L’action dans la théorie politique

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Dans la sphère de la théorie politique, l'importance de comprendre l'action, c'est-à-dire les façons dont les individus ou les groupes s'engagent dans le contexte politique, est devenue de plus en plus cruciale. Le terme 'action' est en constante évolution, devenant de plus en plus complexe à mesure que notre compréhension du comportement humain s'approfondit et que le contexte politique mondial se transforme. Cela nous conduit à repenser continuellement et à réévaluer les théories de l'action, avec pour objectif ultime de fournir un cadre plus nuancé et sophistiqué pour interpréter les acteurs politiques.

Au fur et à mesure que le monde devient de plus en plus interconnecté, l'action dans le contexte politique s'est également complexifiée. Aujourd'hui, les acteurs politiques ne sont plus simplement des individus ou des groupes d'individus ; ils peuvent être des organisations, des institutions, voire des nations. Ils sont également influencés par un éventail toujours plus large de facteurs, allant des dynamiques économiques aux pressions sociales, en passant par les défis environnementaux et technologiques. En réponse à la complexification de l'action, les théories de l'action ont dû évoluer. Nous avons vu des approches traditionnelles, comme la théorie du choix rationnel, être complétées et parfois défiées par de nouvelles perspectives, telles que les approches structuralistes, constructivistes et relationnelles. Chacune de ces théories offre une lentille unique à travers laquelle comprendre l'action, et toutes ont contribué à élargir notre compréhension du comportement des acteurs politiques. L'évolution des théories de l'action a ouvert la voie à de nouvelles manières d'interpréter les acteurs politiques. Au lieu de considérer les acteurs politiques simplement comme des entités autonomes cherchant à maximiser leur propre intérêt, nous pouvons maintenant les comprendre comme des entités complexes, enracinées dans un réseau de relations sociales, façonnées par les structures sociales et politiques et agissant en fonction de normes et d'idées sociétalement construites.

Ainsi, en revisitant et en réévaluant continuellement les théories de l'action, nous pouvons espérer mieux comprendre la complexité de l'action dans le contexte politique contemporain. De plus, cette démarche nous permet d'interpréter les acteurs politiques à travers une lentille plus raffinée, nous donnant les outils nécessaires pour naviguer dans le paysage politique complexe d'aujourd'hui.

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Qu'est ce que l'action en théorie politique ?

L'action, dans son essence, est intrinsèquement liée à l'environnement dans lequel elle se déroule. C'est cet environnement qui fournit le contexte, le cadre et les ressources nécessaires pour l'action. L'environnement, qu'il soit social, politique, économique, technologique ou naturel, offre à la fois des opportunités et des contraintes qui façonnent les possibilités d'action. Par exemple, l'environnement politique d'un pays peut influencer les actions des individus et des groupes en déterminant les lois, les réglementations, et les normes qui régissent le comportement. De même, l'environnement social, incluant la culture, les normes sociales, les relations et les réseaux, peut également influencer l'action en façonnant les attentes, les obligations, et les opportunités.

Lorsque l'environnement change, que ce soit par des événements politiques, des changements sociaux, des avancées technologiques, des crises environnementales ou des transformations économiques, les conditions d'action évoluent également. Un changement dans l'environnement peut rendre certaines actions plus difficiles, en introduisant de nouvelles contraintes, ou peut ouvrir de nouvelles possibilités d'action, en offrant de nouvelles opportunités. Cela signifie que pour comprendre l'action, il est crucial de comprendre l'environnement dans lequel elle se déroule. Il est également important de reconnaître que l'action elle-même peut influencer l'environnement, créant un cycle d'interaction complexe entre action et environnement. Les actions des individus et des groupes peuvent transformer leur environnement, créant ainsi de nouvelles conditions pour l'action future.

Le concept d'action est fondamental dans la philosophie politique et a été profondément étudié par les philosophes classiques grecs comme Aristote et Platon. Pour ces penseurs, la question de l'action était intrinsèquement liée à la compréhension de l'homme en tant qu'animal politique et à la nature du bien et du mal, de l'éthique et de la justice.

Platon a défini l'action en termes éthiques et politiques dans sa vision de la république idéale. Dans "La République", il fait valoir que l'action juste est celle qui contribue à l'harmonie de la cité, où chaque individu joue son rôle approprié en fonction de ses compétences naturelles. Pour Platon, l'action est intrinsèquement liée à la vertu et à la réalisation du bien commun. Aristote, quant à lui, a élargi la compréhension de l'action dans sa notion de "praxis". Pour Aristote, la praxis (action) est une activité humaine consciente et volontaire, dirigée par la raison, qui vise le bien et la réalisation de l'eudaimonia (une vie bonne et accomplie). L'action, pour Aristote, est distincte de la "poiesis" (production), qui est l'activité de créer quelque chose en vue d'une fin extérieure à elle-même. La praxis, en revanche, est une fin en soi. Dans son ouvrage "Éthique à Nicomaque", Aristote a exploré en profondeur la manière dont l'action éthique, guidée par la vertu, contribue à la réalisation du bien individuel et commun.

Le travail de ces philosophes a jeté les bases de nombreuses théories politiques et éthiques ultérieures sur l'action. Leurs réflexions continuent d'influencer notre compréhension de l'action et du rôle de l'individu dans la société, et sont encore pertinentes pour comprendre l'action dans le contexte politique contemporain.

La notion d'action est centrale en science politique. Elle est considérée comme l'expression de l'engagement de l'homme dans son environnement, un environnement qui peut être à la fois social et naturel.

  • L'action comme mouvement naturel: Selon cette perspective, l'action peut être vue comme une extension du mouvement naturel, où les êtres humains sont constamment en interaction avec leur environnement. L'action n'est pas seulement une réponse aux stimuli externes, mais aussi une affirmation de soi, une manière pour l'homme de s'affirmer dans le monde. L'action est ainsi une expression de la volonté humaine, une manifestation de notre capacité à influencer notre environnement plutôt qu'à être simplement influencé par lui.
  • L'action comme nécessité: L'homme, en tant qu'être social et politique, a besoin d'agir. L'action est souvent une réponse à une situation perçue comme insatisfaisante, ou à un désir de changer les conditions existantes. Dans ce sens, l'action est souvent motivée par une certaine forme de nécessité - que ce soit la nécessité de survie, de justice, d'égalité, de liberté ou d'accomplissement personnel.
  • L'action comme une entreprise attentive: L'action politique n'est pas une activité impulsive ou sans réflexion. Elle nécessite de l'attention, de la préparation et de la réflexion. L'attention est nécessaire pour comprendre l'environnement, pour évaluer les conséquences potentielles de différentes actions et pour faire des choix éclairés. Dans le contexte politique, l'action attentive est souvent nécessaire pour naviguer dans des environnements complexes et incertains, pour gérer les relations de pouvoir et pour promouvoir le bien commun.

Ainsi, la notion d'action en science politique renvoie à une image de l'homme comme un être engagé, attentif et nécessiteux, qui est constamment en mouvement et en interaction avec son environnement. Cette compréhension de l'action souligne l'importance de l'agence humaine dans le façonnement de nos sociétés et de notre monde.

L'idée d'action, ancrée dans le mouvement, est un concept central pour la philosophie et la théorie politique. Elle repose sur la notion que l'action n'est pas une activité stérile, mais un processus dynamique qui implique un changement ou un mouvement vers un certain objectif ou une certaine fin. Dans la philosophie, l'action est souvent discutée en termes de finalité ou de téléologie - l'idée qu'il y a un but ou une fin vers laquelle l'action est dirigée. Cette conception est largement influencée par les philosophes classiques comme Aristote, qui a affirmé que toute action vise une certaine fin, et que la fin ultime de l'action humaine est le bonheur ou l'eudaimonia. Dans la théorie politique, l'idée de l'action comme mouvement vers un certain objectif est également cruciale. En particulier, dans le contexte de la démocratie, l'action est souvent vue comme orientée vers le bien public ou le bien commun. Les citoyens agissent - que ce soit par le vote, la participation à la vie civique, ou l'engagement envers des causes sociales et politiques - dans le but d'influencer la politique et la société de manière à favoriser le bien-être de tous. En outre, dans une démocratie, l'idée d'action est liée à la notion de responsabilité civique. Agir pour le bien commun est considéré comme une obligation pour les citoyens. Cela peut prendre diverses formes, allant de l'observation des lois à la participation à la prise de décision politique, en passant par l'engagement en faveur de l'égalité, de la justice et de la durabilité. Cela dit, l'idée d'action dans la philosophie et la théorie politique est complexe et multifacette. Elle implique à la fois une dimension individuelle (l'individu agissant selon ses propres motivations et objectifs) et une dimension collective (les individus agissant ensemble pour le bien de la société).

La notion d'action dans la philosophie classique et la philosophie chrétienne est intimement liée à la réflexion, à l'intelligence, et à la conception de Dieu. Dans ces traditions philosophiques et théologiques, Dieu est souvent vu comme l'agent premier, celui qui met tout en mouvement. Dans la philosophie classique, Aristote, par exemple, a parlé de Dieu comme du "Premier moteur immobile", une cause première qui, bien qu'immobile elle-même, est à l'origine de tout mouvement et de toute action dans l'univers. Pour Aristote, le mouvement est une caractéristique fondamentale de la réalité, et toute action vise à une certaine fin ou à un certain bien, ce qui reflète l'ordre naturel instauré par le Premier moteur. Dans la philosophie chrétienne, la notion d'action est également étroitement liée à la compréhension de Dieu. Dieu est souvent décrit comme étant en action constante, à travers sa création, sa providence, et son plan de salut pour l'humanité. Dans cette tradition, l'homme est appelé à participer à l'action de Dieu en se conformant à sa volonté et en agissant pour le bien. L'action humaine est ainsi considérée comme une réponse à l'action divine et comme une participation à l'œuvre de Dieu dans le monde. Cette conception de l'action comme mouvement et participation à l'action divine a des implications profondes pour la manière dont nous comprenons la responsabilité humaine, l'éthique, et le rôle de l'homme dans le monde. Elle souligne l'importance de l'action consciente, réfléchie, et orientée vers le bien, et elle met l'accent sur la dimension spirituelle et morale de l'action. En outre, elle nous invite à voir l'action non seulement comme une activité humaine, mais aussi comme une participation à une réalité plus grande et plus profonde.

Le philosophe Immanuel Kant a profondément exploré la relation entre l'action et la morale. Pour Kant, la moralité ne se mesure pas à l'effet d'une action, mais plutôt à l'intention qui la motive. Dans sa théorie du devoir ou "deontologie", Kant a postulé que l'action morale est celle qui est accomplie par devoir, par respect pour la loi morale universelle. Cette loi morale universelle est formulée par Kant dans ce qu'il a appelé l'impératif catégorique, qui est une loi morale inconditionnelle qui s'applique à tous les êtres rationnels. L'impératif catégorique est formulé de plusieurs façons, mais l'une des plus célèbres est: "Agis uniquement selon la maxime qui fait que tu peux vouloir en même temps qu'elle devienne une loi universelle." Cela signifie que pour qu'une action soit morale, elle doit pouvoir être universalisée - c'est-à-dire que nous devrions être prêts à accepter que tout le monde agisse de la même manière dans des circonstances similaires. Si une action ne répond pas à ce critère, elle est considérée comme immorale. En ce qui concerne le bien commun, Kant a reconnu que certaines actions pourraient aller à l'encontre du bien commun ou de l'intérêt collectif. Cependant, pour lui, la moralité n'est pas déterminée par les conséquences de l'action (comme c'est le cas dans la théorie conséquentialiste de l'éthique), mais plutôt par l'adéquation de l'action à l'impératif catégorique. Par conséquent, même si une action peut sembler bénéfique pour le bien commun, elle serait immorale si elle violait l'impératif catégorique. Dans cette perspective, l'action dans le domaine politique, y compris les politiques publiques, doit aussi adhérer aux principes de l'éthique kantienne. Par exemple, une politique publique qui viole les droits fondamentaux des individus serait considérée comme immorale, même si elle semble servir l'intérêt collectif, car elle violerait l'impératif catégorique de Kant qui exige le respect de la dignité et de l'autonomie de chaque individu.

La science politique, en tant que discipline académique distincte, s'est développée à partir des sciences morales et politiques au XIXe siècle. Cette discipline se préoccupe principalement de l'étude du pouvoir, des structures politiques, et du comportement politique, mais ses racines dans les sciences morales et politiques signifient qu'elle s'intéresse aussi à des questions éthiques et morales. L'action politique, en particulier, est un domaine où les questions de morale sont particulièrement pertinentes. Les actions politiques peuvent avoir des conséquences significatives pour les individus et la société dans son ensemble, ce qui soulève des questions sur ce qui est juste ou injuste, équitable ou inéquitable, éthique ou non éthique. En outre, comme nous l'avons mentionné précédemment, l'action politique est souvent motivée par des convictions morales ou éthiques et vise des objectifs qui sont considérés comme moralement importants, comme la justice, l'égalité, la liberté, ou le bien commun. Cela dit, il est important de noter que, bien que la science politique soit préoccupée par des questions de morale, elle est avant tout une discipline empirique. C'est-à-dire qu'elle vise à étudier les phénomènes politiques tels qu'ils sont, plutôt qu'à prescrire comment ils devraient être. En ce sens, la science politique peut nous aider à comprendre la nature de l'action politique et à analyser ses causes et ses conséquences, mais elle laisse souvent à d'autres disciplines, comme la philosophie politique ou l'éthique, le soin de déterminer ce qui est moralement correct ou incorrect dans l'action politique.

Plusieurs problèmes apparaissent soulignant la complexité de l'action en science politique :

  • Action et décision : Effectivement, l'action est souvent liée à la décision. Dans beaucoup de situations, avant d'agir, une personne ou une entité politique doit d'abord prendre une décision. C'est dans ce processus de décision que les acteurs évaluent différentes options, considèrent les conséquences potentielles, et finalement choisissent une voie d'action. Par conséquent, comprendre l'action en politique nécessite souvent de comprendre les processus de prise de décision.
  • Action comme support du monde : Dans la théorie politique classique, l'action (et la décision qui la précède) est souvent considérée comme un moyen de donner forme au monde, de le structurer et de le soutenir. En prenant des décisions et en agissant, les acteurs politiques contribuent à la création et à la préservation de l'ordre social et politique.
  • Action et compétence : L'efficacité d'une action dépend souvent de la compétence de l'acteur. Dans le contexte politique, prendre la "bonne" décision ou faire la "bonne" action nécessite une compréhension précise des problèmes à résoudre, des forces en jeu, et des conséquences potentielles des différentes options. L'évaluation de l'action et de la décision dans cette perspective pose des questions sur la compétence et la responsabilité des acteurs politiques.
  • Action pour la préservation sociale : Enfin, l'action peut être vue comme un moyen de préserver la société. Cela peut se faire de différentes manières, par exemple en maintenant l'ordre social, en promouvant la justice et l'égalité, ou en défendant les intérêts de la communauté. Dans cette perspective, l'action est non seulement un moyen d'accomplir des objectifs individuels, mais aussi un outil pour le bien-être collectif et la stabilité sociale.

L'action en science politique est un concept complexe qui implique la décision, la compétence, le soutien du monde et la préservation sociale. Ces dimensions soulignent l'importance de l'action pour la compréhension de la politique et des sociétés.

La décision est un élément fondamental de l'action. Elle sert de prélude à l'action, car c'est par le processus de prise de décision que l'acteur détermine quelle action entreprendre. Agir sans décision serait agir sans réflexion ni connaissance, ce qui est généralement inadéquat dans des contextes complexes comme la politique.

Les dimensions de la décision peuvent inclure :

  • L'évaluation des options : Avant de prendre une décision, l'acteur doit identifier et évaluer les différentes options d'action possibles. Cela peut impliquer de considérer les avantages et les inconvénients de chaque option, de prévoir les conséquences potentielles, et d'évaluer la faisabilité de chaque option.
  • La considération des valeurs et des objectifs : La décision est également influencée par les valeurs, les objectifs et les préférences de l'acteur. Par exemple, un acteur politique peut décider d'agir d'une certaine manière parce qu'il estime que c'est ce qui est le plus conforme à ses valeurs ou à ses objectifs politiques.
  • Le jugement sous incertitude : La prise de décision implique souvent de faire des jugements sous incertitude. En politique, il est rare que toutes les informations nécessaires soient disponibles, et l'acteur doit souvent prendre des décisions sur la base d'informations incomplètes ou incertaines.
  • Le contexte social et institutionnel : La prise de décision est également influencée par le contexte social et institutionnel dans lequel elle se déroule. Par exemple, les normes sociales, les contraintes institutionnelles, et les attentes des autres acteurs peuvent tous influencer la manière dont les décisions sont prises.

La décision est un aspect crucial de l'action politique. Elle permet à l'acteur de définir et de planifier son action, et elle implique un processus complexe d'évaluation des options, de prise en compte des valeurs et des objectifs, de jugement sous incertitude, et de navigation dans le contexte social et institutionnel.

Le couple action/décision est fondamental en science politique, ainsi que dans de nombreux autres domaines. Cette paire conceptualise l'idée que la décision précède et informe l'action : nous prenons une décision, puis nous agissons en conséquence. Par ce processus, nous tentons de limiter l'aléatoire et d'introduire une forme de rationalité dans nos actions.

  • Réduction de l'aléatoire : Lorsque nous prenons des décisions, nous essayons souvent de prendre en compte toutes les informations disponibles, d'évaluer les différentes options et de choisir celle qui semble être la meilleure. Cela permet de limiter l'aléatoire et d'augmenter les chances que nos actions produisent les résultats souhaités. Il convient toutefois de noter que toutes les décisions comportent une part d'incertitude et de risque.
  • Rationalité : En théorie, la prise de décision est un processus rationnel. Nous pesons les pour et les contre de chaque option, nous prévoyons les conséquences potentielles, et nous choisissons l'option qui nous semble la meilleure. Cependant, en pratique, la prise de décision est souvent influencée par des facteurs non rationnels, tels que les émotions, les biais cognitifs, et les pressions sociales.
  • Relation présent-pasé : L'action et la décision sont en effet inscrites dans une relation temporelle. Nos décisions actuelles et nos actions sont informées par notre passé - par nos expériences, nos connaissances, et les leçons que nous avons tirées. En même temps, nos décisions et nos actions dans le présent déterminent notre futur. Par exemple, une décision politique prise aujourd'hui peut avoir des conséquences à long terme pour une société.

Le couple action/décision est une caractéristique fondamentale de l'activité humaine. Il est particulièrement pertinent dans le contexte politique, où les décisions et les actions peuvent avoir des conséquences importantes pour les individus et la société dans son ensemble.

La manière dont nous théorisons et conceptualisons l'action est en effet étroitement liée aux conditions et au contexte dans lesquels l'action se déroule. Et puisque ces conditions sont en constante évolution, notre compréhension de l'action doit aussi évoluer.

  • Conditions changeantes : Les conditions politiques, économiques, sociales, technologiques, environnementales et autres peuvent toutes influencer la manière dont l'action est menée. Par exemple, l'émergence de nouvelles technologies peut créer de nouvelles possibilités d'action, mais aussi de nouveaux défis et dilemmes. De même, les changements dans le climat politique ou social peuvent affecter les motivations, les opportunités et les contraintes auxquelles sont confrontés les acteurs.
  • Évolution de la théorie de l'action : À mesure que les conditions changent, il devient nécessaire d'adapter et d'affiner notre compréhension de l'action. Cela peut impliquer de développer de nouvelles théories ou de modifier les théories existantes pour tenir compte des nouvelles réalités. Par exemple, la montée des médias sociaux a conduit à de nouvelles théories sur l'action collective et le mouvement social.
  • Interdépendance de la théorie et de la pratique : La théorie et la pratique de l'action sont étroitement liées. Les théories de l'action aident à informer et à guider l'action, tandis que l'observation de l'action réelle peut aider à tester, à affiner et à développer les théories. C'est un processus d'interaction continue, où la théorie et la pratique s'informent et se façonnent mutuellement.

La théorie de l'action est un domaine dynamique et évolutif, qui doit constamment s'adapter pour rester pertinent face aux conditions changeantes dans lesquelles l'action se déroule.

Il y a quatre rôles ou objectifs principaux que la prise de décision peut remplir dans un contexte donné, en l'occurrence dans le cadre de la théorie politique. Ces fonctions sont des aspects clés de ce que fait la décision dans ce contexte, c'est-à-dire les rôles qu'elle joue ou les objectifs qu'elle sert. En voici une explication plus détaillée :

  1. Permettre à l'acteur d'agir : En prenant une décision, un acteur (individu, groupe ou institution) définit un chemin à suivre, une action à entreprendre. La décision est donc le préalable nécessaire à toute action.
  2. Permettre au citoyen de supporter le monde : La capacité de prendre des décisions donne aux citoyens un certain contrôle sur leur environnement. Cela peut contribuer à leur donner un sentiment de maîtrise et d'engagement actif dans le monde.
  3. Fragmenter les actes en compétences respectives : Le processus de prise de décision peut aider à diviser les tâches complexes en compétences ou rôles plus simples et plus gérables. Cela peut faciliter la collaboration, la délégation et l'efficacité dans le cadre d'actions collectives.
  4. Assurer la préservation sociale : Les décisions prises par les acteurs politiques peuvent contribuer à la préservation de la société en maintenant l'ordre social, en favorisant la justice et l'égalité, ou en défendant les intérêts de la communauté.

Ainsi, la décision n'est pas seulement un processus individuel de choix entre différentes options. C'est aussi un processus social qui a des implications pour l'organisation et la préservation de la société dans son ensemble.

L'action est un thème central de la philosophie politique et nombreux sont les philosophes qui ont élaboré différentes théories à son sujet. Aristote a introduit une théorie de l'action centrée sur le concept de "telos" ou objectif ultime. Dans son œuvre "Éthique à Nicomaque", il soutient que toute action humaine vise un certain bien et que le but ultime de toute action est le "eudaimonia", souvent traduit par "bonheur" ou "bien-être". Au XVIIème siècle, le philosophe anglais Thomas Hobbes a proposé une vision différente de l'action. Dans son œuvre "Le Léviathan", il soutient que les actions humaines sont motivées par des désirs et des peurs. L'état naturel de l'homme est un "état de guerre de tous contre tous". Ainsi, l'action politique est nécessaire pour créer un "Léviathan", un État souverain qui maintient la paix et l'ordre. Immanuel Kant, philosophe du XVIIIème siècle, a élaboré une théorie de l'action basée sur la morale et le devoir. Pour Kant, une action est morale si elle est accomplie par respect pour la loi morale, indépendamment de ses conséquences. Au XXème siècle, John Rawls a proposé dans sa théorie de la justice que l'action juste est celle qui respecte les principes de justice qu'auraient choisis des individus rationnels dans une "position originelle" d'égalité. Enfin, le philosophe allemand Jürgen Habermas a mis en avant une théorie de l'action communicative. Selon lui, l'action sociale est principalement orientée vers la compréhension mutuelle plutôt que vers le succès individuel. Chacune de ces théories offre une perspective unique sur ce qui motive l'action humaine et comment nous devrions agir, reflétant la complexité et la diversité des facteurs qui peuvent influencer l'action.

Les théories de l’action

Hannah Arendt et l’action comme condition de l’homme moderne

Pour Arendt, ce qui fait de l’homme un être politique est sa possibilité d’action. L’action est ce qui permet à l’homme de rester homme, c’est-à-dire à l’individu humain d’être humain ou en d’autres termes l’affirmation de sa capacité d’exister.

L’agissement est de l’ordre du devenir parce que l’action s’oppose à la mort. La naissance du politique se cherche dans la condition humaine de l’agir. L’existence humaine c’est l’être et mourir, mais aussi, entre-temps, l’appartenance au monde. La nécessité d’agir transcende chaque individu et même si la situation est très difficile, pour Arendt, sa seule possibilité et ce qui caractérise l’être humain en tant qu’être humain et politique est de continuer à agir dès lors qu’il détient la capacité d’action. Il ne peut y avoir de renoncement, chaque génération a un devoir d’agir.

Le propre de la démocratie est de pouvoir agir puisqu’elle interroge le peuple dans sa capacité de poser l’action. Qu’est-ce qui caractérise un régime totalitaire ? C’est le fait que l’individu ne peut plus agir. Une chose fondamentale est dès lors la parole qui renvoie à la question de la démocratie. Il y a dans la condition humaine un principe de spontanéité. Avec la naissance nait la capacité d’advenir, c’est-à-dire que quelque chose se produit. Le fait que chaque génération se trouve dans l’obligation de l’action est donc dans la nécessité de prendre des décisions. Ce qui fonde la capacité d’intégration et d’action c’est la parole. Ainsi, ce qui fonde l’humanité est la capacité d’agir.

Ainsi, agir c’est advenir, il fabrique la capacité de devenir quelqu’un et de se construire en tant qu’être humain. Les conditions de l’existence humaine sont la vie, mais en même temps la pluralité des conditions de vie qui sont les différences et le fait que nous appartenons tous au même monde qui nous propulse ans une sorte d’égalité ou nous avons le devoir d’agir.

La pluralité est à la fois un concept d’égalité, mais aussi un concept de distinction. Nous sommes à la fois unique et pluriel. Ce double caractère est au fondement de la vie politique.

À partir de là, elle va développer le « monde commun », c’est-à-dire que l’homme n’est pas isolé, mais il participe à un monde commun à tous les hommes.

L’homme, par l’action, peut changer le monde, dépasser des antagonismes, affirmer sa liberté ou encore déployer son sens de la responsabilité. L’action est l’activité humaine qui a le plus besoin de la parole.

Dès lors que l’homme est doté de la parole et détient la capacité de réfléchir, il peut changer son destin et si doué de spontanéité, ils agissent ensemble pour transformer le monde commun. Le dialogue est un mode de la construction de la relation politique au monde. Ainsi pour Arendt un régime totalitaire est deux choses :

  • disparité de la pluralité : la pluralité contingente est éliminer les différences ;
  • homme unique ;
  • concept politique d’universalisation ;
  • enjeu central du régime autoritaire est de supprimer la parole.

Ce qui est le plus frappant est que l’enjeu le plus fondamental de ces régimes est la destruction de la parole. Peu importe l’origine du régime totalitaire, il se focalise sur la suppression de la parole parce que c’est la capacité d’agir, l’élément constitutif même de l’action en réduisant les individus a un collectif anonyme.

Ainsi, la parole est contingente à l’action et à la démocratie.

Le monde commun est un monde où il y a la parole est l’action c’est-à-dire ou il y a la parole et l’action, un monde fait d’égalité et de différence, une capacité de parler pour changer le monde et se fixer des destins. C’est une fabrication du collectif, avec la spontanéité on a la capacité à agir pour transformer le monde commun.

"Action – Décision – Parole" sont les fondements du système de démocratie, ainsi le langage fait de l’homme un animal politique en se définissant comme un acteur ayant la capacité à penser le monde.

Au fond, l’action est une activité humaine nécessaire qui a nécessairement besoin de la parole, la parole et l’action qui permette de s’échapper de l’isolement. La parole et l’action se développent dans le cadre de relations humaines et s’actualisent de façon continue.

L’action est à la fois du nouveau, elle ne peut épuiser l’imprévisible avançant sans pour autant tout contrôler. En même temps que l’on produit de la connaissance on produit de la non-connaissance. En d’autres termes, quand l’homme avance, il veut construire un destin prévisible mis doit faire face à de l’imprévisible.

L’action peut aussi être par moment une angoisse, car elle présuppose des choix qui ne peuvent être en nécessairement maitrisés.

Sans action, il n’y a pas la capacité à penser le monde, à être présent au monde et de changer le monde.

L’action dans le monde rationnel

Le monde rationnel est l’interprétation dans les années 1920 qui va substituer jusque dans les années 1970 postulant que le monde va se construire positivement. On pense qu’on s’achemine vers quelque chose de plus rationnel. Les premiers théoriciens vont chercher à poser ce concept d’action rationnel. Étant rationnel, l’homme va interpréter l’action comme allant vers de plus en plus de rationalité.

Max Weber décèle quatre types d’actions :

  • action émotionnelle : irréfléchi et spontané induit par l’émotion ;
  • action traditionnelle : définition d’action par habitude ;
  • action rationnelle par rapport à des valeurs : agissement en fonction d’un ensemble de valeurs dont la rationalité de l’action se définit dans leur cadre ;
  • action rationnelle en finalité : un objectif est fixé dont il faut produire des rationalités pour l’atteindre.

Cela permet de poser l’action politique et d’institutionnalisation moderne. Pour Weber, l’histoire d’humanité est le passage de l‘action émotionnel vers l’action rationnelle.

Ainsi, nous progressons vers de la rationalité, nous allons vers une action de plus ne plus rationnel. Nous allons abandonner l’émotionnel afin d’aller vers des systèmes pensés et raisonnés.

La théorie de l’action rationnelle va ensuite aboutir aux théories du choix rationnel. On s’interroge à partir de l’action qui est un processus, mais qui peut être un processus d’action dans le champ économique. L’action politique n’est pas différente de l’action économique.

Pour Campbell, la réalité politique serait déterminée par des individus qui agissent selon une logique utilitariste du rapport de coût – bénéfice.

En d’autres termes, dans le système économique, l’action est instrumentale. Toutes les décisions sont prises selon une analyse relationnelle des coûts - bénéfices. Cette vision reste utilitariste, chaque acteur politique calcule naturellement le coût et le bénéfice de ses actions. Cette approche est collectiviste, car la rationalité n’est plus de type moral, mais économique.

Selon John Campbell et James Rule, l’action politique se calquerait sur un principe d’action économique au sens classique du terme qui est que l’action humaine est un calcul rationnel. Ainsi, en tant qu’acteur, il est nécessaire de faire des calculs coûts - bénéfices et si ce calcul n’est pas rentable il ne vaut mieux pas la prendre.

Le risque perçu est que si nous sommes dans un pur calcul coût/bénéfice nous pouvons être dans une logique opportuniste et non altruiste qui limite l’engagement dans tout processus d’action à risque.

La réalité politique est déterminée par des individus instrumentalement motivés, mais qui agissent dans une logique utilitariste coût – bénéfice. C’est une logique de calcul qui décrit tout un monde où les actions ne sont pas dictées par une rationalité pure.

Il y a une double contrainte à savoir minimiser la décision et maximiser les bénéfices.

La théorie du choix rationnel a été bâtie sur un processus de décision linéaire, en d’autres termes elle se projette dans une version linéaire de l’environnement. Un processus linéaire d’action signifie que le point A décidé, cela peut être une décision publique, B et C relève de la mise en œuvre de la décision et D est l’output. Il n’y a pas de surprises, il suffit d’affecter les objectifs et les moyens afin d’obtenir l’output.

Si la théorie du choix rationnelle se positionne dans le champ de la rationalité, c’est qu’elle présuppose que le champ environnemental dans lequel se situe l’action est lui-même rationnel.

L’hypothèse reste de dire que la meilleure façon de faire de la politique est de limiter sa conviction. Il faut évaluer les conséquences globales de l’action ou l’on passe à un schéma de prévention de l‘action plus compliqué.

Processus de décision linéaire.png

Dans la linéarité, il n’y a pas de processus de déviation, dès lors la linéarité est une absence de rupture, une absence de changement, une action droite qui se pense comme un processus de rationalité. Dans un monde rationnel, il est possible de faire des choix en fonction d’un processus de rationalité.

L’un des problèmes est que la théorie du choix rationnel se détache de toute réflexion culturelle. Par exemple, les rites sont une rationalité. La théorie du choix rationnelle nous ramène vers l’économie et une interprétation de la société très classique.

La vision linéaire est la vision traditionnelle du processus de décision qui aujourd’hui ne marche plus.

L’action dans la théorie des jeux

La théorie des jeux est une autre théorie de l’action, c’est le fait que nous sommes dans un système concurrentiel et plus complexe ou il ne faut comprendre les acteurs dans leur manière d’interagir, cela ne se fonde pas sur une rationalité pure. C’est une théorie interactionniste, dès lors, le comportement de l‘individu n’est pas lié uniquement par des choix rationnels est aussi lié aux contraintes intérieures et extérieures se fondant dans le jeu collectif. Le processus de décision est un jeu ou il est nécessaire de jouer en prenant en compte les jeux et les prises de décision des acteurs rivaux.

Cette théorie pose que l’acteur politique est un joueur qui joue avec des contraintes extérieures, mais qui interagit dans le jeu pour gagner en efficacité dans la décision même de l’action.

Le politique prend en considération qu’il doit construire un système d’alliance dans l’espace-temps. C’est un modèle plus pragmatique qui nécessite de prendre en compte les paramètres nombreux pouvant maximiser les gains. Elle cause une vision rationnelle de l’action et du jeu d’acteur. C’est une théorie comportementaliste.

L’enjeu n’est plus de la pure rationalité économique, elle s’inscrit dans une gestion de la durée pour garder le pouvoir et tenir. Dès lors, c’est une compétitivité, mais beaucoup plus équilibrée.

La théorie du jeu évolutionniste pose le fait que lorsque l’on veut absolument agir, la capacité à voir à long terme est atténuée, car le jeu immédiat monopolise la capacité d’agir sur l’instant. Ce sont Axelrod et Maynard Smith qui postulent que les joueurs sont des organismes vivants sans rationalité; leur hypothèse est que de la rationalité a disparu au nom de la gestion de proximité incessante. C’est une complexité, une compétitivité et une adaptation qui se fait dans un processus de façon permanente.

Les théories de l’action dans un système complexe

Dans les théories de l’action classique, l’interprétation est que toute action amène à des conséquences, au fond toute action produit des résultats.

Un système complexe est un système dans lequel tous les éléments sociétaux sont liés les uns aux autres. Dans la théorie classique dite « linéaire », on ne peut postuler qu’à partir du moment où l’on agit, il y a un résultat qui est positif.

Dans la théorie du système complexe, on agit dans un monde incertain dont les limites sont floues, cela signifie que nous sommes dans des situations évolutives et beaucoup plus mouvantes.

La théorie des effets pervers

Les théories plus classiques comme chez Machiavel, tout acteur est artisan de modification, il transforme le domaine dans lequel il agit, mais pas nécessairement dans le sens souhaité. On distingue les effets non voulus des effets pervers :

  • Effet non voulu : en agissant, on transforme des choses qui n’ont pas été souhaitées, les résultats de l’action vont dépasser l’intention originale.
  • Effet pervers : c’est quelque chose qui n’a pas été pensé ni souhaité. C’est l’engagement d’une action avec un résultat totalement différent. Par exemple, le featuring down prétend qu’on ne peut pas produire du logement pour les pauvres de bidonvilles, mais on peut pour les plus riches. Ainsi, on crée une discrimination urbaine et territoriale. L’effet pervers est que les plus riches accumulent du capital immobilier tandis que les pauvres restent pauvres.

Comme le tissu social est dense, on peut prendre des décisions avec des intentions dans le but de produire un résultat inverse à l’intention proposée. Pourquoi va-t-elle produire un résultat diffèrent ? Parce que la société est complexe.

Par exemple, la lutte contre la pauvreté nécessite de l’argent, mais comme nous ne sommes que dans des dispositifs sectoriels, on entretient la pauvreté.

Dans le welfare state, la question des logements relève de l’État. Aujourd’hui, sa capacité d’action diminue. Dans certains pays des sociétés privées ont créé des agences immobilières à vocation sociale. En privatisant un segment social où la vision pécuniaire n’a pas lieu d’être, d’autant plus penser dégager des profits à partir de populations pauvres, on va fabriquer des logements encore plus précaires.

Lorsqu’on est pauvre la capacité à investir le temps n’existe pas cardes postes vitaux pour la survie doivent être comblés comme la nourriture qui nécessite un investissement temporaire majeur. Dans certains pays des promoteurs ont réactivé des solutions anciennes comme le compteur à pièce pour l’électricité. C’est un effet pervers découlant du désengagement de l’État sur le secteur des logements sociaux.

C’est un enjeu est institutionnel qui parce qu’il a mal été analysé arrive à un effet contraire. Le concept d’effet pervers laisse apparait un autre concept d’action qui est le fait qu’il peut y avoir un écart entre l’enjeu traité et l’effet recherché.

Pour Machiavel, des effets indésirables peuvent surgir des actions volontaires des hommes. L’action est importante, mais doit être usée avec précaution. Apparait le fait qu’il peut y avoir un écart entre l’enjeu traité et la réalité.

Cette thèse explicite la rencontre avec la société complexe et montre d’autre part que la complexité dans laquelle nous vivons a une force de résistance contre les politiques publiques.

Albert Hirschman

Hirschman (left) translates accused German Anton Dostler in Italy 1945.

Pour Hirschman, il existe toujours dans l’action des conséquences insoupçonnées et insoupçonnables qui engendre des modifications qui peuvent être dramatiques. L’invention de la topographie a été inventée pour rassembler les peuples, mais est devenue un outil de revendications nationales et nationalistes.

Hirschman analyse le discours politique de l’effet pervers comme construction politique ; dans la rhétorique conservatrice et réactionnaire qui s’oppose à la modernité, il y a cette utilisation de l’argument de l’effet pervers qui dit que toutes les mesures prises sont des mesures qui détruit le social au lieu de le construire.

Selon Hirschman, la rhétorique se construit selon trois arguments :

  • l’argument de l’effet pervers (perversity)
  • l’argument de l’inanité (futility): soutient que les projets de transformation de l’ordre existant sont stériles.
  • l’argument de la mise en péril (jeopardy): l’action politique progressiste constitue une menace contre des acquis, des avantages ou des droits obtenus par la lutte.

Au fond, l’argument de l’effet pervers peut être utilisé de manière politique.

Edgar Morin

Edgar Morin .

La théorie de Morin est de faire que par l’industrialisation, nos sociétés sont rentrées dans un environnement complexe. C’est un paradoxe intéressent qui est que lorsque l’on veut agir, l’action nous mène du côté de la simplification.

Par exemple, la télévision est une réduction de la complexité, c’est un paradigme de simplification. C’est-à-dire que l’acteur public veut simplifier la nature des questionnements tout comme le fait la science, car la science procède par isolation et segmentation des connaissances ce qui permet d’éradiquer le principe de complexité.

La complexité est un tissu de constituants hétérogènes inséparablement associés. L‘action doit prendre en compte le complexe pour réussir. L’ensemble constitutif va marquer de façon importante l’évolution dans le cadre du schéma.

Pour Morin, il y a une contradiction entre un système complexe qui est un système ouvert dans lequel il y a des sommes d’interaction qui s’articule et qui bouge dans leur configuration, qui n’est pas linéaire et qui peut produire des rétroactions.

La complexité est un système ouvert d’interaction ou les choses s’agencent selon les configurations du moment. C’est la pensée d’un monde dans lequel tout est en interaction et qu’il n’y a pas une vérité par rapport à une autre.

La théorie de la complexité utilise les logiques de complémentarité utilisant l’idée de rupture permanente et d’équilibre dans le déséquilibre avec de possible de rétroaction et un agencement de façon continue selon les conditions.

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Le problème est que d’un côté le réel se complexifie et en même temps on a des acteurs qui fonctionnent que sur la réduction de la complexité. Pour Morin, ce qui est fondamental est cette contradiction entre le fait que si les acteurs réduisent le champ de manière simpliste ils ne peuvent comprendre la complexité, mais surtout ils ne peuvent la gérer.

Ainsi, la complexité est un tissu de constituant, hétérogène inséparablement associé. En réalité, le grand défi du XIXème siècle est de comprendre la complexité du monde dans laquelle nous sommes entrés.

Le complexe est difficile, car il n’est pas programmable et réduit la capacité de jugement dans le futur.

La théorie de la complexité est importante parce que l’on ne peut plus agir dans le cadre d’un monde linéaire.

  • Comment agir dans les systèmes complexes ?

On ne peut connaitre le futur, le passé dans les sociétés de la modernité a tendance à être oublié ce qui fait que nous sommes prisonniers de l’immédiateté. Le problème est que le temps s’est compressé. C’est une tyrannie du temps qui fait que les conditions de pensée de l’action sont très difficiles.

La proposition de Morin et de dire que nous ne pouvons nous satisfaire d’un processus d’action linéaire entre un point de décision et une arrivée. Il faut restituer l’action dans un système complexe ce qui nécessite de fabriquer de nouveaux outils se faisant dans un système de reconstruction prospectif qui consiste à redéfinir l’action publique dans les dimensions du passé, du présent et du futur. Il faut avant tout reconceptualiser le passé, revenir sur la compression du passé en faisant de la retroprospective. Pour lutter contre la déchéance du temps et la non-explication dans le cadre d’une société complexité, il faut inventer des outils qui permettent d’analyser le passé pour réinterroger le présent.

La seule façon que l’on ait pour agir et de lui redonner de l’autonomie. Dès lors nous sommes dans un système qui a l’avantage est de pouvoir questionner à nouveau les conditions de l’action.

À la différence d’un système linéaire, il est nécessaire de questionner à chaque avancement afin de faire le bilan de son action. Cela veut dire qu’à chaque avancée, il va falloir agir en question de façon continue les conditions de l’action afin de pouvoir à chaque instant modifier le processus d’action en intégrant les avis divergeant des groupes sociaux, de population, etc. Le processus d’action publique et politique aujourd’hui est beaucoup plus difficile qu’il y a cinquante ou soixante ans en intégrant les critiques ainsi que les positionnements des individus en les réactivant et en les réinterprétant dans le champ de l’action.

C’est un processus qui est nécessairement un processus de concertation, car sans concertation, le processus se bloque à travers le conflit. Le principe de ce système et que nous sommes à chaque fois obligés d’intégrer les remarques dans un processus de remise en cause plus ou moins partielle des objectifs pour les renégocier de façon continue. Le résultat de l’action est la somme de ces négociations.

C’est un processus qui va être très lent, intégratif c’est-à-dire de la gouvernance par le fait d’associer le maximum d’individu au processus de décision et d’action, pragmatique et qu’au fond il faut pouvoir négocier ses propres arguments et objectifs.

Les processus d’action aujourd’hui doivent chercher dans un monde complexe l’ensemble de ces données sous peine radicale d’échec. Il faut prendre en conséquence l’imprévisible et le non prévisible.

Le problème de l‘acte humain est qu’en même temps que nous avançons, en même temps nous fabriquons une méconnaissance. La grande question même de l’action aujourd’hui, est qu’on produit de nombreuses non-connaissances qui ensuite devient des connaissances tardives.

Le monde complexe selon Morin est à la lisière de la nutation extraordinaire de nos sociétés dans laquelle on est capable de faire des progrès immenses et dans lequel on produit des méconnaissances qui peuvent se relever comme grave.

Par exemple, lorsque l’on parle de l’action publique, l’action politique est très intéressante dans un processus incertain. Le principe de précaution est l’invention d’un principe d’action dans un champ incertain, c’est-à-dire que nous sommes dans un champ incertain, mais il faut agir. Le principe de précaution est qu’il faut agir, mais agir avec précaution pour ne pas provoquer quelque chose de radical même si on ne connait pas la conséquence d’où on va. C’est agir dans le cadre de boucle de rétroaction en cherchant à chaque fois de mobiliser le monde scientifique pour apporter des réponses rapidement dans le champ d’action, c’est ces contradictions soulève par Morin : difficulté d’agir, de penser le futur, surproduction de la non-connaissance en même temps que l’injonction de l’action.

Conclusion

Ceci répond à la question de savoir comment agir dans un monde incertain. Dans Agir pour un monde incertain publié en 2001[1], Michel Callon, Pierre Lascoumes et Yannick Barthes postulent qu’il faut imaginer des mondes communs devant permettre de réinventer des systèmes démocratiques nouveaux.

L’hypothèse est que l’on ne peut agir dans un monde linéaire. Il faut se donner les instruments qui permettent d’évaluer les risques de la prise de décision pour la recaler instantanément afin de développer des courbes de rétroaction.

Pour agir, il faut évaluer en temps réel l’évolution de l’action pour pouvoir prédisposer l’action. Maintenant pour agir il faut se doter d’instrument d’évaluation en temps réel des outils pour produire des rétroactions. C’est un processus qui explique pourquoi les politiques publiques sont beaucoup plus difficiles à mener qu’il y avait une cinquantaine d’années. Dès lors, il faut réinventer des processus d’action et différencier le savoir profane et le savoir d’expert, car l‘expertise devient la capacité a la société de se penser elle-même.

Nous sommes maintenant dans des temps courts et des dimensions sociétales sans difficulté, c’est pourquoi il faut développer de nouveaux outils d’évaluations et une nouvelle méthodologie avec la construction de forums.

Le partage de la connaissance à travers une expertise sociétale permet d’arriver à une démocratie, ils vont imaginer une nouvelle démocratie qui est de dire que sur la base des incertitudes il soit possible d’engager des débats et des forums et/ou la capacité collective de discuter, et la capacité collective à discuter va pouvoir aider le politique à faire des choix. Puisque personne ne sait, en engagement des forums d’échanges, il faut réfléchir collectivement afin de se saisir par la suite du politique, ce n’est pas le politique qui énonce le politique, car il ne peut la penser.

Cette théorie est révolutionnaire, car elle prône l’invention de nouveaux outils.

Les questions sur la gestion de l’incertitude vont raisonner dans le cadre de vie environnementale. Le principe de précaution préconise que lorsque l’on est dans un système d’incertitude l’enjeu n’est plus de décider, mais de fabriquer un nouveau processus de décision qui prenne en compte les données que l’on n’a pas. On va continuer d’agir pour agir, mais en tenant compte de l’incertitude.

Pour agir, il faut de la pensée, Hannah Arendt dit que « l’action sans pensée est de l’inaction ». Nous ne sommes plus dans l’action, mais dans l’inaction et agir nécessite la capacité à analyser. L’incapacité à penser est très dangereuse.

Annexes

Références

  1. Callon, Michel, Pierre Lascoumes, and Yannick Barthe. Acting in an Uncertain World: An Essay on Technical Democracy. Cambridge, MA: MIT, 2009.