont pas l'unique moyen pour les citoyens suisses d'influencer la politique. Même si un parti ou un candidat qu'ils n'approuvent pas est élu, ils ont toujours la possibilité de contester les lois et les décisions politiques grâce à ces mécanismes de démocratie directe. Cependant, bien que cela puisse réduire l'importance des élections parlementaires, cela ne signifie pas que ces élections sont sans importance. Les députés élus ont toujours un rôle important à jouer dans l'élaboration des lois et dans la prise de décisions au niveau national. De plus, les partis politiques sont souvent à l'origine des initiatives et des référendums, il est donc important pour les électeurs de soutenir les partis qui représentent leurs opinions et leurs intérêts.

Le fédéralisme

Article détaillé : Le fédéralisme.

Le fédéralisme a plusieurs formes d’influence sur les élections.

Le système fédéral suisse donne lieu à une législature bicamérale, qui comprend deux chambres distinctes :

  • Le Conseil national (Nationalrat/Conseil national) : il s'agit de la chambre basse du Parlement suisse. Elle est souvent décrite comme la "chambre du peuple" car ses membres sont élus directement par le peuple suisse. La représentation dans le Conseil national est proportionnelle à la population de chaque canton. En 2021, il y avait 200 membres du Conseil national.
  • Le Conseil des États (Ständerat/Conseil des États) : cette chambre haute est parfois appelée la "chambre des cantons". Chaque canton suisse, indépendamment de sa taille ou de sa population, y est représenté par deux conseillers d'État (à l'exception des demi-cantons, qui ont un seul représentant chacun). En 2021, le Conseil des États comptait 46 membres.

Ces deux chambres forment l'Assemblée fédérale suisse (Bundesversammlung/Assemblée fédérale). Elles sont toutes deux impliquées dans le processus législatif et doivent s'accorder sur une version identique de toute législation pour qu'elle puisse être adoptée. Ce système bicaméral est conçu pour assurer une représentation équitable à la fois de la population suisse (par le biais du Conseil national) et des cantons suisses (par le biais du Conseil des États). Il s'agit d'une caractéristique fondamentale du système fédéral suisse, qui vise à équilibrer les intérêts des diverses parties de la confédération.

Le système bicaméral suisse est considéré comme un exemple de bicamérisme "parfait" ou "symétrique", car les deux chambres du Parlement - le Conseil national (chambre basse) et le Conseil des États (chambre haute) - ont le même pouvoir de légiférer et doivent s'accorder sur le même texte avant qu'une loi puisse être adoptée. Ce système contraste avec un bicamérisme "imparfait" ou "asymétrique", où une chambre a plus de pouvoir ou d'influence que l'autre. Par exemple, au Royaume-Uni, la Chambre des communes a beaucoup plus de pouvoir que la Chambre des lords. En Suisse, si le Conseil national et le Conseil des États ne parviennent pas à s'entendre sur le texte d'un projet de loi, une procédure de conciliation est mise en place. Un comité de conciliation, composé de membres des deux chambres, est alors formé pour tenter de résoudre les différends. Si le comité parvient à un accord, le texte de compromis doit ensuite être approuvé par les deux chambres avant de pouvoir devenir loi. Ce système assure que les intérêts de tous les cantons et de l'ensemble de la population suisse sont pris en compte dans le processus législatif, renforçant ainsi le principe fédéraliste de la Suisse.

En Suisse, le Conseil national (chambre du peuple) et le Conseil des États (chambre des cantons) ont des pouvoirs équivalents dans le processus législatif. Tous les projets de loi, les modifications constitutionnelles, et les arrêtés fédéraux doivent être adoptés par les deux chambres. Cela signifie qu'aucune législation ne peut être adoptée à moins que les deux chambres ne s'entendent sur le même texte. Si elles ne parviennent pas à se mettre d'accord, une commission de conciliation composée de membres des deux chambres est formée pour tenter de trouver un compromis. Ce système de bicamérisme parfait renforce le principe fédéraliste de la Suisse, garantissant que les intérêts de tous les cantons et de l'ensemble de la population sont pris en compte dans le processus législatif.

Le Conseil national est la chambre basse du Parlement suisse et elle est considérée comme la "chambre du peuple" car ses membres sont élus directement par le peuple. Il y a 200 sièges dans le Conseil national, qui sont répartis entre les cantons suisses en fonction de leur population. Plus la population d'un canton est importante, plus il dispose de sièges. Par exemple, le canton de Zurich, qui est le canton le plus peuplé de Suisse, dispose du plus grand nombre de sièges, actuellement 35. Le canton de Genève, qui est également un canton très peuplé, dispose de 11 sièges. Les cantons moins peuplés, comme Neuchâtel, ont moins de sièges. Les plus petits cantons ne disposent que d'un seul siège. Ce système assure une représentation proportionnelle de la population suisse au sein du Conseil national, et permet à toutes les régions du pays d'avoir une voix dans le processus législatif.

Le Conseil des États est la chambre haute du Parlement suisse et elle est parfois appelée la "chambre des cantons". Il y a 46 sièges au Conseil des États, chaque canton y disposant de deux représentants et chaque demi-canton d'un représentant. Cela signifie que chaque canton, indépendamment de sa population, est également représenté au Conseil des États. Cette distribution des sièges garantit que les intérêts de tous les cantons, qu'ils soient grands ou petits, sont pris en compte dans le processus législatif. Cependant, ce système peut effectivement entraîner une surreprésentation des petits cantons. Par exemple, le canton de Zurich, le plus peuplé de Suisse, n'a que deux sièges au Conseil des États, tandis que le canton d'Appenzell Rhodes-Intérieures, l'un des plus petits cantons de Suisse, a également deux sièges. Cela signifie que chaque représentant d'Appenzell Rhodes-Intérieures représente beaucoup moins de personnes que chaque représentant de Zurich. Cette sur-représentation peut avoir des implications politiques, car elle peut donner plus de pouvoir aux petits cantons dans le processus législatif.

Le système fédéral suisse tel que nous le connaissons aujourd'hui a été établi par la Constitution fédérale de 1848. Avant cette date, la Suisse était une confédération plutôt lâche de cantons indépendants. Lors de l'établissement de la Constitution fédérale, il a fallu trouver un équilibre entre les intérêts des différents cantons. Afin d'équilibrer les intérêts des cantons plus grands et plus peuplés avec ceux des cantons plus petits, il a été décidé que chaque canton aurait une représentation égale dans la chambre haute du parlement, le Conseil des États, peu importe sa taille ou sa population. Cela était destiné à protéger les intérêts des petits cantons qui auraient pu être éclipsés par les cantons plus grands dans un système purement proportionnel. Dans le même temps, la chambre basse du parlement, le Conseil national, serait basée sur une représentation proportionnelle, donnant ainsi aux cantons plus peuplés une plus grande influence. Cette structure bicamérale a pour but de garantir que toutes les régions de la Suisse ont une voix dans le processus législatif, et reflète le respect du pays pour le fédéralisme et la diversité régionale.

Le fédéralisme suisse joue un rôle crucial dans le système bicaméral du pays. Ce système permet aux différentes régions et cantons de la Suisse d'avoir une voix équitable dans les affaires nationales, tout en respectant leur autonomie et leur diversité. Le "bicamérisme parfait" en Suisse, où les deux chambres ont des prérogatives équivalentes, est assez unique. Dans de nombreux autres pays avec un système bicaméral, la chambre haute et la chambre basse n'ont pas le même pouvoir. Par exemple, aux États-Unis, certaines questions, comme la destitution du président, ne peuvent être traitées que par la Chambre des représentants, tandis que d'autres, comme la ratification des traités, ne peuvent être traitées que par le Sénat. Cependant, en Suisse, le Conseil national et le Conseil des États doivent tous deux approuver les modifications constitutionnelles, les lois fédérales et les arrêtés fédéraux, assurant ainsi que les intérêts des différents cantons sont correctement pris en compte. Cela reflète l'engagement de la Suisse envers le fédéralisme et son désir de maintenir un équilibre entre les intérêts des différents cantons.

La structure politique suisse est profondément influencée par son système de fédéralisme, qui se reflète également dans l'organisation des partis politiques. Les partis politiques en Suisse ont souvent des racines cantonales et régionales profondes, ce qui signifie que leur identité et leur plateforme politique peuvent varier considérablement d'un canton à l'autre. Par exemple, le Parti libéral-radical (PLR), le Parti démocrate-chrétien (PDC), l'Union démocratique du centre (UDC) et le Parti socialiste suisse (PSS) ont tous des sections cantonales avec leurs propres structures organisationnelles et leurs propres agendas politiques. Ces partis peuvent avoir des positions et des priorités politiques différentes dans les différents cantons en fonction des besoins et des préférences spécifiques de la population locale. Cela peut conduire à une diversité politique substantielle, non seulement entre les différents cantons, mais aussi au sein des partis politiques eux-mêmes. De plus, ce système encourage la participation politique locale et permet une plus grande adaptation des politiques aux besoins spécifiques des différentes régions de la Suisse. Cela illustre une autre façon dont le fédéralisme influence la politique suisse, en permettant une diversité et une flexibilité politiques qui seraient moins possibles dans un système plus centralisé.

La diversité politique entre les différents cantons suisses a un impact significatif sur le paysage politique national. Chaque canton a sa propre dynamique politique, reflétant les caractéristiques socio-économiques et culturelles uniques de la région, ainsi que des préférences politiques distinctes. Les partis politiques eux-mêmes sont souvent organisés à l'échelle cantonale, avec une variété de partis représentés dans chaque canton. Cette diversité se traduit par une fragmentation du paysage politique national, car il n'y a pas deux cantons avec exactement la même répartition des forces politiques. Cela signifie que le paysage politique suisse est caractérisé par une grande variété de partis, reflétant un large éventail d'intérêts et de points de vue. Cela peut rendre la formation de gouvernements de coalition plus complexe, car il peut être nécessaire de négocier entre un grand nombre de partis avec des intérêts divergents. En même temps, cela signifie que le système politique suisse est capable de représenter une grande variété d'intérêts et de perspectives, ce qui peut favoriser l'inclusion politique et la légitimité démocratique. C'est un élément clé de la nature consensuelle de la politique suisse, où les décisions sont souvent prises par des compromis entre un large éventail de partis politiques.

Le système politique suisse, avec sa forte décentralisation et son fédéralisme, permet à une multitude de partis locaux de se faire entendre à l'échelle nationale. Les partis qui peuvent mobiliser un soutien significatif dans un canton spécifique peuvent obtenir une représentation au Conseil national, même s'ils ne sont pas actifs ou n'ont pas beaucoup de soutien dans le reste du pays. Cette caractéristique du système politique suisse augmente la diversité des voix et des intérêts représentés à l'échelle nationale. En permettant aux partis locaux d'avoir une présence sur la scène politique nationale, le système suisse assure une représentation plus complète et diversifiée des citoyens suisses. Cela contribue à la capacité du système politique suisse de refléter et de prendre en compte une variété de points de vue et d'intérêts. Cependant, cela peut également conduire à une fragmentation du paysage politique, rendant plus difficile la formation de majorités stables. Les partis doivent souvent former des coalitions pour gouverner, ce qui nécessite des compromis et des négociations entre des partis aux points de vue parfois très différents. Néanmoins, cela est inhérent à la nature de la démocratie directe et du fédéralisme suisses, qui valorisent la représentation et l'expression de divers points de vue.

La structure fédérale de la Suisse permet à des partis locaux puissants d'obtenir une représentation au niveau national, même s'ils n'ont de présence significative que dans un seul canton. Cette disposition reflète l'engagement du système politique suisse à assurer une représentation diversifiée et à tenir compte des différentes voix locales au niveau national. Un exemple de cette situation est le Mouvement Citoyens Genevois (MCG). Le MCG est un parti politique genevois, créé en 2005. Bien qu'il soit principalement actif à Genève, le MCG a réussi à obtenir un siège au Conseil national, le permettant ainsi de représenter les intérêts de Genève au niveau national. La Lega dei Ticinesi, active uniquement dans le canton du Tessin, est un autre exemple de parti local qui a réussi à se faire une place au niveau national. Fondée en 1991, la Lega dei Ticinesi a également réussi à obtenir des sièges au Parlement fédéral, permettant une représentation du Tessin à Berne. Un troisième exemple est l'Union Démocratique Fédérale (UDF), un parti politique suisse conservateur, qui n'a une présence significative que dans quelques cantons alémaniques. Fondée en 1975, l'UDF est également représentée au Parlement fédéral à Berne, soulignant une fois de plus la diversité des voix représentées au niveau national. Enfin, le Parti Évangélique (PEV), un parti politique suisse d'inspiration chrétienne, a également des sièges à Berne. Bien que principalement actif dans les cantons alémaniques, le PEV est représenté au niveau national, reflétant la volonté du système politique suisse de donner une voix à une variété d'opinions et de valeurs. Ces partis démontrent comment le système politique suisse valorise les intérêts locaux et régionaux et veille à leur représentation au niveau national. La capacité de ces partis à obtenir une représentation nationale dépend, cependant, de leur aptitude à mobiliser un soutien important dans leurs cantons respectifs.

En Suisse, la structure fédérale du pays a joué un rôle significatif dans le développement du paysage politique. Historiquement, les partis politiques nationaux sont nés de l'unification de divers partis cantonaux, qui ont ensuite étendu leur influence à l'ensemble du pays. Aujourd'hui encore, certains de ces partis nationaux sont largement influencés par leurs sections cantonales, reflétant ainsi la diversité et la complexité du paysage politique suisse. Ce caractère fédéral de la politique suisse a toutefois une conséquence majeure : il peut affaiblir la cohérence interne des partis politiques. En raison de la diversité des intérêts et des préoccupations politiques à travers les cantons, il peut être difficile pour un parti d'adopter une ligne de conduite uniforme sur un certain nombre de questions. Chaque section cantonale peut avoir ses propres priorités, reflétant les spécificités de la région qu'elle représente. Cela peut mener à des divergences d'opinions et de politiques à l'intérieur du même parti, rendant la cohésion interne plus difficile à maintenir. Par conséquent, les partis politiques suisses peuvent parfois sembler moins unifiés et moins organisés que leurs homologues dans les pays qui ont une structure politique plus centralisée. Ceci a pour effet de réduire la cohérence interne des partis politiques.

La diversité des contextes politiques régionaux en Suisse a un impact significatif sur la nature et le positionnement des partis politiques à travers le pays. Un exemple frappant est celui du Parti Démocrate Chrétien (PDC). En Valais, le PDC est un parti majoritaire, voire hégémonique, qui s'aligne plutôt sur des positions de droite. C'est un parti interclassiste qui domine largement la scène politique régionale. En revanche, à Genève, le PDC est un parti minoritaire, qui ne rassemble qu'entre 12 et 13% de l'électorat. Il est plus centriste, se positionnant plus proche du Parti Socialiste valaisan que du PDC valaisan. Ainsi, bien que ce soit le même parti, le contexte politique et historique spécifique de chaque canton influence fortement sa position et son rôle dans le paysage politique. Cette hétérogénéité est ensuite reflétée au niveau national, où l'on observe une grande variété de partis et de positions politiques. Cette diversité est une caractéristique clé du système politique suisse, qui est fortement influencé par sa structure fédérale et par la diversité des contextes régionaux à travers le pays.

En Suisse, le découpage des circonscriptions électorales suit la structure fédérale du pays, c'est-à-dire que chaque canton représente une circonscription électorale. Ainsi, les élections se déroulent au niveau cantonal, chaque canton ayant ses propres règles et systèmes électoraux, et les résultats de ces élections cantonales contribuent à former le paysage politique au niveau national. Cette structure reflète l'importance du fédéralisme en Suisse, où chaque canton a une grande autonomie et joue un rôle important dans la politique nationale. En Suisse, les élections fédérales ne sont pas seulement décidées par des questions de politique nationale, mais aussi par des problèmes spécifiques à chaque canton. Cela est dû à la nature fédérale de la Suisse, où chaque canton a un certain degré d'autonomie et peut avoir des préoccupations différentes des autres cantons. Ainsi, lors d'une élection, un parti politique doit non seulement présenter des positions sur des questions nationales, mais aussi prendre en compte les problèmes spécifiques à chaque canton dans lequel il se présente. Cela peut conduire à une situation où les campagnes électorales peuvent différer d'un canton à l'autre, même pour le même parti. Cette approche électorale reflète la nature complexe et diversifiée de la Suisse, où les préoccupations locales ont un impact significatif sur la politique nationale. En conséquence, les élections en Suisse sont souvent une combinaison d'enjeux nationaux et locaux.

Le système fédéral suisse donne aux cantons une grande autonomie, ce qui signifie que même les élections fédérales sont fortement influencées par les enjeux locaux. Ce système politique permet une grande diversité d'opinions et de positions politiques, ce qui se reflète dans la composition du Parlement fédéral. Chaque canton a ses propres particularités et problèmes, et ces questions locales peuvent avoir un impact significatif sur les résultats des élections fédérales. Comme vous l'avez dit, cela signifie que les élections fédérales en Suisse peuvent être considérées comme une série d'élections cantonales simultanées. Cela peut être différent de ce que l'on voit dans d'autres pays où les élections nationales se concentrent davantage sur des enjeux nationaux ou fédéraux. En Suisse, la politique locale a une influence directe sur la politique nationale, ce qui donne aux citoyens la possibilité de s'exprimer sur des questions spécifiques à leur région. C'est ce qui fait de la Suisse un cas intéressant d'étude pour les politologues et les chercheurs intéressés par l'impact du fédéralisme sur la politique.

Le découpage fédéraliste des circonscriptions électorales en Suisse signifie que pour qu'un parti politique puisse gagner du terrain à l'échelle nationale, il doit pouvoir progresser dans plusieurs cantons simultanément. Cette configuration encourage les partis à élaborer des stratégies qui prennent en compte la diversité des intérêts et des préoccupations à travers les différents cantons. Ainsi, un parti qui fait des gains significatifs dans certains cantons mais pas dans d'autres peut ne pas voir une augmentation significative de sa représentation au niveau fédéral. Les pertes ou la stagnation dans certains cantons peuvent en effet neutraliser les gains réalisés ailleurs. Cela a des implications importantes pour la façon dont les partis politiques suisses mènent leurs campagnes électorales. Ils doivent être capables de répondre aux préoccupations locales spécifiques tout en présentant une plateforme politique qui a une portée nationale. Cela peut représenter un défi particulier pour les partis plus petits ou plus nouveaux qui cherchent à établir une présence au niveau national.

L'Union Démocratique du Centre (UDC), un parti de droite populiste et nationaliste, a connu une montée spectaculaire en Suisse au cours des deux dernières décennies. Cette réussite est remarquable compte tenu du système fédéraliste suisse et de la nécessité de progresser dans de nombreux cantons simultanément pour obtenir une augmentation significative de la représentation au niveau fédéral. L'UDC a réussi à s'adapter à ce système complexe et à progresser de manière substantielle dans tous les cantons suisses. Cela démontre à quel point leur stratégie politique et leurs campagnes électorales ont été efficaces pour toucher une large gamme d'électeurs à travers le pays. Cette montée en puissance de l'UDC a eu des répercussions significatives sur le paysage politique suisse. En effet, l'UDC est devenue l'un des principaux acteurs politiques du pays, influençant les débats nationaux sur des questions clés telles que l'immigration, la souveraineté nationale et l'Union européenne.

Les élections fédérales en Suisse sont souvent vues comme une collection d'élections cantonales. C'est parce que chaque canton sert de circonscription électorale, donnant aux enjeux locaux un poids significatif dans les élections nationales. En effet, les cantons ont une grande autonomie et ont leur propre gouvernement et législature. Ils ont aussi une grande influence sur les questions politiques, économiques et sociales qui peuvent varier d'un canton à l'autre. En conséquence, les partis politiques suisses sont souvent confrontés à la tâche de gérer des agendas politiques diversifiés à travers le pays, et de s'adapter à des contextes locaux spécifiques pour attirer les électeurs.

La nationalisation des élections et du système de partis politiques en Suisse est un phénomène qui a pris de l'ampleur au cours des dernières décennies. Malgré le rôle primordial des cantons et des questions locales, les enjeux nationaux et les grandes tendances politiques à l'échelle du pays ont gagné en importance. Le système de partis politiques suisse, bien qu'encore fortement influencé par les particularités cantonales, s'est structuré à une échelle plus large. Les partis nationaux sont plus organisés et cohérents qu'ils ne l'étaient auparavant. Les enjeux politiques nationaux tels que l'immigration, l'environnement, l'économie et la politique étrangère jouent un rôle de plus en plus déterminant dans les élections.

L'Union Démocratique du Centre (UDC) a joué un rôle important dans la nationalisation du système politique suisse. Sa montée en puissance dans l'ensemble du pays a contribué à unifier le paysage politique suisse à une échelle plus large. Avant l'ascension de l'UDC, la politique suisse était fortement décentralisée, chaque canton ayant ses propres dynamiques politiques. Cependant, la popularité croissante de l'UDC a changé cela. En s'implantant dans chaque canton, même ceux où elle était auparavant faible ou inexistante, l'UDC a contribué à créer un débat politique plus uniforme à travers le pays. Cette nationalisation du système politique suisse a également contribué à rendre les élections plus nationales. Les citoyens suisses sont de plus en plus amenés à se concentrer sur des enjeux nationaux plutôt que sur des questions cantonales lors des élections. Bien que l'UDC ait contribué à la nationalisation de la politique suisse, le fédéralisme reste un élément clé du système politique suisse, et les différences cantonales continuent de jouer un rôle important dans la politique suiss

Le système électoral

Nous débutons ave quelques éléments de définition, notamment nous demander ce qu’est le système électoral et quels sont les effets attendus d’un système électoral.

Le système électoral, ce qu’on appel aussi le « mode de scrutin », sont les règles qui définissent et qui déterminent comment traduit-on les suffrages en siège, à savoir comment les voix exprimées se traduisent en sièges pour les partis et les candidats et en suite comment on distribue les sièges entre les différents partis. En d’autres termes, cela est comment on transfert et traduit les voies en sièges et ensuite comment on distribue les sièges entre les partis.

Définitions

Il y a deux grands types de systèmes électoraux qui sont le système majoritaire et le système proportionnel.

Le système majoritaire, comme son nom l’indique, ce système utilise la règle de la majorité comme critère afin de convertir les voies en sièges. Un parti ou un candidat, des partis ou des candidats qui ont obtenu la majorité absolue ou en tout cas plus de voies que les autres candidats et partis reçoivent tous les sièges, ils l’emportent. Dans un système comme celui-là, s’il y a trois partis, et qu’il y a un seul siège à disposition, c’est le parti qui sera en tête qui obtiendra le siège.

Ce système majoritaire a pour conséquence et but de dégager des majorités fortes et uniformes puisqu’on privilégie les grands partis, ceux qui sont devant, automatiquement, le grand parti ou les quelques grands partis vont se retrouver surreprésenter et vont donc pouvoir gouvernement avec une majorité plus homogène.

L’autre type de système est le système proportionnel, comme son nom l’indique également, ce système distribue les sièges plus ou moins proportionnellement au suffrage exprimé. Il permet donc de représenter assez fidèlement les votes exprimés par les citoyens et les citoyennes qui ont voté.

Dans ce système, on distribue les sièges de manière un peu plus prés proportionnels, on essaie de distribuer de manière proportionnelle les sièges en fonction du rapport de force qui s’est exprimé dans les urnes, en d’autres termes en fonction de la part des voies obtenues par chacun des partis.

Si on résume, il y a un système qui est le système majoritaire qui tend à distribuer les voies en fonction du critère majoritaire et qui va concentrer les sièges sur un ou quelques partis. L’autre système tend à distribuer les sièges à peu près proportionnellement à la force électorale telle qu’elle a été exprimée dans les urnes.

La loi Duverger

Sur cette base, il y a une fameuse loi dans la science politique comparée, une hypothèse qui a été développée par Maurice Duverger, un politologue français. Duverger, dans un livre sur les partis politiques en 1951 avait formulé sa thèse et son hypothèse intubée la loi Duberger.

Cette loi postule qu’il y a un lien étroit entre le système électoral que l’on choisit dans un pays ou une région et le système de parti qui va se développer dans cette région ou se pays. C’est une loi relativement simple :

  1. Le système proportionnel favorise le multipartisme, à savoir plusieurs partis qui se partagent les sièges ;
  2. Le système majoritaire favorise les grands partis voire même le bipartisme, cela favorise donc quelques grands partis ou même selon le type de règle majoritaire que l’on applique, cela peut conduire au bipartisme, donc seulement deux partis qui sont actifs e qui sont présent dans un contexte.

Cette loi se développe selon deux types d’effet, à savoir un effet mécanique (1) et un effet psychologique (2). Nous faisons référence au système majoritaire, dans le système proportionnel, la règle est assez claire, le système est proportionnel, donc il y a plusieurs partis. Dans le système majoritaire, la loi est que dans un système majoritaire, il y a quelques partis seulement voire même deux partis à cause d’un effet mécanique et d’un effet psychologique.

L’effet mécanique porte sur le mécanisme de conversion des voies en siège. SI on applique un système majoritaire, cela veut dire qu’il y a une barrière assez élevée à atteindre pour pouvoir être élue. En d’autres termes, avec ce système il y a une barrière assez haute à atteindre pour pouvoir avoir des représentants. Le cas extrême est une majorité absolue où il faudrait à un parti plus de 50% des voies pour obtenir des sièges. Dans un tel contexte, cela tend à favoriser les grands partis parce que seulement les grands partis sont capables d’obtenir suffisamment de sièges afin de passer ce cap majoritaire.

Comme le système a cette demande élevée, ce système récompense les grands partis. Dans un système majoritaire, les grands partis sont surreprésentés tandis que les petits partis sont sous-représentés.

S’il y a un système dans lequel c’est le premier parti qui passe alors le plus grand parti va passer et rafler toute la mise. On parle d’un système « winner takes all », à savoir que le gagnant prend tous les sièges à disposition. Dans ce cas là, si on multiplie les circonscriptions où le grand parti va rafler toute la mise, il y aura à la fin une surreprésentation des grands partis tandis que les petits partis seront sous-représentés.

En quelque sorte, les voies qui sont exprimées pour les petits partis sont perdues parce qu’elles ne sont jamais capables d’atteindre le seuil majoritaire. C’est le premier effet mécanique qui concerne donc comment traduit-on les voies en sièges.

Le deuxième effet est un effet psychologique, à savoir un effet psychologique qui est lié à l’effet mécanique. L’effet psychologique est lié à l’effet mécanique décrit et se produit à la fois du côté des partis politiques et des électeurs. Il y a chez les partis et les électeurs un mécanisme d’anticipation des résultats en fonction du système majoritaire à l’œuvre.

Prenons l’exemple du Conseil des États en suisse avec seulement deux sièges à disposition. Il est clair qu’avec seulement deux sièges, il faut être un grand parti pour espérer obtenir l’un des deux sièges. Si un petit parti se présente à l’élection, on sait par avance qu’il aura peu de chances de gagner parce que la barre est trop haute pour lui. Donc, cet effet psychologique a pour conséquence de décourager les petits partis à candidater, et les petits partis renoncent à se porter candidat parce qu’ils savent par avance qu’ils ont peu de chance voire pas de chance du tout de passer la rampe.

Donc, ce mécanisme psychologique tend à nouveau à favoriser les grands partis parce qu’il dissuade les petits partis de se porter candidat.

Il en va de même du côté des électeurs. Les électeurs qui se rendent à un scrutin de type majoritaire comme aux élections fédérales en Suisse avec seulement deux sièges à disposition, s’il y a six listes et que la quatrième, cinquième et sixième liste sont des petits partis dont on sait par avance qu’ils ne vont jamais être parmi les deux premiers, alors les électeurs vont avoir tendance à renoncer à voter pour les petits partis sachant par avance que ceux-ci n’ont pas de chance d’être élu.

Cet effet psychologique va à nouveau favoriser les grands partis.

C’est la règle de base de la loi de Duverger qui a été largement commenté, critiqué et révise, on sait maintenant qu’il y a d’autres mécanismes qui jouent un rôle et ce n’est pas seulement le système électoral qui explique l’offre politique ou le résultat des élections, mais enfin, c’est une règle qui permet quand même de se faire une idée des effets généraux de ces deux grands types de scrutins.

Pour résumer, le système proportionnel conduit au multipartisme et le système majoritaire conduit à quelques grands partis voire même au bipartisme dans des cas bien spécifiques. Ce détour par le système électoral permet de montrer ce qui se passe en Suisse au niveau des élections fédérales, quel type de système électoral on a et comment il influence les élections.

Autres facteurs déterminants le degré de proportionnalité dans un système proportionnel

Nous avons beaucoup parlé du système proportionnel. En règle générale, un système proportionnel favorise le multipartisme, mais après, dans la grande catégorie des systèmes proportionnels, il y a toute une série de variations et de critères qui font que le système est plus ou moins proportionnel.

Donc, quels sont les autres facteurs qui déterminent le degré de proportionnalité dans un système traditionnel ?

Le premier facteur évident est le nombre de sièges à disposition comme, par exemple, dans le parlement. S’il y a un parlement avec seulement 20 sièges ou un parlement avec 200 sièges, cela va modifier le caractère proportionnel de l’élection.

Une autre question est de savoir s’il y a un quorum légal qui est prévu ? Cela veut dire que l’on fixe un seuil minimum en dessous duquel un parti n’aura pas de sièges comme, par exemple, le fait qu’il faut qu’un parti fasse au moins 5% des voies avoir des sièges, en dessous, il ne sera pas représenté. SI on fixe un tel quorum, cela défavorise les petits partis qui sont en dessous du seuil théorique.

On parle aussi d’un quorum naturel. Pour calculer, le quorum naturel, on utilise la formule suivante : . Le quorum naturel est lié au découpage des circonscriptions et au nombre de sièges à disposition par circonscription. Si on a un système proportionnel, mais que l’on applique dans une circoncision électorale où il y a peu de sièges, alors le système n’est pas tellement proportionnel parce que ce nombre limité de sièges à disposition va réduire le caractère proportionnel de l’élection. C’est ce qu’on appelle la magnitude du district qui veut dire que la taille du district est définie par le nombre de sièges à disposition.

S’il y a dans une circonscription seulement 5 sièges à pourvoir, dans une telle circonscription, il y aura un quorum naturel d’environ 16%. Cela veut dire qu’un parti qui ne ferrait pas au moins 16% ne pourra pas avoir de siège. Même si le système est proportionnel, le fait d’avoir un nombre de sièges limité à disposition crée un quorum naturel. En dessous de 16%, un parti n’a pratiquement aucune chance d’avoir un siège.

L’idée est qu’un système proportionnel dans lequel il y a un quorum légal et/ou des quorums naturels parce qu’un découpage en circonscription et une petite taille des circonscriptions, un tel système va se distancer d’un système proportionnel pour se rapprocher d’un système majoritaire.

La logique derrière est de favoriser les grands partis. Plus le quorum est élevé et plus on va s’approcher d’un système majoritaire. S’il y a une circonscription avec trois sièges à disposition, on a un quorum naturel de 25%, c’est-à-dire qu’un parti doit au moins faire 25% des voies pour avoir un siège. On s’approche d’une logique propre à un scrutin majoritaire.

Le système électoral en Suisse

En Suisse, il y a, s’agissant des élections au Conseil national un système proportionnel dans tous les cantons sauf dans les cantons qui n’ont qu’un siège pour le national. Pour le national on distribue le nombre de sièges par canton en fonction de la taille du canton, c’est-à-dire en fonction de la population. Les plus petits cantons suisses sont tellement petits qu’ils ont droit qu’à un seul siège au Conseil national. Dans ces cantons, par nécessité, par définition, c’est un système majoritaire qui s’applique. Si l’on n’a qu’un siège, le système est forcément majoritaire. On ne peut pas avoir un système proportionnel s’il n’y a qu’un siège à disposition.

Hormis cette exception des plus petits cantons qui n’ont qu’un seul siège, il y a un système proportionnel dans tous les autres cantons suisses. C’est une règle nationale, une loi fédérale sur les droits politiques qui s’applique à tous les cantons.

Donc, au Conseil national, il y a un système qui favorise le multipartisme en tout cas dans les plus grands cantons. Dans les plus grands cantons comme Zurich avec 35 sièges, même des cantons de taille moyenne comme Genève avec 11 sièges et Lucerne avec 10 sièges, dans ces cantons, même pour un petit parti, il est possible d’espérer avoir un siège et donc cela multiplie les listes et le nombre de partis qui seront représentés. Le système proportionnel favorise le multipartisme, en tout cas dans les cantons de taille moyenne et plus grande.

Dans ces petits cantons qui ont par contre un seul siège, dans lesquels le système majoritaire s’applique, dans ces cantons-là, il y a une logique majoritaire qui s’impose et elle favorise un, deux ou trois grands partis dans le canton. Cette logique majoritaire a pour effet de diminuer l’offre électorale, il y a moins de partis qui se portent candidats et il y en a un seul qui est élu puisqu’il n’y a qu’un seul siège. La compétition se résume à deux ou peut être trois partis dont un seul est élu. Cela favorise la concentration autour d’un nombre limité de partis.

Dans ce cas, il faut soit que les partis soient grands dans le contexte local et/ou capable de faire alliance pour faire une coalition et espérer ainsi renforcer le poids de la coalition électorale.

Au Conseil des États, la deuxième chambre, celle du canton, il y a une logique différente puisque là on a dans tous les cantons sauf deux, il y a un système majoritaire. Dans la plupart des cantons, on a un système majoritaire à deux tours. Cela veut dire qu’un candidat doit obtenir la majorité absolue au premier tour, seuls sont élus les candidats qui ont obtenu la majorité absolue au premier tour et si ce n’est pas le cas, il y a un deuxième tour et ce sont les deux premiers qui sont élus.

Dans un tel contexte, on retrouve cette logique majoritaire qui favorise les plus grands partis. Seuls les partis qui sont capables de se battre afin d’avoir l’un des deux sièges à disposition se portent candidat et sont le cas échéant effectivement élus.

La logique majoritaire est très forte dans les élections au Conseil des États et favorise les grands partis contrairement à la logique proportionnelle qui prévaut pour le Conseil National. Il y a donc deux logiques différentes en Suisse, à savoir une logique plus proportionnelle pour les nationales et une logique plus majoritaire pour les États.

L’exception en Suisse est illustrée par deux cantons qui ont choisi d’avoir un système proportionnel y compris pour le Conseil des États, ce sont le canton de Neuchâtel et le canton du Jura. Il faut noter qu’en la circonstance, le système n’est pas tellement proportionnel parce que de nouveau, il n’y a que deux sièges à disposition pour chaque canton et il y a donc un quorum naturel qui est très élevé de presque 33% des voies. Seuls les grands partis, même à Neuchâtel et en Jura ont la chance de passer la rampe.

Les conséquences du système électoral

Quelles sont les conséquences de ces deux types de scrutins, de ces deux chambres qui sont élues selon un système tellement différent dans une chambre et dans l’autre ?

Élections fédérales 2015: répartition (provisoire!) des sièges.

Les conséquences se voient visuellement. Si on admet que cette projection est fidèle à la réalité, au Conseil national, l’UDC domine très nettement, l’UDC a 29% des voies, mais 32% des sièges. Viennent après le parti socialiste, le PLR et le PDC. Ce qui frappe est le contraste entre la force en sièges de l’UDC au Conseil national et sa force en siège au Conseil des États. Là où l’UDC a 32% des sièges au national, il va avoir environ 15% de sièges au Conseil des États. C’est un contraste considérable de forces parlementaires pour un parti.

Il y a la situation inverse pour les deux partis de la droite modérée. Le PLR et le PDC font respectivement 17% et 13% de sièges au national, mais qui ont 26% et 28% des sièges du Conseil des États. Ces deux partis sont beaucoup plus forts en sièges au Conseil des États qu’ils ne le sont au Conseil national. Ces différences sont en bonne partie du au système électoral et au découpage en circonscriptions existant en Suisse.

Les conséquences sont qu’on a d’un côté une forte sous-représentation de l’UDC au Conseil des États. Pourquoi est-ce que l’UDC réussit si bien au Conseil national et si mal au Conseil des États ? Qu’est-ce qui explique que l’UDC ait une telle différence de succès dans une chambre et dans l’autre.

Le profil très marqué de l’UDC, sa radicalisation à droite est une arme à double tranchant comme expliqué dans l’article Les deux principales causes de la sous-représentation de l'UDC dans les gouvernements cantonaux : un profil trop marqué et des sections insuffisamment établies du professeur Pascal Sciarini[1].

D’un côté, ce profil très marqué est un avantage dans une élection à la proportionnelle. Dans une telle élection, un profil très marqué permet de fortement mobiliser l’électorat, cela permet aux partis de se distinguer des autres et donc de capter, de mobiliser fortement les personnes qui s’imaginent voter pour le parti. Le profil très marqué, la campagne très dure que mène souvent ce parti dans une élection proportionnelle lui permet de mobiliser ses voies. Tout ce qui compte est le pourcentage de voix que l’on obtient. Le pourcentage de voix que l’on obtient est proportionnellement traduit en sièges.

Par contre, dans une élection au système majoritaire où il faut être soit un très grand parti, soit être capable de faire des alliances et de « ratisser large », c’est-à-dire aller chercher des voies au-delà de son propre parti. Un parti comme l’UDC qui a un profil très marqué n’est pas capable de « ratisser large ». Il est difficilement capable de faire alliance puisqu’il a des positions tellement dures qu’il se fâche avec a peu près tout le monde est donc cela est difficile pour les autres partis de faire alliance avec l’UDC sachant que l’UDC n’arrête pas de les dénigrer. Donc, cela limite les possibilités d’alliance pour ce parti et une alliance est importante pour franchir la cape majoritaire, et en plus, les candidats de l’UDC souvent sont eux-mêmes très marqués comme le parti et donc ces candidats individuellement en sont pas tellement capables d’aller chercher des voies en dehors de leur propre parti limitant fortement leur chance de succès.

Les deux partis de la droite modérée à savoir le Parti libéral radical et le Parti démocrate chrétien sont dans une configuration exactement inverse à celle de l’UDC. Ces deux partis sont fortement surreprésentés au Conseil des États par rapport à leur force électorale réelle. Le PLR est environ 16% de l’électorat et le PDC est environ 14% de l’électoral. Ils sont beaucoup plus forts et surreprésentés au Conseil des États.

La raison est que ces deux partis, lors d’une élection majoritaire sont favorisés, ils ont un avantage parce qu’ils ont une position relativement centraliste qui leur permet de faire des alliances (1) entre eux ou avec d’autres partis de la droite modérée, cela permet à ces partis de présenter des candidats qui sont capables d’aller glaner des voies bien au-delà de leur propre camp électoral (2). Le PDC et le PDR sont largement capables de faire des alliances parce que leur profil modéré est un atout pour faire alliance avec le centre droit et même la droite un peu plus dure, et d’autre part, ces partis sont capables de présenter des candidats qui vont aller glaner des voies bien au-delà de leur propre parti. C’est la recette à succès pour une élection au système majoritaire.

Par contre, le prix que ces partis ont à payer est un moindre succès dans les élections au système proportionnel parce que dans ces élections, ces partis souffrent de leur manque de profil. Ce sont des partis de la droite modérée, dans un contexte très polarisé d’un gauche dur et d’une droite dure, c’est difficile pour un discours modéré d’être audible. Cela est difficile de mobiliser l’électorat donc ces deux partis sont dans une position qui est exactement inverse à celle de l’UDC. Ils souffrent aux élections à la proportionnelle, mais ils profitent pleinement des élections au système majoritaire.

Les partis politiques ont un succès très variable selon que l’on parle des élections du Conseil national ou du Conseil des États, mais cela a des implications concrètes dans l’activité législative du parlement. Les deux chambres en Suisse ont exactement les mêmes prérogatives, ce qui veut dire que les deux chambres doivent se mettre d’accord sur le même texte. Aucune loi ne peut passer en Suisse tant qu’elle n’est pas adoptée dans le même contenu par les deux chambres.

Avec une telle différence de composition des deux chambres avec l’UDC très forte au national et faible aux États, le PLR et le PDC assez faible au national, mais très fort aux États ; ces différences de compositions des chambres vont se traduire par des différences de préférences politiques dans les deux chambres par des différences de majorité politique dans les deux chambres. Donc, on peut s’attendre pour la prochaine législature a des tensions accrues entre les deux chambres parce que leur composition fait qu’elles vont donner naissance à des textes de loi qui ne sont pas les mêmes et donc il faudra se mettre d’accord. Il y a des mécanismes de va-et-vient entre les deux chambres, peut-être de conciliation pour peut-être arriver à une solution. On peut aussi imaginer que ces tensions entre les deux chambres débouchent sur des blocages, c’est-à-dire qu’on n’arrive pas à se mettre d’accord et on campe sur ses positions et donc on n’arrivera même plus à légiférer. Ce n’est pas un cas fréquent, mais c’est un cas qui pourrait bien se produire.

On voit ainsi comment les règles électorales qui débouchent sur des rapports partisans très variables en fonction des règles électorales en vigueur ont en suite des conséquences sur l’activité législative du parlement dans un contexte de bicamérisme intégral ou de bicamérisme parfait tel qu’on le connaît en Suisse.

Structure des clivages

On entend souvent parler de clivage comme, par exemple, le röstigraben qui est le clivage linguistique en Suisse entre la Suisse romande et la Suisse alémanique, on parle parfois de clivage ville – campagne. Qu’est-ce que cela est ?

Clivage politique : définition

D’un point de vue strict, Bartolini et Mair dans leur ouvrage Identity, Competition, and Electoral Availability publié en 1990 parlent de clivage politique si et seulement si trois conditions sont réunies. Un clivage politique présuppose la présence de trois composantes :

  1. Une composante structurelle empirique qui est une différence, une vision sociale ou une vision culturelle. En Suisse cela est très évident avec plusieurs langues, plusieurs religions, des classes sociales différentes. Donc les différences vont être identifiables empiriquement. Cela est assez évident de distinguer un alémanique d’un roman par exemple. On doit être capable d’observer empiriquement une différence sociale ou culturelle entre des groupes.
  2. La deuxième composante est culturelle-normative. Il faut que ces groupes distincts possèdent chacun des croyances, des valeurs, des préférences propres à leur groupe et différentes des valeurs, des croyances et de préférence des autres groupes. S’il y a d’autres groupes différents, mais qui ont les mêmes préférences, il n’y a pas de potentiel pour un clivage. Si les alémaniques et les romans avaient exactement les mêmes préférences, croyances et valeurs, il n’y aurait pas de clivage possible entre les régions linguistiques. Il faut que chacun de ces groupes possède des valeurs, des croyances et des préférences propres et que ces valeurs, ces croyances et ces préférences se distinguent de celles de l’autre ou des autres groupes. Même s’il y a ces deux conditions, il n’y a pas encore de clivage politique, il y a un clivage qui est potentiel, mais qui n’est pas manifeste.
  3. Pour rendre le clivage manifeste, il faut la troisième condition qui est une composante politico-organisationnelle. Il faut un parti politique ou une organisation qui article et mobilise le clivage. S’il n’y a pas d’organisation qui rend visible, qui articule politiquement le clivage, alors il ne se passe rien, il y a un clivage potentiel, mais personne ne le rend manifeste. Si on prend l’exemple du clivage linguistique en Suisse, selon cette définition, stricto sensu, le clivage linguistique n’existe pas parce qu’il n’y a pas d’organisation, de parti politique en Susse qui s’est créé explicitement pour défendre les intérêts de la Suisse romande contre la majorité alémanique ou pour défendre les intérêts de la majorité alémanique contre la Suisse romande. Il y a une seule exception qui est la Lega ticinesi. La Lega s’est créé au Tessin en autre pour défendre les intérêts de la minorité italophone vis-à-vis de la Berne fédérale. Sinon, il n’y a pas de clivage linguistique selon cette définition stricte. Après, il peut y avoir des votations populaires ou les différences et les préférences entre alémaniques et romans sont manifestent, mais il n’y a pas d’organisation qui articule ce clivage.

On distingue deux types de clivages politiques que sont les clivages traditionnels et les clivages plus récents. L’étude des clivages a été déjà faite depuis les années 1950 et en particulier par Lipset et Rokkan dans Party systems and voter alignments: Cross-national perspectives publié en 1967. Lipset et Rokkan ont montré l’évolution historique des quatre clivages traditionnels existant dans la plupart des pays européens dont la Suisse, à savoir le clivage religieux, le clivage centre – périphérie dit aussi linguistique en Suisse, le clivage de classe et le clivage ville – campagne.

Ces clivages sont liés soit au processus d’industrialisation comme c’est le cas avec le clivage de classe ou le clivage ville – campagne, soit ils ont liés historiquement à la création de l’État-Nation et donc aux tentatives homogénéisatrice du centre que serait le clivage centre – périphérie ou linguistique, éventuellement le clivage religieux.

Ce sont les clivages traditionnels qui sont plus ou moins importants dans les pays. Généralement, on considéré que leur importance à diminuer au cours du temps. Par exemple, le clivage religieux était très fort en Suisse au XIXème siècle et c’est même le clivage qui a donné naissance à la Suisse moderne. La guerre du Sonderbund était en grande partie une guerre sur une base religieuse et ce clivage a en suite beaucoup perdu de son importance au cours du XIXème et XXème siècle. Le clivage de classe a été un peu reformulé, mais globalement, ces clivages traditionnels ont eu tendance à perdre de l’importance au fil du temps.

Ces clivages classiques ont perdu de l’importance au fil du temps ce qui a permis à de nouveaux clivages d’émerger. On parle de pacification des clivages traditionnels. Cette pacification a créé l’espace pour l’affirmation et l’émergence de nouveaux clivages dont le clivage matérialiste – postmatérialiste.

Le clivage matérialiste – postmatérialiste est un clivage qui a été identifié dans les années 1980 et 1990. Il serait dû au renouvellement générationnel et en particulier aux expériences spécifiques que les générations nées après-guerre ont connu par opposition aux générations nées avant la Seconde guerre mondiale. Ces générations nées après-guerre auraient connu un environnement d’abord sans guerre et pacifiste, et surtout un environnement dans lequel l’éducation au fortement augmenté, la société s’est émancipée et cela a favorisé l’émergence de valeurs postmatérialistes. Cela signifie des valeurs plus d’épanouissement personnel et aussi des valeurs plus favorables à la protection de l’environnement contre la croissance économique. Le conflit environnemental est souvent rattaché à l’émergence du clivage matérialiste – postmatérialiste.

L’autre nouveau clivage est le clivage ouverture – tradition, on dit parfois intégration – démarcation ou modernisation – tradition. Ce clivage de valeurs est un clivage de plus en plus important dans la politique suisse qui a commencé à s’affirmer dans les années 1980 et 1990 et il s’est renforcé encore au cours des années 2000 et 2010 qui est l’opposition entre les milieux favorables à l’ouverture internationale, à la solidarité et à la modernisation de la société contre les milieux favorable à la défense des traditions, à l’indépendance traditionnelle de la Suisse et par exemple au refus à l’ouverture de l’Union européenne. Cela est la dimension normative de ce nouveau clivage ouverture – tradition.

On considère que ce clivage a des racines sociostructurelles. C’est ce qu’on considère aussi comme étant le clivage perdant – gagnant qui est le même que le clivage ouverture – tradition sauf que le clivage ouverture – tradition se situe au niveau des valeurs tandis que le clivage gagnant – perdant est sa traduction du point de vue sociologique des caractéristiques individuelles des personnes qui portent ces valeurs d’ouverture d’un côté ou des valeurs de tradition et de repli sur soi de l’autre.

Synthèse de l'introduction à la politique suisse

D’abord, nous avons vu que le contexte institutionnel des politiques de la Suisse influence fortement les élections fédérales. Les élections fédérales sont très marquées par les caractéristiques du système institutionnel suisse notamment le rôle du système de gouvernement, de la démocratie directe, du fédéralisme et du système électoral et en plus la conjonction entre le système électoral et le fédéralisme.

Cela influence fortement le contexte des élections, pas seulement pour les partis politiques, mais aussi pour les électeurs et électrices. Cela influence déjà en amont l’offre de parti et la manière dont ils vont changer ces partis.

On pourrait se demander pourquoi parler des élections fédérales alors que nous avons cessé de dire que les élections fédérales en Suisse étaient peu importantes. Il y a une vue classique selon laquelle les élections parlementaires en Suisse ne sont pas très importantes ou en tout cas, elles sont beaucoup moins importantes qu’ailleurs. Cette vue classique continue d’être en tout cas en partie valable. Les élections parlementaires ont peu d’importance en Suisse parce qu’elles ont peu d’influence sur la composition du gouvernement, elles sont concurrencées par la démocratie directe et en raison de la fragmentation du système de parti et du fédéralisme, les changements de rapport de force entre les partis de grande ampleur sont peu probables en Suisse. La fragmentation du système de parti, ce découpage fédéraliste, limite les possibilités qu’un parti, tout d’un coup, grandisse partout très fortement.

Il y a une vue révisée de cette vue classique. Certes, les changements de grande ampleur sont peu probables en Suisse d’une élection à l’autre. Le 18 octobre 2015, on a parlé de « raz de marré UDC » pour 3% de gain au niveau national. Cela n’est pas énorme, mais il n’empêche que ces 3% viennent s’ajouter à tous les gains qui ont été faits avant et donc même si d’une élection à l’autre il n’y a pas de changement de grande ampleur, il peut y avoir sur deux ou trois élections des changements de grande ampleur. L’UDC a multiplié par plus de 2,5 sa force électorale en l’espace de vingt ans. Des changements de grande ampleur sont possibles en Suisse. Cela augmente l’importance des élections.

Lié à la montée en puissance de l’UDC, il y a eu une augmentation de la polarisation de la politique suisse, à savoir une polarisation de plus en plus grande entre l’UDC et la gauche donc, un éloignement idéologique de plus en plus marqué entre les pôles. De ce fait, la politique suisse, pas seulement les élections, mais aussi au jour le jour au parlement lorsque le parlement élabore des lois, la politique suisse est devenue plus conflictuelle et est devenue plus concurrentielle, il y a beaucoup plus de compétition entre les partis qu’avant. Cela est beaucoup plus vif à la fois en campagne électorale, mais aussi dans l’activité législative du parlement. Donc la politique est devenue beaucoup plus conflictuelle, beaucoup plus concurrentielle, cela augmente l’intérêt et l’importance des élections parlementaires.

Des chercheurs ont montré que le système de parti en Suisse est désormais l’un des plus polarisés d’Europe. Cela est quand même frappant que dans le pays du consensus, on a en réalité un niveau de polarisation qui est l’un des plus élevés d’Europe et il a fortement augmenté au cours des vingt dernières années.

D’autre part, il est vrai que les élections parlementaires n’ont pas beaucoup d’impact sur la composition du gouvernement en Suisse, mais on sait désormais que les élections parlementaires ont une influence au moins sur le septième siège et peut être sur le sixième à l’avenir. Il y a au moins un siège qui est en jeu à chaque élection, ce n’est pas tout le gouvernement, mais cela augmente tout de même l’importance des élections parlementaires.

Enfin, là où le fédéralisme réduisait l’importance des élections nationale parce que le fédéralisme avait pour conséquence d’augmenter le poids des enjeux locaux, des considérations locales, des campagnes cantonales dans les élections nationales, il y a eu une nationalisation du système de parti, une nationalisation des élections et donc les élections parlementaires nationales sont aujourd’hui beaucoup plus nationales qu’elles l’étaient il y a vingt ans et cela a aussi augmenté l’importance des élections nationales. Elles sont moins marquées qu’auparavant par les spécificités cantonales, elles sont plus nationales qu’avant.

Tout ceci contribue à augmenter l’intérêt et l’importance des élections parlementaires en Suisse.

Comment cela se traduit dans la politique suisse ?

Valeurs politiques: position moyenne de l’électorat des partis. Source: Données Selects (Pascal Sciarini).

Ce graphique nous présente la position moyenne de l’électorat des différents partis dans un espace à deux dimensions. Les données sur lesquelles nous nous appuyons sont des données d’enquêtes d’opinion, de sondages réalisés après les élections fédérales.

Depuis 1995, l’Université de Genève avec d’autres universités suisses contribue à l’enquête SELECT (Swiss election studies), enquête conduite chaque quatre an et aussi accompagné d’une enquête d’opinion postélectorale auprès de jusqu’à 4000 personnes au niveau suisse.

Dans cette enquête est demandée notamment aux personnes qui répondent formant l’échantillon d’indiquer leurs préférences sur des axes de 1 à 6 et on leur demande de dire quelle vision de la Suisse défendent-ils.

Les questions utilisées afin de produire ces deux dimensions, est, pour l’axe horizontal, des questions redistributives classiques que l’on pourrait appeler le clivage gauche – droite économique. Pour l’axe horizontal, la question est de savoir si on est pour une Suisse dans laquelle on augmente les dépenses sociales ou pour une Suisse dans laquelle on réduit les dépenses sociales de la confédération. La deuxième question est de savoir si on est pour une Suisse dans laquelle on augmente l’impôt sur les hauts revenus ou est-on pour une Suisse dans laquelle on diminue l’impôt sur les hauts revenus. Chaque fois, ce sont des préférences de gauche ou de droit et après on calcule la position moyenne des électeurs qui stipule pour quel parti ils ont voté sur cet axe.

Idem pour l’axe vertical. Il y a deux questions qui sont derrière la représentation qui est d’abord une question sur les étrangers, à savoir si on est favorable à une Suisse qui donne les mêmes chances aux étrangers et aux suisses ou, est-ce qu’on est favorable à un Suisse qui favorise les suisses sur une échelle de 1 à 6. La deuxième question est de savoir si on est favorable à une Suisse qui adhère à l’Union européenne ou à une Suisse qui fait cavalier seul.

L’axe horizontal est un axe « pour » ou « contre » l’État ou « pour » ou « contre » le marché. C’est une simplification, mais on procède de cette manière généralement. L’axe vertical est cette l’axe de fermeture ou de tradition et d’ouverture.

Apparaît la position moyenne des différents électorats de partis en 1995 et en 2011. On voit qu’il y a un électorat de gauche en haut à gauche avec le Parti socialiste et les Verts, un électorat UDC en bas à droite et au milieu l’électorat de la droite modérée.

Si on trace une droite médiane qui est la droite de régression au milieu des points, apparaît l’axe gauche – droite. La dimension gauche – droite en Suisse est un peu la synthèse de ces deux dimensions avec l’axe gauche – droite économique et le nouvel axe de valeur tradition – ouverture, intégration – démarcation. Les partis ne sont pas alignés parfaitement sur la ligne, mais c’est assez frappant de voir qu’on peut résumer l’information.

Il faut aussi souligner que l’électorat UDC se distingue à peine des autres électorats sur la dimension électorale. Sur cette dimension horizontale, l’électorat UDC est en fait presque moins à droite, moins libéral économiquement que l’électorat PLR. Ce qui fait la spécificité de l’électorat UDC et ce qui fait la spécificité du parti UDC est clairement la position sur la deuxième dimension de la politique. C’est cette dimension qui explique le profil très marqué de l’UDC, c’est-à-dire les questions qui ont trait à l’intégration européenne, la politique d’asile, la politique d’immigration ou encore la souveraineté de la Suisse. D’autres études faites par ailleurs montrent clairement que c’est le profil très marqué de l’UDC sur cette dimension d’ouverture qui est à la base de son succès électoral, c’est cela qui est clef dans l’explication du succès de l’UDC et non pas sa position en matière d’enjeu économique.

On voit également que dans tous les partis presque sans exception, on a eu entre 1995 et 2011 une diminution des préférences d’ouverture. L’électorat de presque tous les partis s’est déplacé vers le bas et c’est entre autres et en bonne partie dû au recul du soutien à l’intégration européenne. La question de savoir si on est favorable à l’adhésion dans l’Union européenne, en 1995 entre 35% et 45% des personnes répondaient « oui », à peine 10% ou 20% aujourd’hui.

Le point est de montrer l’importance très grande désormais dans la politique suisse de cette nouvelle dimension de position sur un axe ouverture – tradition. Ce conflit satisfait les trois conditions présentées précédemment, à savoir une composante structurelle empirique, une composante normative culturelle et une composante politique organisationnelle qui définit un clivage.

Dans ce graphique, nous avons vu l’image globale de synthèse au niveau suisse. Mais si on descend au niveau des cantons, on va avoir des configurations très différentes. Les cantons suisses sont très variables des uns des autres et très différents des uns des autres en termes de structure de clivage et donc de système de parti. Dans les cantons catholiques, on a des clivages spécifiques qui ne sont pas les mêmes que dans les cantons non-catholiques. Dans les cantons qui sont très urbains comme Genève, il n’y a pas les mêmes clivages que dans les cantons qui sont plus ruraux. Donc, cela produit des systèmes de parti très différent d’un canton à l’autre et c’est ce qui, en retour, contribue aux fortes variations des systèmes de parti existant en Suisse au niveau cantonal et donc contribue à la fragmentation du système de parti au niveau national.

Si on avait des cantons qui étaient tous identiques les uns avec les autres, si tous les cantons étaient des reproductions miniatures de la Suisse, on aurait les mêmes clivages dans tous les cantons et les mêmes clivages au niveau suisse. Ce n’est pas le cas. C’est parce qu’il y a cette grande variété de clivages d’un canton à l’autre qu’on se retrouve après avec un système de parti très fragmenté au niveau fédéral parce que toutes ces spécificités cantonales influencent, marquent de leur empreinte le système de parti au niveau national.

Annexes

  • Bartolini, Stefano & Mair, Peter (1990). Identity, Competition, and Electoral Availability. Cambridge: Cambridge University Press.
  • Bornschier, Simon (2007). Cleavage Politics and the Populist Right. The New Cultural Conflict in Western Europe. Philadelphia: Temple University Press.
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Références

  1. Sciarini, P. (2015) Les deux principales causes de la sous-représentation de l'UDC dans les gouvernements cantonaux: un profil trop marqué et des sections insuffisamment établies url: http://www.bochsler.eu/media/sciarini_bochsler_udc05.pdf